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22/06/2012 | FRANCE | N°08/13480

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 22 juin 2012, 08/13480


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 22 JUIN 2012



N° 2012/ 642





Rôle N° 08/13480





SAS VITEMBAL [Localité 11]

M° [S], Mandataire judiciaire de la SAS VITEMBAL [Localité 11]

M° [X], Administrateur judiciaire de la SAS VITEMBAL [Localité 11]



C/



[M] [C]

AGS - CGEA DE [Localité 8] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST

POLE EMPLOI PACA, venant aux droits de l'ASSEDIC Languedoc Roussillon




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- Me Héléne DE SAINT GERMAIN, avocat au barreau de PARIS



- Me Véronique RONDEAU-ABOULY, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Sandra D'ASSOMPTION, avocat au barrea...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUIN 2012

N° 2012/ 642

Rôle N° 08/13480

SAS VITEMBAL [Localité 11]

M° [S], Mandataire judiciaire de la SAS VITEMBAL [Localité 11]

M° [X], Administrateur judiciaire de la SAS VITEMBAL [Localité 11]

C/

[M] [C]

AGS - CGEA DE [Localité 8] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST

POLE EMPLOI PACA, venant aux droits de l'ASSEDIC Languedoc Roussillon

Grosse délivrée le :

à :

- Me Héléne DE SAINT GERMAIN, avocat au barreau de PARIS

- Me Véronique RONDEAU-ABOULY, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Sandra D'ASSOMPTION, avocat au barreau de TARASCON

- Me Yves LINARES, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARLES en date du 07 Juillet 2008, enregistré au répertoire général sous le n° 07/448.

APPELANTS

SAS VITEMBAL [Localité 11], demeurant [Adresse 14]

représentée par Me Héléne DE SAINT GERMAIN, avocat au barreau de PARIS

M° [S], Mandataire judiciaire de la SAS VITEMBAL [Localité 11], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Héléne DE SAINT GERMAIN, avocat au barreau de PARIS

M° [X], Administrateur judiciaire de la SAS VITEMBAL [Localité 11], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Héléne DE SAINT GERMAIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [M] [C], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Véronique RONDEAU-ABOULY, avocat au barreau de MARSEILLE

AGS - CGEA DE [Localité 8] - UNEDIC AGS - DELEGATION REGIONALE SUD-EST, demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Sandra D'ASSOMPTION, avocat au barreau de TARASCON

PARTIE INTERVENANTE

POLE EMPLOI PACA, venant aux droits de l'ASSEDIC Languedoc Roussillon, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Yves LINARES, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Christine SCELLIER-FOURNIER, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 15 Mai 2012 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Christian BAUJAULT, Président de Chambre

Monsieur Patrick ANDRE, Conseiller

Madame Catherine VINDREAU, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2012.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2012.

Signé par Monsieur Christian BAUJAULT, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [M] [C] a été embauché par la société VITEMBAL SI selon contrat à durée déterminée en date du 24 octobre 1997 pour surcroît temporaire d'activité, suivi de plusieurs contrats à durée déterminée jusqu'en 2000 avec cette même société.

Par la suite, il a été recruté comme opérateur par la SARL VITEMBAL [Localité 11] au titre d'un contrat à durée indéterminée du 2 octobre 2000 puis il est devenu conducteur adjoint du chef d'équipe en tant qu'agent de maîtrise.

Cet emploi est soumis à la convention collective de la plasturgie.

Le 13 septembre 2007, M. [M] [C] a été convoqué à un entretien préalable et le 10 octobre 2007, un licenciement lui a été notifié pour faute grave.

*******

Le 30 octobre 2007, M. [M] [C] a saisi le Conseil de Prud'hommes d'Arles pour contester cette mesure et demander à l'encontre de son employeur le règlement des sommes dues.

*******

Par jugement en date du 7 juillet 2008, le Conseil de Prud'hommes d'Arles a:

- dit que le licenciement de M. [M] [C] était sans cause réelle et sérieuse,

- proposé la réintégration du salarié dans l'entreprise au statut antérieur, avec maintien des avantages en nature, et à défaut,

- condamné l'employeur à lui payer les sommes suivantes:

- indemnité de préavis : 4.134,82 euros,

- indemnité de licenciement : 2.060 euros,

- indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse: 20.000 euros,

- frais irrépétibles: 750 euros,

- débouté les parties de leurs autres demandes principales et reconventionnelles, notamment sur la prétention au titre des primes de gratification et sur l'irrégularité du licenciement,

- dit que le jugement serait transmis aux services ASSEDIC aux fins de régularisation.

