COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
11e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 14 NOVEMBRE 2013
N° 2013/543
Rôle N° 12/09535
[F] [V]
C/
SARL LA CORRIDA
SARL CABINET [N] [S]
Grosse délivrée
le :
à :
BERGER GENTIL
CASTELLAN
AUTRAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 05 Avril 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 09:13177.
APPELANT
Monsieur [F] [V]
né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Blandine BERGER-GENTIL, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES
SARL LA CORRIDA,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Nicolas CASTELLAN, avocat au barreau de MARSEILLE
SARL CABINET [N] [S], demeurant [Adresse 3]
dont le siège social est sis par Me Nicolas AUTRAN, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 08 Octobre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Anne CAMUGLI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre
Mme Anne CAMUGLI, Conseiller
M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Anaïs ROMINGER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2013,
Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant acte du 1er décembre 2002, Mme [H] [V] a donné à bail à usage commercial à la société LA CORRIDA des locaux situés a à [Localité 2] du 1er décembre 2002 au 30 novembre 2011 pour une activité de restaurant pizzeria moyennant un loyer annuel de 9140 EUR.
Ce bail avait été précédé d'un contrat de location du 1er décembre 1993 qui avait été cédé le 15 octobre 1996 avec le fonds de commerce à la société LA CORRIDA.
Les 16 octobre et 13 novembre 2009, la société LA CORRIDA a fait assigner M. [F] et Madame [H] [V] devant le tribunal de grande instance de Marseille aux fins, à titre principal,de voir juger recevable son opposition aux commandements de payer délivrés respectivement le 22 septembre 2009 et le 16 octobre 2009 par les bailleurs.
Par acte du 18 juin 2010, M. [F] [V] venant aux droits de Mme [H] [V], décédée le [Date décès 1] 2007, a fait citer en intervention forcée la SARL cabinet [N] [S] qui avait reçu mandat de gestion immobilière et dont il invoquait la responsabilité du retard a procéder à la régularisation de charges qu'invoquait la locataire, aux fins d'obtenir à titre principal sa condamnation au paiement de la somme de 9072 EUR au titre des charges pour la période 1997 et 2004.
La société LA CORRIDA invoquait pour conclure au rejet des prétentions adverses,la prescription par cinq ans de l'action en paiement, le fait qu'on lui réclamait des charges visant un appartement objet d'un précédent bail auquel il avait été mis fin en 2005, que les charges d'eau lui étaient réclamées alors que le contrat de bail ne faisait pas mention de la consommation d'eau.
Elle formait des demandes reconventionnelles indemnitaires.
M. [F] [V] concluait au rejet des demandes adverses, demandait le bénéfice de la clause résolutoire, l'expulsion de la société LA CORRIDA et sa condamnation au paiement d'une somme de 13 981,69 euros au titre des charges pour la période d'octobre 2004 au 31 décembre 2010, une indemnité d'occupation de 5500 EUR par mois et 5000 EUR pour résistance abusive.
À titre subsidiaire il sollicitait l'expulsion de la société LA CORRIDA sur la base d'un refus de renouvellement sans indemnité d'éviction pour motif grave et légitime qu'il avait fait signifier le 26 mai 2011, le locataire s'obstinant selon lui à refuser de régulariser la situation au titre des charges.
Il sollicitait également la condamnation de la SARL cabinet [N] [S], son mandataire dans la gestion du bien, au paiement de la somme de 13 264 EUR au titre des charges dues pour la période de 1997 au 16 octobre 2004 outre 5000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 5 avril 2012, le tribunal de grande instance de Marseille a
Condamné
la société LA CORRIDA à payer avec intérêts au taux légal à M. [F] [V] la somme de 568,71 euros au titre de la régularisation de charges pour la période du 16 octobre 2004 au 31 décembre 2010.
la SARL cabinet [N] [S] à payer à M. [F] [V] avec intérêts au taux légal à compter de la décision la somme de 1316,55 euros au titre de la régularisation de charges de l'année 97 au 16 octobre 2009.
Dit que les commandements de payer du 22 septembre et 16 octobre 2009 sont sans effet et qu'il n'y a pas lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire.
Ordonné l'exécution provisoire.
M. [F] [V] a relevé appel de la décision le 29 mai 2012.
Par conclusions d'appelant déposées et signifiées le 11 février 2013, il entend à titre principal voir
juger valable le commandement de payer délivré le 16 octobre 2009
constater le jeu de la clause résolutoire contenue au bail,
ordonner l'expulsion du preneur
condamner la société LA CORRIDA au paiement
de la somme de 17.820,25euros au titre des charges locatives pour la période allant du 16 octobre 2004 au 31 décembre 2012 avec intérêts légaux à compter du dit commandement,
d'une indemnité d'occupation mensuelle de 5500 EUR par mois jusqu'à la libération des lieux outre d'une somme de 5000 EUR à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
À titre subsidiaire, il entend voir juger valable le congé délivré le 26 mai 2011, se prévaut d'un refus de renouvellement pour motif grave et légitime, le preneur prolongeant sa carence en refusant de s'acquitter des charges ; il sollicite que le congé délivré le 26 mai 2011 reçoive son plein effet et d'être dispensé du règlement de l'indemnité d'éviction, réitère sa demande d'expulsion et de condamnation à paiement des mêmes sommes.
Dans l'hypothèse ou la cour considérerait que les commandements seraient privés d'effet et que le bail n'est pas résilié, il entend voir juger que la SARL cabinet [N] [S] a engagé sa responsabilité contractuelle en laissant les charges usuelles de consommation d'eau à la charge du bailleur et ne faisant aucune diligence pour en assurer le recouvrement.
Il sollicite alors la condamnation de celle-ci au paiement de la somme de 13.264 euros au titre des charges réglées par le bailleur de 1997 au 16 octobre 2004 à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.
À titre infiniment subsidiaire dans l'hypothèse ou la cour considérerait que le bail n'est pas résilié et que le congé avec refus de renouvellement ne peut prendre effet, il entend voir juger que le mandataire a engagé sa responsabilité contractuelle en laissant des charges usuelles de consommation d'eau à la charge du bailleur et en ne faisant par ailleurs aucune diligence pour en assurer le recouvrement, condamner dans cette hypothèse la SARL cabinet [N] [S] au paiement de la somme de 31.084,25 euros correspondant aux charges usuelles réglées par le bailleur sur la période de 1997 au 31 décembre 2012.
Il sollicite :
-la condamnation solidaire de la SARL cabinet [N] [S] et de la SARL LA CORRIDA au paiement d'une somme de 5000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens
-la condamnation de la SARL LA CORRIDA au paiement du commandement du 16 octobre 2009 y compris le droit proportionnel visé au dit commandement.
-la condamnation de la SARL cabinet [N] [S] au paiement du commandement délivré le 22 septembre 2009.
Il estime justifier des charges réclamées par l'ensemble des factures du Groupe des eaux de [Localité 2] pour les années 2004 à 2012 incluses ainsi que des avis de taxe foncière. Il soutient que la société LA CORRIDA est contractuellement tenue au paiement de l'intégralité du foncier, ce qu'elle aurait reconnu mais qu'elle s'abstient de régler sa dette à ce titre pour les années postérieures à 2009, ce qui constitue une faute contractuelle légitimant le constat du jeu de la clause résolutoire. Il précise qu'il a calculé la créance en fonction des tantièmes que représente le local commercial et après déduction de la taxe de l'appartement contigu. Il réclame à ce titre la somme de 9.823,60 euros.
S'agissant des charges de consommation d'eau, il soutient que le locataire est contractuellement tenu à leur paiement, que le contrat de location-gérance entre la société LA CORRIDA et le locataire gérant met d'ailleurs à la charge de ce dernier le paiement des charges locatives dont les consommations d'eau, que la société LA CORRIDA règle d'ailleurs sa consommation d'eau en partie comme la taxe foncière en réglant une provision trimestrielle sur charges de 500 EUR. Il invoquait à ce titre un montant de 17.820,25 euros au 31 décembre 2012.
Il fait valoir que la faute du mandataire qui a omis de réclamer les charges au locataire peut d'autant moins constituer un droit au profit de cette dernière que le contrat les met expressément à la charge de celle-ci, que toutes les charges résultant de l'exploitation ou de l'occupation des lieux sont par principe des charges locatives,
Par conclusions d'intimé et d'appel incident numéro deux déposées et signifiées le 3 avril 2013, la société LA CORRIDA conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a :
Dit n'y avoir lieu à constater l'acquisition de la clause résolutoire par l'effet des commandements des 22 septembre et 16 octobre 2009 et que le retard de la locataire dans le paiement de la régularisation de charges pour les cinq années précédentes ne constituait pas un manquement suffisamment grave pour motiver la délivrance d'un congé sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction en l'État du décompte approximatif établi par le bailleur lors de la délivrance du commandement de payer et de sa carence durable dans l'exécution de son obligation de régulariser les charges.
Rejeté les autres demandes de M. [F] [V].
Elle sollicite la réformation du jugement en ce qu'il
l'a condamnée au paiement de la somme de 568,71 euros au titre de la régularisation des charges pour la période du 16 octobre 2004 au 31 décembre 2010,
a rejeté sa demande reconventionnelle indemnitaire.
Elle entend voir
constater que le commandement de payer du 22 septembre 2009 et celui du 16 octobre 2009 sont irréguliers pour n'avoir pas reproduit la clause résolutoire stipulée dans le bail,
juger en conséquence que ces commandements sont nuls et de nul effet,
juger qu'il n'y a pas lieu à constatation de l'acquisition de la clause résolutoire,
constater que le décompte établi par la SARL cabinet [N] [S] au titre des charges locatives régularisées pour l'année 2012 révèle qu'elle a réglé par provision au titre des charges locatives 2012, une somme de 2000 EUR, que les impôts fonciers représentent une charge de 2174 EUR que la somme à régler au titre de la régularisation est donc de 174 EUR, somme qui a été réglée le 3 avril 2013,
rejeter en conséquence la demande de M. [F] [V] d'une somme de 15 278,16 euros au titre des charges locatives, juger que celui-ci ne pouvait de bonne foi maintenir les effets du premier commandement de payer et délivrer un deuxième commandement de payer,
qu'il ne pouvait davantage pour motiver les deux commandements de payer, réclamer le paiement de charges pour une période prescrite, concernant des frais non visés au bail et sur une régularisation de charges intervenant de plus 12 ans après l'entrée dans les lieux de preneur,
juger que le bailleur ne pouvait non plus en cours de procédure devant le tribunal de grande instance de Marseille faire délivrer le 26 mai 2011 un congé avec refus de renouvellement avec effet au 30 novembre 2011 sans offre d'indemnité d'éviction au motif de la prétendue infraction consécutive au défaut de paiement de charges dont il était alors question devant le tribunal,
constater que nonobstant l'exécution provisoire du jugement, M. [F] [V] continue de solliciter le paiement de la consommation d'eau dans le cadre de sa demande de régularisation de charges du 3 juillet 2012 et de celle de l'année 2012,
juger en conséquence qu'il a agi de façon déloyale à l'égard de son locataire,
condamner celui-ci au paiement de la somme de 50. 000 EUR à titre de dommages et intérêts outre celle de 8.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle répète que le montant des charges trimestrielles est fixé forfaitairement à 500 EUR, que le bail ne prévoit qu'un paiement ou remboursement annuel par le locataire à l'exclusion de provision, qu'aucun retard au défaut de paiement des charges n'a été constaté avant les rappels constitués par les commandements.
Elle réitére principalement ses objections relatives à la prescription des charges sur la période 1997 à 2008 et pour la totalité de l'année 2004, estime que sont réclamées des charges relatives à un appartement qui ne fait pas l'objet du bail commercial visé par le premier commandement, répète que seul le remboursement de la taxe foncière incombe au locataire, que les consommations d'eau ne sont pas dues et n'ont donné lieu à aucune facturation pendant plus de 12 ans, rappelle que les commandements n'ont été accompagnés lors de leur délivrance d'aucune pièce justifiant le paiement par le bailleur de charges locatives récupérables, soutient que les factures d'eau ne sont pas mises à sa charge par le bail de sorte que la clause résolutoire ne pouvait être mise en oeuvre, la provision de 500 EUR par trimestre versée depuis son entrée dans les lieux ne correspondant qu' à la taxe foncière, que sont réclamées des charges relatives à un appartement qui ne fait pas l'objet du bail commercial visé par le commandement de payer.
Par conclusions récapitulatives notifiées et déposées le 7 février 2013, la SARL cabinet [N] [S] conclut à la réformation du jugement entrepris, faisant valoir que la société LA CORRIDA est contractuellement débitrice de toutes les charges y compris les charges d'eau appelées à son encontre, que les commandements des 22 septembre et 16 octobre 2009 sont donc fondés et doivent produire leur entier effet.
Elle entend voir rejeter les demandes de la société LA CORRIDA, demande acte de ce qu'elle s'en porte à justice sur l'ensemble des demandes du bailleur à l'exception de celle consistant à lui reprocher d'avoir failli à ses obligations de mandataire , elle conclut par conséquent à la réformation qu'a été retenue à sa charge une faute de nature à engager sa responsabilité et conclut au rejet des demandes de M.[V] à son encontre.
Si par impossible la cour devait faire droit au principe des réclamations du bailleur à son encontre, elle estime ses demandes indemnitaires injustifiées et conclut également à leur rejet.
Elle entend voir réformer le jugement déféré en ce qu'il a mis à sa charge une somme au titre des charges du local, et à titre infiniment subsidiaire elle conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a limité la somme mise à sa charge à 1.316,55 euros seule somme susceptible de lui être réclamée s'il était établi qu'elle avait commis une faute dans l'exécution de son mandat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 septembre 2013.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la régularité du commandements du 16 octobre 2009.
Le commandement du 16 octobre 2009 dont se prévaut M. [F] [V] aux termes de ces dernières écritures sera jugé régulier en ce qu'il vise et reproduit la clause résolutoire insérée au bail qui prévoit qu'en cas de non-respect de cette clause et un mois après un commandement demeuré infructueux, le bail sera résilié de plein droit ,en ce qu'il reproduit en outre textuellement les dispositions de l'article L 145-41 du code de commerce.
Sur les charges incombant au locataire. :
Le jugement déféré a justement rappelé la liberté des parties en matière de bail commercial quant à la définition et l'imputation des charges récupérables et que les impôts et taxes dont il était prévu par le bail qu'ils seraient intégralement à la charge du preneur sont explicitement distincts des charges récupérables.
Il a cependant considéré que la clause du bail relative à l'usage, l'entretien, les réparations et travaux fait exclusivement et sans la moindre ambiguïté référence aux obligations du locataire concernant l'entretien de la chose louée et ne stipule pas, par conséquent, le principe de l'obligation par le même locataire au remboursement de certaines charges. Or, cette même clause, également relative à l'usage du bien loué, mentionne, outre l'obligation d'entretien, celle également imposée au locataire,de « supporter toutes les charges et obligations imposées au locataire par la loi, les usages et règlements ».
S'il n'y a pas lieu, a peine de dénaturation, d'interpréter les clauses d'un contrat qui ont un sens clair et précis, le bail commercial liant les parties impose donc au locataire de supporter à la fois les charges d'impôts , taxes et d'entretien mais également les charges imposées au locataire par la loi, les usages et règlements, lesquelles s'entendent essentiellement des charges liées à l'exploitation, à l'entretien et au fonctionnement de l'immeuble, la décision critiquée rappelant exactement qu'il est constant et habituel que le locataire supporte les charges correspondants à un service qui lui est rendu.
Le tribunal a donc fait justement application de l'article 1160 du Code civil en recherchant en l'espèce, la commune intention des parties, considérant que, faute d'avoir durablement réclamé le paiement de sa consommation d'eau au locataire, le bailleur ne pouvait se prévaloir de la volonté des parties de mettre à la charge du preneur les charges récupérables.
Or, l'acte de vente de fonds de commerce de la SARL PH à la SARL la corrida en date du 15 octobre 1996 met expressément à la charge du cessionnaire l'obligation d'acquitter à compter de l'entrée en jouissance les contributions, impôts, taxes, impositions locales perçues y compris au titre de la taxe foncière mais également les « autres charges quelconques de toute nature auxquels le fonds vendu est et pourra être assujetti' » .
Le contrat du 4 mai 2006 par lequel la SARL LA CORRIDA a confié la location gérance de son fonds de commerce à M. [P] , impose en outre au gérant de continuer les abonnements concernant le gaz électricité le téléphone et l'eau et d'acquitter à compter de son entrée en jouissance, en sus du loyer stipulé, les impôts et contributions, taxes professionnelles et toutes taxes et autres charges auxquelles est et pourra être assujetti le fonds de commerce objet du contrat même si ces charges, impôts et contributions sont établies au nom du bailleur. Le contrat du 4 mai 2006 rappelle d'autre part que le fonds est exploité en vertu d'un acte sous-seing privé du.... (1er août 2005) pour une durée de neuf années consécutives du 1er décembre 2002 jusqu'au 30 novembre 2011, moyennant, outre diverses charges et conditions, un loyer en principal de 761,66 EUR mensuel « en sus du remboursement des charges locatives ».
Dans un courrier adressé le 23 mars 2006 à Mme [J] , la SARL cabinet [N] [S] fait part à cette dernière de l'accord des propriétaires à la location-gérance qu'elle projette à la condition que celle-ci reste responsable des loyers et charges et lui demande la communication du dernier index du compteur d'eau afin de permettre de faire les comptes à la date de la mise en gérance. Enfin dans sa lettre du 6 octobre 2009 adressé à la SARL cabinet [N] [S] à réception du commandement du 22 septembre 2009 portant en particulier sur les charges d'eau, la SARL LA CORRIDA se contente de rappeler que les arriérés de loyers et charges sont soumis à prescription quinquennale pour s'opposer aux réclamations concernant la période antérieure au 22 septembre 2004 mais ne conteste pas le principe de sa dette au titre des dites charges.
Il résulte d'autre part des pièces produites aux débats que la provision trimestrielle versée par la locataire de 2004 à 2008 était d'un montant de 152,45 euros jusqu'au mois de juin 2009 puis de 500 EUR à partir de cette date. La SARL LA CORRIDA soutient des lors à tort avoir versé une provision de « 500€ par trimestre » depuis son entrée dans les lieux ».
En soutenant en outre que la provision versée correspondrait au montant dû au titre de la taxe foncière, elle procède par pure affirmation , aucune corrélation exacte ne reliant ces versements à la taxe foncière plutôt qu' à des charges d'autre nature. Au contraire , il apparaît qu'alors que le montant des taxes foncières s'est élevé à 1180,99 euros sur l'année 2010 et 1211,49 euros sur l'année 2011, le preneur a réglé deux fois 2000 EUR sur les années considérées soit un montant de provision excédant très largement sa dette au titre des charges dont elle se reconnaît redevable.
Il sera considéré que les éléments précités traduisent la volonté contractuelle des parties en ce que les charges et obligations imposées au locataire par la loi, les usages et règlements au sens du contrat incluent les charges de consommation d'eau, le fait que le bailleur se soit durablement abstenu de les réclamer formellement au locataire n'étant pas de nature à réduire à néant l'obligation de celui-ci.
Le jugement déféré sera par conséquent infirmé en ce qu'il a retenu que la SARL LA CORRIDA n' était pas tenue au paiement des charges liées à la consommation d'eau.
Sur le montant des sommes dues.
Le jugement déféré a rappelé à bon droit que la demande en paiement de charges se prescrit par cinq ans, ladite prescription ne pouvant avoir été interrompue par le courrier précité du 23 mars 2006.
La période sur laquelle la SARL LA CORRIDA doit être jugé débitrice des charges s'entend par conséquent de celle courant du 16 octobre 2004 au 31 décembre 2012, ce dont convient M. [F] [V] dès lors qu'il ne se prévaut plus que du commandement de payer du 16 octobre 2009.
Les justificatifs produits aux débats par M. [F] [V] révèlent une dette de 9.823,60 euros au titre de la taxe foncière calculée en fonction des tantièmes que représente le local commercial, distinct de l'appartement contigu, à compter du 16 octobre 2004, contrairement aux affirmations de la locataire. Celle-ci qui se reconnaît redevable des impôts contributions et taxes diverses sur les années considérées ne justifie pas de paiement correspondant à l'exception d'une régularisation au titre de l'année 2012.
L'appelant justifie d'autre part d'une créance de 17.866,05euros au titre de la consommation d'eau, affirmant sans être utilement contesté à cet égard qu'un compteur de la Société des eaux de Marseille est placé à l'intérieur des locaux donnés à bail tandis qu'un second compteur divisionnaire a été placé dans l'appartement du dessus qui n'est plus donné à bail depuis le 14 octobre 2005.
Il en résulte une dette cumulée justifiée d' un total de 27.689,65euros.
La SARL LA CORRIDA a reçu communication des éléments à l'appui du décompte du bailleur étant observé que dans son courrier du 6 octobre 2009 en réponse au commandement de payer du 22 septembre 2009, elle se contentait invoquer la prescription d'une partie de la dette sans formuler d'autres objections.
M. [F] [V] fait d'autre part justement observer que la locataire ne peut exiger que le paiement des charges soit déclaré prescrit pour la période antérieure au mois d'octobre 2004 et prétendre dans le même temps qu'il y aurait lieu de déduire des sommes qu'elle reconnaît devoir, les versements effectués par elle sur la période antérieure à octobre 2004.
Après déduction des sommes versées par la locataire au titre de provisions sur charges sur la période du 16 octobre 2004 au 31 décembre 2012 soit 9869,40 euros, la SARL LA CORRIDA sera jugée redevable de la somme, sur la même période , de 17.820,25 euros (27.689,65 euros -9869,40 euros).
Les intérêts seront dus au taux légal , à compter du commandement de payer délivré le 16 octobre 2009 sur la somme de 15 997,32 euros et à compter du présent arrêt sur le surplus .
Le commandement du 16 octobre 1009 sera par conséquent déclaré valable et doit produire effet dans la limite de la créance présentement retenue.
Il y a lieu par conséquent de constater le jeu de la clause résolutoire contenue au bail, d'ordonner l'expulsion de la SARL LA CORRIDA ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, et de condamner la SARL LA CORRIDA au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 5500 EUR jusqu'à la libération complète des lieux.
Il n'y a pas lieu en revanche d'accueillir la demande indemnitaire de M. [F] [V] pour résistance abusive, en l'absence de préjudice distinct de celui d'ores et déjà réparé par la reconnaissance de l'arriéré locatif.
Sur les demandes dirigées contre la SARL Cabinet [N] [S]:
Si le jugement déféré a à bon droit, retenu le principe de la responsabilité contractuelle de la SARL [N] [S] qui a laissé prescrire l'action de son mandant en recouvrement des charges antérieures à 2004, la précédente bailleresse a elle-même durablement négligé de se préoccuper de ses intérêts, s'abstenant de la gestion minimale qui incombe à tout propriétaire , manquant notamment pendant plusieurs années d'interpeller son mandataire sur l'insuffisance de ses comptes rendus et versements.
Le préjudice directement résulté des manquements du mandataire sera dans ces conditions arbitré à la somme forfaitaire de 2.000 euros, somme incluant les frais du commandement délivré le 22 septembre 2009.
Sur l'article 700 du code de procédure civile .
Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de M. [F] [V] seul, l'intégralité des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
La somme de 2500 EUR lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement,
Infirme le jugement déféré.
Déclare valable le commandement de payer délivré le 16 octobre 2009 à la SARL LA CORRIDA.
Condamne la SARL LA CORRIDA à payer à M. [F] [V] la somme de 17.820,25 euros euros au titre des charges locatives pour la période du 16 octobre 2004 au 31 décembre 2012 avec intérêt au taux légal sur la somme de 15 997,32 euros à compter du 16 octobre 2009.et à compter du présent arrêt sur le surplus .
Constate l'acquisition de la clause résolutoire du bail à compter du 17 novembre 2009.
Ordonne l'expulsion de la SARL LA CORRIDA ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique.
Condamne la SARL LA CORRIDA à payer à M. [F] [V] une indemnité mensuelle d'occupation de 5500 EUR jusqu'à complète libération des lieux.
Condamne la SARL cabinet [N] [S] à payer à M. [F] [V] la somme de 2000 EUR à titre de dommages et intérêts.
Rejette toute autre demande.
Condamne la SARL LA CORRIDA à payer à M. [F] [V] la somme de 2500 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT