COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
6e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 22 NOVEMBRE 2012
N° 2012/651
Rôle N° 11/05891
[I] [L]
C/
[Z] [H] [P] épouse [L]
Grosse délivrée
le :
à :
la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE
SCP BADIE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge aux affaires familiales de NICE en date du 18 Mars 2011 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 07/5329.
APPELANT
Monsieur [I] [L]
né le [Date naissance 5] 1944 à [Localité 19] (43)
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 7]
représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
Plaidant par Me Agnès ETROY, avocat au barreau de NICE
INTIMÉE
Madame [Z] [H] [P] épouse [L]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/000290 du 10/01/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 11] (ALGERIE) (99)
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constitué en lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL,avoués
Plaidant par Me Jean-François CECCALDI, avocat au barreau d'AVIGNON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 Octobre 2012 en Chambre du Conseil. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Arlette MEALLONNIER, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Arlette MEALLONNIER, Présidente
Monsieur Pascal GUICHARD, Conseiller
Madame Sylvie BLUME, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Valérie BERTOCCHIO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2012.
Signé par Madame Arlette MEALLONNIER, Présidente et Madame Valérie BERTOCCHIO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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OBJET SUCCINCT DU LITIGE - PRÉTENDIONS ET ARGUMENTS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 31 Mars 2011 par Monsieur [I] [L] à l'encontre d'un jugement du Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de NICE du 18 Mars 2011,
Vu les conclusions de Madame [Z] [P] épouse [L] du 20 Septembre 2012,
Vu les conclusions de Monsieur [I] [L] du 25 Septembre 2012,
Vu l'ordonnance de clôture du 25 Septembre 2012 pour l'affaire fixée à l'audience du 02 Octobre 2012.
o0o0o0o
Monsieur [I] [L] et Madame [Z] [P] épouse [L] se sont mariés le [Date mariage 1] 1965 à [Localité 15].
Deux enfants sont issus de cette union :
* [C], née le [Date naissance 3] 1967 à [Localité 14],
* [B], né le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 16] (CAMEROUN) décédé le [Date décès 6] 2004.
Madame [Z] [P] épouse [L] a déposé une requête en divorce le 18 Septembre 2007.
Une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 24 Juin 2008. Monsieur [I] [L] a interjeté appel de cette ordonnance de non-conciliation et un arrêt a été rendu le 15 Janvier 2009.
Par jugement du 18 Mars 2011 auquel il convient expressément de se référer pour le rappel des faits et de la procédure antérieure, le Tribunal de Grande Instance de NICE a notamment :
- prononcé le divorce des époux [P]/[L] sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil,
- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux et invité les parties à se rapprocher d'un Notaire pour qu'il soit amiablement procédé, le cas échéant,
- dit que Monsieur [I] [L] devra verser à Madame [Z] [P] épouse [L] une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 150 000 € qui s'accompagnera d'une rente viagère de 650 € qui devra être versée le premier de chaque mois avec indexation,
- débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
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- condamné Monsieur [I] [L] aux dépens dont distraction.
Monsieur [I] [L] demande à la Cour de :
- réformer partiellement le jugement entrepris,
- réduire le montant de la prestation compensatoire à de plus justes proportions,
- dire que la prestation compensatoire sera versée uniquement sous forme de capital, lequel ne saurait excéder la somme de 50 000 €,
- condamner Madame [Z] [P] épouse [L] à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux dépens dont distraction.
Monsieur [I] [L] fait valoir à l'appui de ses prétentions que les époux sont tous les deux titulaires de CAP et ont eu des formations professionnelles équivalentes. Madame [Z] [P] épouse [L] ne démontre pas selon lui avoir collaboré à l'activité professionnelle de son mari sans être rémunérée, l'aide occasionnelle qu'elle a apportée n'ayant pas excédé sa participation aux charges du ménage.
Par son travail acharné pendant 50 ans, Monsieur [I] [L] expose qu'il a constitué un patrimoine non négligeable dont son épouse profite par moitié. Madame [Z] [P] épouse [L] bénéficie, en outre, dans la succession de ses parents, de droits immobiliers et immobiliers d'importance qu'elle évalue, sans aucun justificatif à la somme de 125 000 €.
Elle occupe d'ores et déjà un appartement à [Localité 12] qui lui restera probablement dans le maintien ou la liquidation de l'indivision successorale, raison pour laquelle, elle n'a pas acquis de nouveau logement.
