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04/07/2013 | FRANCE | N°11/16158

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre a, 04 juillet 2013, 11/16158


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2013



N° 2013/ 400













Rôle N° 11/16158







SARL SOCIETE DE VALORISATION ET D'INVESTISSEMENTS SODINVEST





C/



S.A.R.L. ETABLISSEMENTS [B]





















Grosse délivrée

le :

à :

Me JAUFFRES

SCP MAYNARD














r>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 05 Septembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010F00714.





APPELANTE



SARL SOCIETE DE VALORISATION ET D'INVESTISSEMENTS SODINVEST,

dont le siége social est [Adresse 2]



représentée par Me Jean marie JAUFFRES, avo...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2013

N° 2013/ 400

Rôle N° 11/16158

SARL SOCIETE DE VALORISATION ET D'INVESTISSEMENTS SODINVEST

C/

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS [B]

Grosse délivrée

le :

à :

Me JAUFFRES

SCP MAYNARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de NICE en date du 05 Septembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010F00714.

APPELANTE

SARL SOCIETE DE VALORISATION ET D'INVESTISSEMENTS SODINVEST,

dont le siége social est [Adresse 2]

représentée par Me Jean marie JAUFFRES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Pascal NEVEU, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

S.A.R.L. ETABLISSEMENTS [B] ,

inscrite au RCS Nice B 957 803 042 ,au nom commercial : [B],au capital de 70.523,37 EUROS,Représentée

en la personne de son gérant, domiciliéen cette qualité au siège social sis

dont le siége social est [Adresse 1]

représentée par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Jean-jacques PETRACCINI, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Mai 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Guy SCHMITT, Président

Madame Catherine DURAND, Conseiller

Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2013,

Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL SODINVEST exerce une activité de consultant dans le domaine de l'ingénierie financière et la SARL [B] exploite une entreprise de bois.

Après l'échec d'un projet de vente de l'entreprise [B] à BRICORAMA, dans le cadre duquel l'expert M.[E] , missionné par M.[B] sur la recommandation de SODINVEST, a fixé la valeur du bien immobilier à 8 140 000 euros, la SARL SODINVEST a été missionnée par M.[B] pour effectuer un audit comptable interne, procéder à une analyse fiscale juridique et financière de la société, choisir à ses frais tout intervenant spécialisé comptable ou financier pour finaliser tout projet à mettre en oeuvre pour optimiser l'intérêt économique et financier de l'entreprise et tenter de réduire la fiscalité de son dirigeant et apporter son concours plein et entier auprès de tout organisme administratif ou financier pour assister M.[B] dans l'accomplissement de tout projet.

Par courrier en date du 22 décembre 2009 adressé à M.[B], es-qualités de gérant de la société [B], la SARL SODINVEST présentait une première analyse financière et fiscale intitulée ' Etude d'opportunités financière et fiscale' et, après consultation du cabinet d'expertise comptable IN EXTENSO, proposait une cession temporaire d'usufruit, portant sur les revenus de la location de l'immeuble à usage professionnel par la société, destinée à réduire la fiscalité personnelle du gérant et à lui permettre de récupérer des liquidités dans les comptes de la société pour améliorer sa situation patrimoniale tout en préservant l'intérêt économique de la société.

Ce courrier était accompagné d'une convention d'honoraires du 22 décembre 2009, prévoyant des honoraires de 200 000 €HT et de 239 200€ TTC, incluant honoraires de diligences et honoraires de résultat, payable à concurrence de 100 000 euros lors de la remise d'un rapport circonstancié de l'opération envisagée et de 139 200 € à la signature de l'acte notarié, dont le montant était calculé en fonction des économies ou plus values réalisables, soit pour le projet retenu 1 100 000 € au taux de 20% .

Le 15 janvier, la SARL SODINVEST a adressé un descriptif de l'opération de cession temporaire de l'usufruit au cabinet IN EXTENSO que celui-ci a confirmé et validé le 25 janvier 2010, y apportant sa garantie fiscale.

Le 3 février 2010, la SARL SODINVEST et la SARL [B], signaient une deuxième convention prévoyant des honoraires de résultat de 200 000€ HT , soit 239 000€ TTC , incluant les honoraires de diligence et frais, dont ceux du Cabinet IN EXTENSO, et basés sur ' les gains potentiels acquis tant pour l'entreprise que pour son dirigeant après mise en oeuvre du montage financier et économique détaillée dans le rapport ci-joint'; cette convention prévoyait que la SARL [B] s'acquitterait des honoraires dus à la SARL SODINVEST , préalablement fixés à la somme de 239 000€TTC le jour de la signature de l'acte notarié.

Après que la société SODINVEST ait accepté de prendre provisoirement à sa charge les 30 000 euros de frais de notaire, objet d'un contentieux entre celui-ci et M.[B] , et qu'elle ait obtenu un financement bancaire du LCL, elle était informée par un courrier de la banque du 7 juin 2010 de la décision de M.[B] de ne pas poursuivre son projet de financement pour des raisons personnelles.

Après une mise en demeure infructueuse adressée le 8 juin 2010 à M.[B] d'avoir à payer les honoraires de 239 200 euros, la SARL SODINVEST, le 2 août 2010, assignait la SARL [B] en paiement de cette somme.

Par jugement en date du 5 septembre 2011, le tribunal de commerce de Nice a débouté la SARL SODINVEST de toutes ses demandes, donné acte à la SARL ETABLISSEMENTS [B] de sa proposition de régler à la SARL SODINVEST la somme de 8000 euros au titre d'honoraires de diligence et condamné la SARL SODINVEST à payer à la SARL ETABLISSEMENTS [B] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu le jugement frappé d'appel rendu le 5 septembre 2011 par le tribunal de Commerce de Nice,

Vu les conclusions déposées le 9 novembre 2012, appelant ;

Vu les conclusions déposées le 21 décembre 2012 par la SARL ETABLISSEMENTS [B], intimée ;

Attendu que par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux conclusions visées ci-dessus pour l'exposé des prétentions et moyens des parties;

MOTIFS

Attendu qu'aux termes d'une délibération du 10 novembre 2006, la mairie de [Localité 1] a arrêté un projet de plan local d'urbanisme comprenant 31 emplacements réservés , qui n'avaient pas encore fait l'objet d'une enquête publique dont la propriété [B];

Attendu que le nouveau PLU adopté par la Ville de [Localité 1], suite à l'enquête publique du 10 mai 2010 au 18 juin 2010, n'a pas modifié les dispositions du POS et a supprimé totalement l'emplacement réservé sur la propriété de M.[B];

Attendu que préalablement à la proposition de cession temporaire d'usufruit contenue dans son courrier du 22 décembre 2009, la SARL SODINVEST, le 3 novembre 2009, a adressé à Monsieur et Madame [B] un courrier intitulé ' Analyse de votre situation fiscale et patrimoniale' dans lequel, observant que leur succession paraissait mal préparée et que leurs intérêts comme ceux de leur famille n'étaient pas suffisamment protégés tant sur le plan fiscal que successoral, elle indiquait:

' Il nous paraît urgent et en tout premier lieu de réduire le poids de votre fiscalité et celle de votre famille en optimisant votre situation financière et en protégeant davantage votre épouse et vos enfants dans le cadre de votre subite disparition.

De plus les dispositions à prendre seront utiles pour faire barrage au projet de la Ville de [Localité 1] d'acquérir votre propriété tel que cela est apparu sous la forme d'une 'réservation immobilière' dans le cadre du PLU provisoirement annulée mais qui sera assurément reconduite';

Attendu que la cession temporaire du droit d'usufruit portant sur son immeuble professionnel proposée à M.[B] par la SARL SODINVEST avait pour finalité de réduire le poids de sa fiscalité et d'améliorer sa situation patrimoniale; que toutefois, dans son courrier du 3 novembre 2009, les deux principales raisons invoquées par la SARL SODINVEST pour justifier la nécessité de prendre des dispositions sont l'allégement fiscal mais aussi le barrage au projet de la ville de [Localité 1] d'acquérir la propriété [B] dans le cadre du PLU;

Attendu qu'outre l'allégement fiscal et ' l'importance des avantages immédiats et prochains... de nature à largement compenser ses préoccupations du moment, même si cela devait entraîner quelques bouleversements dans ses habitudes et le choix de ses consultants actuels' , la SARL SODINVEST s'est manifestement servi de la réservation immobilière dont elle a présenté la reconduction comme certaine pour justifier les dispositions à prendre et inciter ainsi M.[B] à conclure rapidement ;

Attendu qu'en se permettant une telle affirmation , et en considérant cette reconduction acquise, alors qu'elle ne disposait d'aucun élément certain pour le faire, la SARL SODINVEST s'est livrée à une présentation déloyale de la situation, sans même envisager, ainsi qu'elle le reconnaît et contrairement à toute élémentaire prudence, la disparition de l'emplacement réservé qui n'était encore qu'une éventualité, alors qu'à défaut de justifier d'une quelconque urgence à réaliser l'opération proposée, il lui appartenait de se préoccuper des conséquences de l'annulation du projet du PLU et de conseiller à M.[B] d'attendre l'issue de l'adoption du PLU pour conclure la convention litigieuse au mieux de ses intérêts, au lieu de se précipiter pour le faire conclure;

Attendu de surcroît que l'opération envisagée ne prenait pas en compte les honoraires de la société SODINVEST de 200 000 € HT qui n'avaient pas été intégrés dans les tableaux de simulation financière et qui représentaient une charge supplémentaire de 650€ par mois sur 15 ans pour la société [B], et que l'expert [E] avait évalué le bien immobilier à 8 140 000 euros , sans tenir compte de l'incidence de l'emplacement réservé, indiquant, dans un courrier du 31 mai 2012, que l'évaluation n'aurait été que de 1 412 971€ s'il avait pris en compte la servitude;

Attendu en conséquence, qu' il ne peut être reproché à M.[B] de ne pas avoir exécuté la convention de bonne foi en ne signant pas l'acte notarié, même si la convention d'honoraires n'était soumise à aucune condition suspensive relative au résultat de l'enquête publique, dès lors que les prévisions de la société SODINVEST, contrairement à ses affirmations, ne se sont pas réalisées et qu' à défaut de modification des dispositions du POS concernant la zone sur laquelle était implantée la propriété [B], l'opération proposée par la SARL SODINVEST, justifiée en partie pour faire barrage au projet de la Ville de [Localité 1] d'acquérir la propriété [B], ne présentait plus aucun intérêt;

Attendu que la revente de la propriété [B], une fois libérée de la servitude qui la grevait permettait à la famille [B] de réaliser une plus-value considérable en exonération d'impôt, que l'avantage de l'opération présenté comme évident, malgré des risques difficiles à évaluer sur le plan fiscal, n'existait plus pour l'intimée, et qu'il appartenait donc à la société SODINVEST d'informer son client des résultats de l'enquête publique dès qu'elle en a eu connaissance et de revoir le projet de cession envisagé;

Attendu en conséquence que le comportement déloyal de la société SODINVEST engage sa responsabilité et la prive de tout droit au paiement des honoraires de résultat qu'elle réclame dont le libellé même ' gains potentiels acquis tant pour l'entreprise que pour son dirigeant après mise en oeuvre du montage financier et économique' est pour le moins dépourvu de clarté et de précision compte tenu du caractère contradictoire des termes 'potentiels' et 'acquis' , alors que la société SODINVEST affirme que sa mission était limitée à la conception d'un projet fiable et sécurisé accepté par son client, et pas à la mise en oeuvre de ce projet sur une durée de plusieurs années qui relevait de la seule responsabilité du dirigeant de la société [B];

Attendu toutefois que la société SODINVEST est toutefois en droit de prétendre à des honoraires de diligences;

Attendu que la société SODINVEST a produit en cause d'appel un état de ses honoraires de diligences d'un montant de 200 000 euros, faisant état de différents frais nullement justifiés ou non identifiables tels que 'divers', ou encore de frais de déplacement dans le [Localité 2] pour contacter une entreprise d'installation de panneaux photovoltaïques dont l'étude technique versée aux débats est générale et nullement spécifique à l'entreprise [B];

Attendu que la convention du 3 février 2010 prévoit que le montant des honoraires et frais englobe tous ceux dus au Cabinet IN EXTENSO dans le cadre de sa participation dans l'opération; que l' état de frais présenté par l'appelante comprend une somme de 35 880 euros destinée à la société IN EXTENSO au titre de 'la validation du schéma SODINVEST y compris garantie fiscale' ; que toutefois le document de la société IN EXTENSO du 25 février 2010 se limite à reprendre mot pour mot celui qui émane de la société SODINVEST en date du 15 février 2010, se révélant être une étude d'opportunité qui ne peut justifier les 77 heures facturées, qu'il n'est par ailleurs accompagné d'aucune facture , et que la société IN EXTENSO a même déclaré à l'intimée dans un courrier du 13 février 2012 qu'elle n'avait pas été payée de ses honoraires ;

Attendu qu'il n'est pas davantage justifié des séances supplémentaires commandées par M.[B] et que la société SODINVEST produit seulement une facture de la société IN EXTENSO de 4784 euros TTC pour assistance sur l'audit des procédures [B] ; que le document intitulé ' Constats sur les procédures internes exercice 2009' n'est qu'une énumération des différentes tâches de la société [B] et ne correspond nullement à la mission de l'audit comptable définie dans la convention du 3 février 2010 qui était notamment de mettre en oeuvre toute disposition pour améliorer la gestion comptable de l'entreprise;

Attendu que l'intervention de la société SODINVEST dans le litige entre la société [B] et la société d'expertise-comptable PRAXIS PLUS, consécutif au changement de comptable, sur les conseils de la société SODINVEST, et les quelques courriers produits ne justifient pas non plus le montant des honoraires réclamés par l'appelante;

Attendu en conséquence, au vu de l'évaluation, entre 8000 et 15 000 euros faite par l'expert comptable du cabinet d'expertise comptable HMA, de la nature du montage juridique envisagé, qui ne présente aucune complexité particulière pour un fiscaliste, des prestations effectuées et des justificatifs produits, il y a lieu d'évaluer les honoraires de diligence de la société SODINVEST à la somme de 20 000 euros et de condamner la SARL [B] au paiement de cette somme;

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Attendu que la SARL SODINVEST sera condamnée à verser une indemnité de 2000 € à la SARL [B] par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que, partie perdante, elle sera condamnée aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière commerciale,

Confirme, par substitution de motifs, le jugement attaqué sauf en ce qui concerne le montant des honoraires de diligence ,

Et, statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la SARL [B] à payer à la SARL SODINVEST la somme de 20 000 euros à titre d'honoraires de diligence;

Condamne la SARL SODINVEST à payer à la SARL [B] une indemnité de 2000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la SARL [B] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre a
Numéro d'arrêt : 11/16158
Date de la décision : 04/07/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8A, arrêt n°11/16158 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-07-04;11.16158 ?
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