COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
11e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 09 JANVIER 2014
N° 2014/14
Rôle N° 12/22029
[G] [S]
C/
[O] [C]
Grosse délivrée
le :
à :
NABERES
PYOT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de FREJUS en date du 16 Octobre 2012 enregistré au répertoire général.
APPELANT
Monsieur [G] [S]
né le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Denis NABERES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIME
Monsieur [O] [C]
né le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Jean-claude PYOT, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 19 Novembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Catherine COLENO, Présidente de Chambre a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre
Mme Anne CAMUGLI, Conseiller
Mme Sylvie PEREZ Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Janvier 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Janvier 2014,
Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte du 1° novembre 1988 M.[E] [C] a consenti à M.[G] [S] un bail sur un terrain nu et inculte cadastré section [Cadastre 1] quartier [Adresse 2] a [Localité 2] d'une superficie de 5.000 m² environ pour une durée de 1 an moyennant un loyer mensuel de 2.000 francs indexé sur le coût de la construction et payable par trimestre.
Le bail s'est ensuite tacitement reconduit.
Par acte du 11 mars 2011 M.[O] [C] venant aux droits de son père décédé a délivré congé à effet au 31 décembre 2011.
Par jugement du 16 octobre 2012 assorti de l'exécution provisoire le tribunal d'instance de Fréjus saisi d'une demande tendant à voir constater que M.[S] est occupant sans droit ni titre et à voir ordonner son expulsion, a:
-constaté la validité du congé et dit le bail résilié depuis le 31 décembre 2011,
- condamné M.[G] [S] à payer une indemnité mensuelle d'occupation de 1.500 euros un mois après la signification du jugement,
- ordonné l'expulsion de M.[G] [S] avec si besoin est le concours de la force publique - condamné M.[G] [S] aux dépens et au paiement de la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi le premier juge a retenu que le bail ne comportait aucune ambiguïté de nature à justifier une interprétation, qu'il ne s'agissait pas d'un bail d'habitation et que les constructions illicites faites par M.[G] [S] sur le terrain ne pouvait permettre la requalification de ce contrat.
M.[G] [S] a relevé appel de cette décision par acte du 22 novembre 2012.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
M.[G] [S] par conclusions déposées et signifiées le 5 septembre 2013 auxquelles il est fait expressément référence pour le détail de l'argumentation conclut à l'infirmation de la décision et demande à la cour de juger que le bail est à usage d'habitation et professionnel relevant de la loi du 6 juillet 1989, d'annuler le congé, de débouter M.[O] [C] de toutes ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il expose que le bail ne peut être un bail de parcelle nue compte tenu de sa réaction et de ses conditions d'occupation,
- qu'en effet le bail met à la charge du preneur toutes les autorisations administratives pour l'exercice de son commerce, ce qui démontre que le propriétaire savait que des bâtiments seraient construits,
- qu'il a édifié sur le terrain avec l'accord du propriétaire de l'époque une petite maison d'habitation dans laquelle il réside avec sa famille, ces constructions figurant sur le plan de partage,
- que M. [C] n'a pas donné suite à la procédure d'expulsion qu'il avait initialement entreprise, et dont il avait été débouté par le juge des référés, qu'il a accepté la situation, encaissé sans réserve les loyers, et reconnu dans un courrier du 23 novembre 2002 que son locataire était prioritaire en cas de vente de la parcelle.
Il produit diverses attestations à l'appui de ses dires..
Il souligne que dans le cadre d'une expropriation partielle le propriétaire a été indemnisé d'une partie des constructions qu'il avait réalisées, qu'aucune action pénale n'a été engagée pour construction illicite, qu'il acquitté les taxes foncières et d'habitation.
Il sollicite en conséquence la novation du bail en bail d'habitation et soutient que le congé qui ne comporte aucun motif ne satisfait pas aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 et doit être annulé..
Il souligne qu'il est actuellement inapte au travail étant en invalidité permanente.
M.[O] [C] par conclusions notifiées et signifiées le 10 octobre 2013 conclut à la confirmation de la décision, au rejet des prétentions de M.[G] [S] et à sa condamnation à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civil.
Il soutient que le terrain est encombré de mobil home, d'épaves de bateaux et de véhicules, et de constructions, constatées par pv d'huissier dressé les 24 avril 2008 et 3 août 2011
Il souligne que la destination de la chose louée exprimée dans le bail est un terrain nu et inculte, que le loyer réglé est en rapport avec cet état de fait, que les installations faites dans les lieux méconnaissent cette destination, et ne sauraient conférer aucun droit à M.[G] [S], que dans ces circonstances le congé n'avait pas à être motivé.
Il souligne que la présence de construction a fait l'objet d'une plainte puis d'une procédure de référé au cours de l'année 2000 qui démontrent l'opposition de son père aux constructions, de sorte qu'aucune intention de nover n'est établie, et ne peut être retenue , à fortiori s'agissant d'un terrain inconstructible.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 novembre 2013.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la qualification du bail
Le bail conclu le 1° novembre 1988 porte sur un terrain nu et inculte.
Il est stipulé dan ce bail que M.[G] [S] devra faire son affaire personnelle de toutes les autorisations administratives que pourra impliquer son commerce, mais aucune clause du bail n'autorise M.[G] [S] à construire de bâtiment sur ce terrain, et n'envisage une telle possibilité.
Il ne peut donc être soutenu que ce bail qui portait sur un terrain et non des locaux est un bail d'habitation régi par la loi du 6 juillet 1989 qui n'avait d'ailleurs pas été promulguée au moment de la rédaction du contrat.
Sur l'existence d'une novation.
En application de l'article 1273 du code civil, la novation ne se présume pas, il faut que la volonté de nover résulte clairement de l'acte.
M.[G] [S] verse aux débats diverses attestations de témoins.
Il ressort de ces attestations et notamment celles de Mme [V] Mme [N] et de M.[Q] que la présence de la piscine est antérieure à l'installation sur les lieux de M.[G] [S], cette piscine est au demeurant implantée sur une parcelle distincte, de sorte que les conditions dans lesquelles M.[C] aurait été exproprié et indemnisé de cette parcelle distincte sont sans effet dans le présent litige.
Dans une attestation complémentaire, [Z] [N] précise que les travaux de création de la maison d'habitation ont été réalisés au cours des années 1991 début 1992, période confirmée par les témoignages de [T] [Q], [D] [V], [K] [M].
Le témoin [X] [H] décrit les visites trimestrielles de M.[C] qui venait encaisser les chèques de loyer.
M. [Q] rapporte une conversation au cours de laquelle M.[C] exprimait sa satisfaction devant les installations faites par son locataire.
Toutefois le bailleur n' a jamais cherché à modifier l'économie initiale du contrat ni demandé une augmentation du loyer pour tenir compte des constructions édifiées sur le terrain, de sorte qu'aucun accord sur des modifications des caractéristiques du contrat initial n'est démontré.
Au surplus , il est établi que M.[O] [C] a saisi par acte du 9 mai 2000 le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Draguignan d'une demande de résiliation du bail et d'expulsion au motif que M.[G] [S] avait érigé des constructions en contrariété avec les stipulations du bail et au mépris des règles de l'urbanisme.
Le juge des référés s'est certes déclaré incompétent au profit du juge des référés du tribunal d'instance de Draguignan, qui a rejeté la demande en raison d'une contestation sérieuse.
Néanmoins, quelque soit le sort de ces instances, il est constant que l'initiative judiciaire prise par M.[C] démontre son opposition de longue date aux constructions faites sur son terrain.
Dans ce contexte le silence ultérieurement gardé par le bailleur après l'échec de sa procédure ne pouvant pas davantage constituer la preuve d'une novation du contrat.
Les termes du courrier du 23 novembre 2002 dans lequel M.[C] indique que M.[S] est son locataire et qu'il est prioritaire dans la vente, ne valent pas davantage preuve d'une volonté non équivoque de novation, d'autant plus qu'il résulte d'un courrier du 19 juin 2004 de M.[C], que celui-ci demandait à M.[S] de faire des propositions d'achat raisonnable de la parcelle en précisant 'j'attends de votre part une proposition acceptable et j'espère que nous trouvions un accord rapidement dans l'attente de la location du terrain nu' termes qui démontrent que le bailleur n'avait pas envisagé ni à fortiori accepté une requalification du contrat.
Dès lors c'est à juste titre que le premier juge a retenu que les construction faites par le locataire à son initiative ne pouvait entraîner la requalification du contrat, ni transformer celui ci en bail d'habitation, étant rappelé que le sort des constructions faites sur le terrain d'autrui relèvent des règles régissant l'accession qui n'ont pas pour effet de conférer au constructeur des droits qu'il n'avait pas sur le terrain servant d'assise à sa construction.
En conséquence le bail ne saurait être qualifié de bail d'habitation et ne relève pas de l'application de la loi du 6 juillet 1989.
S'agissant d'un bail de droit commun le congé n'avait pas à être motivé, il a été délivré en respectant le préavis contractuel, il a été à juste titre validé par le premier juge.
Le congé ayant mis fin au bail, la décision qui prononce l'expulsion sera confirmée, ainsi que le chef de décision concernant la fixation de l' indemnité d'occupation dont le quantum n'est pas critiqué devant la cour.
M.[G] [S] dont l'appel est rejeté supportera les dépens sans qu'il y ait lieu de faire une nouvelle application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR statuant contradictoirement
confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,
y ajoutant
rejette la demande de M.[O] [C] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile
condamne M.[G] [S] aux dépens d'appel
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT