COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
11e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 24 JANVIER 2013
N° 2013/30
Rôle N° 11/05477
SCI L'ATELIER
C/
SARL TOMMASI ET TEPMAHC
Grosse délivrée
le :
à : BADIE
JOURDAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Janvier 2011 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 10/02655.
APPELANTE
SCI L'ATELIER agissant poursuites et diligences de son représentant légal,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués
plaidant par Me Fabien DUPIELET de la ASS PIERI ETIENNE / DUPIELET FABIEN, avocats au barreau de MARSEILLE,
INTIMEE
SARL TOMMASI ET TEPMAHC prise en la personne de ses représentants légaux,
dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par la SCP J F JOURDAN - P G WATTECAMPS, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP JOURDAN - WATTECAMPS, avoués
plaidant par Me Nicolas COURTIER, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 04 Décembre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre
Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller
Mme Anne CAMUGLI, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2013
Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du Tribunal de grande instance de Marseille le 10 janvier 2011 dans l'instance opposant la SCI L'ATELIER à la SARL TOMMASI ET TEPMAHC ;
Vu l'appel interjeté par la SCI L'ATELIER à l'encontre de cette décision le 24 mars 2011 ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées par la SCI L'ATELIER le 12 décembre 2011;
Vu les conclusions récapitulatives déposées par la SARL TOMMASI ET TEPMAHC le 30 octobre 2012 ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 novembre 2012 ;
Par acte sous seing privé du 4 avril 1980, Madame [M] aux droits de laquelle se trouve la SCI L'ATELIER, a donné à bail commercial à la SOCIÉTÉ D'USINAGE MODERNE, aux droits de laquelle est venue la SOCIÉTÉ TOMMASI et TEPMAHC, pour une durée de 9 ans, des locaux situés [Adresse 5] moyennant un loyer annuel de 9.146,94 euros. Le contrat contenait une clause d'indexation du loyer en fonction de la variation de l'indice INSEE du coût de la construction.
A son échéance le bail s'est poursuivi par tacite reconduction.
La société locataire a formé une demande de renouvellement par acte extrajudiciaire du 22 décembre 2006.
Le principe du renouvellement a été accepté tacitement par le bailleur en l'absence de réponse de sa part dans le délai de trois mois.
Au 1er mai 2007, le loyer révisé en fonction de l'évolution de l'indice du coût de la construction s'est élevé à 24.058,33 euros.
Par acte d'huissier du 14 octobre 2008, la SCI L'ATELIER a sollicité la fixation du loyer à la valeur locative soit un prix annuel de 48.000 euros et ce en application de l'article L.145-39 du code de commerce aux termes duquel la révision du loyer peut être demandée lorsque par le jeu de la clause d'échelle mobile, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus de 25% par rapport au prix précédemment fixé .
Après notification le 3 décembre 2009 d'un mémoire demandant la révision du loyer annuel à 46.000 euros, la SCI L'ATELIER, par exploit du 25 février 2010, a saisi le juge des loyers commerciaux du Tribunal de grande instance de Marseille aux mêmes fins.
Par jugement rendu le 10 janvier 2011, le juge des loyers commerciaux l'a déboutée de sa demande en retenant que le silence du bailleur après la réception de la demande de renouvellement du bail vaut acceptation et qu'il y a lieu de retenir qu'un accord est intervenu sur le montant du loyer.
Régulièrement appelante de cette décision dont elle poursuit la réformation, la SCI L'ATELIER demande à la Cour de fixer le loyer du bail au 14 octobre 2008 à la somme annuelle de 46.000 euros HT et HC et de condamner en tant que de besoin la société TOMMASI et TEPMAHC à lui payer le rappel de loyer résultant de cette fixation avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2008.
Elle fait valoir que le défaut de réponse dans le délai de trois mois à compter de la demande de renouvellement du bail formée par la locataire vaut acceptation du principe du renouvellement mais pas du montant du loyer, que la prescription biennale a été interrompue par l'acte extrajudiciaire du 14 octobre 2008, que les conditions de l'article L.145-39 du code de commerce sont remplies dès lors que le loyer à prendre en considération pour calculer l'augmentation de plus de 25% est le loyer initial (9.146 euros) et non celui résultant de l'application de la clause d'échelle mobile (24.058,33 euros au 1er mai 2007), que la valeur locative doit être fixée au vu du rapport d'expertise de Madame [B] à 46.000 euros HT et HC par an.
La société TOMMASI et TEPMAHC soulève la prescription de l'action en indiquant que le mémoire préalable a été notifié le 3 décembre 2009 soit plus de deux ans après la demande de renouvellement du bail du 22 décembre 2006.
Au fond elle conclut au rejet de la demande en faisant valoir que le bail ne contient pas une clause d'échelle mobile mais un simple rappel de la révision triennale prévue par la loi et qu'en tout état de cause les conditions exigées par l'article L.145-39 du code de commerce ne sont pas remplies dès lors que le loyer n'a pas augmenté de plus du quart depuis sa précédente fixation, un nouveau loyer de 24.058,33 euros ayant été convenu en septembre 2008avec effet rétroactif au 1er mai 2007.
A titre subsidiaire elle indique que le loyer annuel réclamé de 46.000 euros est excessif et sollicite l'organisation d'une expertise aux frais avancés de la société appelante.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LA RECEVABILITÉ DE L'APPEL
Attendu que rien au dossier ne révèle une cause d'irrecevabilité de l'appel que la Cour serait tenue de relever d'office;
SUR LA PRESCRIPTION DE L'ACTION
Attendu qu'en application de l'article L.145-10 du code de commerce, le principe du renouvellement du bail au 29 septembre 2007 est réputé avoir été accepté par la société bailleresse, à défaut de réponse de sa part dans le délai de trois mois à compter de la demande de renouvellement signifiée par acte extrajudiciaire du 22 décembre 2006 ;
Attendu que l'action en fixation du prix du bail renouvelé était soumise à la prescription de deux ans prévue à l'article L.145-60 du même code, ce délai ayant commencé à courir à l'issue du délai de trois mois susvisé soit à compter du 22 mars 2007 ;
Attendu par contre que l'action en révision du loyer exercée en application de l'article L.145-39 du code de commerce, n'est soumise quant à elle à aucune condition de délais, la demande étant recevable dès que par le jeu de la clause d'échelle mobile le loyer a augmenté ou diminué de plus d'un quart ;
Attendu que la demande de révision du loyer a été formée par acte extrajudiciaire du 14 octobre 2008 sur le fondement de l'article L.145-39 du code de commerce et que l'assignation a été délivrée au visa du même texte le 25 février 2010 après notification d'un mémoire complémentaire le 4 décembre 2009 ;
Attendu en conséquence qu'il convient de rejeter la fin de non recevoir tirée de la prescription et de déclarer la demande recevable ;
SUR LE BIEN FONDE DE LA DEMANDE DE RÉVISION DU LOYER
Attendu que le bail en date du 4 avril 1980 comporte la clause suivante:
Il est expressément convenu que la révision du loyer aura lieu tous les trois ans sur la base de l'indice INSEE du coût de la construction ou sur la base de tout indice qui pourrait être substitué par la Loi et les Règlements en vigueur ;
Attendu que cette disposition s'analyse en une clause d'échelle mobile au sens de l'article L.145-39 du code de commerce ;
Attendu qu'en application de ce texte, l'augmentation ou la diminution du loyer de plus d'un quart par le jeu de la clause d'échelle mobile doit s'apprécier par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ;
Attendu qu'en l'espèce l'agence mandataire de la société bailleresse a notifié à la société TOMMASI et TEPMAHC, le 26 septembre 2008, soit postérieurement au renouvellement du bail intervenu le 29 septembre 2007, que le loyer était porté à 24.058,33 euros et a sollicité paiement d'un loyer mensuel de 2.004,87 euros à compter du 1er octobre 2008 ainsi que d'un arriéré de 3.924,80 euros pour la période du 1er mai 2007 au 30 septembre 2008 ;
Attendu qu'en l'état d'un accord des parties sur le renouvellement du bail au 29 septembre 2007 et sur le montant du loyer du bail renouvelé, un nouveau bail a pris effet ;
Attendu que le prix de ce bail ayant été fixé contractuellement à 24.058,33 euros HT par an, la société bailleresse ne peut solliciter la révision du loyer à compter du 14 octobre 2008 en application de l'article L.145-39 du code de commerce, en invoquant une augmentation de plus du quart par rapport au prix du bail initial en date du 4 avril 1980 soit 9.146 euros ;
Que le jugement déféré sera ainsi confirmé ;
SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET LES DÉPENS
Attendu qu'il est équitable d'allouer à la SARL TOMMASI et TEPMAHC la somme de 1.000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile; Que ce qui est jugé commande de mettre les dépens à la charge de la société appelante dont les prétentions sont rejetées, qu'il n'y a pas lieu toutefois d'y ajouter le droit proportionnel prévu par l'article 10 du décret du 12 décembre 1996, mis par ce texte à la charge du créancier;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement
- Confirme le jugement déféré
Y ajoutant
- Condamne la SCI L'ATELIER à payer à la SARL TOMMASI ET TEPMAHC la somme de 1.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile
- Rejette toutes autres demandes des parties
- Condamne la SCI L'ATELIER aux dépens d'appel distraits conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT