COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
9e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 09 JANVIER 2014
N°2014/7
Rôle N° 12/19640
[B] [V]
C/
SARL EXPERTISE COMPTABLE [Y] [Q]
Grosse délivrée le :
à :
Me Mickaël BENAVI,
avocat au barreau
de MARSEILLE
Me Cedrick DUVAL,
avocat au barreau
de MARSEILLE
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section AD - en date du 24 Septembre 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/2395.
APPELANTE
Madame [B] [V]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/12311 du 07/12/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 2]
comparante en personne, assistée de Me Mickaël BENAVI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
SARL EXPERTISE COMPTABLE [Y] [Q], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Cedrick DUVAL, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 28 Octobre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Pascale MARTIN, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Marie-Vianneytte BOISSEAU, Président de Chambre
Madame Pascale MARTIN, Conseiller
Madame Annick CORONA, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Janvier 2014
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Janvier 2014
Signé par Madame Marie-Vianneytte BOISSEAU, Président de Chambre et Mme Farida ABBOU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS- PROCÉDURE-PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant acte sous seing privé du 24 août 2009, Mme [B] [V] a été embauchée par la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] sise à [Localité 2], en contrat à durée indéterminée à temps plein, en qualité de 'employée confirmée' au coefficient 180, pour exercer les fonctions de 'collaboratrice confirmée' , au salaire brut de 1700 EUROS , pour 39 heures de travail.
Mme [B] [V] a été placée en arrêt de travail suite à un accident de trajet survenu le 15 janvier 2010.
Lors d'un entretien du 10 mars 2010, Mme [B] [V] et son employeur ont envisagé une rupture conventionnelle du contrat de travail, procédure annulée par l'employeur par lettre du 12 mars 2010.
Le 31 août 2010, Mme [B] [V] a saisi le conseil des prud'hommes de Marseille d'une demande en résiliation judiciaire aux torts exclusifs de son employeur du fait de manquements graves.
Le conseil des prud'hommes de Marseille a , dans sa décision du 24 septembre 2012 :
- dit que la relation professionnelle née le 24/08/09 se poursuit,
- enjoint à la salariée de se rapprocher de son employeur dès la fin de son contrat de travail, à toutes fins utiles,
- donné acte à l'employeur de ce qu'il reconnaît devoir la somme de 185,72€ au titre de 11 heures supplémentaires,
- condamné l'employeur à payer la somme de 100 EUROS à Mme [B] [V] en réparation du préjudice causé par l'absence de visite médicale d'embauche,
- débouté Mme [B] [V] de ses autres demandes et l'employeur de sa demande reconventionnelle ,
- partagé les dépens.
Après avoir interjeté appel le 15 octobre 2012, Mme [B] [V] , par lettre recommandée du 14 décembre 2012, a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur.
Les parties ont été convoquées pour l'audience du 30 mai 2013 et l'affaire a été renvoyée à la demande des parties au 16 septembre puis au 28 octobre 2013.
Reprenant oralement ses conclusions, Mme [B] [V] demande à la Cour de:
- dire qu'elle est en droit de prétendre à une embauche au coefficient 220 avec un salaire mensuel de 1826,30 €,
- constater les manquements graves et répétés de l'employeur,
- analyser la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en un licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] à payer les sommes suivantes :
1) 5943,95 EUROS à titre de rappel de salaire conventionnel, outre l'indemnité de congés payés afférente pour 594,39 € ,
2) 172,86 EUROS , à titre de rappel pour heures supplémentaires, outre l'indemnité de congés payés afférente pour 17,30 € ,
3) 10.956 EUROS , pour travail dissimulé,
4) 1826,30 EUROS pour défaut de visite médicale d'embauche,
5) 4504,46 EUROS , pour complément de salaire prévoyance,
6) 12.000 EUROS , pour le licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse,
7) 1826,30 EUROS à titre de dommages et intérêts , au titre de l'irrégularité de procédure,
8) 1826,30 EUROS , à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
9) 1095 EUROS , à titre d'indemnité légale de licenciement,
10) 5314,40 EUROS , à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.
Elle demande la condamnation de l'employeur à délivrer l'intégralité des documents de rupture avec la mention 'prise d'acte de la rupture s'analysant en un licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse', et l'intégralité des bulletins de salaires avec la mention d'une embauche au coefficient 220, le tout sous astreinte de 100 € par jour de retard.
Elle sollicite l'exécution provisoire.
Elle demande les intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande en justice , avec capitalisation.
Elle réclame la condamnation de l'employeur à payer la somme de 1500 EUROS sur la base de l'article 700 du code de procédure civile , à supporter les dépens ainsi que le droit proportionnel de l'article 10.
Elle indique avoir été embauchée en qualité de collaboratrice confirmée, comme exerçant principalement sous le contrôle de son employeur des fonctions de comptabilité et de secrétariat au siège de l'entreprise mais aussi chez différents clients, étant titulaire du BTS comptabilité & gestion depuis le 9 juillet 2007.
Elle explique qu'elle s'est conformée au jugement du conseil des prud'hommes de Marseille , en sollicitant sa reprise au 29 novembre 2012 mais que l'employeur ne l'a pas faite convoquée pour une visite de pré-reprise , ne lui a plus donné de travail ni de salaire.
Elle indique avoir dès lors , envoyé une lettre de prise d'acte de rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, le 14 décembre 2012.
Elle reproche à son employeur une embauche avec sous-classification de son emploi, le non respect du salaire contractuel, le non paiement d'heures supplémentaires, le non paiement du complément de salaire pendant son arrêt de travail, l'absence de visite médicale d'embauche et de reprise, l'absence de remise régulière des bulletins de salaire, l'utilisation abusive de la rupture conventionnelle, la violation de la garantie d'emploi conventionnel.
La SARL Expertise Comptable [Y] [Q] , dans ses conclusions et oralement, demande à la Cour de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté Mme [B] [V] de l'ensemble de ses demandes, de débouter la salariée de ses demandes en résiliation judiciaire, en rupture du contrat aux torts de l'employeur ,et de celles relatives au rappel de salaires et indemnitaires.
A titre reconventionnel, elle réclame la condamnation de Mme [B] [V] à payer la somme de 3400 EUROS à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, celle nouvelle de 1486 EUROS à titre de dommages et intérêts pour préavis non effectué et celle de 2000 EUROS sur la base de l'article 700 du code de procédure civile .
L'employeur explique que Mme [B] [V] a souhaité une rupture conventionnelle et qu'il s'est rétracté afin de la protéger.
Il indique que ni le travail confié à Mme [B] [V] ni son diplôme ne lui permettent de prétendre à la qualification de niveau 4.
Il considère que la salariée veut 'battre monnaie' en invoquant du travail dissimulé, alors que des heures supplémentaires sont payées ou converties en repos compensateur, et qu'il a accepté devant le conseil des prud'hommes de Marseille , le principe du paiement de la somme de 185,72€.
Il précise que Mme [B] [V] n'avait pas un an d'ancienneté pour prétendre au complément de salaire.
Il estime que la salariée n'a pas subi de préjudice du fait de l'absence de visite d'embauche et précise qu'après plus de deux ans d'arrêt de travail, et sans nouvelles de Mme [B] [V], il ne pouvait organiser de visite de pré-reprise ou de reprise.
A titre subsidiaire, il estime les demandes indemnitaires disproportionnées.
Il qualifie l'action de calomnieuse et la prise d'acte de démission.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Sur le contrat de travail
La salariée expose occuper un poste de $gt;, lui permettant d'exiger dès l'embauche une classification au coefficient 220 (et non 180) et le salaire correspondant soit 1826,30€.
L'employeur invoque la convention collective laquelle prévoit un niveau d'exigence minimum , s'agissant d'une profession réglementée avec 5 niveaux comportant chacun 3 critères et s'appuie sur les notes de frais de la salariée et des attestations, pour dire que les fonctions réelles exercées par Mme [B] [V] relevaient bien du niveau 5.
Il convient d'observer que le document intitulé 'fiche de poste' versé aux débats par la salariée , fait sur papier libre, n'a pas été établi par l'employeur.
La seule attestation produite par la salariée est celle de M [K], en date du 7/03/13, gérant de la Pharmacie du Casino à [Localité 1], et débute ainsi : 'Mme [B] [V] était mon interlocutrice privilégiée car Mme [J] a plutôt brillé par la discrétion lors de mes sollicitations' ; il précise que Mme [B] [V] s'occupait de la gestion de la pharmacie , se déplaçant pour faire des saisies et notamment la révision des comptes et les déclarations TVA tous les mois, et décrivant sa très grande disponibilité.
La convention collective applicable est celle des Experts Comptables et Commissaires aux Comptes Cabinets , laquelle prévoit en son annexe A, 5 niveaux mais il est indiqué que ' la caractérisation finale de l'emploi occupé s'opère en associant le poste de référence et les conditions particulières d'exécution à travers la grille définissant la complexité des tâches et l'ampleur des responsabilités, le niveau de formation initiale et l'expérience professionnelle.
Le poste revendiqué au coefficient 220 est celui du niveau 4 'assistant', terme d'ailleurs non employé par Mme [B] [V] dans sa demande de requalification.
Il est défini ainsi : 'travaux d'exécution comportant une part d'initiative professionnelle dans le traitement de l'information ; l'assistant se fait aider occasionnellement par des assistants de niveau inférieur et contrôle les tâches délégués'.
La formation initiale est le bac et pour les titulaires d'un diplôme bac + 2, 'l'expérience minimale requise en cabinet ou entreprise : un an'.
Il résulte du curriculum vitae de Mme [B] [V] produit par l'employeur qu'elle a occupé un emploi d'aide comptable pendant 2 mois en 2002, puis d'employée comptable pendant 2 mois et 7 jours en 2006 et enfin d'apprentie comptable pendant 18 mois du 03/09/07 au 16/02/09.
La salariée ne démontre pas avoir délégué son travail ni fait preuve d'initiatives particulières , étant précisé que la saisie de données comptables chez un client ne saurait constituer une tâche complexe ; en conséquence, même si elle disposait d'un diplôme supérieur (BTS) , elle n'établit pas remplir les conditions d'expérience et de responsabilité lui permettant de revendiquer le niveau 4 .
Eu égard aux tâches exécutées par Mme [B] [V] , aux indications données par les autres salariés dans leurs attestations, et conformément à la convention collective , l'employeur démontre que Mme [B] [V] exerçait des missions relevant du niveau 5 coefficient 180.
Dès lors, il convient de confirmer le conseil des prud'hommes de [Localité 2] en ce qu'il a débouté Mme [B] [V] de sa demande de requalification et celle subséquente de délivrance de bulletins de salaire conforme à celle-ci.
Sur la rupture conventionnelle
La salariée indique que l'employeur avait la volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail, en utilisant une procédure totalement irrégulière, sans 2ème entretien et sans tenir compte de sa situation protectrice d'accidentée du travail.
La SARL Expertise Comptable [Y] [Q] expose que Mme [B] [V] est à l'origine de la signature de la convention et que la société s'est rétractée précisément pour la protéger.
L'appelante ne justifie d'aucune façon que son employeur soit à l'origine de la procédure de rupture conventionnelle.
En revanche, par ses courriers adressés à Mme [B] [V] les 2 mars et 13 avril 2010 en convocation aux entretiens des 10 mars et 22 avril 2010 et commençant ainsi : 'suite à votre demande' , l'employeur démontre qu'il a engagé la procédure à l'initiative de la salariée ; ces éléments sont corroborés par l'attestation de Mme [M], responsable social, laquelle indique ' Mme [B] [V] m'a appelée en mars 2010 pour m'informer qu'elle avait demandé une rupture conventionnelle car elle ne souhaitait plus intégrer son poste'.
En conséquence, il est manifeste que c'est bien Mme [B] [V] qui est à l'origine de la signature de l'acte du 10 mars 2010.
Dans une lettre du 12 mars 2010 remise en mains propres à Mme [B] [V] et contre- signée par elle , l'employeur écrit ' nous vous informons que nous renonçons par la présente à cette convention pour le motif suivant : après lecture de la Circulaire DGT 2009-4 du 17 mars 2009, il apparaît que cette convention ne peut être mise en oeuvre dans le cas d'une suspension du contrat de travail pour accident du travail'.
L'employeur a donc usé de son pouvoir de rétractation prévu dans le délai de 15 jours à l'article L.1237-13 du code du travail, et dès lors, le contrat de travail s'est poursuivi, comme l'a décidé à juste titre le conseil des prud'hommes de Marseille , en excluant la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, moyen non repris dans le cadre de la procédure devant la Cour, la salariée s'appuyant désormais sur sa lettre de prise d'acte intervenue postérieurement au jugement du conseil des prud'hommes .
Sur la rupture du contrat de travail
En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission.
Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue contre l'employeur .
Aux termes de sa lettre recommandée du 14 décembre 2012 et de ses écritures, Mme [B] [V] invoque 9 griefs à l'encontre de la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] .
La Cour ayant dans les motifs ci-dessus, débouté la salariée de sa demande en requalification, le grief tiré de'la sous-classification d'emploi' doit être écarté comme doit l'être celui de 'l'utilisation abusive de la rupture conventionnelle' et enfin celui de 'la violation de la garantie d'emploi conventionnelle', puisqu'il a été démontré que la salariée avait pris l'initiative de la rupture en mars 2010.
1- sur l'absence de visite médicale d'embauche
L'explication donnée par l'employeur sur le fait que Mme [B] [V] avait été apprentie auparavant dans un autre cabinet d'expertise, n'est pas pertinente et ce d'autant qu'il s'agit d'une obligation simple, inscrite dans le contrat de travail et la convocation ultérieure pour le 19 avril 2010 n'a pas pour effet de faire disparaître l'infraction.
En revanche, la salariée ne justifie pas d'un préjudice particulier , de sorte que c'est à juste titre que le conseil des prud'hommes de Marseille a évalué le préjudice subi par Mme [B] [V] à la somme de 100 EUROS .
2- sur le non respect du salaire contractuel
Sous cette rubrique, la salariée réclame d'une part, des sommes sur la base du salaire correspondant au coefficient 220 et considère d'autre part, que pendant la durée de son arrêt de travail , elle n'a été rémunérée que pour 1487,54 € bruts alors que son contrat prévoyait 1700€ bruts.
Le conseil des prud'hommes de Marseille comme la Cour ayant rejeté la demande de requalification, Mme [B] [V] n'est pas en droit de réclamer un rappel de salaire calculé sur la base de 1826,30€.
Il résulte clairement des bulletins de salaire produits par la salariée qu'elle a été rémunérée du mois de septembre au mois de novembre 2009 conformément au contrat soit 1700€ bruts, s'agissant de mois travaillés et pleins.
Cette rémunération se décompose en 151,67 h (soit la durée légale) et 4 heures supplémentaires majorées de 25 % et est conforme à la convention collective.
Dans la mesure où dès janvier 2010, la salariée était en arrêt de travail, elle ne pouvait prétendre au paiement d'heures supplémentaires majorées .
En conséquence, elle ne peut ni invoquer le non respect des dispositions contractuelles ni réclamer un rappel de salaire à ce titre et doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 5943,95 EUROS ou 4903,97 EUROS comme indiqué dans le corps des écritures.
3-sur le non paiement d'heures supplémentaires et le travail dissimulé
Devant le conseil des prud'hommes de Marseille , l'employeur a admis que, selon tableau établi par Mme [B] [V] , elle avait bien effectué 3,5 h supplémentaires en novembre 2009 et 8,5 h en décembre 2009, représentant selon la salariée la somme de 51,37 + 134,35 soit 185,72 EUROS bruts et la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] mentionne d'ailleurs cette somme comme payée dans sa lettre du 17 décembre 2012, mais ne produit pas le chèque de règlement.
Devant la Cour, Mme [B] [V] demande à ce titre la somme de 47,81 +125,05 = 172,86 EUROS outre l'indemnité de congés payés afférente pour 17,28 € sans expliciter son calcul et alors qu'aucun élément nouveau n'a pu intervenir depuis le jugement.
Au regard du taux de 12,26 % appliqué sur le bulletin de salaire aux heures supplémentaires , sur la base du tableau de la salariée comptabilisant 3,25 h (et non 3,5) en novembre 2009 et 8,5 h en décembre 2009 , la somme retenue sera celle de 39,84 + 104,21 = 144, 05 € et l'indemnité de congés payés afférente étant de 14,40 € .
Pour justifier de ce manquement, l'employeur indique que le cabinet est soumis à un horaire collectif et que, conformément à la convention collective (article 8.23.2), il utilise le repos compensateur comme mode de gestion des heures supplémentaires effectuées par ses salariés , mais que Mme [B] [V] n'a fait aucune demande en ce sens, sans doute en raison de son arrêt de travail intervenu dès janvier 2010.
Il convient effectivement de souligner que ni fin novembre 2009, ni fin décembre 2009, Mme [B] [V] n'a réclamé le paiement des heures supplémentaires et que même dans le billet d'avis déposé devant le conseil des prud'hommes de Marseille, ce poste n'est pas chiffré.
Par ailleurs, les salariés précisent dans leurs attestations et notamment Mme [Z], responsable de la paie, qu'il est d'usage au cabinet [Q] de tenir informé Mme [J] ou M [Q] des heures effectuées au-delà des 39 h applicables afin de convenir si les heures supplémentaires seront payées ou prises en repos compensateur'.
Ces éléments démontrent que l'employeur n'a jamais refusé de payer des heures supplémentaires, n'en a pas discuté le principe devant le conseil des prud'hommes et dès lors la demande en paiement de la somme de 10.956 EUROS , pour travail dissimulé, demande au demeurant non explicitée, n'a aucun fondement.
4- sur l'absence de versement du complément de salaire
Mme [B] [V] reproche à son employeur de ne pas avoir maintenu à compter du 31ème jour suivant l'arrêt de travail, 80 % de son salaire brut après déduction des indemnités journalières .
L'employeur invoque les articles 7-3 et 7-4 de la convention collective, prévoyant que ces dispositions ne s'appliquent que pour les salariés ayant un an d'ancienneté dans le cabinet.
L'élément déclencheur étant l'accident du 15 janvier 2010, à cette date Mme [B] [V] ne bénéficiait que de 4 mois et 20 jours d'ancienneté et dès lors, la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] n'avait pas à régler un complément de salaire , et n'a donc pas commis de manquement.
Par ailleurs, la salariée doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 4504,46 EUROS ou 8365,36 EUROS comme indiqué dans le corps de ses écritures.
5- sur l'absence de remise régulière des bulletins de salaire
Il résulte d'un échange de correspondances commencé en octobre 2010 , que Mme [B] [V] reproche à son employeur l'absence d'envoi régulier des bulletins de salaire.
La SARL Expertise Comptable [Y] [Q] explique dans sa lettre recommandée du 14 octobre 2010 et ses écritures, s'appuyant sur les attestations de ses salariés, que l'usage est une remise des bulletins en mains propres , l'envoi n'étant fait que sur demande du salarié, au besoin par voie électronique.
Si dans sa lettre du 29 octobre 2010 Mme [B] [V] fait état d'un problème récurrent déjà intervenu pour les bulletins de mars, avril et mai 2010, elle ne justifie pas avoir demandé l'envoi desdits bulletins .
Il n'est pas sans intérêt de constater d'une part que depuis son embauche et jusqu'à la mi- octobre 2010, Mme [B] [V] n'a jamais réclamé la remise de ses bulletins ce qui induit qu'elle les recevait bien et d'autre part que même dans le billet d'avis présenté aux fins de conciliation devant le conseil des prud'hommes de Marseille, aucune demande n'a été formulée sur ce point.
Dès lors, ce reproche ne peut être retenu comme sérieux .
6- sur l'absence de visite médicale de reprise
La salariée indique que, voulant se conformer à la décision du conseil des prud'hommes de Marseille , elle a cessé le 29 novembre 2012, d'adresser ses prolongations d'arrêt de travail, dans l'attente de l'organisation de la visite médicale de reprise par l'employeur.
L'employeur expose que Mme [B] [V] absente du cabinet depuis 2 ans et demi , a cessé d'envoyer ses arrêts de travail, et aurait donc dû reprendre le travail le 30 novembre 2012, mais ne s'est pas manifestée, afin de lui permettre d'organiser la visite de reprise.
Dans le préliminaire de ses conclusions, la salariée reproche à l'employeur de n'avoir pas organisé une visite de pré-reprise ; cependant celle-ci ne peut être déclenchée que par le médecin traitant de la salariée ou le médecin conseil, si une modification de l'aptitude du salarié est prévisible, ce qui n'est d'aucune façon démontré en l'espèce.
En vertu des articles R.4624-22 du code du travail , et du fait que l'arrêt de travail de Mme [B] [V] avait duré plus de 30 jours, l'employeur avait l'obligation d'organiser la visite de reprise.
Cependant pour ce faire, il doit d'abord connaître la date de fin d'arrêt de travail : en l'espèce, Mme [B] [V] indique avoir cessé d'envoyer ses arrêts le 29 novembre 2012 mais ne démontre pas un acte positif en vue de sa reprise, comme une lettre adressée à son employeur voire un certificat médical fixant sa date de consolidation.
Outre le fait que la salariée pouvait d'elle-même solliciter cette visite à condition d'en aviser préalablement son employeur, les textes ont prévu que ce dernier $gt;, ce qui induit le fait que la salariée doit se mettre à disposition pour ce faire, étant d'ailleurs soumise au pouvoir disciplinaire de son employeur pendant cette période.
Faute pour Mme [B] [V] de s'être présentée sur son lieu de travail pour démontrer sa volonté de reprise - comme le lui avait d'ailleurs enjoint la juridiction prud'homale, non seulement son contrat de travail est resté suspendu mais son employeur n'a commis aucun manquement en ne la faisant pas convoquer devant la Médecine du travail, étant précisé que quinze jours après, la salariée signifiait sa prise d'acte.
La Cour , comme le conseil des prud'hommes de Marseille n'a donc retenu comme griefs fondés que le défaut de visite médicale d'embauche et le non paiement de 11,25 heures supplémentaires (et non 11), mais considère que l'inexécution de ces obligations par la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] n'est pas d'une gravité suffisante pour rendre impossible la relation de travail et pour justifier la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.
Dès lors, la prise d'acte doit s'analyser comme une démission et en emporte les effets, et Mme [B] [V] doit être déboutée de ses demandes indemnitaires.
Sur les demandes reconventionnelles
Il n'est pas démontré par l'intimée que l'action de Mme [B] [V] ait dérivé en abus et dès lors, il ne peut être fait droit à sa demande en paiement à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, le jugement du conseil des prud'hommes de Marseille étant confirmé de ce chef.
L'employeur forme une demande nouvelle concernant le délai congé non respecté.
Dans la mesure où Mme [B] [V] n'a pas respecté le délai de préavis de démission, la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] est en droit de lui réclamer une indemnité correspondant à un mois selon l'article 6-2 de la Convention collective, soit la somme de 1486 EUROS ,
Sur les intérêts moratoires
Les sommes allouées à titre de salaires (rappel sur heures supplémentaires), porteront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur (présentation de la lettre recommandée) à l'audience de tentative de conciliation valant mise en demeure, soit le 23 septembre 2010 et ordonne la capitalisation en vertu de l'article 1154 du code civil .
La somme allouée à titre indemnitaire en 1ère instance à la salariée pour défaut de visite médicale d'embauche produira intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2012 et celle allouée à l'employeur pour absence de préavis, à compter de la date de la présente décision.
Sur les frais et les dépens
Mme [B] [V] qui succombe dans la quasi totalité de ses demandes , supportera les dépens d'appel, doit être déboutée de sa demande basée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et sera condamnée sur ce même fondement à payer à la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] la somme de 800 EUROS, pour l'ensemble de la procédure.
La demande de l'appelante visant à mettre à la charge du débiteur (l'intimée) le droit proportionnel de l'huissier prévu à l'article 10 du Décret tarifant les actes d'huissier, en date du 12/12/96 et modifié le 08/03/01, alors que dans le cas précis, la Loi a mis à la charge du créancier ce droit et a en outre prévu en son article 8 un autre droit à la charge du débiteur, est non seulement hypothétique mais contraire à la loi.
Le conseil des prud'hommes de Marseille l'a donc à juste titre rejetée.
La demande faite par l'appelante relative à l'exécution provisoire , inopérante devant la Cour d'Appel , doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
* Confirme le jugement déféré, sauf dans ses dispositions relatives aux heures supplémentaires et à l'article 700 du code de procédure civile ,
Statuant à nouveau de ces chefs et Y ajoutant,
* Condamne la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] à payer à Mme [B] [V] la somme de 144,05 EUROS au titre du rappel d'heures supplémentaires, outre 14,40€ d'indemnité de congés payés afférente, avec intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2010 avec capitalisation,
* Dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail du 14 décembre 2012, doit s'analyser en une démission,
* Déboute Mme [B] [V] de ses autres demandes,
* Condamne Mme [B] [V] à payer à la SARL Expertise Comptable [Y] [Q] la somme de 1486 EUROS à titre d'indemnité pour absence de préavis et 800 EUROS sur la base de l'article 700 du code de procédure civile ,
* Condamne Mme [B] [V] aux dépens d'appel, sous réserve des règles relatives à l'aide juridictionnelle.
Le Président Le Greffier