La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/11/2012 | FRANCE | N°11/20855

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 30 novembre 2012, 11/20855


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 30 NOVEMBRE 2012



N° 2012/ 1217













Rôle N° 11/20855





[F] [C] épouse [V]





C/



Association LEO LAGRANGE ANIMATION PACA

FEDERATION NATIONALE LEO LAGRANGE













Grosse délivrée le :



à :



-Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Martine AELION-GUERINI, avocat

au barreau de MARSEILLE



- Me Bertrand DOMENACH, avocat au barreau de PARIS









Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 24 Juin 2009,...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 30 NOVEMBRE 2012

N° 2012/ 1217

Rôle N° 11/20855

[F] [C] épouse [V]

C/

Association LEO LAGRANGE ANIMATION PACA

FEDERATION NATIONALE LEO LAGRANGE

Grosse délivrée le :

à :

-Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Martine AELION-GUERINI, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Bertrand DOMENACH, avocat au barreau de PARIS

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 24 Juin 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 07/1007.

APPELANTE

Madame [F] [C] épouse [V], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Association LEO LAGRANGE ANIMATION PACA, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Martine AELION-GUERINI, avocat au barreau de MARSEILLE

FEDERATION NATIONALE LEO LAGRANGE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Bertrand DOMENACH, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Edith FAURE-MURET, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 02 Octobre 2012 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre

Monsieur Patrick ANDRE, Conseiller

Madame Catherine VINDREAU, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2012.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2012.

Signé par Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [V] a été embauchée par l'établissement régional Léo Lagrange animation Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'association) à partir du mois de novembre 2000 en qualité d'animatrice soutien scolaire, puis d'animatrice CLSH, et enfin de responsable secteur enfant

Cet emploi est soumis à la convention collective de l'animation.

Le 20 juillet 2005, Mme [V] a été convoquée une première fois à un entretien préalable et le 9 août 2005, un licenciement lui a été notifié pour motif économique.

Après convocation à un second entretien préalable le 3 mai 2006, lors d'un congé maternité, Mme [V] a été licenciée par lettre du 28 novembre 2007 pour motif économique.

* * *

Mme [V] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Marseille pour contester cette mesure et demander à l'encontre de son employeur le règlement des sommes dues.

* * *

Par jugement de départage en date du 24 juin 2009, le Conseil de Prud'hommes de Marseille a

débouté Mme [V] de ses demandes formées à l'encontre de l'établissement régional Léo Lagrange animation Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'association) et de la fédération nationale Léo Lagrange (la fédération) laquelle a été mise hors de cause de même que l'UES.

* * *

Mme [V] a interjeté appel de cette décision.

* * *

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, Mme [V] demande l'infirmation du jugement et de dire:

- que son licenciement économique est nul,

-condamner solidairement l'association et la fédération, ou à défaut l'association à payer les sommes suivantes:

-50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul

-5000 euros pour non respect de la proposition du congé de reclassement

Subsidiairement dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamner solidairement l'association et la fédération, ou à défaut l'association à payer les sommes suivantes:

-50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul

-5000 euros pour non respect de la proposition du congé de reclassement

Très subsidiairement

-condamner solidairement l'association et la fédération, ou à défaut l'association à payer les sommes suivantes:

-50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des critères relatifs à l'odre des licenciements

-5000 euros pour non respect de la proposition du congé de reclassement

En tout état de cause,

-condamner solidairement l'association et la fédération ou à défaut l'association à payer les sommes suivantes:

- rappel de salaires sur points d'ancienneté: 3078,38euros,

- congés payés afférents:638,68 euros,

- rappel de salaires sur le classement au groupe 6 indice 350 points: 15008 euros

- congés payés afférents: 1800, 96euros,

- frais irrépétibles: 2000 euros à la charge de chacune des intimées.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, l'association demande la confirmation du jugement et une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile , et, très subsidiairement , la restitution par Mme [V] des sommes par elle perçues en vertu du PSE.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, la fédération demande sa mise hors de cause de voir débouter Mme [V] de ses prétentions et une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

* * *

Pour un plus ample exposé des faits de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer à la décision déférée et aux écritures déposées oralement soutenues à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Il importe de souligner en préalable que l'UES, mise hors de cause par le premier juge, n'était et n'est pas partie en tant que telle à la procédure.

Mme [V] a été licenciée pour motif économique dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, les raisons invoquées par l'employeur étant les 'difficultés économiques récurrentes de l'établissement régional Léo Lagrange Animation PACA entraînant la suppression de [son] poste de travail' et son refus des propositions de postes qui lui avaient été faites.

Mme [V] conteste cette décision, d'une part en raison du non respect de la procédure, et subsidiairement pour absence de cause réelle et sérieuse ;

Elle argue du défaut de présentation du plan de reclassement aux représentants du personnel, du refus du Comité d'entreprise d'émettre en conséquence un avis au regard de l'insuffisance des dispositions présentées, procédant d'un défaut d'appréhension des mesures au niveau de L'UES constituée par l'association et la fédération, et enfin du non respect des critères de l'ordre des licenciements ;

Sur le fond elle soutient que ces dernières avaient la qualité de co-employeur au regard des statuts et des conditions de fonctionnement de ces organismes, dont il ressort que l'une, l'association, est assujettie à l'autre ;

Les intimées contestent toute qualification de co-employeur au regard de l'absence de dépendance économique , de solidarité au sein de l'UES faute de périmètre économique, et, en définitive, de toute assimilation à un groupe de sociétés ;

La reconnaissance de principe de la qualification de co-employeur n'est pas, en réalité le débat dès lors qu'en droit, les difficultés économiques invoquées par l'employeur doivent s'apprécier dans le secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise ;

Il en découle que, en tout état de cause, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; en outre, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, le procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés, s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi, n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel qui doivent être réunis, informés et consultés, la validité du plan de sauvegarde étant appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou l'unité économique et sociale ou le groupe.

En l'espèce, l'association, qui emploie plus de cinquante salariés, est adhérente de la fédération et ses statuts prévoient notamment:

- qu'elle s'oblige au respect des statuts et du règlement intérieur de la fédération,

- qu'elle est membre de l'unité économique et sociale Léo Lagrange dont le chef de file est la fédération - l'Ues ayant été constatée par décision du tribunal d'instance de Pantin du 23 juin 2004,

- qu'elle est intégrée dans le périmètre de combinaison des comptes de la fédération à la suite de la signature d'un protocole d'intégration du 30 mai 2002,

- que son conseil d'administration est composé de deux collèges dont le collège national majoritaire,

- que le délégué régional, qui exerce la direction de l'association, est nommé par la fédération.

Effectivement, l'association a signé, le 30 mai 2002, un 'protocole d'intégration au périmètre économique de consolidation de la fédération' aux termes duquel :

- depuis le 1er janvier 2002, la fédération mandate ses administrateurs chargés de la représenter au sein du conseil d'administration de l'association, le président de celle-ci étant un membre de la fédération,

- l'association rejoint les critères de gestion établis par la fédération pour ses établissements régionaux,

- l'association paye une cotisation à la fédération équivalant 4,5 % de sa masse salariale brute.

En outre, cet accord du 30 mai 2002 prévoyait expressément qu' 'eut égard au capital mobilier transféré par Léo Lagrange Animation PACA à la F.N.L.L., qui jouira de la pleine propriété de l'immeuble concerné, il est convenu, pour une durée de 8 ans, que la cotisation due par Léo Lagrange Animation PACA à la F.N.L.L. est minorée de 76 224,51 euros, soit 500 000 Francs par an', cette dernière disposition prenant fin le 31 décembre 2009 ; ainsi, la fédération reconnaissait, contrairement à ce qu'elle soutient aujourd'hui dans ses conclusions, que l'association, en tant que membre majoritaire de l'union d'association du centre coopératif Léo Lagrange de Marseille, a bien accepté, lors de la dissolution de cette union le 30 juillet 2003, de lui transmettre, officiellement à titre gratuit mais en réalité sous condition de minoration des cotisations, les parts qu'elle détenait dans la propriété d'un immeuble situé sur la Canebière à Marseille ; or, les deux parties devaient signer un nouveau protocole d'accord le 1er juin 2005 aux termes duquel la disposition du précédent protocole prévoyant la minoration des cotisations était supprimée, au motif ,fallacieux, qu'il avait été mis en place dans le souci 'de respecter l'histoire de la fédération départementale des Bouches du Rhône dans l'action des clubs Léo Lagrange' ; toutefois, l'association prétend, sans être contredite, que la fédération l'a soutenue dans ses difficultés, outre par l'exonération des cotisations de 2002 à 2004, mais également en abonnant une créance de 119.000 euros en 2004 et en lui accordant une subvention exceptionnelle de 261.000 euros en 2005.

Il résulte de ce qui précède que les difficultés économiques invoquées par l'employeur n'auraient pas du être appréciées uniquement au niveau de l'association - seul employeur de Mme [V] - mais bien dans tout le secteur d'activité de l'animation du groupe constitué par la fédération et toutes ses associations et instituts adhérents ; or, si la fédération justifie aujourd'hui que le secteur animation était également en difficulté en 2005 et 2006, il reste que l'association n'a jamais invoqué les difficultés économiques du secteur d'activité de la fédération dans la procédure de licenciement mise en oeuvre en 2006.

En effet, le 'projet de redéploiement des activités de Léo Lagrange Animation Provence-Alpes-Côte d'Azur' et le plan de sauvegarde de l'emploi soumis le 24 février 2006 à l'examen du comité d'entreprise national de l'unité économique et sociale Léo Lagrange ne comportent aucune analyse de la situation économique du secteur d'activité de la fédération (pas même d'ailleurs ne serait-ce qu'un inventaire des membres composant ladite fédération et travaillant dans le secteur de l'animation).

C'est en partie pourquoi le comité d'entreprise de l'Ues a :

- refusé de donner son avis le 24 février 2006 aux motifs que ses membres restaient 'dans l'attente des compléments d'information concernant le PSE, éléments d'ordre organisationnels et économiques' et n'acceptaient pas 'le saucissonnage des différents PSE au niveau de l'UESLL',

- ont décidé d'une expertise comptable lors de leur réunion du 9 mars 2006 au motif notamment que 'les informations remises en séance ne leurs permettent pas de se forger une opinion objective et sincère' sur le Pse, expertise qui n'a pu être réalisée puisqu'elle aurait du être ordonnée lors de la première réunion du Ce.

En outre, l'inspection du travail de [Localité 6] - régulièrement informée du projet de licenciement - a relevé également, dans un courrier du 13 mars 2006 adressé à un délégué syndical, que 'la procédure collective engagée découle exclusivement des difficultés économiques qui affectent l'Etablissement Régional Léo Lagrange PACA (...) et que les difficultés de l'entreprise ne peuvent suffire à justifier un licenciement économique si le secteur d'activité du groupe auquel elle appartient n'en connaît pas'.

Le Pse élaboré par l'association est donc nul ce qui emporte la nullité des licenciements prononcés.

Mme [V] est donc fondée en sa demande d'indemnisation qui sera fixée à la somme de 20.000,00 euros au regard des éléments d'appréciation suffisants dont dispose la cour.

L'association, qui appartient à la fédération dont le siège est en France et dont l'effectif cumulé est d'au moins 1 000 salariés, aurait dû proposer un congé de reclassement à ses salariés dont le licenciement était envisagé ; cette absence de proposition a nécessairement causé un préjudice à Mme [V] qui sera justement réparé par l'octroi de la somme de 500,00 euros.

Les dommages-intérêts portent intérêts à compter de la décision qui les ordonne ; en l'espèce il ne convient pas de faire remonter à titre de complément d'indemnisation le point de départ du cours des intérêts au jour de la demande en justice.

Les sommes allouées seront capitalisées conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

Le remboursement par Mme [V] des sommes perçues par elle dans le cadre du PSE doit être ordonné.

La fédération, qui ne saurait être considérée comme co-employeur de Mme [V] sera mise hors de cause mais elle conservera la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens.

L'équité commande que l'association verse à Mme [V] 800,00 euros au titre de ses frais irrépétibles ; elle sera également condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Infirme le jugement déféré,

Met hors de cause la fédération nationale Léo Lagrange qui conservera toutefois la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens,

Dit que le licenciement de Mme [V] est nul,

Condamne l'établissement régional Léo Lagrange animation Provence-Alpes-Côte d'Azur à payer à Mme [V] la somme de 20.500 euros à titre de dommages-intérêts,

Dit que les intérêts sur la somme susdite dûs à compter du présent arrêt seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne Mme [V] à rembourser à l'établissement régional Léo Lagrange animation Provence-Alpes-Côte d'Azur les sommes perçues par elle dans le cadre du PSE,

Condamne l'établissement régional Léo Lagrange animation Provence-Alpes-Côte d'Azur à verser à Mme [V] la somme de 800,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le condamne aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 11/20855
Date de la décision : 30/11/2012

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-30;11.20855 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award