La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2014 | FRANCE | N°12/10642

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 31 janvier 2014, 12/10642


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 31 JANVIER 2014



N°2014/ 63















Rôle N° 12/10642







SA SNEF





C/



[E] [D]























Grosse délivrée le :



à :



-Me Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Cyril MICHEL, avocat au barreau de MARSEILLE


<

br>

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section I - en date du 26 Octobre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/551.





APPELANTE



SA SNEF, demeurant [Adresse 2]



représenté...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 31 JANVIER 2014

N°2014/ 63

Rôle N° 12/10642

SA SNEF

C/

[E] [D]

Grosse délivrée le :

à :

-Me Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Cyril MICHEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE - section I - en date du 26 Octobre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/551.

APPELANTE

SA SNEF, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [E] [D], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Cyril MICHEL, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Catherine VINDREAU, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre

Madame Catherine VINDREAU, Conseiller qui a rapporté

Madame Laurence VALETTE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2014

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Janvier 2014

Signé par Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[E] [D] a été embauché par la société SNEF en qualité d'agent technique par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 26 mars 1980.

Il avait préalablement travaillé pour la société SNEF :

- du 8 septembre 1969 au 30 avril 1975 puis du 5 juin 1975 au 8 avril 1977

- du 26 mars 1979 au 26 mars 1980 .

Par la suite [E] [D] s'est vu confier des missions à l'étranger comme son contrat initial le prévoyait:

- dans les Emirats Arabes Unis ([Localité 1]) : contrat de mission du 1er juin 1990

- en Angola: contrat de mission du 21 novembre 1991 .

[E] [D] a fait le choix de bénéficier du dispositif légal de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante en démissionnant de ses fonctions le 16 octobre 2003 avec effet au 31 décembre 2003.

Il a saisi le conseil de prud'hommes de MARSEILLE le 19 février 2009, pour demander la condamnation de la SNEF au paiements des sommes suivantes :

- 80 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi lié aux conditions de travail et à la nécessité de cesser de manière anticipée son activité ,

- 15 000 € au titre du préjudice d' 'angoisse',

- 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

Par jugement de départage en date du 26 octobre 2010 , le conseil de prud'hommes de MARSEILLE a :

- débouté [E] [D] de sa demande tendant à 1'octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique invoqué, lié à la cessation anticipée de son activité professionnelle ,

- déclaré la SA SNEF entièrement responsable du préjudice d'angoisse subi par [E] [D], attaché au risque de développer une pathologie liée à l'amiante,

- évalué ce dommage à la somme de 10.000 € ,

- par suite, condamné la SA SNEF à payer à [E] [D] la somme de10.000 € à titre de dommages et intérêts en indemnisation de son entier préjudice d'anxiété,

- condamné la SA SNEF à payer à [E] [D] la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

- dit n'y avoir lieu à application de ces dispositions au bénéfice de la SA SNEF ,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ,

- condamné la SA SNEF aux entiers dépens, distraits au profit des avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .

*

La SA SNEF a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, la SA SNEF demande de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté l'intimé de sa demande indemnitaire en réparation du prétendu préjudice lié à la cessation anticipée de son activité professionnelle,

- le réformer en ce qu'il l'a condamnée à verser à Monsieur [D] les sommes de 10 000 € au titre du préjudice d'angoisse lié au risque de développer une pathologie causée par le contact avec l'amiante et de 1 200 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamner [E] [D] au paiement de la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

En réplique, au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués , [E] [D] demande de :

- condamner la SA SNEF à lui payer les sommes suivantes:

- 15 000 € en réparation du préjudice d'anxiété,

- 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamner la société aux dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'indemnisation au titre du préjudice économique subi lié à la cessation anticipée de son activité professionnelle

En cause d'appel, [E] [D] a renoncé à sa demande de ce chef. Le jugement sera confirmé en ce que reposant sur des motifs exacts et pertinents , il a rejeté la demande .

Sur la demande d'indemnisation au titre du préjudice d'anxiété

[E] [D], qui n'est atteint d'aucune affection médicale liée à l'exposition à l'amiante, sollicite un préjudice d'anxiété attaché au risque de développer une telle pathologie exposant avoir été, durant toute sa carrière à la SNEF, massivement exposé aux poussières d'amiante sans jamais avoir bénéficié d'une protection individuelle ni être informé des risques et danger encourus par la manipulation de l'amiante. Il considère ainsi que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat en matière de santé des travailleurs.

La loi du 23 décembre 1998 a instauré l'allocation de cessation anticipée d'activité, dite ACAATA, destinée aux salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante ainsi qu'à ceux des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, y exerçant ou y ayant exercé des travaux de bord, de coque ou d'ateliers relevant de la construction ou la réparation navale.

[E] [D] a bénéficié de ce dispositif, l'arrêté du 7 juillet 2000 modifié le 2 mars 2007 mentionnant la SNEF dans la liste des établissements et des métiers de la construction et de la réparation navales susceptibles d'y ouvrir droit pour la période allant de 1951 à 1985, l'activité navale marginale de l'établissement marseillais n'ayant plus été conduite à compter de 1986.

La SA SNEF expose que le salarié ne peut arguer utilement du seul dispositif de l'ACAATA, pour justifier de son exposition à l'amiante, le bénéfice de ce dispositif n'étant pas conditionné par la démonstration d'une exposition réelle aux poussières d'amiante.

Elle soutient que c'est en alléguant faussement des travaux d'électricien de bord, de coque ou d'atelier auprès de la CARSAT que [E] [D] a pu bénéficier de l'ACAATA (les activités déployées dans le secteur du bâtiment et de l'industrie n'étant pas prévues dans ce dispositif légal), l'instruction du dossier n'associant pas l'employeur.

Il est de principe que la réparation du préjudice d'anxiété est subordonné à la preuve de l'exposition à un risque avéré et d'une réelle gravité pour la santé. Si une telle preuve est présumée pour les salariés qui travaillaient dans un établissement ouvrant droit au bénéfice de l'ACAATA, pendant une période où étaient fabriqué ou traité l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, cette présomption est simple, l'employeur pouvant démontrer l'absence d'exposition.

En l'espèce, la SA SNEF justifie par la production de l'extrait du fichier du personnel ainsi que de la fiche d'aptitude médicale de [E] [D] du 26 mars 1979, que tout au long de sa collaboration au sein de l'établissement de [Localité 2] , le salarié était affecté au service industrie et non naval et ne relevait pas des métiers visés par la loi du 23 décembre 1998.

En outre, au regard de la cessation de l'activité navale de la SNEF, en 1986, [E] [D] ne peut valablement soutenir avoir exercé dans les navires en construction dans le port de [1] jusqu'en 2003, ce d'autant qu'il indique également avoir été affectés à des activités exposantes dans le secteur du bâtiment.

Sinon rappeler de façon générale, la connaissance commune de la présence d'amiante dans le bâtiment , pour démontrer la réalité de son exposition à l'amiante, [E] [D] produit, pour une relation contractuelle de quelques 25 années , une seule et unique attestation émanant de [P] [K] lequel ne fait pas référence à des travaux sur des chantiers de construction ou de réparation navales, ni au demeurant du bâtiment, mais indique l'avoir côtoyé de 1990 à 2001 et que ' leurs interventions se déroulaient lors d'arrêts d'unités pétrolières ou industrielles nécessitant le démontage de tuyauteries, de moteurs, de chaudières, comportant un isolement thermique à hase d'amiante ce qui fait que nous travaillions dans une atmosphère chargée de poussière d'amiante.'

Ce seul témoignage, de surcroît imprécis et peu circonstancié, ne peut être retenu comme élément de preuve de l'exposition massive à l'inhalation de poussière d'amiante alléguée.

Au regard de la solution apportée au litige, il ne peut être considéré que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat en matière de santé des travailleurs.

En réformation du jugement déféré, [E] [D] sera débouté de sa demande de dommages intérêts au titre du préjudice d'anxiété.

Sur les autres demandes des parties

Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

[E] [D], qui succombe, supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Reçoit l'appel régulier en la forme,

Infirme partiellement le jugement de départage déféré rendu le 26 octobre 2010,

Statuant à nouveau,

Déboute [E] [D] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice d'anxiété,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil,

Condamne [E] [D] aux dépens de première instance,

Confirme pour le surplus la décision déférée,

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil en cause d'appel,

Condamne [E] [D] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 12/10642
Date de la décision : 31/01/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°12/10642 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-31;12.10642 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award