COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
3e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 28 MARS 2013
N° 2013/ 156
Rôle N° 12/02697
SARL EGE NOEL BERANGER
C/
SAS CEMEX BETONS SUD EST
Grosse délivrée
le :
à : SELARL Abeille & Associes
Me LEONARDI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 16 Janvier 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 2011/01694.
APPELANTE
SARL EGE NOEL BERANGER représentée par son représentant légal en exercice domicilié au siège,
demeurant [Adresse 2]
représentée par la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE,
Assistée de Me Stéphane GALLO, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Vidya BURQUIER, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE
SAS CEMEX BETONS SUD EST,
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Michel LEONARDI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
Assistée de Me Nassos marcel CATSICALIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de Chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat en a rendu compte dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de Chambre
Madame Patricia TOURNIER, Conseiller
Madame Rose-Marie PLAKSINE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2013
Signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de Chambre et Madame Elsa FABRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement du Tribunal de Commerce de Marseille en date du 16/01/12 qui a condamné la SAS CEMEX à payer à la SARL EGE NOEL BERANGER la somme de 14.002,88 euros ;
Vu l'appel de cette décision par la SARL EGE NOEL BERANGER en date du 15/02/12 et ses écritures en date du 24/05/12 par lesquelles elle demande à la cour de condamner la SAS CEMEX à lui payer la somme de 28.005,76 euros TTC ; subsidiairement de désigner un expert et de limiter sa part de responsabilité à 10 % ;
Vu les écritures de la SAS CEMEX en date du 12/07/12 par lesquelles elle demande à la cour de débouter la SARL EGE NOEL BERANGER en toutes ses demandes et de la condamner à lui rembourser la somme reçue au titre de l'exécution provisoire ;
Le 30/03/06 EDF a chargé la SARL EGE NOEL BERANGER de procéder à la pose de câbles électriques enterrés, cette société a chargé la société EUROVIA de procéder à la réfection des enrobés de surface ; le produit auto compactant utilisé a été fabriqué et livré par la SAS CEMEX ;
Au mois de juillet 07 certaines parties de la tranchée se sont affaissées ; le 31/03/08 le CEBTP SOLEN concluait, après 6 carottages, que la matériau livré n'était pas un béton auto-compactant mais une grave non traitée ;
Le 28/07/08 la SARL EGE NOEL BERANGER adressait une lettre recommandée avec accusé de réception à la SAS CEMEX confirmant les désordres et les carottages et réitérait le 9/12/08 ;
Le 5/12/08 MPM adressait une télécopie à la SARL EGE NOEL BERANGER signalant une tranchée dangereuse et mal signalée ;
Le 11/12/08 la SAS CEMEX répondait par lettre recommandée avec accusé de réception niant toute responsabilité ;
Le 11/03/09 MPM réitérait ses observations par lettre recommandée avec accusé de réception exigeant une réparation ;
Le 4/06/09 le cabinet SARETEC réunissait contradictoirement la SAS CEMEX et la SARL EGE NOEL BERANGER et le 6/08/09 il indiquait que le produit commandé devait être du béton auto-compactant comportant 50 kg de ciment au mètre cube ; que le produit utilisé correspond à de la grave non traitée ;
Le 27/10/09 la SARL EGE NOEL BERANGER mettait en cause la responsabilité de la SAS CEMEX par courrier et le 9/11/09 le conseil de la SAS CEMEX rejetait cette responsabilité ;
Le 5/08/10 la Communauté urbaine mettait ERDF en demeure de réaliser les travaux de réfection et le 23/08/10 ERDF répercutait cette demande à la SARL EGE NOEL BERANGER ;
La SARL EGE NOEL BERANGER mettait en demeure la SAS CEMEX par courriers en date des 30/08, 6/09, 28/09 et 8/10/10 de reconnaître sa responsabilité sans résultat ;
La SARL EGE NOEL BERANGER, faute de réponse de la SAS CEMEX a fait effectuer les travaux de réfection pour un coût de 28.005,76 euros ;
La SAS CEMEX indique qu'elle n'est que le fournisseur de la SARL EGE NOEL BERANGER ; qu'elle est spécialisée dans la production de bétons prêts à l'emploi et non pas dans la réalisation de réseaux routiers ; qu'au contraire la SARL EGE NOEL BERANGER est spécialisée dans ce type d'ouvrage ; qu'elle utilise régulièrement ce type de béton ; qu'elle a procédé au paiement de toutes les factures ;
Elle ajoute que l'expertise ne lui est pas opposable ; qu'elle n'a pas été destinataire du compte-rendu de la réunion ; qu'au surplus ce rapport manque totalement de pertinence ;
La SARL EGE NOEL BERANGER qu'il ressort tant du carottage que de l'expertise SARETEC que les déformations de la chaussée sont dues à un défaut de qualité du produit livré ; que la SAS CEMEX devait livrer du béton auto-compactant ; qu'elle ne l'a pas fait ; que les bons de livraison font état de BDF REMBLAI RAPIDE mais ne sont pas signés ; que le rapport SARETEC est opposable car la SAS CEMEX a été convoquée aux opérations d'expertise amiable ; qu'elle a assisté à la réunion d'expertise ; que les résultats des carottages ont été intégrés à ce rapport ; qu'enfin le produit livré est inadapté au trafic ;
En ce concerne l'opposabilité du rapport d'expertise amiable SARETEC la cour constate que la SAS CEMEX a été représentée à la réunion d'expertise par Mrs [M] et [F] qui ont fait part de leurs observations telles que mentionnées dans le rapport d'expertise ; qu'elle a aussi eu connaissance des conclusions des carottages effectués précédemment ;
La cour dira qu'il résulte en conséquence de ces opérations que la SAS CEMEX a bien été convoquée aux opérations d'expertise amiable, qu'elle y a été représentée, qu'elle a pu prendre connaissance de l'ensemble des griefs faits par la partie adverse et a présenté des observations consignées et commentées par l'expert dans son rapport ; que de plus ce rapport a été régulièrement produit aux débats et a fait à nouveau l'objet d'un débat contradictoire ;
La cour dira aussi que la SAS CEMEX pouvait dans le cadre de la réunion à laquelle elle a assisté demander le prélèvement de nouveaux carottages, ce qu'elle n'a nullement fait ; que donc et contrairement à ce qu'elle conclut, elle a accepté le principe même de l'expertise amiable effectuée par SARETEC ;
La cour déboutera en conséquence la SAS CEMEX en sa demande d'inopposabilité du rapport d'expertise amiable ;
La cour rappellera sur le fonds qu'il appartenait en droit à la SAS CEMEX de livrer à la SARL EGE NOEL BERANGER un béton conforme aux normes et commandes faites ; que certes elle n'est un professionnel de la réalisation de travaux routiers mais qu'elle est au contraire un professionnel du béton ; que sa responsabilité est d'ailleurs recherchée de ce seul fait : fourniture d'un béton non conforme à la commande et aux prescriptions techniques ;
La cour relève que la SAS CEMEX devait livrer à la SARL EGE NOEL BERANGER du béton auto-compactant comportant 50 kg de ciment par M3 dénommé BDF remblai rapide RRIXX ; que ce béton devait être livré directement sur le chantier par camions-toupie et versé dans la tranchée depuis le camion ;
La cour relève que certes la SAS CEMEX produit des bons de livraison faisant état de ce type de produit ; que cependant tous ne sont pas signés ; que surtout ils résultent tant des carottages que du produit de remblai récupéré et analysé par le CEBTP que le produit livré correspond à de la grave non traitée dont la cohésion est quasiment nulle en l'absence de liant et qui doit être compactée à la mise en oeuvre car elle n'est pas un produit auto-compactant ; il est indiqué en outre dans le rapport d'expertise que 'ce défaut de qualité du produit résulte d'une ségrégation engendrée par des défauts de dosage (insuffisance de ciment ou excès d'eau) et/ou de malaxage imputable au fabricant ;
La cour dira qu'il importe peu dès lors que la SAS CEMEX fasse soutenir qu'elle a livré un béton conforme à la demande en produisant le tableau des pesées de ciment, dans la mesure où il s'agit d'une preuve à soi-même, et ou d'autre part l'analyse du béton livré et mis en place contredit formellement cette affirmation ;
La cour dira aussi que vainement la SAS CEMEX fait soutenir la réalité d'un trafic routier plus intense que celui indiqué dans la mesure où elle ne démontre nullement que la fourniture d'un béton auto-compactant conforme aux prescriptions techniques n'était pas suffisant pour ce type de circulation ;
En conséquence la cour dira que la SAS CEMEX est entièrement responsable des conséquences dommageables de la mise en oeuvre d'un béton qu'elle a livré non conforme à la demande ; la décision sera réformée en ce qu'elle avait retenue une part de responsabilité à la charge de la SARL EGE NOEL BERANGER ;
La SAS CEMEX sera condamnée à payer une somme de 28.005,76 euros TTC à 28.005,76 euros TTC ainsi que celle de 3.000 euros sur la base des dispositions de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens de toute la procédure ;
Par ces motifs,
La Cour
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Reçoit la SARL EGE NOEL BERANGER en son appel et le déclare régulier en la forme ;
Au fond,
Réforme parte in qua la décision entreprise et statuant à nouveau de ce seul chef ;
Dit la SAS CEMEX seule et entière responsable des conséquence dommageables de la mise en oeuvre d'un béton livré non conforme à la commande ;
Condamne la SAS CEMEX à payer à la SARL EGE NOEL BERANGER la somme de 28.005,76 euros outre celle de 3.000 euros sur la base des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS CEMEX aux entiers dépens de toute la procédure avec application des dispositions de l'article 699 du CPC.
Le Greffier Le Président
Ybs.