La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/11/2013 | FRANCE | N°11/06651

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 22 novembre 2013, 11/06651


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2013



N° 2013/586













Rôle N° 11/06651







CAMEFI (CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT)





C/



[C] [Z]

[O] [R]

SCP [R]





















Grosse délivrée

le :

à : la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON



la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE



Me Paul GUEDJ













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 24 Mars 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 10/8929.





APPELANTE



CAMEFI (CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT), agissant poursuite...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2013

N° 2013/586

Rôle N° 11/06651

CAMEFI (CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT)

C/

[C] [Z]

[O] [R]

SCP [R]

Grosse délivrée

le :

à : la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE

Me Paul GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 24 Mars 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 10/8929.

APPELANTE

CAMEFI (CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT), agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Virginie ROSENFELD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [C] [Z]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 1] (ALGERIE), demeurant [Adresse 2]

représenté par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Valérie MORALES, avocat au barreau de PARIS

Maître [O] [R], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Paul GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Philippe KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SCP [R], prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Paul GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Philippe KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Juillet 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Olivier COLENO, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier COLENO, Président (rédacteur)

Monsieur Christian COUCHET, Conseiller

Madame Françoise BEL, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11Octobre 2013, puis prorogé au 25 Octobre 2013 et 22 Novembre 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2013,

Signé par Monsieur Olivier COLENO, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Par le jugement dont appel du 24 mars 2011, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Marseille a ordonné la mainlevée d'une saisie-attribution sur loyers pratiquée le 9 juin 2010 entre les mains de la S.A.R.L. SGCR contre [C] [Z], emprunteur défaillant, par la société CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT -CAMEFI- en vertu d'un acte notarié de prêt du 14 décembre 2004, à raison du défaut d'annexion, à la copie exécutoire de l'acte notarié, de la procuration donnée par l'emprunteur, d'autant plus préjudiciable qu'il s'avère que ce dernier a été représenté à l'acte par une dame [Q], secrétaire notariale alors que M.[Z] avait donné procuration à tous clercs de l'étude de Maître [R], qualité qu'elle ne possède donc pas, de sorte que l'acte authentique est affecté d'un défaut de forme qui le prive de sa qualité de titre exécutoire pour ne valoir que comme écriture privée par application de l'article 1318 du code civil.

Le premier juge a par ailleurs rejeté :

-la contestation de la recevabilité de l'action de [C] [Z] tirée d'un défaut de notification à l'huissier de justice instrumentaire, la formalité ayant été accomplie,

-la demande de nullité de la saisie-attribution faute de présentation du titre en violation de l'article 502 du code de procédure civile comme inapplicable aux actes notariés,

-l'exception de prescription de l'action en nullité, la contestation soulevée ne tendant pas au prononcé de la nullité de l'acte notarié,

-la demande de dommages-intérêts formée par [C] [Z] faute de preuve d'un abus de procédure du créancier impayé,

-l'appel en garantie contre les notaires au motif qu'il n'entre pas dans les attributions du juge de l'exécution de statuer sur la responsabilité des notaires ni un appel en garantie à leur encontre.

Vu les dernières conclusions déposées le 3 juillet 2013 par la société CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT -CAMEFI-, appelante, tendant à la réformation de cette décision et demandant à la Cour de débouter M.[Z] de toutes ses demandes et de déclarer le jugement commun à Maître [R] et la SCP notariale,

soutenant notamment que la compétence du juge de l'exécution se limite à l'examen de la copie exécutoire et ne s'étend pas à l'appréciation de la minute, que la demande de sursis est irrecevable par application de l'article 74 du code de procédure civile pour n'avoir été soulevée pour la première fois qu'en cause d'appel, que l'article 4 du code de procédure pénale est sans application en matière de voies d'exécution, que l'annexion des procurations à la copie exécutoire n'est pas exigée par la loi et en tout état de cause n'est pas de nature à affecter la force exécutoire du titre, que l'exécution du mandat -dont la nullité n'est pas recherchée- a été ratifiée sans équivoque par l'emprunteur dans les termes des dispositions de l'article 1998 du code civil, que l'exception de nullité est prescrite par l'accomplissement du délai de 5 ans depuis la mise à disposition des fonds et ne peut jouer que pour faire échec à un acte qui n'a pas encore été exécuté, que les délais de la loi SCRIVENER ont été respectés selon les mentions de l'acte de prêt qui ne sont pas arguées de faux, ce que ne contredisent pas les mentions de la procuration notariée qui n'est pas soumise auxdits délais,

Vu les dernières conclusions déposées le 2 juillet 2013 par Maître [R] et la SCP [R] tendant à la réformation du jugement et demandant à la Cour de surseoir à statuer, subsidiairement de juger infondés les moyens tirés d'un défaut d'annexion des procurations ou de l'absence de qualité du mandataire, de juger que l'interprétation a contrario de l'article 8 du décret du 31 juillet 1992 n'interdit pas au juge de l'exécution de surseoir à statuer lorsque le titre fondant l'exécution n'est pas une décision de justice, qu'il n'y a pas matière à annexion d'une procuration reçue par le notaire instrumentaire lui-même et dont la mention à l'acte est valable, que la contestation de la validité de l'exécution du mandat est prescrite par application de l'article 1304 du code civil, que la contestation de la validité de la procuration, acte autonome, échappe à la compétence du juge de l'exécution, que l'acte de prêt rectifie la mention erronée de la procuration sur la signature de l'offre de prêt, qu'il n'existe pas de définition légale du terme clerc, que M.[Z] ne justifie pas qu'il aurait entendu faire de la qualification professionnelle de son mandataire une condition de validité du mandat, que le contenu du mandat, qui prévoyait une faculté de substitution, a été respecté, que le mandant est tenu d'exécuter les engagements de son mandataire par application de l'article 1998 du code civil, qu'il a ratifié ces derniers, ce qui rend inopérant la contestation de validité du mandat,

et de condamner M.[Z] au paiement de la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts,

Vu les dernières conclusions déposées le 19 juin 2013 par [C] [Z] tendant au sursis à statuer, au besoin moyennant injonction de communiquer les pièces du dossier pénal, et demandant à la Cour à titre principal de constater l'absence de menace pour le recouvrement de la créance et d'ordonner la mainlevée de la saisie, subsidiairement d'écarter la jurisprudence de la chambre mixte et de juger que le défaut d'annexion de la procuration prive l'acte de son caractère exécutoire, d'ordonner la mainlevée de la saisie de ce fait, plus subsidiairement de l'ordonner également en considération de la nullité du titre exécutoire faute de signature de sa part dès lors qu'il a été représenté à l'acte par une personne qui n'en avait pas le pouvoir, outre le fait que l'offre de prêt visée à la procuration et celle résultant de l'acte notarié ne concordent pas, en tout état de cause de juger que la banque qui avait connaissance des graves irrégularités de son acte ne pouvait engager de mesure d'exécution forcée, en conséquence d'ordonner mainlevée de la mesure et de la condamner au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts,

soutenant notamment qu'il n'a pu ratifier un acte dont il ignorait les vices, que la procuration a été obtenue par dol,

que les notaires font parfaitement la distinction entre clerc et employé de l'étude puisque d'autres les rédigent en mentionnant les deux termes, qu'ils avaient souhaité bénéficier de la garantie d'être représentés par un véritable professionnel du droit, que la nullité qui en résulte est absolue, se prescrivait par trente ans, et ne peut être ratifiée,

que l'acte n'indique pas que Madame [Q] aurait substitué un clerc et que le terme substituer dans la procuration vise le mandataire,

que la seule exécution d'un contrat nul ne vaut pas ratification, que rien ne révèle que l'emprunteur aurait eu connaissance du vice et intention de le réparer,

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que la demande de sursis à statuer en référence à une action publique en cours n'avait pas été formée par [C] [Z] en première instance ;

qu'il s'ensuit, s'agissant d'une exception tendant à faire suspendre le cours de la procédure, que, présentée pour la première fois en cause d'appel, elle est irrecevable par application des dispositions de l'article 74 du code de procédure civile ;

Attendu, sur l'injonction de produire les éléments de la procédure pénale, qu'aucune explication véritablement précise n'est fournie qui soit de nature à faire admettre la prétention selon laquelle l'emprunteur n'aurait été en possession d'aucun document contractuel, ce qui aujourd'hui entraverait le plein exercice des droits de sa défense après l'avoir mis hier hors d'état de mesurer l'étendue d'engagements qu'il a pourtant accepté de souscrire de façon réitérée et à l'élaboration desquels il a eu l'occasion de participer personnellement ;

Attendu que la compétence du juge de l'exécution pour connaître des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, résulte des termes mêmes de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire et est vainement contestée relativement aux actes notariés ;

qu'il n'y a pas de lien nécessaire entre l'application de l'article 1318 du code civil et le faux, la première ne concernant que l'existence d'un vice de forme et pouvant donc être recherchée hors la procédure d'inscription de faux ;

qu'il ne résulte d'aucun élément du débat que l'acte notarié ici en cause ferait l'objet d'une procédure d'inscription de faux ;

Attendu, sur la validité de la copie exécutoire, qu'aucun des textes concernant la copie exécutoire de l'acte notarié, à savoir antérieurement au décret du 10 août 2005 -entré en vigueur le 1er février 2006- les articles 15 à 18 du décret du 26 novembre 1971 -devenus 32 à 37-, et l'article 1er de la loi du 15 juin 1976, n'édicte que la copie exécutoire doit contenir les annexes ;

qu'ils édictent en effet clairement et seulement que la copie exécutoire est une reproduction de « l'acte » lui-même, et non pas de l'acte et « des pièces qui sont annexées à l'acte » au sens de l'article 8 ancien devenu 21 du décret du 26 novembre 1971 ;

Attendu, sur l'application de l'article 1318 du code civil, que les dispositions de ce texte, selon lequel l'acte qui ne serait point authentique par l'incompétence ou l'incapacité de l'officier ou par un défaut de forme, vaut comme écriture privée s'il a été signé des parties, n'édictent pas une nullité ;

qu'elles ne le font ni directement, ni indirectement au regard des dispositions de l'article 23 ancien devenu 41 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971 qui n'édicte une nullité des actes notariés affectés de certains vices que dans le cas où il ne sont pas revêtus de la signature de toutes les parties ;

que l'action qui tend à en obtenir l'application n'est donc pas soumise à la prescription de l'article 1304 du code civil ;

Attendu, au fond, qu'après l'article 1317 du code civil qui définit l'acte authentique comme celui qui est reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises, l'article 1318 édicte que l'acte qui n'est point authentique par l'incompétence ou l'incapacité de l'officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écriture privée s'il a été signé des parties ;

Attendu que pas plus que les règles de compétence et de capacité de l'officier public visées à l'article 1318, le code civil n'a réglé des formes que doit revêtir l'acte authentique ni des solennités de l'article 1317 ;

que ces formes et solennités ont été définies, pour les notaires, par la loi du 25 ventôse de l'an XI contenant organisation du notariat et réglant des actes notariés, et à sa suite le décret 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires, ce dernier pris au visa des articles 1317 à 1321 du code civil, de l'article 37 de la constitution du 4 octobre 1958 qui habilite le pouvoir réglementaire, hors du domaine de la loi défini à l'article 34, à modifier après avis du Conseil d'État des textes de forme législative antérieurs, et de l'article 67 de la loi du 25 ventôse de l'an XI qui renvoie au décret la fixation des modalités de son application, dernièrement modifié le 10 août 2005 ;

que l'on ne peut par conséquent, relativement à ces formes et solennités, que s'en référer aux loi et décret qui les ont édictées ;

Attendu qu'en son article 23 ancien devenu 41, le décret a défini, parmi toutes celles qu'il édicte avec la loi du 25 ventôse de l'an XI, et outre diverses nullités spéciales d'effets limités (article 14, article 19...), certaines des formes des actes notariés qui sont requises à peine de nullité de l'acte s'il n'est pas revêtu de la signature de toutes les parties, sauf pour celui-ci à valoir comme écrit sous signature privée s'il est revêtu de la signature de toutes les parties contractantes, et sauf dans tous les cas et s'il y a lieu les dommages-intérêts contre le notaire contrevenant;

Attendu qu'en reprenant les termes de l'article 1318 du code civil lorsqu'il définit les vices de forme et de capacité de l'officier qui privent l'acte notarié de son caractère authentique mais le laissent valoir comme écriture privée s'il a été signé des parties contractantes, l'ancien article 23 devenu 41 se présente clairement comme pris sur ce point pour l'application dudit article 1318, conformément aux visas du décret;

qu'il en est de même, pour la compétence du notaire, des dispositions de l'article 9 du décret 71-942 du 26 novembre 1971 ;

qu'en ce sens, l'objet des dispositions de l'article 1318 du code civil n'est pas de sanctionner tout défaut de forme de l'acte authentique en le rétrogradant ou disqualifiant comme il est prétendu ;

qu'il est d'admettre à l'acte notarié irrégulier au regard des formes définies à l'article 41, et nul s'il n'est pas signé de toutes les parties, la force probante d'un acte sous seing privé s'il est signé de toutes les parties contractantes ;

Attendu enfin que non seulement le code civil n'a pas réglé les solennités et formes qu'il évoque de l'acte authentique, mais il ne résulte des termes des articles 1317 et 1318 du code civil aucune espèce d'indication sur celles-ci  ;

que l'on ne peut par conséquent, relativement à elles, que s'en référer aux loi et décret qui les ont édictées ;

que l'on ne peut par conséquent également que s'en tenir à ces loi et décret auxquels il n'appartient pas au juge d'ajouter, ce qui n'introduit dans l'ensemble du corps de règles aucune incohérence ou contradiction ni de fond ni de forme ;

que ce serait au contraire de donner à l'article 1318 du code civil le sens prétendu d'une sanction de toute irrégularité de forme qui introduirait une incohérence puisque alors l'article 23 ancien devenu 41 n'aurait pas lieu d'être, pas plus du reste que les autres nullités limitées édictées par le décret ;

Attendu qu'il en résulte au total que [C] [Z] n'est pas fondé à prétendre que l'application de l'article 1318 s'étendrait à toute irrégularité de forme et ne serait pas limitée aux seules prévisions de l'article 23 ancien devenu 41 du décret du 26 novembre 1971, ni que retenir le contraire reviendrait à faire prévaloir un texte réglementaire sur une loi au mépris de la hiérarchie des normes, ni non plus qu'il en résulterait que le décret du 26 novembre 1971 et les articles 1317 et 1318 du code civil s'en trouveraient vidés de toute substance ;

que ses autres moyens relatifs à l'importance de la procuration dans le processus d'établissement de l'acte notarié ou aux vérifications ultérieures que permet son annexion, sont inopérants aux fins prétendues dès lors que rien, ni dans le code civil ni dans le décret, n'autorise à étendre les dispositions de l'article 1318 du code civil au-delà des prévisions de l'article 23 ancien devenu 41 du décret du 26 novembre 1971 pris pour son application ;

Attendu de la sorte que de la combinaison des articles 23 ancien devenu 41 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971 et 1318 du code civil, il résulte que l'inobservation, par le notaire rédacteur, des obligations résultant de l'article 8 ancien devenu 21 du décret d'annexer les procurations à l'acte ou de mentionner dans l'acte le dépôt des procurations au rang des minutes, ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ;

Attendu, sur la nullité du contrat à raison de l'invalidité de la procuration, que la nullité de l'acte notarié de prêt, qui trouverait sa source dans l'absence de pouvoir du mandataire en raison de l'irrégularité prétendue de la procuration donnée par l'emprunteur, et non dans la signature en tant que telle de l'acte notarié qui n'a pas fait l'objet d'une procédure d'inscription de faux, ne peut être sanctionnée que par une nullité relative dès lors que la validité de ce pouvoir ne peut être contestée que par le mandant, lequel est en outre en droit de ratifier ce qui aurait été fait sans mandat valable ;

Attendu que la règle selon laquelle l'exception de nullité ne peut plus être invoquée lorsque le contrat a été exécuté n'opère que lorsque le débiteur ne peut plus invoquer la nullité d'un acte en raison de la prescription de l'action en nullité dont il est donc nécessaire de déterminer les conditions d'accomplissement ;

Attendu que le point de départ de la prescription de l'action en nullité d'un acte ayant reçu un commencement d'exécution est la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater la cause de nullité, ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci ;

Attendu que selon ce qui est soutenu, la procuration notariée reçue le 27 octobre 2004 par Maître [R], notaire associé à Aix-en-Provence, contient mandat donné par [C] [Z] à « tous clercs de notaire de l'étude de Maître [R], notaire à Aix-en-Provence avec faculté d'agir ensemble ou séparément » d'emprunter auprès de tout établissement financier de leur choix « jusqu'à concurrence de la somme de 205.721 € en une ou plusieurs fois, pour le temps, au taux et sous les conditions que le mandataire jugera convenables, telles que ces conditions résultent de l'offre de prêt signé ce jour par le mandant » (sic) ;

Attendu, sur la désignation du mandataire, qu'il est constant que Madame [Q] qui a assuré la représentation de [C] [Z] à l'acte notarié de prêt en vertu de cette procuration n'est pas clerc de notaire de l'étude, appellation réservée aux seuls collaborateurs de l'étude accomplissant des tâches juridiques avec une qualification adaptée, mais secrétaire de l'étude de Maître [R] ainsi que l'acte le précise expressément;

que l'irrégularité qui en résulte selon le moyen n'est pas apparente à la lecture de l'acte puisque la procuration n'est pas annexée à l'acte de prêt ;

Attendu, sur la divergence de dates, que l'offre de prêt de la CAMEFI, d'un montant de 67.345 € a été acceptée par [C] [Z] le 20 octobre 2004 selon les mentions et annexes de l'acte notarié de prêt du 14 décembre 2004 ;

que l'irrégularité qui résulterait de la discordance entre les deux actes notariés sur la date de l'offre de prêt n'est donc apparente au seul examen de la teneur de l'acte notarié de prêt que si celui-ci comporte la procuration en annexe, ce qui n'est pas le cas ;

Attendu qu'il en résulte que ce n'est qu'à la date de la révélation des irrégularités que la prescription a pu commencer à courir ;

qu'il n'est pas démontré par celui qui s'en prévaut, auquel incombe la charge de la preuve de la prescription qu'il invoque, que [C] [Z] qui soutient n'en avoir eu connaissance qu'à l'occasion des mesures d'exécution, aurait reçu d'une quelconque manière révélation des deux irrégularités en cause depuis plus de cinq ans au jour où il se prévaut du moyen ;

Attendu en conséquence que l'acquisition de la prescription n'est pas démontrée ;

Attendu au fond, sur l'absence de pouvoir de Madame [Q], qu'il est à bon droit soutenu par le notaire que l'intervention à l'acte d'une secrétaire notariale au lieu du clerc de notaire mandaté s'analyse en l'espèce considérée et au sein de l'étude de notaire désignée, non pas en une absence de pouvoir de la personne qui est intervenue, pour violation de l'article 1134 du code civil, mais en une substitution d'une personne par le mandataire dans la gestion qui lui était confiée, dont les conséquences sont réglées, non pas en termes de nullité des actes accomplis, mais de responsabilité par les dispositions de l'article 1994 du code civil afférentes au contrat de mandat;

que l'emprunteur qui n'a pas désigné une personne précisément dénommée mais s'est uniquement et de façon générale référé à la dénomination d'un emploi au sein de l'étude, qui recouvre certes une qualité synonyme de compétence, n'est pas fondé à prétendre que les actes accomplis sous couvert de ce mandat serait atteints de nullité du seul fait qu'ils l'ont été par une personne que le mandataire s'est substituée au sein de l'étude de notaire désignée où elle est également employée mais qui ne serait pas pourvue de cette compétence ;

que cette situation est réglée par l'article 1994 du code civil, soit que le pouvoir de se substituer quelqu'un n'ait pas été conféré par le mandant, soit qu'il l'ait été mais sans désignation d'une personne, et alors dans le cas où la personne substituée aurait été notoirement incapable, le mandataire répondant dans tous les cas de celui qu'il s'est substitué et le mandant pouvant dans tous les cas agir directement contre la personne que le mandataire s'est substituée ;

Attendu que le pouvoir donné expressément dans le mandat de « substituer et généralement faire le nécessaire » n'a assurément pas le sens que prétend lui imprimer [C] [Z], le mandat par lui-même étant de représenter et non de substituer, la substitution désignant l'opération définie à l'article 1994, de nature courante ;

Attendu que la circonstance que la représentation par Madame [Q] ne soit pas désignée à l'acte comme assurée par voie de substitution du clerc mandaté n'a pas pour effet de faire disparaître le fait en lui-même, le clerc de l'étude de M°[R] non désigné nominativement étant de fait substitué par une secrétaire ;

Attendu que le notaire soutient en outre à juste titre que [C] [Z] ne démontre pas qu'il aurait entendu faire de la compétence du mandataire une condition de validité du mandat ;

qu'il se contente d'affirmer avoir entendu être représenté par un mandataire doté de compétence juridique sans aucunement s'en expliquer, alors qu'il se réfère dans ses écritures à une formule de procuration en expliquant que d'autres notaires rédigent différemment en employant la formule « tous clercs ou employés », ce qui n'est pas dans le sens de la preuve ni d'une intention particulière de sa part, ni d'une consistance réelle de l'irrégularité qu'il prétend imputer à cette substitution de fait ;

qu'il n'explique pas quelle conséquence ou grief il serait résulté du défaut de compétence dont il prétend se prévaloir ;

Attendu, sur l'absence de mandat pour contracter le prêt litigieux, que selon les mentions de l'acte notarié de prêt du 14 décembre 2004 dressé au moyen de cette procuration et les pièces qui lui sont annexées, l'offre de prêt de la CAMEFI d'un montant de 67.345 €, émise le 1er octobre 2004 et reçue par voie postale le 9 octobre 2004, avait été acceptée par [C] [Z] le 20 octobre 2004, soit donc antérieurement à la procuration notariée ;

Attendu qu'au regard de la pluralité d'emprunts que vise expressément la procuration et des montants comparés des sommes visées aux deux actes, plus amples dans la procuration, rien n'indique qu'il faudrait considérer que la phrase de la procuration concernant une offre de prêt signée à sa date, le 27 octobre 2004, aurait désigné l'offre de prêt ici considérée par l'acte de prêt du 14 décembre 2004;

que l'irrégularité qui résulterait de ces discordances supposerait, en présence de l'imprécision de la rédaction dénoncée de la procuration, qui évoque une signature et non une acceptation et sans préciser l'origine de l'offre, d'établir la fausseté des documents produits par la banque concernant l'application des prescriptions de la loi Scrivener et annexés à l'acte de prêt ;

que [C] [Z] ne tente d'aucune manière de faire précisément cette démonstration, pas même en produisant des écritures de comparaison alors que l'apparence des pièces est au contraire dans le sens d'une écriture de sa main dans la lettre d'acceptation, y compris en ce qui concerne les dates ;

Attendu que les différences de dates entre procuration et acte de prêt pointées par le moyen ne sont pas de nature à caractériser une indétermination voire une absence de mandat ni une irrégularité de l'acte qui a été dressé par son moyen, là où :

non seulement la mention ci-dessus discutée -« l'offre de prêt signé ce jour par le mandant »- ne figure dans la définition du mandat qu'à titre illustratif des conditions du ou des emprunts que le mandataire reçoit mandat de contracter « sous les conditions qu'il jugera convenables », libellé dont la généralité ne contrevient pas aux dispositions de l'article 1988 du code civil, de sorte que cette phrase ne définit pas l'offre du prêt à passer en la forme notariée,

mais en outre [C] [Z], qui a reçu les fonds empruntés par cet acte, les a employés conformément à leur affectation contractuelle à l'acquisition et au financement des immeubles-mêmes qui sont visés à la procuration -un appartement dans l'ensemble [Adresse 3]-, et les a remboursés un temps conformément à l'échéancier établi par la banque et annexé à l'acte sans élever aucune protestation, exécutant ainsi ledit emprunt, n'élève présentement aucune discussion relativement aux-dites conditions du prêt, en sorte qu'il ne démontre pas que le mandat n'aurait pas été donné en vue de la passation de l'acte notarié litigieux concernant l'offre de prêt qu'il mentionne, ni que ledit mandat n'aurait pas été exécuté conformément aux prévisions en vue desquelles il avait été consenti ;

Attendu en outre que la banque et le notaire sont fondés à soutenir que le défaut de conformité au mandat des engagements contractés par le mandataire n'est pas en tant que tel sanctionné de nullité par la loi-ce qui exclut l'application des dispositions de l'article 1338 du code civil dont [C] [Z] prétend se prévaloir des conditions- qui énonce seulement, aux termes de l'alinéa 2 de l'article 1998 du code civil, que le mandant ne peut être tenu de ce qui a été fait au delà du pouvoir qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement ;

et attendu qu'il est constant que [C] [Z] a reçu les fonds, les a employés conformément à l'acte, s'est comporté pendant plusieurs années en propriétaire du bien financé et en a perçu les revenus tout en remboursant l'emprunt dans les termes des échéanciers de remboursement communiqués par la banque et annexés à l'acte notarié de prêt, ce dont il résulte que la banque et le notaire sont fondés à soutenir qu'il a ainsi ratifié sans équivoque les engagements contractés par son mandataire sur les termes et conditions desquels ils n'a jamais élevé aucune critique et ne le fait toujours pas ;

Attendu que le caractère abusif de la saisie immobilière engagée par la banque n'est pas démontré alors qu'il est soutenu en référence à un caractère qualifié frauduleux du titre qui vise en fait une opération d'ensemble à laquelle la participation en la circonstance de la banque, qui la conteste, n'est pas un fait avéré à ce jour et que ne suffisent pas à traduire les éléments du litige soumis à l'examen de la Cour ;

Attendu qu'il suit de ces motifs que la demande de dommages-intérêts de [C] [Z] n'a pas de fondement ;

Attendu qu'il suit de l'ensemble de ces motifs que les moyens opposés par [C] [Z] à la saisie-attribution pratiquée par la CAMEFI sont inopérants et que la banque justifie disposer d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible ;

que le jugement dont appel est donc réformé ;

Attendu que Maître [R] et la SCP [R] n'établissent pas le caractère fautif des actions et défenses de [C] [Z] ;

Attendu qu'aux termes de l'article 331 du code de procédure civile, un tiers peut être mis en cause soit aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d'agir contre lui à titre principal, soit par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement ;

que l'objet des défenses de [C] [Z] tendait pour une part importante à la contestation de la mesure prise par la banque au moyen de la contestation de la régularité de l'acte notarié ;

qu'il s'ensuit que la CAMEFI était recevable en ses appels en intervention forcée du notaire afin qu'il apporte toutes explications sur ses actes et sa mise en cause, et de la sorte afin de lui rendre commun le jugement ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement dont appel et, statuant à nouveau,

Déclare [C] [Z] irrecevable en sa demande de sursis à statuer, et mal fondé en sa demande de communication de pièces, en sa contestation tendant à l'absence de titre exécutoire à raison du défaut d'annexion à l'acte de prêt de leur procuration, en sa demande en nullité du prêt à raison d'une absence de pouvoir, ainsi qu'en sa demande de dommages-intérêts pour abus de saisie ;

En conséquence, le déboute de toutes ses demandes tendant à la mainlevée de la saisie-attribution à pratiquée le 19 juin 2010 entre les mains de la S.A.R.L. SGCR ;

Juge que la CAISSE MEDITERRANEENNE DE FINANCEMENT -CAMEFI- justifie d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et valide en conséquence la saisie-attribution contestée ;

Déclare le présent arrêt commun à Maître [O] [R] et la SCP [R] ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples;

Condamne [C] [Z] aux dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du code de procédure civile pour les dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 15e chambre a
Numéro d'arrêt : 11/06651
Date de la décision : 22/11/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 5A, arrêt n°11/06651 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-22;11.06651 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award