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25/10/2012 | FRANCE | N°10/18111

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 25 octobre 2012, 10/18111


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 25 OCTOBRE 2012



N° 2012/710













Rôle N° 10/18111





[I] [J]





C/



SA MIYOWA

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Cédric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Jean-Phillippe PASSANANTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PR

OVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 06 Septembre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/3063.







APPELANT



Monsieur [I] [J], demeurant [Adresse 2]



r...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 25 OCTOBRE 2012

N° 2012/710

Rôle N° 10/18111

[I] [J]

C/

SA MIYOWA

Grosse délivrée

le :

à :

Me Cédric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Jean-Phillippe PASSANANTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 06 Septembre 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 09/3063.

APPELANT

Monsieur [I] [J], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Cédric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SA MIYOWA, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean-Phillippe PASSANANTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Elsa BONETTO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Juin 2012 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Michel VANNIER, Président

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Madame Laure ROCHE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Octobre 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Octobre 2012.

Signé par Monsieur Michel VANNIER, Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Miyowa (ci-après la société), entreprise de plus de 11 salariés exerçant son activité dans le domaine de l'informatique et qui applique la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, a engagé monsieur [J] par contrat de travail à durée indéterminée du 16 janvier 2007 en qualité de développeur informatique dans le département recherche et développement.

Le salarié a été licencié pour motif économique par lettre recommandée en date du 18 mai 2009 ainsi libellée, notamment :

'Comme il a été indiqué aux représentants du personnel au cours des différentes réunions tenues dans le cadre de la présentre procédure de licenciement pour motif économique, notre Société doit faire face à des pertes considérables.

En effet, les pertes de la société ont été multipliées par deux entre les exercices 2007 et 2008, pour passer de 364 923 € au 31 décembre 2006 à 1 504 509 € au 31 décembre 2007, puis à 3 694 356 € au 31 décembre 2008.

Par ailleurs, le résultat d'exploitation de la Société est largement déficitaire. Il est passé de -621 312 € au 31 décembre 2006 à -1. 950 172 € au 31 décembre 2007 puis à -4 341 289 € au 31 décembre 2008.

De même, le chiffre d'affaires sur 2008 est très nettement inférieur au prévisionnel (-28 % par rapport au budget).

[...] le marché des applications sur mobile a connu une baisse vertigineuse ces 5 dernières années et, la situation a commencé à fortement se dégrader début 2009. [...]

La forte pression exercée par nos concurrents sur les prix à entraîner un dumping lors des appels d'offre en 2008, tendance qui se confirme en 2009. Les services que doit offrir MIYOWA dans ce contexte n'atteignent pas le niveau de rentabilité minimum attendu. [...]

Ainsi, MIYOWA a à faire face à une baisse d'activité. Le niveau de revenus est inférieur à 28 % environ par rapport aux prévisions (6,5M€ / 9M€), impactant fortement la trésorerie.

En conclusion, le développement est insuffisant et pour les mois à venir, il est clair que la récession sera toujours d'actualité et qu'aucun signe de redressement rapide n'est envisageable.

[...]

Notre structure est dimensionnée pour un marché et une situation économique qui n'existe plus et MIYOWA est contrainte de mettre en oeuvre une réorganisation afin de pallier ses difficultés économiques et financières si elle veut assurer son avenir et sauvegarder sa compétitivité. [...]

Dans ces conditions, votre poste de Développeur Informatique Senior Cadre .Net Plugin au sein du service Plateforme est supprimé.

Nous avons donc procédé à une recherche des possibilités de reclassement au sein de notre entreprise et dans le groupe. A ce jour, toutes nos recherches de reclassement tant au sein de notre entreprise qu'au sein des autres entreprises du groupe étant restée infructueuse, nous sommes donc dans l'impossibilité de vous reclasser.

Par ailleurs, nous vous avons remis le 24 avril 2009 l'ensemble des documents relatifs à la convention de reclassement personnalisée. Nous vous avions indiqué que vous bénéficiiez d'un délai de 21 jours à compter de la date de cette remise pour accepter ou refuser cette convention de reclassement personnalisée. Nous vous rappelons donc que ce délai de réflexion expirait le 15 mai 2009.

N'ayant pas répondu au terme de ce délai, vous êtes réputé avoir refusé la convention de reclassement personnlisée.

La présente lettre constitue donc la notification de votre licenciement pour motif économique[...]'.

Par lettre postée le 8 octobre 2010, monsieur [J] a régulièrement interjeté appel du jugement rendu le 6 septembre 2010 par le conseil de prud'hommes de Marseille qui a jugé que la rupture pour motif économique repose sur une cause réelle et sérieuse et qui l'a débouté en conséquence de l'ensemble de ses demandes ; ; l'appelant conclut à la réformation de cette décision et il demande à la cour de condamner MIYOWA à lui payer 50.000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 50.000,00 euros de dommages et intérêts pour violation des critères d'ordre des licenciements et 2.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MIYOWA demande à la cour de constater que le licenciement de monsieur [J] repose sur une cause réelle et sérieuse, de dire qu'elle a respecté les critères d'ordre des licenciements et en conséquence de rejeter l'intégralité des demandes de l'appelant et de le condamner à lui payer la somme de 1.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer à la décision déférée et aux écritures déposées, oralement reprises à l'audience du 7 juin 2012.

MOTIFS DE LA DECISION :

- sur la cause du licenciement :

Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutivement notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à une réorganisation décidée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient.

Ainsi, même lorsqu'elle n'est pas liée à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques - qui doivent s'apprécier à la date de la rupture du contrat de travail - la réorganisation de l'entreprise peut constituer une cause de licenciement si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient et ainsi prévenir des difficultés à venir.

En l'espèce, selon l'employeur, la réorganisation de son entreprise était justifiée, d'une part, en raison des difficultés économiques rencontrées et motivée, d'autre part, par la sauvegarde de sa compétitivité.

Or, monsieur [J] ne discute pas sérieusement que 'le marché des applications sur mobile a connu une baisse vertigineuse ces 5 dernières années', la situation ayant commencé à fortement se dégrader début 2009, ni que 'la forte pression exercée par [les] concurrents sur les prix à entraîner un dumping lors des appels d'offre en 2008", ces deux éléments justifiant à eux-seuls la nécessaire réorganisation de la société Miyowa en vue de sauvegarder sa compétitivité ; de ce chef, les licenciements opérés reposent donc sur une cause réelle et sérieuse qui est effectivement démontrée par les pièces versées aux débats.

En outre, et même si le chiffre d'affaires de l'entreprise, créée en 2003, a fortement progressé de 2005 à 2009 (sa phase de plein développement), passant de 2.242.907,00 € à 9.652.544,00 €, les documents comptables versés par l'employeur démontrent la pertinence des chiffres notés dans la lettre de licenciement - chiffres d'ailleurs non contestés par le salarié - et donc la réalité des difficultés économiques rencontrées, les levées de fonds invoqués par monsieur [J] - 3.000.000,00 € en septembre 2006, 5.000.000,00 € en 2008 - ainsi que les augmentations de capital réalisés en octobre 2009 et août 2010 - venant confirmer que l'entreprise a dû avoir recours à de nouveaux investisseurs pour surmonter ses graves difficultés de trésorerie et à des partenariats avec de grandes entreprises en raison de ses difficultés économiques, lesquelles ont été reconnues par les membres du comité d'entreprise qui ont émis l'avis suivant lors de la réunion extraordinaire du 9 avril 2009 : 'Nous sommes d'accord avec la direction, sur la base des chiffres annoncés, que des mesures sont nécessaires pour renouer avec la rentabilité et assurer la sauvegarde et la compétitivité de la société. Ces mesures doivent passer par une réduction des coûts et une nouvelle organisation des équipes'.

Par ce motif encore, les licenciements intervenus dans l'entreprise reposent sur une cause réelle et sérieuse.

- sur les critères d'ordre des licenciements :

Monsieur [J], qui ne conteste pas le sérieux des recherches de reclassement faites par l'employeur, qui a refusé le bénéfice de la convention de reclassement personnalisée par lettre du 13 mai 2009 et qui n'a pas fait valoir sa priorité de réembauchage (il a créé le 21 septembre 2010 une société de conseil, études, développement et exploitation de sites Internet), reproche à son employeur ne pas avoir respecté l'ordre des licenciements en comparant sa situation à celle de 18 autres développeurs informatiques cadres et plus préciséement à celle de 4 d'entre-eux qui ont obtenu le même nombre de points que lui en fonction des critères définis qui étaient les suivants : 1- ancienneté, 2- âge, 3- charges de famille, 4- difficultés particulières de reclassement, 5- qualités professionnelles.

Or, l'employeur justifie - notamment par ses offres d'emploi - que ses développeurs informatiques cadres, s'ils ont une formation commune, doivent être distingués non seulement en fonction du langage informatique qu'ils utilisent au sein de la société, par exemple les langages JAVA, DOTNET, C++, mais également en fonction de la technologie cible sur laquelle ils interviennent (notamment les ordinateurs, les webcams, les systèmes de navigation automobile, les appareils médicaux), l'usage d'un même langage ne permettant pas à lui-seul à tous ses locuteurs la maîtrise de toutes ces technologies.

Ces nécessaires distinctions entre développeurs sont d'ailleurs involontairement mais évidemment validées par monsieur [J] puisqu'il a refusé par écrit le 24 avril 2009, de nombreux postes qui lui étaient proposés au sein des entreprises Eurocopter, Amesys, BeNomad et du cabinet E&D au motif , 3 fois réitérés de manière manuscrite : 'ne corresponds (sic) en aucun point à mes compétences actuelles', alors qu'il lui était précisément proposé des postes de 'développeur C++/Java expérimenté - développeur Java/Swing - développeur C++ Windows/Linux, développeur sur plateforme mobile'.

En appliquant tous ces critères et ces distinctions, exposés dans le document remis aux représentants du personnel, le plan de restructuration visait la suppression de deux postes de 'développeurs en JAVA (V3 et stats)', deux postes de 'développeur en intégration' et un poste de 'développeur en technologie.net plugin' ce dernier poste étant occupé uniquement par monsieur [J].

Concernant les deux autres critères dont l'application est contestée par monsieur [J] de manière toute théorique, l'employeur démontre par le tableau comparatif de ses 18 salariés que son ancienneté a bien été prise en compte comme celle de ses collègues de travail et il justifie que celui des qualités professionnelles a été appliqué, pour ne pas pénaliser les salariés jeunes ou récemment embauché, en ne retenant, ainsi que cela a été précisé aux représentants du personnel, que le nombre d'item classés en exceptionnel lors des dernières évaluations : or, monsieur [J] n'en avait bénéficié d'aucun.

Ainsi, la cour est en mesure de s'assurer que les critères d'ordre des licenciements ont bien été respectés par l'employeur et en conséquence la décision déférée sera également confirmée de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 16 septembre 2010,

Déboute monsieur [J] de ses demandes plus amples ou contraires,

Condamne monsieur [J] à payer à la société Miyowa 1.500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus et le condamne aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/18111
Date de la décision : 25/10/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°10/18111 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-25;10.18111 ?
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