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22/03/2013 | FRANCE | N°12/04227

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 22 mars 2013, 12/04227


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2013



N° 2013/121













Rôle N° 12/04227







[I] [U]

[Z] [U]

[O] [P]





C/



[M] [H] épouse [S]





















Grosse délivrée

le :

à :



la SCP MARY-PAULUS



SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE











Déc

ision déférée à la Cour :



Jugement du tribunal de grande instance de NICE en date du 16 février 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 04/01205.





APPELANTS



Monsieur [I] [U]

né le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 5],

demeurant [Adresse 2]



Madame [Z] [R] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2013

N° 2013/121

Rôle N° 12/04227

[I] [U]

[Z] [U]

[O] [P]

C/

[M] [H] épouse [S]

Grosse délivrée

le :

à :

la SCP MARY-PAULUS

SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal de grande instance de NICE en date du 16 février 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 04/01205.

APPELANTS

Monsieur [I] [U]

né le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 5],

demeurant [Adresse 2]

Madame [Z] [R] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 2] (Italie)

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [O] [P]

né le [Date naissance 3] 1954 à [Localité 4],

demeurant [Adresse 4]

représentés et plaidant par la SCP MARY-PAULUS, avocats au barreau de NICE

INTIMÉE

Madame [M] [H] épouse [S]

venant aux droits de son oncle, [C] [B] [T] décédé le [Date décès 1]/08 à [Localité 3]

née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 5],

demeurant chez M. [H] - [Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant Me Marie-Françe CESARI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 février 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Georges TORREGROSA, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Marion ASTIE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 mars 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 mars 2013,

Signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président et Sylvie MASSOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

LES FAITS, LA PROCÉDURE ET LES PRÉTENTIONS :

Les époux [U] et M. [P] ont assigné le 6 février 2000 M. [T], ultérieurement décédé le [Date décès 1] 2008 et dont Mme [S] vient aux droits.

Dans leur assignation initiale, les demandeurs poursuivaient au visa de l'article 1589 du Code civil la vente d'un terrain et d'une maison d'habitation sis [Adresse 1], vente qu'il décrivait comme parfaite suite à l'accord sur la chose et sur le prix concrétisé au compromis signé le 10 avril 2003.

Il était en substance demandé la condamnation de M. [T] à régulariser sous astreinte la vente par acte authentique. Une somme de 20'000 euros était réclamée à titre de dommages-intérêts outre 7000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le défendeur a conclu et le tribunal de Nice a statué le 16 février 2012, faisant droit à la demande reconventionnelle, après avoir sursis à statuer jusqu'à l'évacuation de la plainte déposée au pénal par M. [T] pour abus de faiblesse.

Le tribunal a jugé qu'au moment de sa conclusion, l'engagement de M. [T] était dépourvu de cause ou faussement causé. La nullité de la promesse de vente a été retenue, et les demandeurs ont été déboutés, avec condamnation à payer 10 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Les époux [U] et M. [P] ont relevé appel le 5 mars 2012 de façon régulière et non contestée. Il sera fait application de l'article 455 du code de procédure civile.

Les appelants ont conclu le 10 juillet 2012 à la réformation de l'entier jugement.

Statuant à nouveau, la cour réformera et constatera l'accord des parties sur la chose et sur le prix dans le compromis en date du 10 avril 2003.L'ensemble des conditions suspensives ont été réalisées et la vente est parfaite au sens des articles 1583 et 1589 du Code civil.

Les biens décrits au compromis seront déclarés acquis aux appelants, et Mme [S] sera condamnée sous astreinte à régulariser par acte authentique.

Faute de déférer, le jugement rendu tiendra lieu d'acte de vente et vaudra titre de propriété, et sa publication sera ordonnée. Les appelants sont prêts à payer comptant l'intégralité du prix de vente, ainsi que les frais de l'acte authentique constatant la vente.Une somme de 14'700 euros était réclamée au titre des frais engagés pour l'acquisition du bien, outre 2000 €à titre de dommages-intérêts, et 7000 euros au titre des frais irrépétibles .

Mme [S], venant aux droits de M. [T], intimée, a conclu le 5 juin 2012 à la confirmation, avec allocation de 7000 euros au titre des frais irrépétibles.

L'ordonnance de clôture est en date du 7 février 2013.

SUR CE :

Attendu que les décisions intervenues sur le plan pénal n'ont d'autorité que pour ce qui a été jugé ; attendu que référence faite aux éléments constitutifs de l'infraction d'abus de faiblesse, il a été jugé de façon définitive que n'étaient pas remplie la condition de particulière vulnérabilité de M. [T] lors du compromis litigieux, pas plus que le caractère apparent de cette vulnérabilité et la connaissance qu'aurait pu en avoir l'auteur de l'infraction ;

Attendu que s'il convient donc de retenir, au plan civil, que la capacité de M. [T] n'était pas affectée lors de la passation du dit compromis, il n'en demeure pas moins que cet acte

peut se voir contesté pour des raisons distinctes, étrangères à la capacité qu'avait ce dernier de consentir à la vente ;

Attendu qu'en effet, et au plan civil, les parties ont convenu le 10 avril 2003 d'une vente sous condition suspensive, et non pas d'une promesse de vente ;

Attendu qu à juste titre, les appelants concluent d'ailleurs, au visa de l'article 1589 du Code civil, que le consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix vaut vente, et insistent sur la levée des conditions suspensives, ce qui leur permettrait donc de poursuivre la réitération de cette vente par acte authentique ;

Attendu que M. [T] ayant donc consenti à la vente dès le 10 avril 2003, il importe d'examiner son argumentation relative au défaut de paiement du prix, avec toutes conséquences pouvant découler au strict plan du droit civil ;

Attendu que l'acte du 10 avril 2003 a été passé sous seing privé, et peut donc être contesté dans ses énonciations par tous moyens de preuve ;

Attendu que cet acte stipule que le prix convenu était de 106'000 euros , outre une rente viagère annuelle de 7200 euros;

Attendu qu'il était précisé que la somme de 106'000 euros « a déjà été réglée par l'acquéreur au vendeur préalablement aux présentes » ;

Attendu cette stipulations ne correspond pas à la réalité, ainsi que M. [T] le démontre de façon formelle puisqu'il verse aux débats les auditions ordonnées par le juge d'instruction au plan pénal, et confiées à un officier de police judiciaire, ainsi que les courriers des notaires concernés, que la cour analyse ci-dessous :

- le notaire [Q], qui avait été saisi du compromis, a refusé de passer l'acte en raison des 'variations et flous quant à l'existence de paiements antérieurs'. Il ne témoigne pas de ce que les acquéreurs aient évoqué ni l'existence d'un chèque, ni sa restitution ;

- les notaires [G] et [L], saisis par les acquéreurs suite au refus du notaire [Q], témoignent de façon constante et concordante non seulement de ce que les époux [U] leur ont déclaré qu'aucun versement n'avait été fait au titre du prix de vente, mais aussi de ce qu'un protocole de caducité du compromis de vente a été dressé par leurs soins, que M. [T] a signé mais que les époux [U], qui pourtant en n'avaient accepté le principe, ont refusé de signer ;

- ce protocole a été versé à la procédure pénale, ainsi que les courriers recommandés des deux notaires tant à chacun des acquéreurs qu'au président de la chambre des notaires ;

- M. [U], entendu le 27 décembre 2004 par la police, a indiqué qu'il avait établi un chèque de 106'000 euros lors du compromis de vente, mais que M. [T] le lui avait restitué en septembre 2003. Suite aux investigations policières sur ses comptes, il a reconnu que le chèque n'était pas provisionné, mais qu'il avait donné instruction à une employée de banque de provisionner son compte si le chèque était présenté, avec le montant d'un prêt en attente sur un autre compte ;

- aucune précision n'a pu être ensuite fournie tant sur l'identité de cet employé de banque, que sur les instructions données ou sur la disponibilité d'un prêt en attente, la seule certitude étant que le chèque allégué n'était pas provisionné, M. [U] ne pouvant que reconnaître, le 14 janvier 2005, que ' le prix n'avait pas été encaissé' ;

- alors que le chèque de 106'000 euros aurait été restitué en septembre 2003 selon M. [U], la première mention de cette restitution n'apparaît que dans le PV de carence en date du 23 décembre 2003, dressé par le notaire [E], à la demande des acquéreurs qui y déclarent, sans autre précision, que le vendeur leur avait retourné le chèque car il ne voulait plus réaliser la vente ;

- la seule trace de la restitution de ce chèque est constituée par une enveloppe usagée portant le tampon de France Télécom, et un tampon postal en date du 26 août 2003, ainsi que des mentions de la main de M. [T] sans aucun rapport avec le chèque qui, selon les appelants, était contenu dans ladite enveloppe ;

Attendu que dans ce contexte reprécisé, la cour estime que M. [T] rapporte la démonstration certaine qu'à la date de signature de l'acte de vente sous condition suspensive, soit le 10 avril 2003, la somme de 106'000 euros , élément essentiel du prix de vente ne lui avait pas été réglée, sauf à occulter le témoignage concordant, précis et corroboré par des documents établis à l'époque en pleine conscience de leur responsabilité, tant à l'égard des parties que de leur ordre, de deux notaires qui se sont immédiatement interrogés sur cette mention essentielle de paiement, tout comme le premier notaire Me [A] auprès de qui a été sollicitée en premier la réitération ;

Attendu qu'au surplus, les explications des acquéreurs à propos de l'établissement d'un chèque apparaissent sujettes à caution, puisque, conscients de l'importance du compromis, au point d'avoir fait attester le jour même par un médecin des facultés intellectuelles de M. [T], ils n'ont nullement protesté, sinon avec trois mois de retard et pour les besoins du procès-verbal de carence, et ne peuvent en réalité ni acter de la remise du chèque, ni de sa restitution, ce que M. [U] a résumé devant l'OPJ (pièce 13. Cote pénale D 49) :

'M. [T] a acquitté la remise de ce chèque en signant l'acte d'avril qui stipule le prix réglé' , formule très audacieuse au plan civil;

Attendu qu'en toute hypothèse, il est établi de façon certaine et reconnue au cours de la procédure pénale par M. [U] que le chèque n'était pas provisionné au moment de son établissement, et n'a donc pu constituer le support d'un quelconque paiement ;

Attendu qu'il est ainsi établi par M. [T] que la formule apparaissant à l'acte du 10 avril 2006, selon laquelle le prix de 106'000 euros à ' déjà été réglé par l'acquéreur au vendeur préalablement aux présentes' est fausse ;

Attendu qu'une obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ne peut avoir aucun effet, la situation au regard de l'article 1131 du Code civil devant s'apprécier au jour de l'acte qui consacre la rencontre des volontés ;

Attendu qu'en l'espèce, et de façon synallagmatique, les appelants ont souhaité acquérir le bien tandis que M. [T] a consenti à le leur vendre, son consentement étant causé par la perception du prix tel que stipulé à l'acte, tant pour la partie du prix décrite comme déjà réglée que pour la partie du prix convertie en rente viagère ;

Attendu que la démonstration étant faite qu'à la date du 10 avril 2003, la somme de 106'000euros, partie du prix décrite comme déjà réglé, ne l'était pas, la vente a été consentie alors qu'elle n'était pas causée et ne peut donc avoir aucun effet ;

Attendu qu'il convient donc de confirmer le jugement premier ressort, y compris s'agissant de la demande de dommages et intérêts, la cour adoptant les motifs pertinents du premier juge sur ce volet ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Rejette l'appel comme non fondé ;

Confirme l'intégralité du jugement de premier ressort ;

Condamne les appelants à payer à Mme [S], intimée, la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel, ainsi qu'à supporter les entiers dépens qui seront recouvrées au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

S. MASSOT G.TORREGROSA


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 12/04227
Date de la décision : 22/03/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°12/04227 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-22;12.04227 ?
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