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05/07/2012 | FRANCE | N°11/14924

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 05 juillet 2012, 11/14924


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 05 JUILLET 2012

FG

N° 2012/456













Rôle N° 11/14924







[W] [R]

SCI MARE





C/



[O] [H]

[V] [H]

[K] [M]

[N] [H]

[P] [H]





















Grosse délivrée

le :

à :



SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE



SCP TOLLINCHI PERRET VIG

NERON









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 10 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 09/3405.



APPELANTS



Monsieur [W] [R]

né le [Date naissance 5] 1941 à [Localité 19],

demeurant [Adresse 8]



SCI MARE,

dont le siège social est s...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 05 JUILLET 2012

FG

N° 2012/456

Rôle N° 11/14924

[W] [R]

SCI MARE

C/

[O] [H]

[V] [H]

[K] [M]

[N] [H]

[P] [H]

Grosse délivrée

le :

à :

SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE

SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 10 Mai 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 09/3405.

APPELANTS

Monsieur [W] [R]

né le [Date naissance 5] 1941 à [Localité 19],

demeurant [Adresse 8]

SCI MARE,

dont le siège social est sis [Adresse 21], prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié.

représentés par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistés de Me Julie FEHLMANN, avocat au barreau de GRASSE.

INTIMES

Monsieur [O] [H]

né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 19],

demeurant [Adresse 21]

Monsieur [V] [H]

né le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 19],

demeurant [Adresse 7]

Monsieur [N] [H]

né le [Date naissance 1] 1993 ,

demeurant [Adresse 21]

Mademoiselle [P] [H]

née le [Date naissance 2] 1996 ,

demeurant [Adresse 21], mineure, représentée par Mme [K] [M], ès qualités de représentante légale, née le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 14], demeurant [Adresse 21]

représentés par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué (e) aux lieu et place de la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués , assistés de Me Antoine ANDREI, avocat au barreau de NICE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Juin 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2012

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2012,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

Par jugement en date du 10 mai 2011, le tribunal de grande instance de Grasse a, au visa des articles 389-5, 1108, 1315, 1591 du code civil, 9 et 325 du code de procédure civile:

- donné acte à Mlle [P] [H] de son intervention volontaire,

- débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande de résolution des actes de cession pour non paiement du prix,

-débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande tendant à dire la cession de parts sociales consentie le 2 janvier 2008 par [P] [H] et par [N] [H] à M.[W] [R], sans autorisation du juge des tutelles, est nulle en application des articles 389-5 et 1108 du code civil,

- dit que la renonciation au droit d'usage et d'habitation qui doit être analysée comme une cession du droit d'usage et d'habitation et concrétisée par le 'protocole d'accord' en date du 24 juillet 2008 conclu entre la SCI MARE et M.[O] [H], est nulle pour défaut de prix et de contrepartie de cette renonciation,

- en conséquence, débouté M.[R] et la SCI MARE de l'intégralité de leurs demandes reconventionnelles, à savoir :

- constater que M.[H] [O] occupe illégalement la villa [Adresse 21],

- constater que M.[H] [O] a disposé d'un délai de dix mois pour quitter les lieux à compter de sa renonciation expresse à son droit d'usage et d'habitation,

- dire qu'il s'agit d'une habitation secondaire, en conséquence, dire qu'il y a lieu de supprimer le délai de deux mois prévu à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 au double motif que le bien litigieux constitue une résidence secondaire et qu'en outre l'occupation par M.[H] revêt un caractère particulièrement illégitime compte tenu de sa renonciation à son droit d'usage et d'habitation et à son maintien dans les lieux,

-prononcer l'expulsion immédiate de M.[H] [O] et de tout occupant de son chef, si besoin est avec le concours de la force publique à compter de la signification de la présente décision, et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard,

- débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande de nullité des cessions de parts sociales intervenues au profit de M.[W] [R] pour absence de prix sérieux,

- débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande de nullité des cessions de parts sociales intervenues au profit de M.[W] [R] pour absence de consentement éclairé,

- débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande tendant à voir désigner un administrateur ad hoc pour la SCI MARE,

- débouté M.[W] [R] et la SCI MARE de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- débouté toutes les parties de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration de la SCP TOLLINCHI, PERRET-VIGNERON et BUJOLI-TOLLINCHI, avoués, en date du 24 août 2011, M.[W] [R] et la SCI MARE ont relevé appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions, notifiées le 23 mars 2012 et déposées le 27 mars 2012, M.[W] [R] et la SCI MARE demandent à la cour d'appel, au visa de l'article 1315 du code civil, de :

- constater que les intimés ne rapportent pas la preuve du non paiement des parts sociales,

- constater que les cédants des parts sociales, mineurs, étaient dûment représentés pour la signature de l'acte de cession litigieux,

- constater que les intimés n'établissent pas l'existence d'une erreur sur les qualités substantielles des parts sociales,

- constater que les intimés n'établissent pas l'existence d'un vice du consentement relatif aux actes de cessions de parts sociales litigieux,

- en conséquence, confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande de résolution des actes de cession pour non paiement du prix, les a déboutés de leur demande tendant à dire la cession de parts sociales consentie le 2 janvier 2008 par [P] [H] et par [N] [H] à M.[W] [R], sans autorisation du juge des tutelles, est nulle en application des articles 389-5 et 1108 du code civil, les a déboutés de leur demande de nullité des cessions de parts sociales intervenues au profit de M.[W] [R] pour absence de prix sérieux, les a déboutés de leur demande de nullité des cessions de parts sociales intervenues au profit de M.[W] [R] pour absence de consentement éclairé,

- réformer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

- constater que les intimés n'établissent pas de défaut de cause aux actes de cession de parts,

- constater que M.[O] [H] occupe illégalement la villa [Adresse 21], qu'il a disposé d'un délai de 2 ans pour quitter les lieux à compter de la renonciation expresse à son droit d'usage et d'habitation, qu'il s'agit d'une résidence secondaire, et dire qu'il y a lieu de supprimer le délai de 2 mois prévu à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 eu égard au double motif que le bien litigieux constitue une résidence secondaire et qu'en outre l'occupation par M.[H] revêt un caractère particulièrement illégitime compte tenu de sa renonciation à son droit d'usage et d'habitation et à son maintien dans les lieux,

-prononcer l'expulsion immédiate de M.[H] [O] et de tout occupant de son chef, si besoin est avec le concours de la force publique à compter de la signification de la présente décision, et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard,

- condamner solidairement les intimés à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner solidairement les intimés à leur payer 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les intimés aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP TOLLINCHI & PERRET-VIGNERON & BUJOLI-TOLLINCHI.

Par leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 7 juin 2012, M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H], mineure, représentée par Mme [K] [M], ès qualités de représentante légale, demandent à la cour d'appel, au visa des articles 1654 et suivants, 1108, 1109, 389-5 du code civil, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré nul et de nul effet l'acte de renonciation par M.[O] [H] à son droit d'usage et d'habitation,

- constater que M.[W] [R] n'a jamais payé les parts de la SCI MARE dont il est porteur,

- prononcer la résolution de tous les actes de cession à son profit,

- déclarer nul et de nul effet l'acte de cession de parts sociales en date du 2 janvier 2008 par [P] et [N] [H] à M.[R] sur le fondement des articles 1108, 1109 et 389-5 du code civil,

