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31/10/2013 | FRANCE | N°12/19831

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 31 octobre 2013, 12/19831


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 31 OCTOBRE 2013

FG

N° 2013/624













Rôle N° 12/19831







[B] [T]

SARL CONFORT SERVICE





C/



[M] [H]





















Grosse délivrée

le :

à :





SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE





Me Maud DAVAL-GUEDJ





Décision déférÃ

©e à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix en Provence en date du 06 Septembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/5914.





APPELANTS





Monsieur [B] [T]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 2] (Algérie),

demeurant [Adresse 1]





représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP CO...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 31 OCTOBRE 2013

FG

N° 2013/624

Rôle N° 12/19831

[B] [T]

SARL CONFORT SERVICE

C/

[M] [H]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE

Me Maud DAVAL-GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix en Provence en date du 06 Septembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/5914.

APPELANTS

Monsieur [B] [T]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 2] (Algérie),

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE , plaidant par Me Fanny LAPORTE avocat au barreau de MONTPELLIER

SARL CONFORT SERVICE

immatriculée au RCS de NIMES sous le numéro 400 170 221,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par [J] [I] [S] épouse [T] en qualité de mandataire ad hoc désignée par le Tribunal de commerce de NIMES par ordonnance du 15 Mars 2010 , prise en la personne de son gérant e n exercice domicilié audit siège

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN - GUEDJ - MONTERO - DAVAL-GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE , plaidant par Me Fanny LAPORTE avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME

Maître [M] [H],

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Philippe HERVE du cabinet FABRE GUEUGNOT , avocat au barreau de PARIS.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2013,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

Par jugement du 8 décembre 1999, le tribunal de commerce de Nîmes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la Sarl Confort Service, société de vente en gros, installation, entretien et réparation de chaudières et de matériel de chauffage, dont le siège est à Nîmes. Ce jugement a commis M°[M] [H] comme liquidateur judiciaire.

Par jugement du 6 novembre 2000, le tribunal de commerce de Nîmes a confirmé M.[B] [T], gérant de la Sarl Confort Service, à combler l'insuffisance d'actif de cette société à hauteur de 200.000 francs.

Par arrêt du 28 novembre 2002, la cour d'appel de Nîmes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de M.[B] [T].

La liquidation judiciaire de M.[T] a été close par extinction du passif.

Le 30 juillet 2011, M.[B] [T] et la Sarl Confort Service, agissant par Mme [S], mandataire ad'hoc, ont fait assigner M°[M] [H] devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en responsabilité civile professionnelle.

Par jugement en date du 6 septembre 2012, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :

- déclaré l'action de la Sarl Confort Service recevable,

- débouté la Sarl Confort Service et M.[B] [T] de leurs demandes en dommages et intérêts,

- ordonné la suppression des conclusions de M.[B] [T] et de la Sarl Confort Service des phrases suivantes, écrites à propos de M°[H] : dans le seul but d'obtenir des droits proportionnels sur la vente de la maison$gt;$gt;, a utilisé des stratèges peu avouables$gt;$gt;, a clôturé Confort Service pour insuffisance d'actif, uniquement par vengeance et pour nuire au débiteur$gt;$gt; et n'a jamais hésité à mentir et à se parjurer malgré son statut de liquidateur judiciaire$gt;$gt;,

- condamné M.[B] [T] à payer à M°[H] la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts,

- condamné M.[B] [T] à payer à M°[H] la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M.[B] [T] aux dépens qui seront recouvrés par la SCP KLEIN RIBON conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration de M°Laurent COHEN, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, en date du 19 octobre 2012, M.[B] [T] et la Sarl Confort Service, représentée par Mme [N] [S], mandataire ad'hoc, ont relevé appel de ce jugement.

Par leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 26 août 2013, M.[B] [T] et la Sarl Confort Service demandent à la cour d'appel, au visa des articles 1382 du code civil, des dispositions du titre 6 du code de commerce, des articles L.812-1 et suivants du code de commerce, de :

- débouter M°[H] de ses prétentions,

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'action engagée par Mme [N] [S] épouse [T] ès qualité de mandataire ad'hoc de la Sarl Confort Service,

- pour le surplus, réformer le jugement,

- dire que M°[H] a commis diverses fautes dans l'exécution de son mandat de liquidateur judiciaire qui lui avait été confié dans le cadre de la procédure collective de la Sarl Confort Service et de celle de M.[T],

- dire que ces fautes sont à l'origine du préjudice subi par M.[T] et de la Sarl Confort Service,

- dire que la responsabilité civile professionnelle de M°[H] est engagée,

- condamner M°[H] à payer à M.[T] et à la Sarl Confort Service prise en la personne de Mme [N] [S] épouse [T], mandataire ad'hoc, la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi et de 160.000€ pour le préjudice matériel subi,

- débouter M°[H] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M°[H] au paiement de la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de la SCP Hervé COHEN, Laurent COHEN, Paul GUEDJ, Jean-Philippe MONTERO et Maud DAVAL-GUEDJ, avocats.

M.[T] et le mandataire ad'hoc de la société Confort Service estiment que M°[H] a manqué de diligences pour réaliser l'actif, a commis des erreurs dans l'évaluation du passif, a demandé de manière injustifié l'extension de la procédure collective à M.[T], a commis des erreurs dans les redditions de comptes, a exigé des droits proportionnels disproportionnés, a manqué de diligence pour procéder au règlement des créanciers, s'est trompé en fin de procédure en demandant la clôture pour insuffisance d'actif au lieu de clôture pour extinction du passif, a retardé la clôture de la procédure.

M.[T] estime avoir subi un préjudice moral et perdu la chance de relancer une activité.

Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 5 juillet 2013, M°[M] [H], mandataire judiciaire, demande à la cour d'appel de :

- réformer le jugement en ce qu'il a dit recevable l'action de la Sarl Confort Service,

- déclarer cette action irrecevable,

- pour le surplus, confirmer le jugement,

- à titre subsidiaire, constater que M.[B] [T] et la Sarl Confort Service ne rapportent pas la preuve d'une faute commise par M°[H] dans l'exercice de sa mission, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre ces deux éléments,

- en conséquence, les débouter de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner M.[B] [T] et la Sarl Confort Service à payer à M°[H] une somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens, qui seront recouvrés par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY et LEVAIQUE.

M°[H] fait observer que la société Confort Service est radiée du registre du commerce et des sociétés et que le mandataire ad'hoc n'a pas pouvoir d'engager une action en responsabilité délictuelle au nom de la société.

M°[H] fait remarquer que les décisions prises dans le cadre de la procédure collective sont des décisions judiciaires définitives.

M°[H] considère qu'il n'a pas fait preuve de manque de diligences pour réaliser l'actif. Il fait valoir que le passif a été vérifié. Il fait observer que l'extension de la procédure à M.[T] est le résultat de décisions judiciaires. Il estime avoir accompli toutes diligences pour régler les créanciers et que la procédure n'a pas été ralentie de son fait, l'erreur matérielle commise n'ayant pas eu de conséquences. Il estime qu'il n'y a pas de préjudice en lien avec les fautes prétendues.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 19 septembre 2013.

MOTIFS,

La partie du dispositif qui ordonne la suppression de certaines mentions des conclusions de première instance de M.[T] et de la société Confort Service n'est pas discutée.

-I) Sur la recevabilité de l'action de la société Confort Service :

La société Confort Service est une société à responsabilité limitée qui était inscrite au registre du commerce et des sociétés de Nîmes sous le numéro 400 170 221 95 B 206, avec pour objet social la vente en gros et détail l'installation l'entretien et la réparation de chaudières et de matériel de chauffage.

Cette société a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire qui a été clôturée par jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 28 septembre 2005. Cette clôture est intervenue pour insuffisance d'actif, même si M°[H] a reconnu avoir fait une erreur dans la rédaction de sa requête en clôture.

A la suite de ce jugement de clôture de la liquidation judiciaire, la société a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 29 septembre 2005.

Par ordonnance en date du 15 mars 2010, le président du tribunal de commerce de Nîmes a désigné Mme [N] [S] en qualité de mandataire ad'hoc de la Sarl Confort Service avec pour mission d'intervenir dans une action en responsabilité civile professionnelle à l'encontre de M°[M] [H] .

Cette ordonnance permettait à la société Confort Service, bien que radiée, de retrouver une personnalité au travers de son mandataire ad'hoc pour les besoins d'une procédure de responsabilité civile menée contre M°[M] [H].

En conséquence, Mme [N] [S], ès qualités de mandataire ad'hoc de la Sarl Confort Service, est recevable à agir en cette action en responsabilité pour défendre les intérêts de la société Confort Service.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

-II) La chronologie de la procédure collective :

Le 23 novembre 1999, M.[T], gérant de la société, a déclaré la cessation des paiements de celle-ci au greffe du tribunal de commerce de Nîmes. Il a déclaré que la société avait cessé toute activité depuis le 31 octobre 1999 et sollicité la liquidation judiciaire immédiate de l'entreprise.

Par jugement en date du 8 décembre 1999, le tribunal de commerce de Nîmes a constaté l'état de cessation des paiements de la société Confort Services, a ouvert une procédure de liquidation judiciaire et désigné M°[H] comme liquidateur.

L'état des créances a été établi le 21 novembre 2000.

Sur demande de M°[H], ès qualités de liquidateur, le tribunal de commerce de Nîmes a condamné M.[B] [T], gérant de la société Confort Service, à combler le passif de cette société à hauteur de 200.000 francs.

Sur appel de M.[T], la cour d'appel de Nîmes, par arrêt du 28 novembre 2002, a confirmé partiellement ce jugement en ce qu'il avait retenu des fautes de gestion de M.[T], mais l'a infirmé en ce qu'il avait condamné ce dernier à combler le passif à hauteur de 200.000 F et a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M.[T], avec pour date de cessation des paiements celle de la procédure ouverte à l'égard de la société Confort Service.

Cette procédure a été ouverte sur la base de l'article L.624-5 du code de commerce en sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005.

Le paragraphe II de cet article dispose que dans ce cas le passif comprend, outre le passif personnel, celui de la personne morale.

Il s'agit d'une procédure distincte, mais liée à la procédure d'origine, avec entrée du passif personnel de la société dans le passif personnel de M.[T].

Le 16 juin 2003, M°[H], ès qualités, a sollicité du juge commissaire l'autorisation de faire vendre le bien immobilier des époux [T], mariés sous le régime de la communauté. Cette cession a eu lieu de gré à gré le 27 juin 2003, moyennant le prix de 152.449,02 €, somme sur laquelle 149.649 € sera remis à M°[H] par le notaire.

En novembre 2003, tous les créanciers sont désintéressés. Il y avait un boni de liquidation.

Un litige interviendra entre M.[T] et M°[H] sur le montant de ses émoluments, avec ordonnance du 27 avril 2004, ordonnance du premier président de la cour d'appel de Nîmes du 16 juillet 2004 et arrêt de la Cour de cassation du 13 juin 2006 qui terminera le litige.

M°[H] a déposé le 13 juillet 2005 une requête en clôture de la liquidation judiciaire de la société Confort Service. La requête demande la clôture pour insuffisance d'actif.

Le jugement de clôture pour insuffisance d'actif interviendra le 28 septembre 2005.

Le 20 janvier 2011, M°[H] présentera une requête au tribunal de commerce aux fins de rectification d'erreur matérielle en ce que la clôture aurait dû être prononcée pour extinction du passif et non insuffisance d'actif. Le tribunal de commerce, au motif que la requête visait une insuffisance d'actif refusera de rectifier le jugement, par une décision de débouté du 8 juin 2011.

M°[H] a déposé le 27 février 2008 une requête en clôture de la liquidation judiciaire de M.[T] pour extinction du passif.

Le jugement de clôture de la liquidation judiciaire de M.[T] sera prononcé ensuite, mais aucune des parties n'a produit ce jugement de clôture concernant M.[T].

-III) Sur les fautes reprochées à M°[H] :

M.[T] et la société Confort Service reprochent à M°[H] :

- une extension injustifiée de la procédure collective à M.[T],

- des erreurs dans l'évaluation du passif,

- un manque de diligences pour réaliser l'actif et pour procéder au règlement des créanciers,

- des erreurs dans les redditions de comptes,

- avoir exigé des droits proportionnels disproportionnés,

- avoir demandé la clôture de la liquidation judiciaire de la société Confort Service pour insuffisance d'actif au lieu de la clôture pour extinction du passif,

- avoir retardé la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de M.[T].

-III-1) Sur l'extension de la procédure collective :

La procédure collective ouverte à l'égard de la société Confort Service a fait l'objet d'une extension à M.[B] [T] à titre personnel.

C'est M°[H] ès qualités qui a demandé cette extension.

Le tribunal de commerce avait seulement décidé d'un comblement du passif à hauteur de 200.000 francs et, sur appel de M.[T], la cour d'appel de Nîmes, a décidé l'extension de la liquidation judiciaire à celui-ci.

La cour d'appel a retenu des fautes de M.[T] en qualité de gérant, et qui avaient été de nature à aggraver le passif de la société.

Cet arrêt est définitif et M.[T] ne peut reprocher aujourd'hui à M°[H] d'avoir demandé cette extension de procédure collective, dont il a été définitivement jugé qu'elle résultait de l'attitude de M.[T].

-III-2) Sur les erreurs alléguées dans l'évaluation du passif :

Les créances ont été déclarées à M°[H] ès qualités.

La procédure de déclaration des créances et vérification des créances a été respectée.

A chaque niveau de ces procédures, la société Confort Service et M.[T] étaient en mesure de former toutes observations utiles.

Toutes erreurs étaient susceptibles d'être corrigées dans le cadre de ces procédures, sous le contrôle du juge commissaire.

Aucune faute de M°[H] n'est établie pour n'avoir pas respecté les procédures applicables.

-III-3) Sur le manque de diligences pour réaliser l'actif et procéder au règlement des créanciers:

L'action en extension de la procédure collective à M.[T] suivie de la demande de vente du bien immobilier de celui-ci correspond à une diligence très sérieuse pour réaliser l'actif.

M.[T] aurait d'ailleurs pu prendre l'initiative de cette solution avant que la situation de la société ne devienne catastrophique pour éviter la cessation des paiements.

Il ne peut être reproché au liquidateur de l'avoir fait à sa place.

A partir de ce moment les créanciers ont pu être payés progressivement de leurs créances.

Ces créanciers ont été réglés. Les investigations menées par les services de police suite à la plainte de M.[T] ont révélé que les questions posées par celui-ci à certains créanciers avaient été mal posées et que les créanciers litigieux avaient été effectivement réglés dans des délais raisonnables.

-III-4) Sur des erreurs dans les redditions de comptes :

Les deux procédures, celle concernant la société, et celle concernant M.[T], restaient distinctes même si elles étaient liées. Mais il ne s'agissait d'une procédure unique, comme une extension de la procédure collective au dirigeant.

Il ne peut être reproché à M°[H] d'avoir tenu deux comptabilités.

Le liquidateur accomplissait sa mission sous le contrôle du juge commissaire et du tribunal de commerce. Il appartenait, en cas de difficulté, à M.[T] de procéder à toute réclamation utile pendant le cours de la procédure collective.

Aucune faute de M°[H] n'est caractérisée.

-III-5) Sur les droits proportionnels :

Le litige sur les droits proportionnels demandés par M°[H] a fait l'objet des recours légaux.

Par ordonnance du 18 novembre 2003, le juge commissaire a taxé M°[H] en qualité de liquidateur de M.[T], à 15.711,15 €.

Sur recours de M.[T], le président du tribunal de grande instance de Nîmes a retranché 10.735, 42 € sur ce montant.

Sur recours de M°[H], le premier président de la cour d'appel de Nîmes a confirmé l'ordonnance.

Sur pourvoi en cassation, la Cour de cassation a cassé cette ordonnance et arrêté les émoluments à 15.711,15 €;

La décision de la Cour de cassation prouve que les émoluments demandés par M°[H] n'étaient pas disproportionnés, puisqu'ils ont été en définitive validés.

-III-6) Sur l'erreur dans la requête en clôture de la liquidation judiciaire de la société Confort Service :

Il n'est contesté par M°[H] qu'il a déposé le 13 juillet 2005 une requête en clôture de la liquidation judiciaire de la société Confort Service pour insuffisance d'actif, alors que le passif avait été soldé, de sorte qu'est intervenu le 28 septembre 2005 un jugement de clôture pour insuffisance d'actif.

M°[H] essaiera plus tard, de 20 janvier 2011, de réparer son erreur en déposant une requête en rectification d'erreur matérielle en ce que la clôture aurait dû être prononcée pour extinction du passif et non insuffisance d'actif. Mais le tribunal de commerce refusera de rectifier le jugement, par une décision de débouté du 8 juin 2011.

Cette faute est reconnue.

-III-7) Sur le retard dans la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de M.[T]:

Au vu des éléments des procédures collectives, après la vente de gré à gré de la maison des époux [T], en 2003, le passif a pu être soldé.

Après la clôture de la procédure collective de la société Confort Service, par jugement du 28 septembre 2005, la procédure à l'égard de M.[T] aurait pu être également terminée.

C'est le litige sur le montant des émoluments qui a fait perdurer la procédure, pour solder tous les comptes.

Ce litige s'est terminé par l'arrêt de la Cour de cassation en date du 13 juin 2006.

Dès lors rien n'empêchait M°[H] de déposer une requête en clôture de la procédure collective à l'égard de M.[T].

M°[H] attendra jusqu'au 27 février 2008 pour déposer cette requête. Il s'agit d'une négligence de sa part d'avoir ainsi tardé à déposer cette requête.

En définitive deux fautes seront retenues:

- une erreur dans la requête en clôture de la procédure concernant la société Confort Service,

- une négligence tardive à déposer la requête en clôture de la procédure concernant M.[T].

-IV) Sur le préjudice et le lien de causalité :

-IV-1) pour la société Confort Service :

La société Confort Service n'avait plus d'activité déjà lorsque M.[T] a saisi le tribunal de commerce d'une demande de cessation des paiements.

L'erreur de M°[H] a été sans conséquence préjudiciable pour cette société alors qu'elle n'avait plus aucune activité, et qu'en tout état de cause, cette société devait être radiée du registre du commerce et des sociétés.

Le jugement sera confirmé sur l'absence de préjudice.

-IV-2) pour M.[B] [T] :

En tant qu'ancien gérant d'une société dont la liquidation judiciaire a été clôturée officiellement pour insuffisance d'actif, M.[T] subit un préjudice moral, alors que sa réputation d'ancien gérant de société est atteinte.

Le retard dans la clôture de la jugement de M.[T] pendant près de deux ans l'a empêché d'avoir la libre disposition de son patrimoine et l'a empêché de bénéficier de concours bancaires pour créer une nouvelle activité. Il ne justifie pas préjudice matériel mais d'un préjudice moral également de ce fait.

Il lui sera accordé la somme de 20.000 € d'indemnisation au titre de son préjudice moral.

Par équité, chaque partie conservera ses frais irrépétibles, mais M°[H] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Confirme partiellement le jugement rendu le 6 septembre 2012 par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en ce qu'il a :

- déclaré l'action de la Sarl Confort Service recevable,

- débouté la Sarl Confort Service de sa demandes en dommages et intérêts,

- ordonné la suppression des conclusions de M.[B] [T] et de la Sarl Confort Service des phrases suivantes, écrites à propos de M°[H] : dans le seul but d'obtenir des droits proportionnels sur la vente de la maison$gt;$gt;, a utilisé des stratèges peu avouables$gt;$gt;, a clôturé Confort Service pour insuffisance d'actif, uniquement par vengeance et pour nuire au débiteur$gt;$gt; et n'a jamais hésité à mentir et à se parjurer malgré son statut de liquidateur judiciaire$gt;$gt;,

Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne M.[M] [H], mandataire de justice à Nîmes, à payer à M.[B] [T] la somme de vingt mille euros (20.000 €) à titre de dommages et intérêts,

Dit que chaque partie conservera ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Met les dépens de première instance et d'appel à la charge de M.[M] [H], avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 12/19831
Date de la décision : 31/10/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°12/19831 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-31;12.19831 ?
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