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23/11/2012 | FRANCE | N°12/08867

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre a, 23 novembre 2012, 12/08867


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 23 NOVEMBRE 2012



N°2012/581













Rôle N° 12/08867







SA SAINT GOBAIN ISOVER





C/



DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS DE PROVENCE





































Grosse délivrée

le :

à :



ME SOULE

Me DI

FRANCISCO





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Mars 2012 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11-11-579.





APPELANTE



SA SAINT GOBAIN ISOVER, établissement d'[Localité 5], [Adresse 6], demeurant [Adresse 4]

représentée et plaidant par Me Dominique S...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 23 NOVEMBRE 2012

N°2012/581

Rôle N° 12/08867

SA SAINT GOBAIN ISOVER

C/

DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS DE PROVENCE

Grosse délivrée

le :

à :

ME SOULE

Me DI FRANCISCO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Mars 2012 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11-11-579.

APPELANTE

SA SAINT GOBAIN ISOVER, établissement d'[Localité 5], [Adresse 6], demeurant [Adresse 4]

représentée et plaidant par Me Dominique SOULE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS DE PROVENCE, demeurant [Adresse 1]

représentée et plaidant par Me Jean DI FRANCISCO, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Daniel ISOUARD, Président, et Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Conseiller, chargés du rapport.

Monsieur Daniel ISOUARD, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président

Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Conseiller

Madame Sylvie PEREZ, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2012.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2012.

Signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société Saint-Gobain Isover consomme du gaz pour la fabrication de fibres de verre à son usine d'[Localité 5] (Vaucluse). À ce titre elle a réglé au titre de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (la TICGN) la somme de 881 617,26 euros pour la période du 1er janvier 2004 au 31 mars 2008.

Estimant cette taxe contraire à la directive européenne 2003/96/CE, elle en a demandé le 22 mars 2010, le remboursement à la Direction Régionale des Douanes et des Droits Indirects de Provence et a essuyé un refus de cette administration.

La société Saint-Gobain Isover a saisi le tribunal d'instance d'Aix-en-Provence pour obtenir la restitution de ces droits et cette juridiction, par jugement du 16 mars 2012, a déclaré prescrite son action pour les droits acquittés avant le 22 mars 2007 et mal fondée sa demande pour ceux réglés pour la période du 23 mars 2007 au 31 mars 2008.

Le 9 mai 2012, la société Saint-Gobain Isover a interjeté appel de cette décision. Elle sollicite sa réformation et la condamnation de la direction des Douanes à lui rembourser la somme de 881 617,26 euros ainsi que celle de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle prétend que son action ne s'avère pas prescrite pour la totalité de la période concernée. Pour cela elle se prévaut des dispositions de l'article 352 ter du Code des douanes et expose que l'arrêt du 29 mars 2007 de la Cour de justice de l'Union européenne qui a condamné la France pour ne pas avoir transposé dans le délai expirant au 31 décembre 2003 la directive 2003/96/CE a rendu la TICGN illégale et constitue la première décision de révélation du droit à restitution au titre de la période débutant le 1er janvier 2004.

Au fond, la société Saint-Gobain Isover prétend que le défaut de transposition par la France de la directive 2003/96/CE dans le droit interne incompatible avec le droit communautaire a eu comme conséquence d'écarter ce droit interne même si les dispositions de la directive européenne permettaient à l'État membre d'instaurer la taxe payée et qu'en absence d'un droit interne conforme à la directive européenne, la TICGN ne peut s'avérer due. Elle souligne que la transposition doit s'effectuer dans un cadre légal, précis et transparent.

La direction des Douanes conclut à la confirmation du jugement attaqué et à la condamnation de la société Saint-Gobain Isover à lui payer la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle invoque la prescription de l'action de son adversaire pour la période antérieure au 22 mars 2007 en vertu de l'article 352 du Code des douanes, l'arrêt du 29 mars 2007 de la Cour de justice de l'Union européenne ne s'étant pas prononcé sur la validité de l'article 266 quinquies de ce code dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 décembre 2007.

Elle prétend que la société Saint-Gobain Isover ne peut invoquer l'absence de transposition de la directive 2003/96/CE en droit interne dès lors que cette directive ne crée à son profit aucun droit à l'exonération de la TICGN compte tenu de l'utilisation du gaz naturel dans un procédé minéralogique.

Le Ministère public a conclu à la confirmation du jugement attaqué.

* *

* * *

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la prescription :

L'action de la société Saint-Gobain Isover se fonde sur l'article 226 quinquies dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur à compter du 1er avril 2008 de la loi du 24 décembre 2007, texte qui serait contraire selon elle à la directive 2003/96/CE et invalidé par l'arrêt du 29 mars 2007 de la Cour de justice de l'Union européenne.

L'article 352 ter du Code des douanes énonce : 'Lorsque le défaut de validité d'un texte fondant la perception d'une taxe recouvrée par les agents de la direction générale des douanes et des droits indirects a été révélé par une décision juridictionnelle, l'action en restitution mentionnée à l'article 352 ne peut porter, sans préjudice des dispositions de l'article 352 bis, que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle au cours de laquelle cette décision est intervenue'.

Mais l'arrêt du 29 mars 2007 de la Cour de justice de l'Union européenne s'est limité à condamner la France pour avoir manqué à ses obligations qui lui incombaient en ne prenant pas, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2003/96/CE du Conseil du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité.

Cet arrêt qui ne se prononce pas sur la validité du droit interne français par rapport à cette directive, ne révèle pas le défaut de validité de l'article 226 quinquies dans sa rédaction litigieuse.

D'ailleurs, si la société Saint-Gobain Isover estimait que ce droit interne était contraire à cette directive, elle pouvait à partir du 1er janvier 2004, date prévue de transposition de cette directive, en invoquer les dispositions contre le droit interne et aucun obstacle ne l'empêchait d'agir.

Ainsi la société Saint-Gobain Isover ne peut se prévaloir de l'article 352 ter du Code des douanes.

Son action se trouve régie par l'article 352 du même code qui dispose : 'Aucune personne n'est recevable à former, contre l'administration des douanes, des demandes en restitution des droits et de marchandises et paiements de loyers, trois ans après l'époque que les réclamateurs donnent aux paiements des droits, dépôts des marchandises et échéances des loyers'.

Ayant formé sa demande en restitution le 22 mars 2010, celle-ci s'avère prescrite pour la période antérieure au 22 mars 2007.

Le jugement attaqué doit être confirmé de ce chef.

Sur le fond :

C'est à tort que la société Saint-Gobain Isover prétend que le défaut de transposition de la directive 2003/96/CE dans le droit interne français non conforme à cette directive a eu pour effet de priver ce droit de toute portée.

En effet aucun texte communautaire ou national ne sanctionne le défaut de transposition d'une directive par la nullité ou l'annihilation du texte de droit interne.

Ce défaut de transposition permet aux justiciables d'invoquer, après l'expiration du délai de transposition, les règles d'une directive européenne qui se trouveraient contraires à un texte de droit interne.

En l'espèce la société Saint-Gobain Isover doit démontrer que la directive 2003/96/CE la dispense du règlement de TICGN et s'oppose ainsi à l'article 266 quinquies dans sa rédaction antérieure au 1er avril 2008 sur le fondement duquel cette taxe a été payée.

Mais la directive 2003/96/CE en son article 2, 4b énonce qu'elle ne s'applique pas à certaines utilisations des produits énergétiques et de l'électricité et notamment dans des procédés minéralogiques. Or il est constant que l'utilisation par la société Saint-Gobain Isover du gaz naturel sert à la fabrication de fibres de verre et s'effectue dans le cadre d'un procédé minéralogique.

Ainsi aucune règle édictée par cette directive ne s'applique à l'usage fait par la société Saint-Gobain Isover du gaz naturel et cette société ne peut les revendiquer contre le droit interne.

En conséquence elle ne peut réclamer le remboursement de la TICGN payée entre le 1er janvier 2004 et le 31 mars 2008, la suppression de cette taxe après cette date relevant d'une décision du législateur français dans son pouvoir de fixation des taxes et non pas de la nécessité de la transcription de la directive 2003/96/CE.

La confirmation du jugement attaqué s'impose.

Succombant à son recours, la société Saint-Gobain Isover doit être condamnée à payer à la direction des Douanes la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

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* *

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du 16 mars 2012 du tribunal d'instance d'Aix-en-Provence ;

Y ajoutant ;

Condamne la société Saint-Gobain Isover à payer à la Direction Régionale des Douanes et Droits Indirects de Provence la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 12/08867
Date de la décision : 23/11/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°12/08867 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-23;12.08867 ?
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