COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
14e Chambre
ARRÊT AU FOND
DU 14 NOVEMBRE 2012
N°2012/952
Rôle N° 11/20115
SA KONE
C/
CPAM DE [Localité 5]
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE
Grosse délivrée
le :
à :
Me Christian DELPLANCKE, avocat au barreau de NICE
CPAM DE [Localité 5]
Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ALPES MARITIMES en date du 08 Novembre 2011,enregistré au répertoire général sous le n° 20800488.
APPELANTE
SA KONE, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Christian DELPLANCKE, avocat au barreau de NICE
INTIMÉE
CPAM DE [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
représenté par Mme [F] [I] en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 2]
non comparant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Florence DELORD, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Bernadette AUGE, Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2012
Signé par Madame Bernadette AUGE, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La SA KONE a adressé à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie une déclaration d'accident du travail de son salarié, M.[V] qui, le 25 août 2007, vers 8 heures 45, alors qu'il venait de reprendre son poste après ses congés d'été, s'est plaint d'une douleur dorsale.
Ce courrier émettait des réserves sur l'imputabilité de l'accident avec le travail.
La Caisse a procédé à une enquête et elle a pris la décision de reconnaître le caractère professionnel de l'accident.
La société KONE a contesté cette décision devant la Commission de recours amiable qui a rejeté son recours.
Par jugement du 8 novembre 2011, le Tribunal des Affaires de sécurité sociales des Alpes Maritimes a rejeté les demandes de la société KONE
La société KONE a fait appel du jugement.
Par ses dernières conclusions récapitulatives développées à l'audience de plaidoirie du 17 octobre 2012, elle a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de lui déclarer inopposable l'accident survenu à M. [V], de constater l'absence de preuve du caractère professionnel de l'accident allégué par M.[V] et de condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur interpellation de la Cour, elle a contesté la retranscription des déclarations faites par M.[Z] son responsable régional et a indiqué que c'était bien l'origine professionnelle des lésions qui étaient contestée.
Par ses dernières conclusions développées à l'audience de plaidoirie, la Caisse a demandé à la Cour de confirmer le jugement.
La MNC régulièrement avisée n'a pas comparu.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande d'inopposabilité de la décision de la Caisse Primaire
L'employeur ayant émis des réserves d'emblée, l'article R 441-11 al.2 du code de la sécurité sociale devait envoyer un questionnaire à l'employeur (et à la victime) ou faire procéder à une enquête auprès des intéressés.
La Caisse n'a rempli aucune de ces deux obligations à l'égard de l'employeur, du moins.
Elle a néanmoins notifié une prolongation de la procédure d'enquête par sa lettre du 17 septembre 2007.
La Cour constate que l'accident se serait produit le lundi 20 août 2007 vers 8 heures 45 alors que le salarié venait de rentrer de congés (11-20 août).
Il a déclaré qu'alors qu'il s'apprêtait à déplacer un élément de cabine, il aurait ressenti une douleur au dos'.
Par lettre du 22 août 2007, l'employeur a transmis la déclaration d'accident du travail avec des réserves quant au caractère professionnel de l'accident, car la victime rentrait de congés.
L'employeur a également ajouté que la victime avait travaillé dans le secteur de l'automobile et aurait présenté un état pathologique préexistant (hernies discales).
Par lettre du 15 octobre 2007, la Caisse a informé la société Koné de la fin de la procédure d'instruction et de la possibilité de consulter le dossier, soit sur place soit sous pli confidentiel cacheté, sa décision devant être prise le 30 octobre 2007.
Par lettre du 22 octobre (faxée le 24 octobre), le Directeur de la Sécurité de la société Koné a demandé la copie du dossier en faisant valoir l'impossibilité de se déplacer.
Par lettre du 26 octobre reçue le 23 novembre (date non contestée), la Caisse a renouvelé son invitation à venir consulter le dossier, la décision devant être prise le 10 novembre 2007.
La décision de la Caisse a été prise le 9 novembre 2007.
Par lettre datée du 27 septembre 2007 transmise par télécopie le 1er octobre 2007, elle s'était engagée à transmettre à la société Koné, à son siège de St Priest en région lyonnaise, la totalité du dossier d'enquête 'dès sa réalisation'.
Il vient d'être démontré que la Caisse a pris sa décision à l'issue d'une enquête sans que l'employeur ait pu faire connaître ses observations sur les éléments révélés par l'enquête menée par la Caisse.
L'employeur a fait valoir que les déclarations de M.[V] étaient douteuses puisqu'il prétendait d'abord avoir ressenti des douleurs avant d'avoir soulevé le plancher de cabine, mais qu'ultérieurement il a déclaré qu'il avait soulevé ce plancher qui pesait entre 120 et 200 kilos, alors qu'une enquête sur place avec examen des notices techniques du plancher de cabine aurait permis de constater que le poids n'excède pas 40-45 kilos.
La Cour constate que les éléments de ce dossier présentaient suffisamment d'incohérence et de contradictions pour que l'enquêteur de la Caisse, informé des réserves parfaitement motivées de l'employeur, réalise une véritable instruction en se rendant sur place et en procédant aux auditions et aux constats nécessaires, avant de se prononcer sur la prise en charge de l'accident, au lieu de se contenter de contacter les témoins par téléphone.
Devant la Cour, l'appelante a d'ailleurs contesté la retranscription des déclarations faites par M.[Z] son responsable régional et a indiqué que c'était bien l'origine professionnelle des lésions qui étaient contestée.
Dès lors qu'elle s'était engagée à communiquer le dossier d'enquête à l'employeur avant toute décision, et que l'employeur en avait expressément formalisé la demande, la Caisse ne pouvait enfreindre le principe du contradictoire de la procédure ainsi défini par ses propres services.
La Cour constate, en conséquence, que ce principe du contradictoire n'a pas été respecté par la Caisse et que l'employeur a été privé de son droit de connaître les éléments recueillis par l'enquêteur et de présenter ses observations, la décision à intervenir étant susceptible de lui faire grief.
L'employeur est fondé à soutenir que la décision de prise en charge de la maladie à titre professionnel lui est inopposable.
La Cour infirme le jugement sur ce point et fait droit à la demande de l'appelante sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la contestation du caractère professionnel de la maladie
L'employeur qui conteste le caractère professionnel d'un accident peut combattre la présomption d'imputabilité qui s'attache aux lésions apparues au temps et lieu du travail et que consacre l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale.
Il lui appartient de rapporter la preuve que les lésions ont une cause totalement étrangère au travail.
Cette contestation s'inscrit dans le cadre des rapports entre l'employeur concerné et la Caisse et n'a aucune incidence sur les droits de la victime.
Cependant, et malgré l'insuffisance de l'enquête menée par la Caisse, l'appelante qui limite ses explications au fait que le salarié rentrait d'une période de congés et aurait eu des hernies discales (ce qui ne ressort d'aucune pièce objective du dossier) n'a pas rapporté la preuve que les lésions auraient eu une cause totalement étrangère au travail.
La contestation du caractère professionnel des lésions n'est donc pas fondée.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en matière de sécurité sociale,
Infirme le jugement déféré,
Et statuant à nouveau:
Constate que la Caisse Primaire d'assurance maladie de [Localité 5] n'a pas respecté le principe du contradictoire à l'égard de la SA KONE avant sa décision du 9 novembre 2007 de prise en charge de l'accident du travail du 20 août 2007 subi par M.[V],
En conséquence, déclare inopposable à la SA KONE cette décision du 9 novembre 2007,
Déboute la SA KONE de sa contestation du caractère professionnel de l'accident du 20 août 2007,
Et y ajoutant:
Condamne la Caisse Primaire d'assurance maladie de [Localité 5] à payer à la SA KONE la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT