COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 19 DECEMBRE 2013
FG
N° 2013/751
Rôle N° 12/14777
CAISSEDEGARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES ET DES MANDATAIRES
C/
[T] [N]
[J] [U]
[A] [X]
[Y] [W]
[I] [W]
[H] [W]
Compagnied'assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY
Grosse délivrée
le :
à :
SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON
Me Paul GUEDJ
Me Jean-marie JAUFFRES
SCP JOURDAN JEAN FRANCOIS
SELARL GOBAILLE & SARAGA-BROSSAT
SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE
Décisions déférées à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 17 Janvier 2008 enregistré au répertoire général sous le n° 02/05559.
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 5 juillet 2012 enregistré au répertoire général sous le n°02/05559.
APPELANTE
CAISSE DE GARANTIE DES ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES ET DES MANDATAIRES JUDICIAIRES A LA LIQUIDATION DES ENTREPRISES,
dont le siège social est sis [Adresse 4]
prise en la personne du Président de son Conseil d'administration y domicilié.
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Florence REBUT DELANOE de la SCP REBUT DELANOË-BOULLOT GAST, avocat au barreau de PARIS.
INTIMES
Maître [T] [N] ,
mandataire judiciaire
né le [Date naissance 3] 1945 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 3],
agissant en sa qualité de commissaire à l'exécution du Concordat de Monsieur [W].
représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE , assisté de Me Corinne BONVINO-ORDIONI, avocat au barreau de TOULON
Maître [J] [U]
mandataire judiciaire
demeurant [Adresse 7],
ès qualités d'administrateur de l'étude de Maître [A] [X]
représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assisté de la SCP FABRE M., FABRE J.P., GUEUGNOT D., FABRE H SAVARY-BASTIANI C.substituée par
Me DE HEAULME, avocat au barreau de PARIS.
Monsieur [A] [X]
né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 5]
Non comparant
Madame [Y] [W]
née le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 2]
ès qualités d'héritière de feu [S] [W]
représentée par Me Jean-marie JAUFFRES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Michèle ROCCA, avocat au barreau de GRASSE
Madame [I] [W] épouse [Z]
née le [Date naissance 4] 1949 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 1]
ès qualités d'héritière de feu [S] [W]
représentée par la SELARL GOBAILLE & SARAGA-BROSSAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Odile-marie LA SADE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
Madame [H] [W] épouse [F]
née le [Date naissance 5] 1946 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 6]
ès qualités d'héritière de feu [S] [W]
représentée par Me Jean-marie JAUFFRES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Michèle ROCCA, avocat au barreau de GRASSE
Compagnie d'assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY venant aux droits de la Compagnie d'Assurances AGF, dont le siège social est sis [Adresse 8], prise en la personne de son Président Directeur Général en exercice y domicilié
représentée par la SCP JOURDAN JEAN FRANCOIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Jean-Louis ROINE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Décembre 2013.
ARRÊT
Par défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Décembre 2013,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,
M.[S] [W], négociant en vins, a procédé le 7 mai 1974 à un dépôt de bilan devant le tribunal de commerce de Brignoles.
Le tribunal de commerce a désigné M°[G], puis M°[A] [X] comme syndic du règlement judiciaire. Un concordat a été homologué le 18 juillet 1995 et M°[A] [X] a été commissaire à l'exécution de ce concordat.
Le 20 octobre 1998, M°[U] a été nommé administrateur provisoire de l'étude de M°[X], alors incarcéré.
Le 5 novembre 1998, M°[U] a déclaré auprès de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises un sinistre pour non représentation de fonds de l'étude [X] estimé provisoirement à 20.215.996 francs ou 3.081.908,72 €.
Le 21 novembre 2000, M°[T] [N] a été désigné à la place de M°[U].
M°[U] a établi une reddition de comptes le 20 novembre 2001.
Le 25 avril 2002, M.[S] [W] a fait assigner la Caisse de Garantie des Administrateurs judiciaires et M.[A] [X] devant le tribunal de grande instance de Marseille aux fins de les voir condamner in solidum à lui payer 857.591 € à titre de dommages et intérêts, aux motifs de détournements allégués.