*******

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 15 juillet 2008 et reçue au greffe de la cour d'appel le 17 juillet 2008, la SARL VITEMBAL [Localité 11] a interjeté appel de cette décision.

En cours d'instance d'appel, le service POLE EMPLOI PACA est intervenu volontairement à cette instance pour réclamer le remboursement des sommes versées au salarié.

Par jugement en date du 8 avril 2011, la société VITEMBAL a été mise en redressement judiciaire. Me [S] a été désigné en qualité de mandataire judiciaire et Me [X] comme administrateur judiciaire.

L'affaire a fait l'objet de plusieurs renvoi avant d'être évoquée en audience.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, la société VITEMBAL représentée par les organes de procédure susvisées demande la confirmation en ce que le jugement a débouté le salarié de sa prétention au titre de la prime de gratification et de celle sur l'irrégularité de la procédure, mais l'infirmation pour le surplus en soutenant que le licenciement est justifié pour faute grave. Elle s'oppose aux nouvelles demandes concernant la requalification du contrat de travail à durée déterminée initial avec la société VITEMBAL SI et conteste la référence à l'unité économique et sociale. A titre subsidiaire, elle demande de limiter les sommes à allouer au minimum légal, et s'oppose à la réclamation au titre des frais irrépétibles. Par contre, elle réclame la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elle s'oppose aux prétentions de POLE EMPLOI.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, M. [M] [C] demande la confirmation du jugement sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les dommages alloués selon lui à hauteur de la somme de 30.000 euros (en fait 20.000 euros). Il réclame toutefois au titre du préjudice économique complémentaire la somme de 64.754,71 euros, ainsi que la somme de 413,48 euros pour les congés payés afférents au préavis.

Il soutient que le contrat de travail à durée déterminée initial conclu avec la société VITEMBAL SI doit être requalifié en contrat à durée indéterminée et réclame la somme de 6.202,23 euros.

Il forme appel incident sur les demandes écartées par les premiers juges et, après avoir modifié ses prétentions au titre des rappels de salaires, réclame les sommes suivantes:

- à titre principal: 16.299,71 euros,

- à titre subsidiaire, pour le préjudice subi: 5.000 euros.

Il demande la remise des bulletins de salaires rectifiés.

Outre la fixation de sa créance au passif de la société en redressement judiciaire, il demande la remise des documents légaux rectifiés, ainsi que la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Il soutient que le CGEA-AGS du Sud Est doit garantir les sommes qui lui sont dues.

Au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, le CGEA AGS de [Localité 8] s'en rapporte aux observations des organes de la procédure de redressement judiciaire de la société VITEMBAL. Il s'oppose à la garantie au titre du préjudice complémentaire invoqué par le salarié sur un préjudice d'anxiété. Il demande que la décision ne sera opposable à titre subsidiaire dans les limites de sa garantie.

*******

Enfin, au visa de ses conclusions écrites et réitérées lors des débats, et auxquelles la Cour se réfère quant aux prétentions et moyens invoqués, le service POLE EMPLOI PACA demande à l'employeur le remboursement des sommes versées au salarié dans la limite de six mois et réclame la somme de 750 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel

L'examen des éléments produits aux débats tant en ce qui concerne la formalité de la déclaration d'appel que le respect du délai légal applicable à ce recours, au regard de la date de notification du jugement, rend cet appel recevable en la forme.

Sur la requalification des contrats de travail à durée déterminée

Il est constant entre les parties que M. [C] a été employé à partir du 24 octobre 1997 par la SA VITEMBAL située à [Localité 9] dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée pour surcroît temporaire d'activité en qualité d'opérateur service, et que cette relation contractuelle s'est renouvelée par la suite dans le cadre de plusieurs contrats qualifiés comme saisonniers à durée déterminée.

Pour soutenir à titre de demande nouvelle en cause d'appel que ces contrats qui ont précédé celui du 2 octobre 2000 par lequel le salarié a été embauché à durée indéterminée par la SAS VITEMBAL dont le siège est à [Localité 11], doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée, avec versement d'une indemnité de requalification, M. [C] invoque l'existence de l'unité économique et sociale incluant les deux sociétés et le transfert du contrat de travail initial au sein de la seconde société.

Toutefois, alors qu'il n'est pas remis en cause que selon l'employeur, la réalité de l'unité économique et sociale n'a été reconnue qu'en 2005 dans le cadre de la mise en place des instances représentatives au sein des deux sociétés, et qu'il n'est produit aucun élément probant sur l'applicabilité à ces entités des dispositions de l'article L 122-12 devenu L 1224-1 du code du travail concernant la possibilité de revendiquer un transfert du contrat de travail de la société VITEMBAL située à [Localité 9] à la SAS VITEMBAL dont le siège est à [Localité 11], M. [C] est mal fondé à réclamer une requalification des contrats de travail conclus auprès de son précédent employeur.

De plus, alors que ce dernier n'est pas dans la cause, M. [C] ne peut prétendre à une requalification au regard du contenu du premier contrat de travail à durée déterminée qui n'est pas opposable à la SAS VITEMBAL dont le siège est à [Localité 11] et aux organes de la procédure collective la concernant.

En conséquence, M. [C] doit être débouté de cette demande.

Sur le rappel de salaire

M. [C] soutient que l'employeur a modifié sa rémunération sans son accord à partir du mois d'octobre 2006 en procédant à la suppression d'un avantage de rémunération faisant partie de la structure et du niveau de son salaire, et en globalisant dans le salaire de base un nouvel avantage constitué par un élément supplémentaire de rémunération de 8,33 %. Il explique qu'au mois de septembre 2006, le salaire comprenait un pourcentage de sur rémunération à hauteur de 49,55 % en plus du montant du salaire minima conventionnel qui correspondait à un avantage individuel acquis sur lequel l'employeur est revenu sans son accord sans avoir dénoncé au préalable cet usage ou engagement unilatéral, la dénonciation de l'usage relatif aux primes de gratifications devant selon le salarié ne pas être confondue avec le mode de rémunération tel que relaté ci-dessus. Il en déduit une créance de 16.299,71 euros et à titre subsidiaire fait valoir le préjudice subi à hauteur de la somme de 5.000 euros.

Il demande enfin la remise des bulletins de salaires rectifiés qui doivent faire ressortir l'avantage et le calcul de la totalité de la structure de la rémunération.

Pour s'opposer à cette prétention, la société VITEMBAL et les organes de la procédure collective contestent l'analyse du salarié sur le calcul de la rémunération et font valoir au principal que les augmentations des minima conventionnels ne peuvent pas s'appliquer aux salariés dont le salaire leur est supérieur, et qu'il n'existe aucun avantage acquis sur ce point.

Il est constant que la modification de la rémunération du salarié qui constitue un élément du contrat de travail ne peut intervenir sans son accord, peu important que l'employeur prétende que le nouveau mode serait plus avantageux.

S'il n'est pas contestable que le contrat de travail du 2 octobre 2000 n'a prévu que le taux horaire en faveur du salarié sur la base de 36 heures de travail hebdomadaire, il n'est pas remis en cause que jusqu'en septembre 2006, M. [C] a perçu un salaire excédent jusqu'à 49,55% celui du salaire minimum conventionnel prévu par la convention collective de la plasturgie, et qu'à partir du mois d'octobre, en application de l'accord collectif du 16 décembre 2004 qui a modifié le système de classification des emplois et la grille des salaires, l'employeur a appliqué un mode de rémunération au salarié sur la base du coefficient 800 sans tenir compte de la sur rémunération dont le salarié avait bénéficié auparavant.

Or, si par lettre du 13 juillet 2006, la société VITEMBAL a expressément dénoncé à l'égard de M. [C] l'avantage relatif à la prime de gratification dont le douzième devenait intégré au salaire mensuel, pour autant, il n'est justifié d'aucune remise en cause de l'avantage afférent à la sur rémunération qui doit être analysé en l'espèce, à partir des éléments produits, comme un avantage individuel acquis par le salarié que l'employeur ne pouvait pas modifier sans son accord.

Au vu des éléments de calcul du reliquat salarial dû depuis octobre 2006 tels que présentés par M. [C], que les explications des autres parties ne permettent pas de remettre en cause sérieusement, il s'en déduit que la réclamation à hauteur de la somme de 16.299,71 euros arrêtée en décembre 2007 est fondée.

Sur le licenciement

Le contenu de la lettre de licenciement en date du 10 octobre 2007 qui fixe les limites du litige précise ce qui suit:

'(...)

Il apparaît clairement que vous avez agi en contradiction manifeste avec l'exécution normale de votre contrat de travail.

Nous vous rappelons ci-après les griefs que nous formulons à votre encontre:

Nous avons constaté à plusieurs reprises durant les mois de juillet, août et septembre 2007 que vous avez pris des pauses supplémentaires en dehors des horaires de la pause régulière de l'équipe dans laquelle vous êtes affecté, ou lors de vos remplacements de chefs d'équipe dans d'autres équipe que la votre.

Certaines de ces pauses supplémentaires sont prises dès le début de votre prise de poste à 4h00 du matin.

Vous vous permettez de prendre parfois 2 pauses supplémentaires à quelques heures d'intervalle, ce qui cumulé porte leur durée à environ 1 heure.

Ce faisant, durant vos horaires de travail, vous n'étiez plus occupé aux tâches pour lesquelles vous êtes rémunéré en votre qualité de Conducteur Adjoint au chef d'équipe, ayant abandonné votre poste pour discuter à proximité du distributeur de boissons.

Ces faits constituent de graves manquements à vos obligations contractuelles que vous ne pouvez ignorer...

En conséquence, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave(....)'

La faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

L'article L1333-1 du code du travail précise qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Pour contester le jugement rendu par les premiers juges, les appelants soutiennent que M. [C] a agi au mépris des usages en vigueur dans la société, et en violation d'une obligation essentielle et intrinsèque à son contrat de travail, à savoir fournir un travail en contrepartie de la rémunération versée. Ils s'opposent à l'illicéité des moyens invoqués à travers le recours au contenu des enregistrements par vidéo-surveillance, et affirment que les faits sont établis par les éléments produits et principalement par le procès-verbal de constat d'huissier dressé le 3 octobre 2007.

L'examen dudit procès-verbal de constat d'huissier fait ressortir que ce jour-là, Me [F] a visionné cinq compacts discs qui lui ont été remis par [K] [W], directeur d'usine, qui contenaient des enregistrements vidéo présentés par ce dernier comme correspondant à ceux provenant des caméras de surveillance dont celle installée à proximité de la machine à café dont la présence aurait été postée préalablement à la connaissance du personnel.

L'acte de l'huissier précise que ce visionnage a porté sur les enregistrements des jours suivants: 10 juillet, 18 juillet, 19 juillet, 27 juillet, et 28 juillet 2007, dont les dates et heures apparaissent selon le document lors de la lecture du contenu. Il indique ce qui suit:

- au 10 juillet 2007:

- à 4 heures 11, une personne de sexe masculin, identifiée par M [W] comme étant [M] [C], rejoint deux autres personnes précédemment décrites, lesquelles conversent devant la machine à café jusqu'à 4 H 28, soit pendant 18 minutes,

- à 5 H 54, les trois personnes dont celle identifiée comme étant [M] [C] sont à nouveau présentes au même endroit avant de se diriger dans un local décrit par M. [W] comme étant le local chauffeur dont il est indiqué qu'il serait étranger aux postes auxquels ces salariés sont normalement affectés, dans lequel un autre salarié les rejoints jusqu'à 6 H 28, soit pendant une pause totale de 34 minutes,

- au 18 juillet 2007:

- à 4 H 07, une personne se dirige devant la machine à café rejointe à 4 H 09 par deux autres dont un est identifié par M. [W] comme étant [M] [C] qui serait resté jusqu'à 4 H 32 soit pour une pause de 25 minutes,

à 6 H 32, les trois personnes, dont l'une identifiée par M. [W] comme étant [M] [C], se retrouvent devant la machine à café et entrent dans le local chauffeur rejointes par un quatrième homme, puis un cinquième, jusqu'à 7 H 07, soit pendant une pause de 39 minutes,

- au 19 juillet 2007:

- à 4 H 04, deux personnes dont l'une identifiée par M. [W] comme étant [M] [C] se trouvent devant la machine à café rejointes par un troisième, lesquels restent jusqu'à 4 H 26 soit pendant une pause de 22 minutes,

- à 5 H 43, trois personnes dont l'une identifiée par M. [W] comme étant [M] [C], sont à nouveau devant la machine à café, se déplacent cers les allées et reviennent pour rester jusqu'à 6 H 21 soit pendant une pause de 38 minutes.

Or, sans nullement avancer une fausseté des constatations de l'huissier instrumentaire à partir des éléments mis à sa disposition pour l'établissement de son procès-verbal de constat, ainsi que le soutient M. [C] dans ses écritures développées lors des débats, dans la mesure où en fait l'identification de M. [M] [C] lors du visionnage des enregistrements par Me [F], ne résulte que des seules déclarations de M. [W], qui représentait l'employeur, cette opération n'ayant été effectuée en présence d'aucun autre témoin, il ne peut être retenu que les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont suffisamment établis.

En outre, les attestations des deux salariés [R] [Z] et [U] [E] produites par les appelants ne sont pas de nature à apporter des éléments probants sur le grief invoqué par l'employeur.

Pour ce qui concerne le premier témoin cité, celui-ci se contente en effet de déclarer que le procès-verbal de constat d'huissier qu'il date du 22 novembre 2007 expose avec exactitude les faits constatés, alors que l'acte susvisé est du 3 octobre 2007, d'autant que ce document ne mentionne pas sa présence lors du visionnage, de telle sorte que ce témoignage ne permet pas d'établir les faits avancés à l'appui du licenciement.

Le témoignage de [U] [E] qui fait ressortir que ce dernier a constaté la présence d'[M] [C] lors du visionnage d'enregistrements de vidéo surveillance effectués les 10 et 19 juillet 2007 (les dates des 4 août et 13 septembre 2007 également citées ne sont pas référencées par l'huissier dans le document susvisé) est également insuffisant pour établir une faute du salarié dans la mesure où notamment l'attestation ne précise pas ni les références des périodes au jour concerné, ni surtout les durées globales de pause susceptibles d'être analysées, la corrélation entre le témoignage et les périodes retenues par l'huissier n'étant pas démontrée.

Par ailleurs, aucun élément probant n'est avancé en ce qui concerne les faits décrits dans la lettre de licenciement qui se seraient produits en août et septembre 2007. La seule énumération de temps pause figurant dans les écritures de l'employeur réitérées lors des débats ne peut valoir démonstration sérieuse des faits invoqués.

Par conséquent, au vu de ce qui précède, sans qu'il soit nécessaire de procéder à un examen de l'argumentation complémentaire développée par le salarié, tant sur l'adéquation de la faute invoquée au regard du règlement intérieur de l'entreprise concernant les temps de pause auxquels le salarié était en droit de prétendre, par rapport aux horaires contractuels hebdomadaires de travail, que sur la question de la licéité de l'utilisation du système de vidéo surveillance mis en place par l'employeur au niveau de la machine à café de l'entreprise, laquelle est positionnée, selon les clichés photographiques produits, à proximité d'une aire de travail, il se déduit de ce qui précède que le seul grief reproché à M. [M] [C] n'est pas sérieusement établi, étant précisé que la cour ne dispose pas des enregistrements sur la base desquels le licenciement a été prononcé.

Il s'ensuit que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement était dénué d'une cause réelle et sérieuse.

Sur les incidences indemnitaires

* - indemnité pour non respect de la procédure

Outre que M. [C] n'a pas réitéré sa demande indemnitaire initiale pour non respect de la procédure de licenciement, d'autant qu'au visa de l'article L 1235-3 du code du travail, le cumul de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité complémentaire pour licenciement irrégulier n'est pas possible, il doit être constaté que le salarié ayant été normalement avisé par la lettre de convocation à l'entretien préalable de la possibilité de se faire assister par un conseiller de son choix parmi le personnel de l'entreprise, et alors qu'il n'est pas contesté qu'il a pu bénéficier de cette assistance, l'irrégularité n'est pas établie, de telle sorte que le jugement doit sur ce point être confirmé.

* - indemnité de préavis

Au visa des articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail, et tenant compte de l'ancienneté dans l'entreprise et du salaire brut perçu à la date du licenciement, M. [C] est en droit de prétendre à la somme de 4.134,82 euros, la somme de 413,48 euros en plus au titre des congés payés afférents.

Le jugement doit être confirmé en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis, la somme complémentaire en plus au titre des congés payés afférents.

* - indemnité de licenciement

Au visa de l'article L 1234-9 du code du travail, en l'état du licenciement sans cause réelle et sérieuse, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a alloué à M. [C] la somme de 2.060 euros, dont l'évaluation n'est pas remise en cause par les appelants.

* - indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

En premier lieu, la réintégration du salarié dans l'entreprise telle qu'évoquée par le jugement critiqué n'est pas réclamée par M. [C] de telle sorte que la formulation retenue par le Conseil de Prud'hommes sur ce point est sans objet.

Au visa de l'article L 1235-3 du code du travail applicable en l'espèce, et tenant à l'ancienneté de du salarié, à son âge, sa qualification, et à sa rémunération, ainsi qu'aux circonstances de la rupture, il convient de confirmer l'indemnité retenue par premiers juges à hauteur de la somme de 20.000 euros.

En application de l'article L 1235-4 du code du travail, à partir des éléments produits par la salariée, l'employeur devra rembourser à l'organisme intéressé les indemnités de chômage versées à cette dernière dans la limite du plafond prévu par ce texte.

* - dommages intérêts pour préjudices complémentaires

M. [C] fait valoir un préjudice complémentaire évalué à la somme de 64.754,71 euros résultant des éléments suivants:

- situation de chômeur pendant un an après le licenciement,

- manque à gagner dans le cadre de la prise en gérance avec son épouse d'un magasin Casino,

- perte de chance au titre de la pension de retraite à venir, y compris pour son épouse qui a du quitté son emploi précédent.

Toutefois, ainsi que les appelants l'invoquent, le lien de causalité entre la diminution de revenus du seul fait de la prise en gérance selon contrat du 17 janvier 2008d'un magasin avec son épouse qui a préféré démissionner de son précédent emploi de comptable et le licenciement n'étant pas suffisamment établi pour donner à une indemnisation complémentaire subséquente, M. [C] ne démontrant pas qu'il a tenté de retrouver un emploi de salarié avant de recourir à cette nouvelle activité, cette prétention doit être écartée, l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ayant pour finalité de réparer le préjudice principal subi du fait de la rupture injustifiée du contrat de travail.

Par voie de conséquence, la même solution doit être retenue en ce qui concerne l'argumentation relative à la perte de chance dans le cadre de la pension de retraite à laquelle le salarié pourra prétendre alors qu'il se dit n'est âgé que de 42 ans et qu'il ne peut soutenir sérieusement que cette perte est à ce jour certaine.

Sur la remise des documents légaux

Aucun motif ne s'oppose à cette demande en ce qui concerne les bulletins de salaires postérieurs au mois de septembre 2006.

Sur la garantie du CGEA-AGS du Sud Est

Le CGEA ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 à L 3253-21 du même code, et sous les limites du plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L 3253-20 de ce code, exception faite des sommes allouées au titre des frais irrépétibles.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité ne justifie pas au regard des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de faire droit à la demande de la société VITEMBAL et des organes de la procédure collective ouverte au nom de cette société, ni à celle de POLE EMPLOI.

Par contre, au visa du même principe d'équité, la demande de M. [C] est fondée à hauteur de la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en plus de celle allouée par les premiers juges qui doit être confirmée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Déclare l'appel recevable en la forme.

Confirme le jugement du 7 juillet 2008 du Conseil de Prud'hommes d'Arles en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [M] [C] était sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre de la prime de gratification et sur le non respect de la procédure de licenciement.

Réforme le jugement pour le surplus

Statuant à nouveau sur les points infirmés

Fixe la créance de M. [M] [C] au passif de la procédure de redressement judiciaire de la SAS VITEMBAL aux sommes suivantes:

- indemnité de préavis : 4.134,82 euros,

- indemnité de licenciement : 2.060 euros,

- indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse: 20.000 euros,

Y ajoutant

Ordonne le remboursement par la SAS VITEMBAL au profit de l'organisme intéressé des indemnités de chômage que celui-ci a versées au salarié dans la limite du plafond prévu par l'article L 1235-4 du code du travail,

Dit qu'une copie de la présente décision sera transmise à Pôle emploi par les soins du greffe.

Fixe la créance complémentaire de M. [M] [C] au passif de la procédure de redressement judiciaire de la SAS VITEMBAL aux sommes suivantes:

- rappel de salaires: 16.299,71 euros

- congés payés afférents au préavis: 413,48 euros

- frais irrépétibles: 1.500 euros, en plus de celle allouée en première instance.

Ordonne la délivrance par les organes de la procédure de la SAS VITEMBAL des bulletins de salaires postérieurs au mois de septembre 2006.

Dit que le CGEA ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 à L 3253-21 du même code, et sous les limites du plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L 3253-20 de ce code, frais irrépétibles non compris.

Déboute M. [M] [C] de ses autres demandes.

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur des autres parties en cause d'appel.

Dit que les dépens seront employée en frais de procédure de redressement judiciaire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 08/13480
Date de la décision : 22/06/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°08/13480 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-22;08.13480 ?
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