Elle dispose des revenus de la somme de 300 000 € provenant de la vente de la villa commune. Ledit capital, placé à 4% d'intérêts par an, lui rapporte déjà 1000 € par mois.
Monsieur [I] [L] expose qu'il n'a pas d'espérance successorale et qu'il devra prochainement participer aux frais d'une maison de retraite pour sa mère âgée de 90 ans. Contrairement à son épouse, il devra consacrer la quasi-totalité de ses droits dans la communauté à l'acquisition d'un logement et il lui restera que sa retraite pour vivre.
La différence des droits à la retraite des époux est largement compensée par celle de leurs patrimoines respectifs. Il propose de régler une prestation compensatoire sous forme d'un capital, réduit à de plus justes proportions, lequel ne saurait excéder la somme de 50 000 €.
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Madame [Z] [P] épouse [L] demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
' prononcé le divorce de Monsieur [I] [L] et de Madame [Z] [P] épouse [L] sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil,
' ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux et invité les parties à se rapprocher d'un notaire pour qu'il soit amiablement procédé, le cas échéant,
' dit que le divorce prendra effet entre les époux à la date de l'ordonnance de non-conciliation,
' constaté que la décision emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu'à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l'un des époux et des dispositions à cause de mort que les époux ont pu s'accorder mutuellement par contrat de mariage ou pendant l'union,
- le réformer partiellement et :
' condamner Monsieur [I] [L] à lui verser au titre de la prestation compensatoire une somme en capital de 350 000 €, outre une rente viagère de 1000 € par mois,
' condamner Monsieur [I] [L] à lui verser la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamner Monsieur [I] [L] aux dépens dont distraction.
Madame [Z] [P] épouse [L] rappelle que le mariage a duré 42 ans, que ses ambitions de carrière ont été abandonnées pour se consacrer à l'éducation des deux enfants du couple, qu'elle a consenti des sacrifices professionnels pour favoriser la carrière de son mari, qu'elle a été conjoint collaborateur sans être rémunérée, qu'elle ne peut plus à son âge 66 ans envisager un avenir professionnel.
Elle estime qu'elle a également sacrifié sa santé pour la réussite professionnelle de son mari en résidant au CAMEROUN. Elle est aujourd'hui invalide dans une proportion de 81%. Elle considère réunir les trois conditions pour bénéficier d'une rente viagère au moins en partie.
Elle a du subir des attitudes vexatoires postérieures à la séparation des époux. Son mari s'est moqué des décisions de justice.
Elle sollicite l'octroi d'une prestation compensatoire d'un montant de 350 000 € en capital, outre une rente viagère de 1000 € par mois. Elle critique les écritures de Monsieur [I] [L] quant à ses avoirs qui ne reflètent pas la réalité selon elle.
Au delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour entend se référer, pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures ci-dessus visées.
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SUR CE,
En l'état des dernières écritures des parties, il convient de constater que seuls sont discutés le principe de la prestation compensatoire et le cas échéant du montant en capital et/ou sous forme de rente viagère revenant à l'épouse.
Les autres dispositions de la décision déférée ne font l'objet d'aucune critique et seront en conséquence, purement et simplement confirmées.
' Sur la prestation compensatoire :
L'article 270 du Code civil dispose que le divorce met fin au devoir de secours prévu par l'article 212 du même Code et qu'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives.
Aux termes de l'article 271 du Code civil, cette prestation est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
A cet effet, le Juge doit, notamment, prendre en considération :
- la durée du mariage,
- l'âge et l'état de santé des époux,
- leur qualification et leur situation professionnelles,
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial,
- leurs droits existants et prévisibles,
- leur situation respective en matière de pensions de retraite.
Le mariage entre Monsieur [I] [L] et Madame [Z] [P] épouse [L] a duré 42 ans puisqu'ils se sont mariés le [Date mariage 1] 1965. Deux enfants sont issus de cette union, [C], née le [Date naissance 3] 1967 et [B], né le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 16] au CAMEROUN, décédé le [Date décès 6] 2004. [C] est autonome.
Les époux sont tous les deux âgés de 67 ans.
Madame [Z] [P] épouse [L] perçoit une pension de retraite de 282 € par mois. Elle est aujourd'hui reclassée comme invalide dans une proportion de 81%. Elle ne pourra pas améliorer cette situation professionnelle comme tenu de son âge et de son état de santé. Elle occupe un appartement appartenant à l'indivision successorale entre ses frères et soeurs. Il n'est pas établi qu'elle paye un loyer pour ce logement sauf dédommagement éventuel ultérieur dû à l'indivision.
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Monsieur [I] [L] perçoit une retraite de 2928 € par mois qui constitue ses seuls revenus. Il n'a pas été établi dans le cadre de la présente procédure qu'il aurait des revenus de capitaux mobiliers, ou des dividendes provenant du garage, lequel a été vendu en 2010. Il a dû régler un loyer au moment du divorce d'un montant de 936 € par mois. Il a souffert de stress et d'une grave hypertension artérielle au moment du divorce.
Les époux disposent d'un patrimoine commun lequel est constitué en partie par les éléments principaux suivants :
' le prix de vente de la villa qui constituait le domicile conjugal, soit 600 000 €. Madame [Z] [P] épouse [L] a perçu la somme de 300 000 € sur le prix de vente. Madame [Z] [P] épouse [L] a fait pratiquer une saisie-conservatoire sur la part de Monsieur [I] [L] qui a été autorisée à hauteur de la somme de 150 000 €,
' les meubles garnissant le domicile conjugal,
' le tiers d'un appartement acquis en 1987 à [Localité 10] valeur 85 066 €,
' un bateau de plaisance vendu au prix de 6000 €,
' 49 % de parts de la S.A.R.L. FRÉDÉRIC PASSY, le fonds ayant été vendu le 1er Octobre 2010 au prix de 200 000 € (le frère de Madame [Z] [P] épouse [L] détient 51% des parts de cette société), Madame [Z] [P] épouse [L] a fait opposition sur le prix de vente du fonds, le dossier est en appel,
' une somme de 15 000 € virée du compte de Monsieur [I] [L] par Madame [Z] [P] épouse [L] sur son propre compte après le départ de celui-ci le 04 Mai 2007.
Contrairement à ce que soutient Madame [Z] [P] épouse [L], il n'est pas établi que Monsieur [I] [L] aurait des comptes ou des placements boursiers dissimulés. Au demeurant, Madame [Z] [P] épouse [L] est restée au domicile conjugal au moment de la séparation et avait en sa possession tous les documents et relevés bancaires du temps de la vie commune. Madame [Z] [P] épouse [L] a fait vérifier les comptes BPCA par un détective privé le cabinet MARTIN.
Madame [Z] [P] épouse [L] a également un patrimoine propre puisqu'elle a reçu en héritage avec ses trois frères et soeurs des biens provenant de la succession de ses parents pour lesquels elle devrait percevoir une somme d'au moins 125 000 €. Monsieur [I] [L] prétend pour sa part que les estimations du patrimoine présentées par son épouse sont sous-évaluées.
Monsieur [I] [L] et Madame [Z] [P] épouse [L] ont reçu le paiement de parts indivises dans un appartement appartenant au père de Madame [Z] [P] épouse [L], décédé. Ils ont perçu 27 000 € chacun.
Au vu de ces éléments, c'est à juste titre que le premier juge a dit que la rupture du mariage crée une disparité entre les situations respectives des parties au détriment de Madame [Z] [P] épouse [L] qu'il convient de compenser en lui allouant une prestation compensatoire.
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Cependant, dans la mesure où Madame [Z] [P] épouse [L] a perçu et va percevoir d'importantes sommes au titre de la liquidation de la communauté, qu'elle a également reçu un capital au titre d'une succession, que ces sommes pourront être utilement placées, il convient de lui allouer au titre de la prestation compensatoire, la somme en capital de 150 000 €. Le jugement sera donc infirmé de ce chef en ce qu'il a accordé une rente viagère en sus du capital.
' Sur l'article 700 du code de procédure civile :
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. En conséquence, les parties seront déboutées de leurs demandes présentées à ce titre.
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PAR CES MOTIFS /
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après débats non publics ;
Infirme partiellement le jugement du Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de NICE du 18 Mars 2011 en ses dispositions concernant la prestation compensatoire allouée à Madame [Z] [P] épouse [L],
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne Monsieur [I] [L] à payer à Madame [Z] [P] épouse [L] à titre de prestation compensatoire la somme en capital de 150 000 €,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions non contraires au présent arrêt,
Y AJOUTANT,
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les parties conserveront chacune la charge des dépens d'appel par elles exposés qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile aux alinéas 2 et 5 de l'article 27 de la loi N°2011-94 du 25 Janvier 2011.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT