COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 16 JANVIER 2013
N°2013/50
Rôle N° 11/14068
SAS BALL PACKAGING EUROPE
C/
CPCAM DES [Localité 2]
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE
Grosse délivrée
le :
à :
Me Michel DOSSETTO, avocat au barreau
de MARSEILLE
CPCAM DES [Localité 2]
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOUCHES DU RHONE en date du 06 Juillet 2011,enregistré au répertoire général sous le n° 20901000.
APPELANTE
SAS BALL PACKAGING EUROPE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Michel DOSSETTO, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
CPCAM DES [Localité 2], demeurant [Adresse 3]
représenté par M. [T] [L] (Autre) en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 1]
non comparant
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COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 05 Décembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Florence DELORD, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Bernadette AUGE, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Farida ABBOU.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Janvier 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Janvier 2013
Signé par Madame Bernadette AUGE, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M.[M], salarié de la société Ball Packaging depuis 1991, a exercé des fonctions d'opérateur sur ligne de production jusqu'en 1996, puis opérateur palétiseur en 1996, puis, de 1997 à 2002, il a travaillé au « contrôle-qualité ».
Il a exercé des fonctions de cariste à partir de janvier 2003.
Son travail consistait à transporter des palettes de boîtes de conserves entre les camions de livraison et les lieux de stockage dans l'usine.
Le 20 janvier 2007, il a fait une déclaration de maladie professionnelle (tableau 42: surdité bilatérale), en joignant un certificat médical et un bilan audiométrique du 27 décembre 2006.
Par décision du 13 juillet 2007, Caisse Primaire d'assurance maladie a reconnu sa pathologie comme maladie professionnelle.
Par décision du 2 décembre 2008, la Commission de recours amiable de la Caisse a rejeté le recours de la société Ball Packaging.
Par jugement du 6 juillet 2011, le Tribunal des Affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône a débouté la société Ball Packaging de son recours contre cette décision.
La société Ball Packaging a fait appel de ce jugement, en contestant l'exposition au risque puisque le salarié travaillait non pas à la fabrication mais au dépôt, et en maintenant que toutes les protections anti-bruit étaient assurées, en rappelant que les visites médicales du travail incluant un audiogramme (une fois par an alors que la législation n'en prévoit qu'une tous les deux ans) n'avaient jamais mis en évidence de déficit fonctionnel avant décembre 2006, et en estimant que les premiers juges n'avaient pas tenu compte des antécédents professionnels de son salarié aux Chantiers Navals (chaudronnier).
La Caisse a rappelé que l'employeur avait lui-même admis pendant l'enquête le caractère bruyant de l'usine (plus de 84 décibels), que le seuil du bruit ne faisait pas partie des critères permettant la reconnaissance de la maladie du tableau 42, et elle a demandé la confirmation du jugement.
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Par arrêt du 19 septembre 2012, la Cour a constaté que les critères prévus par le tableau 42 des maladies professionnelles étaient établis, a rejeté les critiques de la société Ball Packaging sur le caractère professionnel de la pathologie de M.[M], et, sur l'exonération de la présomption d'imputabilité soutenue par l'appelante, elle a demandé aux parties de s'expliquer et de commenter les données chiffrées du rapport d'expertise technique figurant au dossier.
A l'audience de renvoi du 5 décembre 2012, les parties ont développé oralement leurs nouvelles conclusions, la société Ball Packaging demandant à la Cour d'infirmer le jugement et de débouter M.[M] de sa demande de prise en charge de sa maladie par la Caisse au titre du tableau des maladies professionnelles, et la Caisse Primaire d'assurance maladie demandant à la Cour de confirmer le jugement déféré et de déclarer opposable à l'employeur la reconnaissance de la maladie professionnelle de M.[M].
La MNC régulièrement avisée n'a pas comparu.
MOTIFS DE LA DECISION
L'audiogramme a été réalisé le 27 décembre 2006, après 4 jours pleins d'arrêt de l'exposition aux bruits, et la déclaration de maladie professionnelle a été faite le 20 janvier 2007.
La Cour a constaté d'une part que les critères posés par le tableau 42 étaient remplis puisque l'activité visée au § 4 est « la manutention mécanisée de récipients métalliques »
et que la maladie est reconnue si la perte auditive est d'au moins 35 décibels ( 50 et 53 décibels en l'espèce ), le délai de prise en charge n'ayant pas été critiqué.
L'article L 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale prévoit qu' « est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ».
L'employeur peut s'exonérer de cette présomption d'imputabilité en apportant la preuve que le travail n'a joué aucun rôle causal.
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L'appelante fait valoir que M.[M] n'avait jamais travaillé dans le secteur réservé à la fabrication des canettes de boisson, qui est effectivement une zone très bruyante, mais uniquement dans la zone de dépôt qui n'est pas exposée au bruit, étant précisé que l'activité de cariste n'est pas accidentogène.
Elle ajoute que M.[M] avait toujours été déclaré apte à cette fonction de cariste par le médecin du travail, y compris sur le plan auditif, et le docteur [B] en a attesté par courrier du 22 juillet 2011.
Enfin, la mise à disposition et l'utilisation d'un casque anti-bruit avaient pour objet (et donc pour effet) de réduire l'exposition au risque pour tous les salariés travaillant comme M.[M] en qualité de cariste.
La Caisse a rappelé que, quelle que soit l'importance des bruits auxquels avait été exposé le salarié, la surdité était présumée imputable au travail dès lors que ces bruits figuraient sur la liste du tableau 42.
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Certes, la plus ou moins forte intensité des bruits auxquels le salarié a été exposé n'est pas un critère d'imputabilité professionnelle de la surdité au sens du tableau 42, et la Cour a précisément retenu le caractère professionnel de cette pathologie.
En revanche, et pour être exonéré de cette présomption d'imputabilité, l'employeur est fondé à démontrer qu'en raison de leur faible intensité, les bruits effectivement ressentis ne peuvent avoir causé cette surdité.
La Cour constate que M.[M] circulait sur des chariots conformes à la réglementation de la Communauté Européenne (101-103 dB), qui fixe le seuil maximal à 135 dB, ainsi qu'il en est justifié par les déclarations de conformité versées au dossier.
Les rapports et analyses ont été réalisés par ou à l'initiative de l'employeur en 2002, 2003 et 2006.
La Caisse n'a pas critiqué les mesures effectuées par l'employeur.
Il ressort du document établi en 2002, en sa page 24 concernant le poste occupé « actuellement » par M.[M], que l'exposition quotidienne au bruit en dehors des périodes de repas est de 84 décibels sans dépassement de niveau de pression acoustique de crête de 135 et de 140 dB.
L'atténuation de bruit annoncée dans la brochure concernant le casque porté par le salarié est de 32 décibels SNR (H:32; M:29 et L:23).
Le rapport de la société Expertis (« Estimation de l'exposition au bruit de la société Ball Packaging- juillet 2006 » ) a été versé dans son intégralité aux débats suite à l'arrêt de cette Cour du 19 septembre dernier: il y est précisé que les mesures ont été faites à l'intérieur du casque anti-bruit , dont il est admis que M.[M] le portait en permanence.
Les rédacteurs de ce rapport ont constaté que ce casque réduisait le niveau sonore réellement ressenti par le salarié à (84 dB ' 32 dB = ) 52 Db.
La Cour considère que le port du casque anti-bruit réduisait de manière significative le niveau sonore des bruits auxquels avait été exposé M.[M].
Selon le rapport du 28 janvier 2003 « Continental CAN », le seuil d'alerte est 85 dB et le seuil de danger est 90dB (voir page 4).
L'appelante a rapporté la preuve que son salarié, M.[M], avait été exposé à des bruits de faible intensité à son poste de travail et qu'une exposition professionnelle à des bruits effectivement ressentis de 52 dB ne peut pas être la cause de l'origine et du développement de sa surdité dans les conditions fixées par le tableau 42.
La Cour considère que les éléments de fait ci-dessus analysés permettent d'exonérer la société Ball Packaging de la présomption d'imputabilité de la pathologie reconnue par la Caisse.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en matière de sécurité sociale,
Vu l'arrêt de cette Cour en date du 19 septembre 2012 qui a constaté que les critères prévus par le tableau 42 des maladies professionnelles sont établis et a rejeté les critiques de la société Ball Packaging sur le caractère professionnel de la maladie de M.[M],
Déclare fondée la demande de la société Ball Packaging tendant à être exonérée de la présomption d'imputabilité,
En conséquence, infirme le jugement du Tribunal des Affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône en date du 6 juillet 2011,
Et statuant à nouveau:
Déclare inopposable à la société Ball Packaging la décision de la Caisse primaire d'assurance maladie en date du 13 juillet 2008 de reconnaître la maladie professionnelle (tableau 42) de M.[M].
LE GREFFIER LE PRESIDENT