La société AGF IART a été appelée en cause par M.[W] en qualité d'assureur de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires.
Par jugement en date du 17 janvier 2008, le tribunal de grande instance de Marseille a :
- débouté, en l'état de la procédure, la compagnie AGF IART de ses demandes fondées sur les dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile,
- fait toutefois injonction à [A] [X] d'avoir à communiquer l'ensemble des pièces dans la suite de la procédure au fond,
- dit que M.[W] a qualité et intérêt à agir contre M.[X] sur le fondement des dispositions de l'article 1843-5 du code civil, en sa qualité d'associé de la Sarl Vauclusienne de Concentration, du GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et du GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC',
- débouté M°[X] de la fin de non recevoir soulevée sur le fondement des dispositions de l'article 2052 du code civil,
- dit que l'action de M.[W] n'est pas prescrite,
- avant dire droit au fond et sur la question de la garantie de la compagnie AGF IART, ordonné une expertise et commis pour y procéder M.[M] [O]...[Localité 4]..avec pour mission de : - se rendre à l'étude de chacun des successeurs de M°[X], M°[U] et M°[N], ......- inventorier les diligences accomplies à la date des opérations expertales, dire qui en est l'auteur .., - déterminer les honoraires dus à M°[X] à la date du 20 octobre 1998, date de la désignation de M°[U] en qualité d'administrateur judiciaire, -inventorier les sommes perçues par M°[U] en qualité d'administrateur provisoire de l'étude [X] dans le cadre du règlement judiciaire concernant M.[W] et son groupe, - prendre connaissance des actes de présentation des comptes établis par M°[U] en application de l'article 31 du décret n°85-1388 du 27 décembre 1995 lors de transfert de dossiers en cours à ses différents successeurs, en présence du juge commissaire, - prendre connaissance des éventuelles oppositions formées par le débiteur en application de l'article 88 du décret n°85-1388 du 27 décembre 1985 auprès du tribunal de commerce de Brignoles, - proposer une clé de répartition des honoraires et émoluments ou de toute autre rémunération due à M°[X], M°[U] et ses successeurs en considération des dispositions de l'article 27 du décret n°85-1388 du 27 décembre 1985 dans le cadre des missions d'administrateur judiciaire, aux termes desquelles la procédure de taxation des émoluments prévue à l'article 29 du même décret n'est possible qu'en cas de contestation de l'arrêté des émoluments proposés par le mandataire judiciaire, - proposer une clé de répartition des honoraires et émoluments proposés par le mandataire judiciaire, - proposer une clé de répartition des honoraires et émoluments ou toute autre rémunération en qualité de commissaire à l'exécution en application des dispositions de l'article 9 du décret n°85-1390 du 27 décembre 1985 qui laissent le soin au seul président du tribunal de commerce de décider du montant de la rémunération spéciale pour la répartition du prix, fixé en fonction des usages en vigueur auprès du tribunal de commerce de Brignoles notamment à 3% dudit prix, -donner son avis sur l'étendue du préjudice de M.[W] et des sociétés dans lesquelles il a la qualité d'associé,
- fixé les modalités de l'expertise ....,
-............,
- sursis à statuer sur les demandes présentées au fond et sur la question de la garantie de la compagnie AGF IART dans l'attente du rapport d'expertise,
- renvoyé l'affaire à la mise en état ...,
- condamné in solidum [A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires à payer à M.[W] la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toute autre demande au titre des frais irrépétibles,
- dit n'y avoir lieu à allouer à M.[W] une provision ad litem,
- condamné in solidum [A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de M°[K] et de M°[B] en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, à l'exception des dépens exposés par la société AGF IART qui resteront à la charge de celle-ci,
- ordonné l'exécution provisoire.
M.[S] [W] est décédé le [Date décès 1] 2008, laissant pour lui succéder Mme [H] [W] épouse [F], Mme [I] [W] et Mme [Y] [W].
L'expert [O], désigné par jugement du 17 janvier 2008, a déposé son rapport le 29 avril 2011.
Par jugement en date du 5 juillet 2012, le tribunal de grande instance de Marseille a :
- déclaré recevables Mmes [H] [W], [I] [W] et [Y] [W] en leur intervention volontaire comme héritières de M.[S] [W],
- déclarés recevables Mmes [H] [W], [I] [W] et [Y] [W] en leurs demandes,
- rejeté la demande présentée par la société Allianz tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions signifiées le 13 mars 2012 par Mme [I] [W],
- constaté l'absence de demande de dommages et intérêts présentée par les demanderesses sur le fondement de la responsabilité civile à l'encontre de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises et de la compagnie Allianz,
- homologué le rapport d'expertise de M.[O],
- constaté que la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises est tenue de garantir M.[A] [X],
- condamné in solidum M.[A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises à payer à Mme [H] [W] épouse [F], Mme [I] [W] et Mme [Y] [W] la somme de 765.265,70 € avec intérêts aux taux légal à compter du 29 avril 2002 avec application de l'article 1154 du code civil,
- dit que le capital et les intérêts seront versés à M°[T] [N] en sa qualité de commissaire à l'exécution du concordat de [S] [W],
- mis hors de cause M°[U] en sa qualité d'administrateur provisoire de l'étude de M°[X],
- débouté Mme [H] [W] épouse [F], Mme [I] [W] et Mme [Y] [W] de leur demande de dommages et intérêts fondée sur les fautes professionnelles de M.[A] [X],
- déclaré recevable la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par la compagnie d'assurances Allianz,
- déclaré prescrite l'action en garantie de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises à l'égard de la compagnie d'assurances Allianz,
- condamné M.[A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise, au profit des avocats constitués,
- condamné solidairement M.[A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises à payer à chacune des demanderesses la somme de 3.000 €,
- débouté la compagnie d'assurances Allianz de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Par déclaration de M°Sandra JUSTON, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, en date du 27 juillet 2012, la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises a relevé appel des deux jugements, du 17 janvier 2008 et du 5 juillet 2012.
Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 26 février 2013, la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises demande à la cour d'appel de :
- infirmer le jugement du 5 juillet 2012 en toutes ses dispositions,
- vu le jugement du 17 janvier 2008 sur la qualité à agir restreinte de M.[W],
- vu les dispositions de l'article L.814-3 du code de commerce, de :
- déclarer Mmes [W] tant irrecevables que mal fondées en leurs demandes, et en conséquence les en débouter,
- subsidiairement, dire que la condamnation en principal ne pourra porter intérêts qu'à compter du dépôt du rapport d'expertise de M.[O], soit le 28 mars 2011,
- condamner la compagnie Allianz, venant aux droits de la compagnie AGF au titre de la police n°65.062.682, à garantir la Caisse de Garantie de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre, à hauteur d'une quote-part de 80%,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M.[X] à garantir la Caisse de Garantie de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre,
- condamner tout succombant à payer à la Caisse de Garantie une somme de 6.000 e en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SCP BADIE & SIMON-THIBAUD & JUSTON.
La Caisse de Garantie expose avoir été créée par l'article 34 de la loi du 25 janvier 1985 aujourd'hui article L.814-3 du code de commerce, affectée au remboursement des fonds, effets ou valeurs reçus ou gérés par chaque administrateur judiciaire inscrit sur une liste nationale et par chaque mandataire à la liquidation des entreprises. Elle précise avoir souscrit une police d'assurance non représentation de fonds auprès de la compagnie AGF, aujourd'hui Allianz, contrat n°65.062.682.
La Caisse rappelle que, s'agissant de la responsabilité civile des administrateurs et mandataires, elle n'a d'autre obligation que celle d'intermédiaire pour la souscription de cette assurance.
La Caisse explique avoir indemnisé les victimes de M°[X] à hauteur de 19.928.200 F ou 3.038.034,51 €, étant précisé que 20% des condamnations sont restées à la charge des professionnels, confrères de M°[X].
La Caisse fait observer que les consorts [W] sont confus en leurs demandes.
La Caisse estime M.[W], aujourd'hui ses héritières, irrecevables pour défaut de qualité à agir. Elle fait observer que le règlement judiciaire visait non seulement M.[S] [W] à titre personnel mais aussi la Sarl Vaucluse de Concentration, le GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] CERJ, le GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation GIC et la Sa Les Caves André, soit cinq entités.
La Caisse estime que les ayants droit [W] ne sont pas recevables à agir et relève que la demande a été globalisée sans distinguer les passifs.
La Caisse fait observer que le jugement de 2008 ne statue pas sur la difficulté liée à une demande globale.
La Caisse fait observer que le rapport de l'expert n'éclaire pas sur la répartition des sommes entre les diverses entités de la procédure et M.[W] à titre personnel.
A titre très subsidiaire, la Caisse demande la garantie de la société Allianz
La Caisse expose qu'elle détenait une police de 'première ligne' à hauteur de 20 millions de francs auprès de UAP devenue AXA Courtage, et une police de 'seconde ligne' dont la compagnie AGF IART était apéritrice, ayant vocation à s'appliquer après épuisement des garanties de la police de première ligne. Elle fait observer que le délai de prescription ne commence à courir que du jour où la police de première ligne est épuisée;
Elle fait remarquer que AGF IART n'avait pas opposé de prescription.
Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 21 décembre 2012, la société d'assurances Allianz Global Corporate & Speciality (France), venant aux droits de la compagnie AGF, demande à la cour d'appel de :
- statuer ce que de droit en ce qui concerne la recevabilité de l'appel interjeté par la Caisse de Garantie des Administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires,
- confirmer le jugement du 5 juillet 2012, en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de la Caisse de Garantie des Administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires à l'égard de la société Allianz,
- subsidiairement, dire qu'en tout état de cause, la société Allianz ne pourra être tenue qu'à concurrence de sa quote-part dans la co-assurance, soit 40%, et ce après déduction de la franchise de 20% prévue par l'article L.814-3 du code de commerce,
- plus subsidiairement, déclarer recevable et bien fondé l'appel incident et provoqué formé par la société Allianz contre le jugement du 17 janvier 2008,
- y faisant droit, déclarer prescrite l'action des consorts [W] en application des dispositions de l'article L.110-4 du code de commerce,
- plus subsidiairement encore, déclarer irrecevables, en tout état de cause, mal fondées les demandes formées par les consorts [W],
- condamner M.[X] à garantir la société Allianz Global Corporate & Speciality France de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre,
- condamner tout succombant à payer à la société Allianz une somme de 6.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SCP JOURDAN & WATTECAMPS.
Par leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 26 décembre 2012, Mme [H] [W] épouse [F] et Mme [Y] [W], ès qualités d'ayants droit de feu [S] [W], demandent à la cour d'appel, au visa des articles 1382 et 1154 du code civil, de :
- déclarer irrecevable l'appel formé par la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires contre le jugement rendu le 17 janvier 2008,
- confirmer le jugement rendu le 5 juillet 2012 en ce qu'il a
- déclarer Mme [H] [W] épouse [F] et Mme [Y] [W] recevables en leur intervention volontaire en qualité de seules héritières de feu [S] [W],
- homologuer le rapport d'expertise [O],
- dire la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires tenue de garantir M°[X] à hauteur de la non représentation de fonds et de ses accessoires,
- condamner in solidum M°[X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires à leur payer la somme de 762.265,17 € en principal, augmentée des intérêts aux taux légal à compter du 18 juillet 1995, avec application de l'article 1154 du code civil,
- y ajoutant, ordonner que les fonds seront versées à l'administrateur domicilié hors département des Bouches-du-Rhône ou du Var, désigné en remplacement de M°[N] ou tel séquestre qu'il plaira à la cour de désigner, auquel mission sera donnée de répartir les fonds entre les créanciers,
- dire que la non représentation des fonds, et plus généralement la conduite par M°[X] des missions qui lui ont été confiées par décisions de justice, constituent des fautes professionnelles qui engagent sa responsabilité civile professionnelle,
- le condamner à payer aux dames [W] la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices moraux et financiers causés par ses fautes et dont les seuls intérêts moratoires ne sauraient suffire à indemniser,
- subsidiairement, si la poursuite de l'expertise venait à être ordonnée, allouer aux dames [W] une somme provisionnelle de 382.000 €, dire que ces fonds seront versés au nouvel administrateur séquestre, leur donner acte de leurs réserves quant à la mise en cause de la responsabilité de M°[N],
- en tout état de cause, condamner M°[X] in solidum avec la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires à leur payer la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,
- les condamner aux dépens, comprenant ceux de l'expertise [O], avec distraction au profit de M°JAUFFRES.
Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 27 décembre 2012, Mme [I] [W] épouse [Z] demande à la cour d'appel de :
- confirmer le jugement du 5 juillet 2012 en ce qu'il a déclaré Mme [I] [W] recevable en son intervention volontaire en qualité d'héritière de feu [S] [W], en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise [O], en ce qu'il a condamné in solidum M.[A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires à payer 765.265,17 €, dit que le capital et les intérêts seront versés à M°[N] commissaire à l'exécution du concordat, au paiement de 5.000 € de frais irrépétibles ,
- y ajoutant, condamner la Caisse appelante à lui payer 50.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3.000 € supplémentaires en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens avec distraction au profit de la Selarl GOBAILLE & SARAGA BROSSAT.
Par ses conclusions, notifiées et déposées le 24 décembre 2012, M°[J] [U], ès qualités d'administrateur de l'étude de M°[A] [X], demande à la cour d'appel de confirmer le jugement du 5 juillet 2012 en ce qu'il l'a mis hors de cause et de condamner tout contestant aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de la SCP ERMENEUX-CHAMPLY et LEVAIQUE.
Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 4 septembre 2013, M°[T] [N], ès qualités de commissaire à l'exécution du concordat de M.[W], demande à la cour d'appel de lui donner acte de qu'il s'en rapporte à la sagesse de la cour et de statuer ce que de droit sur les dépens, avec distraction au profit de la SCP Hervé COHEN, Laurent COHEN, Paul GUEDJ, Jean-Philippe MONTERO et Maud DAVAL-GUEDJ, avocats.
M.[A] [X], régulièrement assigné le 31 octobre 2012, non touché à sa personne, n'a pas comparu.
L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 24 octobre 2013.
MOTIFS,
-I) Le cadre du litige :
Bien que la déclaration d'appel de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises en date du 27 juillet 2012 porte sur les deux jugements, celui du 17 janvier 2008 et celui du 5 juillet 2012, dans ses dernières conclusions, l'appelante ne conteste que le jugement du 5 juillet 2012 et vise comme acquis le jugement du 17 janvier 2008.
En conséquence la demande de Mmes [H] et [Y] [W] de voir déclarer irrecevable l'appel du jugement du 17 janvier 2008, demande qui aurait relevé de la compétence du conseiller de la mise en état, est sans objet.
Aucune partie ne conteste le jugement du 17 janvier 2008.
L'appel ne porte que sur le jugement du 5 juillet 2012, avec appel principal de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires à liquidation des entreprises et appel incident de Mmes [H] et [Y] [W].
La recevabilité de l'appel du jugement du 5 juillet 2012 n'est pas discutée.
La disposition de ce jugement qui met M°[U] hors de cause n'est pas contestée.
-II) Sur la qualité à agir des héritières de feu [S] [W] :
La Caisse de Garantie fait valoir que les héritières de feu [S] [W] ne peuvent avoir plus de droit à agir que leur père, que le tribunal de grande instance de Marseille, par le jugement non contesté du 17 janvier 2008, n'ayant retenu que la qualité à agir de M.[W] en qualité d'associé, les ayants droit ne peuvent agir au titre du patrimoine personnel de M.[S] [W].
L'assignation introductive d'instance, initiée le 25 avril 2002 par M.[S] [W], est une action en responsabilité civile dirigée contre M°[A] [X] pour le voir condamner à lui verser une somme de 7.061.947,83 F soit 1.076.587 € correspondant selon lui à des prélèvements opérés par M°[X] sur des actifs personnels et celui confondu des sociétés qui lui étaient liées, faisant l'objet de la procédure collective unique.
Il demandait la condamnation de la Caisse de Garantie in solidum avec M°[X] au titre du remboursement de ces sommes.
Il a fait valoir également ses droits d'associé des personnes morales Sarl Vauclusienne de Concentration, GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC', prétendant exercer l'action de l'article
1843-5 du code civil.
Aucune assignation n'était dirigée à l'encontre de l'assurance responsabilité civile de M°[X]. Seule était assignée la Caisse de Garantie, laquelle avait déjà, dans le cadre de la garantie non-représentation de fonds, renfloué les fonds manquants de M°[X] à hauteur d'un peu moins de 20 millions de francs, sommes comprenant les fonds manquants au titre la procédure collective [W] et sociétés annexes ;
Lorsque M.[S] [W] a diligenté cette action, il était encore en cours d'exécution du concordat et M°[T] [N] était et se trouve toujours être commissaire à l'exécution du concordat. Ce concordat est toujours en cours d'exécution;
Comme l'a relevé le tribunal, dans le jugement du 17 janvier 2008, le jugement d'homologation du concordat redonnait à M.[W] la libre administration de ses biens, à l'exception de ceux qui avaient fait l'objet d'un abandon, lesquels étaient réglés dans le cadre de la liquidation des biens. Précisément, M.[W] et son groupe de sociétés ont obtenu un concordat par abandon d'actif, de sorte que M.[W] n'avait pas qualité pour agir au sujet de cet actif abandonné.
Lors du concordat, il avait été relevé un actif total d'un peu plus de 4.500.000 francs pour un passif total de 10.728.000 francs environ, dont un peu plus de 7 millions de francs rien que pour M.[S] [W] à titre personnel.
Le tribunal n'a pas retenu de qualité et intérêt à agir de M.[S] [W] à titre personnel mais a seulement retenu la qualité et l'intérêt à agir de M.[S] [W] contre M.[X] sur le fondement des dispositions de l'article 1843-5 du code civil, en sa qualité d'associé de la Sarl Vauclusienne de Concentration, du GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et du GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC'.
Les héritières [W], loin de contester ce jugement de 2008 par voie d'appel incident, ont soulevé l'irrecevabilité de l'appel de ce jugement par la Caisse de Garantie. Elles ne relèvent appel incident que du jugement de 2012. En définitive, la Caisse de Garantie n'a pas maintenu son appel de ce jugement, comme il a été relevé plus haut.
Toutes les parties y ont acquiescé.
Or ce jugement définitif a retenu que la seule qualité à agir de M.[S] [W] était non pas à titre personnel mais en qualité d'associé de personnes morales au titre de l'action sociale de l'article 1843-5 du code civil.
En conséquence, en tant qu'ayants droit de feu [S] [W], les héritières ne peuvent agir qu'au titre de la poursuite de l'action sociale de celui-ci en qualité d'associé des personnes morales Sarl Vauclusienne de Concentration, GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC'.
-III) Sur les demandes :
Les héritières [W] demandent la condamnation :
- d'une part in solidum de M.[X] et de la Caisse de Garantie à verser la somme de 765.265,70 €, somme à verser à M°[N] selon Mme [I] [W], ou à un autre administrateur selon Mmes [H] et [Y] [W],
- d'autre part, pour Mmes [H] et [Y] [W] de M.[X] à leur payer 100.000€ à titre de dommages et intérêts,
- enfin pour Mme [I] [W], celle de la Caisse de Garantie à lui payer 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
-III-1) Sur la demande concernant la somme de 765.265,70 € :
Il y a lieu d'observer que la somme de 765.265,70 € qui correspondrait à des fonds non représentés et non déjà renfloués par la Caisse de Garantie, soit 5.019.813,90 francs, dépasse le montant de l'actif total abandonné de M.[W] et des quatre personnes morales concernées par la procédure collective.
En tout état de cause les ayants droit [W] ne peuvent agir qu'au titre des droits d'associé qu'elles tiennent de leur père dans trois personnes morales.
Il leur appartient en tant que demanderesses d'établir la partie non renflouée des fonds manquants au titre des personnes morales Sarl Vauclusienne de Concentration, GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC' et le préjudice en résultant pour ces sociétés.
La preuve n'est pas rapportée de ce manque.
A cet égard l'expertise ne permet pas de déterminer si des fonds de ces personnes morales ou revenant à ces personnes morales étaient manquants.
La demande n'est pas fondée.
-III-2) Sur la demande de 100.000 € :
Mmes [H] et [Y] [W] demandent la condamnation de M.[X] à leur payer 100.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la faute personnelle de M.[X].
Il convient de leur rappeler que le jugement du 17 janvier 2008, dont elles ont revendiqué l'autorité de chose jugée a dit que M.[W] a qualité et intérêt à agir contre M.[X] sur le fondement des dispositions de l'article 1843-5 du code civil, en sa qualité d'associé de la Sarl Vauclusienne de Concentration, du GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et du GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC'.
Le seul préjudice dont elles pourraient demander la réparation est celui causé à ces sociétés, ce qu'elles ne demandent pas, sollicitant un préjudice causé à M.[W].
En conséquence cette demande est irrecevable.
-III-3) sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :
Au vu du caractère infondé de la demande de Mme [I] [W], la Caisse n'a fait preuve d'aucune résistance abusive.
-IV) Sur les autres points :
La demande présentée à titre subsidiaire par la Caisse de Garantie contre la société Allianz Global Corporate & Speciality (France), venant aux droits de la compagnie AGF, est sans objet.
La demande de Mmes [H] et [Y] [W] de désignation d'un autre administrateur ne relève de la présente procédure et se trouve en tout état de cause sans objet.
Par équité, chaque partie conservera ses dépens et ses frais irrépétibles.
Les frais d'expertise seront partagés pour moitié entre les ayants droit [W] et la Caisse de Garantie.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt de défaut, par suite de la défaillance de M.[A] [X], prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Constate que la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires à la liquidation des entreprises ne conteste pas le jugement rendu le 17 janvier 2008 par le tribunal de grande instance de Marseille dont l'appel n'est plus en cause,
Statuant sur l'appel du jugement rendu le 5 juillet 2012 par le tribunal de grande instance de Marseille,
Infirme le jugement rendu le 5 juillet 2012 par le tribunal de grande instance de Marseille, sauf en ce qu'il a mis hors de cause M°[U],
Statuant à nouveau,
Déclare Mme [H] [W] épouse [F], Mme [Y] [W] et Mme [I] [W] épouse [Z], ès qualités d'ayants droit de feu [S] [W], recevables à agir contre M.[A] [X] et la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires à la liquidation des entreprises au titre des droits d'associé de feu [S] [W] dans les personnes morales Sarl Vauclusienne de Concentration, GIE Centre d'Embouteillage [Localité 3] 'CERJ' et GIE Groupement Interprofessionnel de Commercialisation 'GIC', au titre de l'action de l'article
1843-5 du code civil,
Déboute Mme [H] [W] épouse [F], Mme [Y] [W] et Mme [I] [W] épouse [Z], ès qualités d'ayants droit de feu [S] [W], de leur demande de condamnation in solidum de M.[X] et de la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires à la liquidation des entreprises à leur payer la somme de 765..265,70 €,
Déclare Mme [H] [W] épouse [F] et Mme [Y] [W], ès qualités d'ayants droit de feu [S] [W], irrecevable en leur de condamnation de M.[X] à leur payer 100.000 € à titre de dommages et intérêts,
Déboute Mme [I] [W] épouse [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Dit sans objet la demande présentée à titre subsidiaire par la Caisse de Garantie des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires à la liquidation des entreprises contre la
la société Allianz Global Corporate & Speciality (France), venant aux droits de la compagnie AGF,
Dit sans objet la demande concernant M°[N] ès qualités,
Dit que chaque partie conservera ses dépens et ses frais irrépétibles de première instance postérieurs au jugement du 17 janvier 2008, et ses dépens et frais irrépétibles d'appel,
Dit que les frais d'expertise seront partagés par moitié entre d'une part, Mme [H] [W] épouse [F], Mme [Y] [W] et Mme [I] [W] épouse [Z], et d'autre part Mme [H] [W] épouse [F], Mme [Y] [W] et Mme [I] [W] épouse [Z].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT