La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2013 | FRANCE | N°11/04122

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre a, 02 mai 2013, 11/04122


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

6e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 02 MAI 2013



N° 2013/285









Rôle N° 11/04122







[D] [S] [M] [E] épouse [H]





C/



[I] [H]

































Grosse délivrée

le :

à :

SELARL BOULAN

la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE





Décision déférée à la Cour :
>

Jugement du Juge aux affaires familiales de MARSEILLE en date du 18 Janvier 2011 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 08/12565.





APPELANTE



Madame [D] [S] [M] [E] épouse [H]

née le [Date naissance 4] 1965 à [Localité 1]

de nationalité Française,

demeurant C/O Mme [T] [G] - [Adresse 1]



comparant en perso...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

6e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 02 MAI 2013

N° 2013/285

Rôle N° 11/04122

[D] [S] [M] [E] épouse [H]

C/

[I] [H]

Grosse délivrée

le :

à :

SELARL BOULAN

la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge aux affaires familiales de MARSEILLE en date du 18 Janvier 2011 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 08/12565.

APPELANTE

Madame [D] [S] [M] [E] épouse [H]

née le [Date naissance 4] 1965 à [Localité 1]

de nationalité Française,

demeurant C/O Mme [T] [G] - [Adresse 1]

comparant en personne,

représenté par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constitué en lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS,avoués,

Plaidant par Me Jean michel LOMBARD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [I] [H]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 2] (84)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Ayant Me Jean-Pierre BROT, avocat plaidant au barreau d'AVIGNON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Mars 2013 en Chambre du Conseil. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Sylvie BLUME, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Arlette MEALLONNIER, Présidente

Madame Sylvie BLUME, Conseiller

Monsieur Alain VOGELWEITH, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Valérie BERTOCCHIO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2013.

Signé par Madame Arlette MEALLONNIER, Présidente et Madame Valérie BERTOCCHIO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

.../...

EXPOSE DU LITIGE

Madame [D] [E] et Monsieur [I] [H] se sont mariés le [Date mariage 1] 1985 devant l'Officier d'état civil de la commune de [Localité 3] (83) sans contrat préalable.

De leur union sont nés [U] le [Date naissance 2] 1988 et [C] le [Date naissance 1] 1992.

Après ordonnance de non conciliation en date du 02 juin 2009, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, statuant sur l'assignation en divorce délivrée le 22 juillet 2009 par Madame [D] [E] à son conjoint sur le fondement de l'article 242 du code civil, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a, par jugement du 18 janvier 2011 :

- prononcé le divorce aux torts partagés des époux ;

- rejeté la demande de prestation compensatoire formée par Madame [D] [E] ;

- dit que l'autorité parentale sera exercée conjointement ;

- fixé la part contributive de Monsieur [I] [H] à l'entretien et à l'éducation des enfants à la somme mensuelle de 220 €.

Par déclaration au Greffe en date du 07 mars 2011, Madame [D] [E] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières en date du 26 novembre 2011 elle sollicite l'infirmation de ce jugement et demande à la Cour de :

- prononcer le divorce aux torts de son mari ;

- condamner  Monsieur  [I]  [H]  à  lui  verser  une  prestation  compensatoire de 50 000 € ;

- ordonner la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux ;

- désigner un expert aux fins de dresser un inventaire complet des biens communs, en fixer la valeur, proposer la constitution de lots ;

- lui donner acte de ce qu'elle renonce à demander une part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants ;

- condamner Monsieur [I] [H] à lui verser la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

Elle fait valoir que l'alcoolisme de son mari a entraîné une modification de son caractère, que la violence de son comportement à son encontre l'a contrainte à se réfugier à plusieurs reprises chez des membres de la famille ; qu'elle a dû quitter le domicile conjugal avec l'enfant [C] début septembre 2008 après avoir été menacée par Monsieur [I] [H] à l'aide d'une arme à feu.

.../...

.../...

Elle expose que pendant la durée du mariage, elle a secondé son époux dans son activité de forain, sans être déclarée en qualité de salariée ni même en qualité de conjoint de collaborateur, qu'elle est sans droit à la retraite alors que son mari bénéficiera d'une retraite complète. Elle ajoute que si un manège de pêche à canards lui a été attribué lors de la tentative de conciliation, elle n'a jamais pu l'exploiter faute d'emplacement approprié. Elle a exercé une activité salariée du 25 juin 2010 au 2 novembre 2011, date à laquelle elle a été inscrite au Pôle Emploi.

Elle estime que préalablement à la désignation d'un notaire chargé d'établir un projet d'acte liquidatif, un expert doit être désigné afin d'établir un inventaire complet de biens communs.

Monsieur [I] [H], intimé, dans ses dernières écritures en date du 26 août 2011 contenant appel incident, sollicite l'infirmation partielle de la décision entreprise et demande à la Cour de :

- prononcer le divorce aux torts exclusifs de son épouse ;

- débouter Madame [D] [E] de ses demandes de prestation compensatoire et de dommages et intérêts ;

- ordonner la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux ;

- condamner Madame [D] [E] au paiement d'une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ;

- condamner Madame [D] [E] au paiement des entiers dépens et d'une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que l'abandon par Madame [D] [E] du domicile conjugal, établi par un procès verbal de constat d'huissier du 29 septembre 2008, a entraîné une dégradation de son état de santé mentale et a justifié son hospitalisation en hôpital psychiatrique.

Il soutient que Madame [D] [E] a continué à travailler avec son aide depuis l'ordonnance de non conciliation lors de diverses fêtes, y compris sur les manèges constituant des biens propres de son mari, et que les parties se sont partagé les manèges, qu'en conséquence aucune prestation compensatoire ne lui est due.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION /

' Sur le divorce :

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article 242 du Code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;

../...

.../...

En l'espèce, Madame [D] [E] produit de nombreux témoignages émanant d'amies et de membres de sa famille indiquant de façon concordante que Monsieur [I] [H] s'adonnait à l'alcool et était sujet à des accès de violences qui avaient conduit Madame [D] [E] à plusieurs reprises à trouver refuge auprès de membres de sa famille par mesure de sécurité, notamment chez son oncle [F] [G] et sa grand-mère Madame [T] [G],

Un compte rendu en date du 24 août 2008 relate le déplacement des services de Gendarmerie de [Localité 4] et l'hospitalisation de Monsieur [I] [H] en secteur psychiatrique après qu'il ait tiré à l'aide d'une arme à feu. Face aux simples dénégations de Monsieur [I] [H], cet incident d'une gravité certaine ainsi que les dépôts de main courante effectués par Madame [D] [E] les 05 septembre et 15 octobre 2008 évoquant le comportement menaçant de Monsieur [I] [H] confèrent un crédit incontestable aux allégations de Madame [D] [E] concernant des menaces exercées par son mari à l'aide d'une arme.

Les accès de violences de Monsieur [I] [H] liés à une consommation excessive et chronique d'alcool constituent une violation grave et renouvelée des obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune, et justifiant le prononcé du divorce aux torts du mari.

Dans le contexte susvisé, le départ de l'épouse du domicile conjugal procédait d'un souci de protection pour elle-même et l'enfant commun , la vie commune dans une caravane ne lui permettant pas de se soustraire à la violence et aux menaces de son époux.

Dans ces conditions, le grief tiré du départ de l'épouse qui trouve sa justification dans le comportement de son mari, ne saurait, quel que soit l'état dépressif qu'il a pu engendrer chez Monsieur [I] [H], constituer un manquement grave aux obligations du mariage de nature à justifier le prononcé du divorce aux torts de l'épouse.

Le jugement entrepris sera donc réformé et le divorce prononcé aux torts exclusifs de Monsieur [I] [H].

' Sur la demande de dommages et intérêts :

Madame [D] [E] ne produit aucun élément de nature à caractériser son préjudice découlant directement des fautes de Monsieur [I] [H]. Le premier juge sera donc approuvé en ce qu'il a débouté Madame [D] [E] de sa demande de dommages et intérêts fondée sur l'article 1382 du code de civil.

Les griefs allégués par Monsieur [H] à l'encontre de son épouse n'étant pas établis comme cause de divorce, celui-ci ne peut prétendre à l'octroi de dommages et intérêts. La demande formée de ce chef sera donc rejetée.

' Sur la demande de prestation compensatoire :

Selon les dispositions énoncées par les articles 270 et 271 du code civil la prestation compensatoire a pour but d'atténuer autant qu'il est possible la disparité que la rupture du lien conjugal est susceptible de créer dans les conditions de vie respectives des époux.

.../...

.../...

Son montant doit être déterminé en considération de la durée du mariage, de la situation des parties au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible, notamment de leurs ressources et charges, de leur âge et de leur état de santé, de leur qualification professionnelle et de leur disponibilité pour de nouveaux emplois, du temps qui a été et sera consacré à l'éducation des enfants, des droits existants et prévisibles des conjoints, de la consistance de leur patrimoine, enfin de la perte éventuelle des droits en matière de pension de réversion.

Elle est versée en capital mais, à titre exceptionnel, le juge peut la fixer sous forme de rente viagère si l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins.

Le mariage a duré 27 ans pour 23 ans de vie commune. Les époux sont âgés de 48 ans et sont mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts. Ils possèdent en commun divers biens évalués comme suit aux termes d'un rapport d'expertise amiable établi le 1er juillet 2011:

- une caravane évaluée 100 000 € ;

- un container de pêche aux canards évalué 25 000 € ;

- un 'stand multijeux'(stand de tir et pêche à canards) évalué 35000 € ;

- stand de tir à plomb 'Wild west' évalué 15 000 €.

Monsieur [H] soutient que les époux ont dores et déjà procédé au partage des manèges mais Madame [E] ne fait état, quant à elle, que de la remise à son profit du container de pêche à canard.

Il indique également posséder en propre un ou plusieurs manèges dont la valeur n'est pas indiquée. Les deux époux ont élevé deux enfants actuellement majeurs et autonomes financièrement.

Au vu des pièces produites et notamment de la déclaration sur l'honneur exigée par l'article 272 du code civil, la situation des époux s'établit comme suit :

' Monsieur [I] [H] est forain ; il a perçu en 2008 un bénéfice de 19 507 €, soit un revenu mensuel moyen de 1625 €. Il a déclaré en 2011 un revenu annuel de 14 119 € ainsi qu'un revenu foncier brut de 3 500 €, soit un revenu mensuel moyen de 1468 €.

' Madame [D] [E] a collaboré à l'activité professionnelle de son mari pendant le mariage jusqu'à la séparation en 2008, mais n'a eu ni la qualité de salariée ni le statut de conjoint collaborateur, en sorte qu'à supposer qu'elle cotise dans le cadre d'emplois qu'elle aura pu exercer après la séparation, elle ne pourra prétendre à l'âge de la retraite qu'aux minima sociaux.

Elle dispose depuis l'ordonnance de non conciliation d'un manège de pêche à canards qu'elle affirme n'avoir pu exploiter faute d'emplacement adéquat, ce que conteste son mari sur la base de témoignages de forains indiquant qu'ils ont aidé Madame [D] [E] à installer le manège. Elle admet, en toute hypothèse, avoir tenu des stands dans diverses foires après la séparation du couple jusqu'en juin 2009 sans autre précision sur les revenus perçus.

Elle déclare dans ses écritures en date du 30 novembre 2011 avoir perçu un salaire mensuel net de 1440 € équivalent au SMIC de juin 2010 à novembre 2011. Depuis, elle est sans emploi et perçoit des indemnités chômage d'environ 1071 € par mois. Son avis d'imposition  2012  sur  les  revenus  de  l'année  2011  mentionne  un  revenu  annuel de 15 355 €, soit environ 1279 € par mois.

.../...

.../...

Des éléments qui précèdent il ressort que les revenus actuellement déclarés par les deux époux sont sensiblement équivalents. Si Madame [D] [E] est actuellement au chômage, les emplois qu'elle a occupés depuis 2008 démontrent qu'elle est en capacité de retrouver un emploi. Bien qu'aucune disparité significative ne ressorte des revenus actuellement perçus par les parties, la situation prévisible du mari sera beaucoup plus favorable que celle de son épouse, Monsieur [I] [H] pouvant prétendre à une retraite à taux plein alors que Madame [D] [E] qui n'a pas cotisé auprès des organismes de retraite pendant le mariage bénéficiera des minima sociaux.

La rupture du mariage crée ainsi en défaveur de l'épouse une disparité qu'il convient de compenser par l'allocation d'un capital d'un montant de 35 000 €.

' Sur la demande de désignation d'un expert aux fins de dresser un inventaire complet des biens communs, en fixer la valeur , proposer la constitution de lots :

Les expertises amiables ainsi que les devis afférents aux caravanes et manèges que produit Madame [E] rendent inutile à ce stade de la procédure l'expertise qu'elle revendique. Cette demande est en tout état de cause prématurée et sera rejetée.

' Sur les autres dispositions :

Les autres dispositions, notamment celles ayant ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux seront confirmées.

' Sur les frais et dépens :

Monsieur [I] [H] succombe principalement en appel , il supportera donc les entiers dépens d'appel. L'équité justifie que Monsieur [I] [H] soit condamné à verser à Madame [D] [E] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS /

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après débats non publics ;

Infirme partiellement le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Prononce le divorce aux torts de Monsieur [I] [H] ;

Condamne Monsieur [I] [H] à verser à Madame [D] [E] une prestation compensatoire en capital de 35 000 € ;

.../...

Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire des parties ;

Condamne Monsieur [I] [H] à verser à Madame [D] [E] une somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [I] [H] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SEARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre a
Numéro d'arrêt : 11/04122
Date de la décision : 02/05/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6A, arrêt n°11/04122 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-02;11.04122 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award