- constater que ces cessions de parts sociales constituent une vente déguisée à vil prix de la villa sise à [Localité 22] constituant le lot 8 d'un groupe d'habitations établi sur le lot 10 du sous-lotissement [Localité 16] en bordure de mer et de la route nationale du bord de mer, cadastré section AP n°[Cadastre 10], lieudit [Adresse 18] pour une contenance cadastrale de 23 ares 90 centiares, ayant fait l'objet d'un cahier des charges publié le 1er octobre 1958 volume 4183 n°1, étant précisé que ce sous-lotissement dépendait à l'origine du lotissement [Adresse 15] ayant fait l'objet d'un cahier des charges déposés au bureau des hypothèques des Grasse le 27 juillet 1926 volume 1720 n°52,

- en conséquence, déclarer nulles les cessions de parts du 2 janvier 2008 par [P] et [N] [H] à M.[R] portant sur 255 parts à 10 € la part soit 2.550 €, du 20 septembre 2008 par [V] [H] à M.[R] portant sur 235 parts à 10 € la part soit 2.350 €,

- débouter M.[R] de l'ensemble de ses demandes et notamment de sa demande d'expulsion,

- désigner un administrateur provisoire de la SCI MARE,

- condamner M.[W] [R] à leur payer la somme de 2.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens, avec distraction au profit de la Selarl BOULAN CHERFILS IMPERATORE.

L'instruction de l'affaire a été déclarée définitivement close, après nouvelle constitution faisant suite à la suppression de la profession d'avoué, et conclusions tenant compte de la minorité de Mlle [P] [H], d'accord des représentants des parties, le 7 juin 2012, avant les débats.

MOTIFS,

-I) Les actes, leur chronologie :

Dans le lotissement [Adresse 15] à [Localité 22] (Alpes Maritimes), a été formé un sous-lotissement dit [Localité 16].

A l'intérieur de ce sous-lotissement, dans le lot numéro dix de ce sous-lotissement, a été créé un groupement d'habitations.

Ce groupement d'habitations est formé de neuf maisons portant les lots 1 à 9.

Le lot n°8 est une maison d'habitation dite '[Adresse 21]' composée d'un étage sur rez-de-chaussée et sous-sol avec un terrain de 291 m², les 132/1.000èmes des parties communes, le 1/16ème des frais d'entretien de la route privée, des parkings et du chemin de piétons, et le 1/18ème des frais d'entretien des canalisations d'eau, d'électricité et d'égout.

Ce bien immobilier appartenait jusqu'en 2004 en indivision aux consorts [I], M.[F] [I], avocat honoraire, M.[A] [I] et M.[J] [I].

Ce bien immobilier a été vendu par acte du 16 février 2004 moyennant un prix de 579.304 € selon des modalités particulières.

L'acquisition a été faite à la fois par M.[O] [H] et par une SCI familiale de la famille [H].

Il a été convenu dans cet acte de vente que sur 579.304 €, un montant de 167.694 €, soit environ 29% du prix correspondait au droit d'usage et d'habitation de M.[O] [H], né le [Date naissance 6] 1948, alors âgé de 56 ans. Ce dernier acquérait seulement le droit d'usage et d'habitation.

Ce montant de 167.694 € était payé à hauteur de 91.740 € par la comptabilité du notaire et pour le reste hors comptabilité du notaire.

Le reste du prix, représentant environ 71% du prix, ou 411.610 €, devait être payé par une société civile immobilière, la SCI MARE, qui devenait propriétaire du bien, mais sans être titulaire du droit et d'habitation du vivant de M.[O] [H].

Cette SCI était constituée pour les besoins de cette acquisition, entre la mère de M.[O] [H], Mme [D] [G], née le [Date naissance 9] 1918, titulaire de 335 parts sur 500 et un fils de M.[O] [H], M.[V] [H], né le [Date naissance 4] 1978, titulaire de 165 parts sur 500.

Par la suite Mme [D] [G] a cédé ses parts à ses petits-enfants, enfants de M.[O] [H], tous deux mineurs, M.[N] [H], né le [Date naissance 6] 1992 à [Localité 19], et Mlle [P] [H], née le [Date naissance 11] 1998 à [Localité 14].

Ce procédé d'acquisition permettait à M.[O] [H] de bénéficier d'une maison dont 70% du prix était payé par sa mère et ses enfants, lesquels au travers de la SCI seraient pleinement propriétaires au décès de M.[O] [H].

Cette SCI n'avait pas immédiatement le financement nécessaire pour payer le prix et celui-ci était prévu payable à termes, en cinq versements de 82.322 € étalés de février 2005 au 31 décembre 2008, mais avec indexation sur l'indice du coût de la construction. Ces sommes étaient

Les termes de paiement du prix n'étaient pas respectés. C'est alors que M.[O] [H] a fait appel à M.[W] [R].

En ce qui concerne la première échéance de février 2005 c'est M.[W] [R] qui a prêté 88.994,85 € la SCI MARE, laquelle lui a signé le 10 février 2005 une reconnaissance de dette pour un prêt de cette somme à rembourser sur 3 ans au taux d'intérêt de 4% l'an.

A la date du 1er février 2006 c'est M.[W] [R] qui a fait un chèque de 82.322 € représentant le terme du 1er février 2006, à l'ordre de M.[C] [I].

La SCI MARE signait à la même date une reconnaissance de dette sous seing privé en reconnaissant que cette somme correspondait à un prêt à rembourser en trois ans à 4% d'intérêt l'an.

Mais en 2007 l'échéance n'était pas réglée en totalité et M.[W] [R] arrêtait de prêter des fonds. En conséquence les consorts [I] ont fait assigner en 2007 la SCI MARE et M.[O] [H] en résolution de la vente pour défaut de paiement du prix, demandant la condamnation à payer 207.799,29 € plus 20.779 € de dommages et intérêts.

M.[W] [R] entrait alors dans la société SCI MARE en janvier 2008, alors que celle-ci était menacée de devoir payer 228.578,29 € et que celle-ci lui devait déjà 88.994,85 € +

82.322 € plus intérêts.

Par acte sous seing privé daté du 2 janvier 2008, et enregistré le 23 janvier 2008, les deux enfants mineurs de M.[O] [H], M.[N] [H], 15 ans, représenté par son père, M.[O] [H], et Mlle [P] [H], 9 ans, représentée par son père M.[O] [H] et sa mère Mme [K] [M], ont cédé

en ce qui concerne [N] [H] quatre parts sociales à M.[W] [R] et 80 parts sociales à M.[V] [H], et en ce qui concerne [P] [H] 251 parts sociales à M.[W] [R]. Ces cessions étaient faites au prix de 10 € la part.

A cette date M.[W] [R] entrait dans la SCI MARE avec 255 parts sur 500, soit plus de la majorité du capital social et devenait le gérant de la SCI MARE.

Par acte sous seing privé daté du 30 juin 2008, entre la SCI MARE représentée par son gérant, M.[R], et M.[O] [H], il était convenu de la vente du bien immobilier au prix du marché immobilier.

La SCI MARE propriétaire de la maison, sauf droit d'usage et d'habitation, et M.[O] [H], titulaire du droit d'usage et d'habitation convenaient de vendre.

Le 23 juillet 2008, M.[W] [R] établissait un document unilatéral ainsi libellé et signé par lui : 'Suite à la réunion de ce jour entre M.[W] [R], gérant et actionnaire majoritaire de la SCI MARE et M.[O] [H], détenteur du droit d'habitation de la villa [Adresse 21]. Il est pris par le gérant M.[W][R], dans le cadre de ses fonctions et des décisions antérieures prises notamment de la vente de la villa d'indemniser le détenteur du droit d'habitation M.[O][H] d'une somme fixée d'un commun accord à 200.000 €. Ce montant entre dans le montant de la vente et son règlement sera effectué par le notaire.

En contrepartie, M.[O] [H] s'engage à accepter le protocole d'accord de cession sous seing privé pour l'abandon de ce droit d'habitation- document qui sera enregistré au service des impôts'.

Le lendemain, par acte sous seing privé daté du 24 juillet 2008, dénommé protocole d'accord sous seing privé, entre la SCI MARE représentée par son gérant, M.[R], et M.[O] [H], et bien signé par ce dernier, il était convenu de : 'transmettre à la SCI MARE par M.[O] [H] son droit d'usage et d'habitation d'une manière définitive et irrévocable pour permettre la location ou la vente du bien immobilier'. Ce protocole d'accord était enregistré le 31 juillet 2008.

Par acte sous seing privé date du 29 septembre 2008, enregistré le 13 octobre 2008, c'est M.[V] [H] qui cédait à M.[W] [R] 235 parts sociales sur les 245 qu'il détenait, au prix de 10 € la part. A cette date M.[W] [R] est devenu propriétaire de

490 parts sur 500 et M.[V] [H] n'a gardé que 10 parts.

Le 16 octobre 2008 intervenait un protocole d'accord transactionnel entre les consorts [I] d'une part et M.[O] [H] et la SCI MARE représentée par M.[W] [R], d'autre part.

Selon cet accord la SCI MARE et M.[O] [H] reconnaissaient devoir aux consorts [I] la somme de 125.478 € plus 41.599 € de dommages et intérêts contractuels: 167.077 €, plus une indemnité de 50.000 € plus 4.784 € de frais, le tout payable à hauteur de 175.000 € à la signature de la transaction, ainsi que les 4.784 € de frais d'avocat, et le solde en 2 échéances annuelles.

M.[R] réglait cet acompte de 175.000 € le 16 octobre 2008.

Par assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2008 les associés de la SCI MARE, de manière unanime, M.[W] [R] 490 parts, mais aussi M.[V] [H], 10 parts, décidaient, au vu des problèmes financiers de la SCI MARE, de vendre le bien immobilier et prenaient également la résolution suivante, adoptée à l'unanimité :'Il est bien entendu que l'occupant à titre gratuit devra quitter les lieux avec ses meubles meublants dès la signature du compromis de vente '.

-II) La demande de nullité de la cession de parts sociales datée du 2 janvier 2008 :

Il s'agit de la cession effectuée par acte sous seing privé daté du 2 janvier 2008, enregistré le 23 janvier 2008.

Il s'agit d'une triple cession :

- cession par M.[N] [H] de 4 parts sociales à M.[W] [R],

- cession par M.[N] [H] de 80 parts sociales à M.[V] [H],

- cession par Mlle [P] [H] de 251 parts à M.[W] [R].

La demande de nullité est formée sur trois fondements :

- défaut d'autorisation du juge des tutelles pour des cessions par des mineurs,

- absence de consentement libre et éclairé,

- cession à vil prix équivalant à une donation déguisée.

La demande est formée de manière conjointe par les intimés, M.[O] [H] à titre personnel, M.[O] [H] ès qualités de père et administrateur légal de sa fille [P] [H], M.[N] [H], M.[V] [H], et Mme [M] ès qualités de mère et d'administratrice de sa fille [P] [H].

Il y a lieu d'observer que ces cessions ne concernent pas M.[O] [H] qui n'y est pas partie à titre personnel.

Il convient de noter que la cession [N] [H] à [V] [H] n'est pas contestée alors que les trois fondements juridiques des demandes de nullité pourraient concerner également cette cession, conclue exactement dans les mêmes conditions.

M.[V] [H] n'est donc pas concerné par cette action.

-II-1) Sur le défaut d'autorisation du juge des tutelles, article 389-5 du code civil :

Il faut noter que l'acquisition de la même manière de ces parts sociales, d'une société qui pourtant comprenait un passif important compte tenu des sommes dues aux consorts [I] au titre du paiement du prix de la maison, et à M.[W] [R] au titre de reconnaissance de dettes, n'est pas discutée par les demandeurs à l'action.

Le texte visé ne prévoit pas expressément la nullité de l'acte. Par contre la responsabilité des administrateurs légaux, M.[O] [H] et Mme [K] [M] pourrait être recherchée. Or ceux-ci sont précisément demandeurs à cette action et se prévalent ainsi de leur propre comportement, alors que de l'autre côté la mauvaise foi de M.[R] n'est pas établie.

La cession de quatre parts par [N] [H], mineur, a été effectuée avec la signature de son père M.[O] [H].

Seule la cession des quatre parts est discutée et non celle des 80 parts à M.[V] [H]. Il n'y a en conséquence aucun préjudice causé par cette cession.

La cession des parts de [P] [H] a été signée par ses deux parents, qui mettent en avant leur propre turpitude.

-II-2) Sur l'absence de consentement libre et éclairé :

Les administrateurs légaux des mineurs, et notamment M.[O] [H] était le mieux placé pour connaître toute l'histoire de la SCI MARE, structure créée pour lui permettre d'occuper une maison en payant seulement 28% de son prix, selon un montage complexe dont il était à l'origine.

Si le consentement des cédants était vicié, pourquoi les demandeurs font ils une différence entre la cession à M.[V] [H] et la cession à M.[W] [R].

Ce moyen n'est pas sérieux.

-II-3) Sur le vil prix, la donation déguisée :

Le prix des parts sociales cédées à M.[V] [H] et celui des parts sociales cédées à M.[W] [R] est le même. Or les demandeurs à l'action ne contestent que les cessions à M.[W] [R], c'est qu'ils ne considèrent pas que le prix était vil.

Le cessionnaire M.[W] [R], devenant titulaire de 255 parts de la SCI MARE reprenait également à son compte et en proportion de ses parts, les dettes de la SCI MARE.

La SCI MARE se trouvait à ce moment là, en janvier 2008, propriétaire d'une maison grevée d'un droit d'usage et d'habitation au profit de M.[O] [H], âgé de 59 ans, soit d'un bien immobilier amputé d'une part non négligeable de sa valeur, environ la moitié, acquis deux ans plus tôt au prix de 579.304 €, représentant ainsi environ 600.000 € à cette date. Il existait une action en résolution de la vente et une demande de condamnation de 228.578,29 €. M.[W] [R] était déjà créancier de cette société pour 88.994,85 € + 82.322 € plus intérêts.

La SCI MARE représentait alors un passif supérieur à son actif en tenant compte de la demande de condamnation des consorts [I].

M.[O] [H] et les consorts [H] ont fait appel à M.[W] [R] pour rétablir la situation et injecter des fonds. Ils ne peuvent sérieusement dire, ni que leur consentement n'était pas éclairé, ni qu'il s'agissait d'un défaut de prix de cession. Le prix de dix euros la part pour une société en situation de passif n'était pas dénué de sérieux.

-III) La demande de résolution pour défaut de paiement du prix :

Le versement du prix a fait l'objet d'une quittance dans l'acte et il n'est pas apporté de preuve contraire contre cette quittance.

Cette demande n'est pas fondée.

-IV) La demande relative au droit d'usage et d'habitation :

Tous les intimés demandent de dire nulle la renonciation du droit d'usage et d'habitation de M.[O] [H].

Il y a lieu d'observer que cette demande ne concerne pas [P] et [N] [H] qui n'ont plus de parts dans la SCI MARE.

Il convient de noter que, non sans paradoxe, M.[V] [H] se joint à cette action alors que, lors de l'assemblée générale de la SCI MARE du 2 décembre 2008; il avait précisé avec M.[W] [R] que 'l'occupant à titre gratuit (c'est à dire M.[O] [H]) devra quitter les lieux '.

L'acte sous seing privé daté du 24 juillet 2008, enregistré le 31 juillet 2008, précise bien qu'il s'agit d'un protocole d'accord selon lequel il est convenu de : 'transmettre à la SCI MARE par M.[O] [H] son droit d'usage et d'habitation d'une manière définitive et irrévocable pour permettre la location ou la vente du bien immobilier'.

Il fait suite à un précédent accord entre les mêmes le 30 juin 2008, de la vente du bien immobilier au prix du marché immobilier.

M.[R] s'était engagé en contrepartie à lui verser 200.000 € à prendre sur le prix de vente. M.[H] avait acquis son droit d'usage et d'habitation pour 167.694 € en 2004. Ce prix de 200.000 € en 2008 correspond à l'évolution de la valeur de ce droit, sur la base du prix auquel l'avait acquis M.[H]. Cet accord fait suite à l'offre de paiement de 200.000 € faite la veille par la SCI MARE. Cette renonciation est la conséquence de cette offre d'indemnisation. Il y a bien eu renonciation moyennant une indemnité de 200.000 € à prendre sur le prix de vente.

Cet accord s'inscrit dans la logique de tous les actes précédents, par lesquels progressivement M.[W] [R] a repris toutes les dettes de la SCI MARE et a convenu avec les consorts [H] de la vente du bien immobilier pour se rembourser des sommes ainsi payées.

La vente du bien immobilier supposant qu'il soit vendu libre, M.[H] acceptait de libérer les lieux et la SCI MARE lui versait 200.000 € à prendre sur le prix de vente.

Cette reprise des dettes a permis d'éviter la résolution de la vente et des condamnations.

Dans un premier temps, M.[O] [H] n'a pas remis en cause cet accord. Il a même momentanément loué un logement et quitté la maison.

M.[W] [R] a payé les sommes convenues aux consorts [I].

Cette renonciation est causée et fait l'objet d'une indemnisation.

M.[O] [H] est venu par la suite remettre en cause tous les engagements pris une fois le danger de résolution de la vente disparu. Son attitude est empreinte de mauvaise foi.

-V) Sur la demande d'expulsion de M.[O] [H] :

M.[O] [H] n'a pas respecté l'accord passé le 24 juillet 2008.

Il s'est maintenu abusivement dans la maison, ce qui en a empêché la vente et bloqué la situation. Il tente de la bloquer par la présente action.

La demande d'expulsion est fondée.

La suppression du délai de 2 mois prévu à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 est justifiée alors que depuis plus de deux ans, M.[O] [H] se maintient dans les lieux pour bloquer la situation, alors qu'il avait précisé qu'il partait pour permettre la vente du bien.

Il sera fait droit à la demande d'astreinte.

L'action des consorts [H] ne sera pas jugée fautive. Il n'y a pas lieu à dommages et intérêts.

Par contre, M.[O] [H] sera condamné aux dépens et à paiement de frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Confirme partiellement le jugement rendu le 10 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a débouté M.[O] [H], M.[V] [H], M.[N] [H] et Mlle [P] [H] de leur demande de résolution des actes de cession pour non paiement du prix, et de leur demande tendant à la nullité des actes cession de parts sociales du 2008 par [P] [H] et par [N] [H] à M.[W] [R], débouté M.[W] [R] et la SCI MARE de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau de ce chef,

Dit valable la renonciation au droit d'usage et d'habitation par M.[O] [H],

Ordonne l'expulsion immédiate et sans délai de M [O] [H] de la [Adresse 21],

Supprime le délai de deux mois prévu à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991,

Ordonne l'expulsion immédiate de M.[O] [H] et de tout occupant de son chef, si besoin est avec le concours de la force publique à compter de la signification de la présente décision, et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard, à compter de la signification du présent arrêt,

Condamne M.[O] [H] à payer à M.[W] [R] et la SCI MARE la somme de cinq mille euros (5.000 €) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M.[O] [H] aux dépens, avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 11/14924
Date de la décision : 05/07/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°11/14924 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-07-05;11.14924 ?
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