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22/10/2013 | FRANCE | N°12/21602

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre b, 22 octobre 2013, 12/21602


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

6e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 22 OCTOBRE 2013



N°2013/864













Rôle N° 12/21602







[F], [I] [T] épouse [A]





C/



[K] [B] [A]





































Grosse délivrée

le :

à :Me LIBERAS



Me JAUFFRES









Décision dÃ

©férée à la Cour :



Jugement du Juge aux affaires familiales de GRASSE en date du 07 Novembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/01750.





APPELANTE



Madame [F], [I] [T] épouse [A]



née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 3],



demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Pierre LIBERAS, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PR...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

6e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 22 OCTOBRE 2013

N°2013/864

Rôle N° 12/21602

[F], [I] [T] épouse [A]

C/

[K] [B] [A]

Grosse délivrée

le :

à :Me LIBERAS

Me JAUFFRES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge aux affaires familiales de GRASSE en date du 07 Novembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 10/01750.

APPELANTE

Madame [F], [I] [T] épouse [A]

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Pierre LIBERAS, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Pascal KLEIN de la SCP KLEIN, avocat plaidant au barreau de NICE,

INTIME

Monsieur [K] [B] [A]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 4] (ALGERIE) (99),

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jean-marie JAUFFRES, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me Pascale DAVID-BODIN, avocat plaidant au barreau de NICE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2013, en Chambre du Conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Dominique RICARD, Président, et Madame Dominique KLOTZ, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Dominique KLOTZ, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Dominique RICARD, Président

Madame Dominique KLOTZ, Conseiller

Madame Sophie TERENTJEW, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Sol ROBINET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Octobre 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Octobre 2013.

Signé par Monsieur Dominique RICARD, Président et Madame Marie-Sol ROBINET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement rendu le 04/11/2012 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de GRASSE sous le n°10/01750

Vu l'appel interjeté le 16/11/2012 par [F] [T]

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 08/04/2013

Vu les conclusions de l'appelante notifiées le 05/06/2013

Vu les conclusions de [K] [A] signifiées le 15/04/2013

Vu l'ordonnance de clôture en date du 12/09/2013

EXPOSE DU LITIGE

[F] [T] et [K] [A] se sont mariés le 19/07/2002 devant l'officier d'état civil de la ville de [Localité 6] après avoir adopté le régime de la séparation des biens selon contrat reçu le 25/06/2002 par Maître [X] , notaire à NICE (06).

Aucun enfant n'est issu de cette union.

[F] [T] a présenté une requête en divorce le 24/03/2010. L'ordonnance de non conciliation a été rendue le 01/06/2010. Le magistrat conciliateur a attribué la jouissance du domicile conjugal au mari s'agissant d'un bien lui appartenant en propre, alloué à l'épouse une pension alimentaire de 4 000 euros par mois au titre du devoir de secours entre époux et mis à la charge de Monsieur [A], une provision pour frais d'instance de 10 000 euros. Le magistrat conciliateur a enfin désigné un notaire en vue d'élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial.

Cette décision a été confirmée par la cour de ce siège le 28/06/2011.

[F] [T] a fait assigner son mari en divorce par acte du 31/08/2010 sur le fondement de l'article 242 du code civil.

Le jugement entrepris prononce le divorce aux torts partagés des époux et déboute [F] [T] de ses demandes de dommages intérêts, de prestation compensatoire et d'expertise.

[F] [T] a interjeté appel général de cette décision le 16/11/2012.

Par ordonnance du 08/04/2013, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la demande d'expertise formée par [F] [T] et débouté [K] [A] de sa demande tendant à voir supprimer ou réduire la pension qu'il verse à son épouse.

Cette ordonnance n'a pas été déférée à la cour.

[F] [T] conclut à l'infirmation de la décision déférée. Elle demande à la cour de prononcer le divorce aux seuls torts de son mari, de condamner ce dernier à lui verser d'une part une prestation compensatoire sous forme de rente mensuelle de 20 000 euros pendant huit ans et d'autre part la somme de 50 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral et matériel. Elle sollicite la désignation d'un notaire pour liquider le régime matrimonial des époux et réclame la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

[K] [A] a relevé appel incident de ce jugement critiquant uniquement le prononcé du divorce. Il demande que celui-ci soit prononcé aux torts exclusifs de son épouse, soutenant que l'adultère qui lui est reproché est postérieur au dépôt de la requête et qu'il n'a donc plus un caractère de gravité suffisant pour rendre intolérable le maintien de la vie commune.

Il conclut en conséquence à la confirmation pour le surplus mais subsidiairement, demande à la cour de dire que si le droit à prestation compensatoire était établi, cette prestation a déjà été acquittée par l'acquisition d'un appartement avec garage et parking et par la donation de la moitié de la pleine propriété des murs d'un atelier de sculpture ce qui représente la valeur de 90 000 euros. Il réclame la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure.

MOTIFS DE LA DECISION

Au fond

Il y a lieu de rappeler à titre liminaire, d'une part qu'en vertu de l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif et d'autre part que la cour ne statue que sur les demandes énoncées au dispositif des conclusions.

Sur le divorce

L'article 242 du code civil dispose que le divorce peut être demandé par l'un des époux, lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables au conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune.

Le premier juge a retenu la solitude affective dans laquelle Monsieur [A] a laissé son épouse, ainsi qu'un adultère datant de 2010. Ces faits sont amplement démontrés par les attestations et les factures d'hôtel pour deux personnes versées aux débats par l'appelante ([C], [E], [V], [N]). Monsieur [A] ne conteste pas pour sa part être allé à [Localité 5] en compagnie d'une amie au mois d'avril et au mois de juin 2010, mais il considère que l'adultère n'est pas démontré.

Il apparait utile en l'espèce de rappeler que les devoirs et obligations du mariage doivent être respectés par les époux tant qu'ils sont dans les liens de ce mariage et nonobstant le dépôt de la requête en divorce.

En l'espèce, le comportement injurieux du mari, qui ne démontre pas avoir été affecté par le dépôt de la requête de son épouse contrairement à ce qu'il soutient, attitude qui s'inscrit dans le cadre d'un abandon affectif depuis l'année 2007, constitue une violation grave et renouvelée du devoir de fidélité rendant intolérable le maintien de la vie commune.

S'agissant des griefs de Monsieur [A], le premier juge a écarté à juste titre l'obstruction faite par l'épouse au bon déroulement des fêtes familiales et religieuses ainsi que le refus de recevoir la famille de son époux. Les photographies produites par l'appelante, le témoignage de la femme de ménage du couple notamment, contredisent en effet toutes ces allégations qui ne sont au demeurant rapportées que par la compagne du fils de Monsieur [A].

L'agressivité de Madame [T] à l'égard de son mari serait d'autre part démontrée par les attestations de Madame [R] et de Madame [U].

Il convient de relever en premier lieu que l'attestation de la première n'est pas circonstanciée et que l'intéressé n'a pas assisté aux faits qu'elle décrit. Le second témoin affirme quant à lui avoir vu Monsieur [A] « couvert de griffures » au retour de ses vacances, sans toutefois que les circonstances précises des constatations soient rapportées. Même s'il n'est pas contesté que Monsieur et Madame [A] sont partis en vacances ensemble en 2010, rien établit que [F] [T] est l'auteur d'une prétendue agression dont le mari n'aurait pas manqué de faire constater les conséquences, compte tenu de la procédure en cours, ce qu'il n'a pas fait.

La cour considère donc que la preuve des faits reprochés à Madame [T] n'est pas rapportée. Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il prononce le divorce des époux à leurs torts partagés. La cour prononcera le divorce aux seuls torts de [K] [A].

Sur les dommages-intérêts

La demande de [F] [T] est fondée sur l'article 1382 du code civil qui dispose que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L'appelante soutient que le comportement de son mari a eu des répercussions sur son état de santé et elle produit une ordonnance du docteur [Q] en date du 08/10/2010.

Le lien entre le traitement cardio vasculaire de l'intéressée et le comportement de l'intimé ne résulte toutefois pas de ce document.

Il est en revanche manifeste que l'attitude injurieuse du mari et le délaissement affectif que celle-ci a subi durant les trois années précédant la requête, lui ont causé un préjudice moral qui mérite indemnisation.

Monsieur [A] sera donc condamné à payer à son épouse la somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts.

Sur la prestation compensatoire

La prestation compensatoire que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre, est destinée à compenser, autant que possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives. Elle ne saurait cependant assurer une parité des fortunes en gommant les effets d'un régime matrimonial que les époux ont librement choisi.

La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

Elle est versée en capital mais, à titre exceptionnel, le juge peut la fixer sous forme de rente viagère, si l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins.

Pour en déterminer le montant, le juge prend notamment en considération :

-la durée du mariage,

-l'âge et l'état de santé des époux,

-leur qualification et leur situation professionnelles,

-les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la durée de la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière du conjoint au détriment de la sienne,

- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial,

-leurs droits existants ou prévisibles,

-leur situation respective en matière de pension, de retraite.

[F] [T] est âgée de 66 ans et [K] [A] de 64 ans. Leur vie commune n'a duré que huit ans, étant rappelé qu'en vertu d'une jurisprudence bien établie, il n'y a pas lieu de tenir compte de la durée de la vie commune antérieure au mariage.

[F] [T] est atteinte de troubles cardiaques. Monsieur [A] est en bonne santé.

Les époux sont mariés sous le régime de la séparation des biens, ils n'ont aucun patrimoine indivis.

Lorsqu'ils se sont mariés, [F] [T] était âgée de 55 ans ; elle possédait un appartement de 65 m2 situé à [Localité 1]. Elle a alors cessé son activité d'éditrice, mais il s'agit d'un choix manifestement personnel : les enfants de Monsieur [A] étaient déjà élevés et l'intéressée a choisi de se consacrer à la sculpture. Elle ne démontre pas s'être investie dans la société de son mari. Celui-ci l'a aidée dans sa nouvelle activité, en acquérant en indivision les murs d'un atelier dans lequel elle pratique son art, il n'est pas démontré qu'elle en tire un quelconque revenu, même si la presse locale lui attribue une certaine notoriété. Le 09/12/2010, [K] [A] lui a offert un appartement situé à [Adresse 2] d'une valeur de 498 200 euros. Elle occupe ce bien immobilier. [K] [A] lui a encore cédé sa quote part du bien constituant son atelier d'artiste. Il n'est pas contesté que ce bien immobilier a une valeur de 180 000 euros. Le 30/03/2010, [F] [T] a aussi bénéficié de la somme de 10 000 euros versée par son mari en vue de la rénovation de l'appartement qu'elle possède en propre. Elle affirme qu'elle loue ce bien libre de toute occupation depuis 2009, pour un loyer de 862 euros par mois, depuis le début de l'année 2013. Elle perçoit en outre les loyers de deux garages soit la somme de 165 euros par mois ainsi qu'une retraite mensuelle de 525,12 euros. Elle évalue ses frais fixes à la somme de 940 euros par mois. [F] [T] possède enfin en nu propriété, 99% des parts de la société civile immobilière Lisadrian ainsi qu'une part de cette société en pleine propriété. Il sera en outre relevé que contrairement à ce qu'elle indique, ses biens immobiliers ne sont grevés d'aucune hypothèque.

[K] [A] est retraité depuis le 01/01/2011, après avoir exploité des supermarchés sous l'enseigne LEADER PRICE. Il est actionnaire de la société GP FINANCES. Il perçoit diverses pensions qui totalisent la somme mensuelle de 3 828,11 euros et il dispose également de revenus fonciers et autres. Au total, son revenu mensuel moyen était de 18 182,83 euros en 2011. Son patrimoine taxé à l'ISF, comprenant ses parts de la société GP FINANCES, était de 6 445 594 euros en 2010.

Il est propriétaire du domicile conjugal acquis en 1999 pour la somme de 2 100 000 francs soit 320 142 euros. L'évaluation de ce bien soit, 1 197 000 euros dans sa déclaration ISF, n'a pas été remise en cause par l'administration fiscale. Il dispose d'un bateau de marque BENETEAU immatriculé à [Localité 1] acquis en leasing avec un ami.

Au vu de ces éléments, il apparait que Madame [T] a vu sa situation patrimoniale s'améliorer pendant l'union, grâce à son époux qui a fait l'acquisition de biens immobiliers don't il lui a, par la suite, fait donation.

La rupture du lien conjugal ne crée donc aucune disparité au détriment de l'appelante, la prestation compensatoire n'ayant pas vocation à niveler les fortunes. C'est donc à juste titre que la demande de [F] [T] a été rejetée.

Sur la désignation du notaire

L'article 267 du code civil fait obligation au juge d'ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux lorsqu'il n'existe pas de règlement conventionnel. En l'espèce, les époux ne soumettent aucune convention à l'appréciation de la cour.

La demande de désignation d'un notaire apparait prématurée : il résulte des dispositions des articles 1358 et suivants du code de procédure civile que la mise en 'uvre d'un partage judicaire, qui ne pourra intervenir qu'après assignation en partage, ne peut avoir lieu qu'en cas d'échec de la phase amiable que les parties doivent organiser de leur propre chef.

Sur les autres dispositions du jugement

Non remises en cause, elles seront confirmées.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'admission partielle des demandes de [F] [T] conduit la cour à partager les dépens d'appel par moitié entre les parties. Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en audience publique, contradictoirement, après débats non publics,

Infirme la décision entreprise uniquement en ce qu'elle prononce le divorce des époux à leurs torts partagés et statuant à nouveau de ce chef,

Prononce le divorce de

[K] [B] [A], né le [Date naissance 2]/1949 à [Localité 4] (ALGERIE)

Et de

[F] [I] [T], née le [Date naissance 1]/1947 à [Localité 2]

Mariés le 19/07/2002 devant l'officier d'état civil de la commune de [Localité 6]

Aux torts exclusifs du mari,

Condamne [K] [A] à payer à [F] [T] la somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts,

Partage les dépens d'appel par moitié entre les parties,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre b
Numéro d'arrêt : 12/21602
Date de la décision : 22/10/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6B, arrêt n°12/21602 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-22;12.21602 ?
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