COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 14 JUIN 2012
N° 2012/
Rôle N° 12/00694
SAS SODIVAR
C/
[Z] [W]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP ERMENEUX
SCP COHEN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 15 Décembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 10/02551.
APPELANTE
SAS SODIVAR ,
demeurant [Adresse 10]
représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Jean-marie LAFRAN, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [Z] [W]
né le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 3] (18), demeurant [Adresse 8]
représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
plaidant par Me Philippe BOUILLON,avocat au barreau de PARIS substitué par
Me Delphine ROY-LLAMAS avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 18 Avril 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Catherine ELLEOUET- GIUDICELLI, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Guy SCHMITT, Président
Madame Catherine ELLEOUET - GIUDICELLI, Conseiller
Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2012,
Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par exploit en date du 28 avril 2010, M. [W], invoquant un acte sous seing privé du 23 octobre 1994, intitulé 'Protocole', par lequel 'la société anonyme SODIVAR représentée par son PDG Monsieur [P] [N]' s'est engagée 'irrévocablement à l'expiration du crédit bail des Sicomi et après levée de l'option auprès des Sicomi par la SCI La Repe à céder (à M. [W]) les dix parts sociales de la SCI La Repe achetées ce (jour) pour la somme de mille francs'... 'cette vente aura lieu moyennant le prix de mille francs (indexé sur l'indice du coût de la construction, l'indice de référence étant celui connu au jour de la signature des présentes', a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de TOULON, la S.A.S. SODIVAR pour obtenir la cession forcée de dix parts sociales détenues par cette société dans le capital de la S.C.I. LA REPE qui louait par ailleurs les locaux commerciaux, dont elle était propriétaire, à la société SODIVAR.
Par jugement en date du 15 décembre 2011, le tribunal a constaté que M. [N] était bien de président directeur général de la société SODIVAR à la date de la signature de l'acte invoqué et pouvait donc engager cette société vis à vis des tiers, que la promesse synallagmatique n'était pas soumise à publication, que cette promesse était causée, que le prix de revente des parts était réel et sérieux, que la société REPE avait levé l'option d'achat et acquis les locaux et il a, en conséquence, constaté que la vente formalisée dans l'acte sous seing privé du 23 octobre 1994 était parfaite et dit que sa décision valait vente à M. [Z] [W] des parts sociales numérotées 1 à 10 dont la société SODIVAR était titulaire dans le capital de la société immobilière LA REPE à la seule condition du paiement, dans le mois suivant la signification de la décision, du prix convenu, soit 224,93 euros. Il a aussi condamné la défenderesse à payer au demandeur 2000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, débouté M. [W] de ses autres demandes et ordonné l'exécution provisoire de la décision.
La S.A.S. SODIVAR a relevé appel de cette décision et l'affaire a été fixée directement à l'audience par application de l'article 905 du Code de procédure civile.
Le magistrat délégué par Mme le Premier Président a arrêté l'exécution provisoire de la décision par une ordonnance du 17 février 2012.
Dans des conclusions du 26 mars 2012, tenues ici pour intégralement reprises, la société SODIVAR expose que la S.C.I. LA REPE avait souscrit, en 1990, un contrat de crédit bail en vue du financement de l'acquisition d'un terrain et de l'édification d'un bâtiment à usage commercial à [Localité 2], que de 1991 à 1994, le bâtiment avait été sous-loué à la S.A.R.L. [W] BANDOL qui était donc propriétaire du fonds de commerce, titulaire d'un bail à usage de supermarché et aussi propriétaire de 10 % des parts sociales de la S.C.I. LA REPE, dont les 90% restant appartenaient à M. [Z] [W] également gérant de la S.C.I. LA REPE, que le 23 octobre 1994, elle a, par trois actes notariés, acquis de la S.A.R.L. [W] BANDOL, le fonds de commerce et les parts sociales qu'elle détenait, et s'est fait consentir par la S.C.I. LA REPE un bail de 18 ans qui s'achève le 22 octobre 2012, que lors de l'acquisition du fonds elle a aussi obtenu que l'objet social de la S.C.I. LA REPE soit notamment limité à la location de l'ensemble immobilier à son seul profit sans limitation de durée, un droit de veto afin d'être garantie du renouvellement du bail initial et un droit de préférence en cas de cession de ses parts par M. [W],
que cependant depuis 1999 des procédures l'opposent à M. [W] dont elle a demandé la révocation judiciaire de ses fonctions de gérant de la S.C.I. LA REPE en l'état d'anomalies comptables et financières graves affectant la gestion de cette société,
que c'est dans le cadre de cette dernière procédure, et pour la première fois en février 2003, que M. [W] a produit l'acte sous seing privé du 23 octobre 1994, signé par M. [N], qui n'est plus son P.D.G. depuis 1999, qui l'engagerait à céder ses parts de la société civile immobilière à l'expiration du crédit bail, mais aussi à rétrocéder, à M. [W], les dividendes qu'elle pourrait percevoir de la S.C.I. LA REPE,
que cependant cet acte lui a été déclaré inopposable par un jugement du 21 juin 2007 qui a condamné la S.C.I. REPE à lui payer des dividendes et elle a obtenu la révocation de M. [W] de ses fonctions de gérant de la société LA REPE par un jugement du 30 novembre 2009, confirmé depuis par un arrêt du 1er juin 2011,
que, par ailleurs, M. [W] qui avait aussi intenté, en qualité de gérant de la société [W] BANDOL, une action en nullité de la vente des parts sociales de la S.C.I. LA REPE au motif du caractère lésionnaire et vil du prix de ces parts, a dû se désister de cette action en l'état de la contravention au contrat de crédit bail qu'aurait constitué une telle annulation,
qu'il a aussi été débouté toujours en qualité de gérant de la société [W] BANDOL d'une demande de nullité de la vente du fonds de commerce,
que c'est dans ces conditions que M. [W], qui n'a pas cessé depuis des années de tenter d'obtenir une augmentation démesurée du loyer, a intenté la présente procédure afin de pouvoir lui refuser le renouvellement de son bail et de louer le local à une enseigne concurrente à qui il l'a déjà promis.
Elle soutient que l'acte du 23 octobre 1994 est nul et lui est inopposable car il n'a pas de date certaine et qu'il ne peut donc être démontré que, quand M. [N] l'a signé, il était son P.D.G., et ce d'autant que, quand il a été pour la première fois produit dans une procédure judiciaire, c'est à dire en 2003, il était indiqué dans le bordereau de communication de pièces 'protocole du 23 octobre 1994 entre M. [W] et SODIVAR du 17 janvier 2002", que M. [N] a déclaré dans un acte du 1er février 2001, qu'il n'existait aucun contrat susceptible de l'engager et notamment pas de promesse de vente et que cet acte ne lui a pas été notifié en son temps comme le prévoyait les statuts,
qu'en outre cet acte lui est aussi inopposable car, si M. [N] avait reçu de son conseil d'administration pouvoir d'acquérir les parts sociales de la S.C.I. LE REPE de conclure un contrat de sous-location et de voter, en son nom, à une assemblée générale extraordinaire de la S.C.I. LA REPE ayant pour objet de procéder à des modifications statutaires propres à garantir ses droits, il n'avait pas pouvoir pour vendre les dites parts ce que M. [W] qui intervenait aux actes en qualité de gérant de la société LA REPE et de la société [W] BANDOL ne pouvait ignorer puisque la copie de la délibération qui habilitait M. [N] était annexée à l'acte de cession des parts sociales,
qu'en tout état de cause, elle peut solliciter la nullité de l'acte en raison du vil prix qui aurait été convenu, vil prix reconnu par M. [W] lui-même qui en 2004 a considéré, dans la procédure qu'il avait engagée pour obtenir la nullité de la cession des parts que cette valeur était de 200 000 euros, que c'est à tort que le premier juge a retenu que ce prix n'était pas vil compte tenu du prix d'achat des parts sociales, puisque, entre temps, notamment grâce au paiement du crédit bail, la situation de la société civile s'est considérablement amélioré notamment du fait du versement direct par elle d'une grande partie des au crédit bailleur,
qu'enfin l'acte doit aussi être annulé sur le fondement de l'article 1131 du Code civil en l'état l'illicéité de sa cause, puisque s'il était validé, il permettrait à M. [W] d'obtenir un avantage personnel au détriment de sa société [W] BANDOL et que le demandeur lui-même a prétendu, qu'en fait, il était la conséquence du caractère fictif de la cession des parts de la S.C.I. REPE, cession qui n'avait eu pour objet que de respecter fictivement les dispositions fiscales relatives aux SICOMI et ne reposait sur aucun affectio societatis.
Elle demande donc l'infirmation du jugement déféré, le débouté de M. [W] et sa condamnation à lui payer 15 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 10000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans des conclusions du 13 avril 2012, tenues aussi pour intégralement reprises, M. [W] réplique que c'est bien en raison des exigences des organismes de crédit bail et des dispositions fiscales applicables qu'en 1994, que des parts sociales de la S.C.I. LE REPE avaient été cédées à la société SODIVAR mais que, pour lui permettre de récupérer l'intégralité de la propriété de l'immeuble, le protocole du 23 octobre 1994 avait été signé,
que la société LE REPE avait pris, lors d'une assemblée générale extraordinaire du 23 octobre 1994, la décision de lever l'option d'achat, et l'avait levée par anticipation, le 28 juin 2006,
que cependant la société SODIVAR s'étant opposée à cette levée d'option en demandant l'annulation de l'assemblée générale du 23 octobre 1994, demande dont elle a été déboutée par jugement du 19 mars 2009, l'option a été définitivement levée à son échéance et la vente de l'immeuble par les crédits-bailleurs à la S.C.I. LA REPE constatée par acte authentique du 15 janvier 2010,
que la société SODIVAR a alors refusé d'appliquer le protocole d'accord du 23 octobre 1994,
que cependant ce protocole est parfait puisqu'il y a accord sur la chose et sur le prix et que la condition suspensive qu'il contenait, c'est à dire la levée de l'option d'achat, est acquise,
que si des procédures sont actuellement en cours entre la bailleresse et sa locataire concernant l'acquisition de la clause résolutoire du bail ou la révision du loyer, elles sont sans incidence sur le litige,
qu'il est aussi faux de prétendre que le seul but de la présente procédure serait d'évincer le locataire protégé par sa propriété commerciale,
que dans la procédure intentée par la société [W] BANDOL, la société SODIVAR s'est, elle, prévalue du caractère sérieux du prix des parts sociales,
que si une décision du 21 juin 2007, confirmée en appel, a déclaré inopposable à la société SODIVAR le protocole, c'est seulement en ce qu'il lui était opposé par la société REPE qui n'y était pas partie, et qu'il n'existe à ce jour aucune décision définitive sur la validité du dit protocole.
Il soutient ensuite que le protocole est parfaitement opposable à la société SODIVAR puisque rien n'obligeait les parties à conclure cet acte sous forme authentique, que d'ailleurs simultanément, et sous la même forme, M. [W] avait lui donné une autorisation de consentir des sous-locations,
que M. [N] avait pouvoir, en sa qualité de président du Conseil d'administration et de président directeur général de la société, d'engager celle-ci dans la limite de son objet social et le procès verbal de l'assemblée générale qui l'a désigné comme PDG ne limite nullement ces pouvoirs, pas plus que le mandat spécial qu'il a reçu du conseil d'administration et que, de toute façon, de telles limitations ne lui seraient pas opposables en sa qualité de tiers et ce même s'il en avait eu connaissance,
que ce protocole, qui n'est pas une contre-lettre, puisqu'il n'est pas en contradiction avec les actes authentiques signés le même jour et est, au contraire, parfaitement cohérent avec les conventions conclues concomitamment par les parties puisque ces conventions prévoyaient un droit de veto pour la société SODIVAR dans la société LE REPE, mais aussi un droit de préférence en cas de vente de l'immeuble, droit qui n'aurait pas été nécessaire s'il n'avait pas été convenu d'une revente des parts au terme des contrats de crédit bail,
que ce protocole ne peut non plus s'analyser comme une promesse unilatérale puisque M. [W] y donne son accord pour acquérir les parts au prix de mille francs, n'avait pas a être enregistré et ne peut donc être annulé sur le fondement de l'article 1589-2 du Code civil d'autant que la S.C.I. LE REPE n'est pas une société civile d'attribution,
que si la société SODIVAR soutient maintenant, après 10 ans de procédure, que ce protocole lui serait inopposable dans la mesure où il n'a pas date certaine, cet argument ne peut être retenu puisqu'elle connaît l'existence du protocole depuis 2003 et n'a intenté aucune action contre M. [N], pas même dans le cadre de la garantie de passif qu'il lui devait après la cession de ses propres actions, et que la démonstration de l'éventuelle malhonnêteté de ce dernier n'est pas rapportée,
que le prix des parts n'est pas vil puisqu'il doit être apprécié à la date de l'échange des consentements et que la société SODIVAR, elle-même qu'il n'était à l'époque ni vil ni lésionnaire,
que l'acte a bien une cause, cause qui doit être recherchée dans l'économie globale du contrat, qui était de permettre à la société SODIVAR de louer le fonds à un prix légèrement inférieur au loyer qui était payé par la société [W] BANDOL et, à M. [W], de récupérer l'immeuble,
que cette cause n'était nullement illicite puisqu'elle n'avait pas pour objet de détourner la loi mais de la respecter.
Il demande, en conséquence, la confirmation de la décision déférée et la condamnation de l'appelante à lui payer 15 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE L'ARRÊT :
Attendu que l'analyse de l'opération conclue entre la société [W] BANDOL et la société SODIVAR, en 1994, montre que le protocole d'accord aujourd'hui invoqué par M. [W] ne peut être considéré comme un acte frauduleux,
qu'en effet la société LA REPE n'était alors que locataire de l'immeuble et ne pouvait, en l'application des textes régissant les crédits baux immobiliers, sous- louer l'immeuble qu'à une société qui avait avec elle des liens capitalistiques,
que donc l'acquisition des parts détenues par la société [W] BANDOL dans la société LA REPE était indispensable à l'opération envisagée,
que cependant le fait que les parties aient pu alors convenir que, quand l'existence de ce lien entre le locataire et le sous -locataire ne serait plus nécessaire du fait de l'acquisition de l'immeuble par la société LA REPE, les parts sociales seraient revendues par la société SODIVAR ne serait pas constitutif d'une fraude au regard des textes régissant le crédit-bail immobilier, puisque ces textes n'étaient plus applicables après la levée de l'option,
que, par contre, se pose le problème de la capacité qu'avait M. [N], P.D.G. de SODIVAR à prendre un tel engagement pour le compte de la société,
que le seul fait que les actuels dirigeants de la société SODIVAR considèrent, qu'à ce jour, l'engagement est contraire à l'intérêt de la société est insuffisant pour présupposer qu'à l'époque M. [N] n'avait pas le pouvoir de signer cet acte,
qu'il est certain que M. [N], qui était en 1994 président directeur général de la société SODIVAR, disposait du pouvoir d'engager la société envers les tiers même dans un cadre dépassant l'objet social de la société,
qu'en effet, en l'espèce, il ne peut pas être considéré, contrairement à ce que soutient M. [W] et à ce qu'a retenu le premier juge, que l'achat et surtout la revente de parts sociales d'une société immobilière soit une opération relevant à proprement parler de l'objet social de la société SODIVAR qui était 'le négoce au détail.., la mise en oeuvre et l'exploitation de tous commerces..., la création, l'acquisition, la location, la prise à bail, l'installation, l'exploitation de tous établissements se rapportant aux activités spécifiées ; la prise, l'acquisition, l'exploitation ou cession de tous procédés et brevets concernant ces activités ; la participation directe ou indirecte de la société dans toutes les opérations ou entreprises pouvant se rattacher à l'objet social ;',
que M. [W], qui se présente en tant que tiers, ne pouvait ignorer que l'opération n'entrait pas dans l'objet social de la société SODIVAR puisque dans cette opération, M. [N] n'a pas agi en vertu des pouvoirs que lui concédaient la loi et les statuts de la société, mais en vertu d'un mandant spécial donné par le conseil d'administration de la société SODIVAR de consentir un nantissement sur le fonds de commerce acquis, de conclure un bail avec la S.C.I. LA REPE, 'd'acquérir 10 % des parts sociales de la société civile immobilière LA REPE... aux charges et conditions qu'il jugera utiles ou favorables, signer tous actes et en général faire le nécessaire',
que ce mandat ne comportait pas une autorisation de vendre les parts, acte de disposition qui ne peut relever d'une simple faculté de négociation, que cette 'lacune' ne peut, si ce n'est être justifiée, mais du moins être expliquée par une éventuelle fraude aux textes régissant les crédits baux immobiliers, puisque la cession prévue après la levée de l'option n'avait aucun caractère illégal,
qu'il est donc certain que M. [N] n'est intervenu dans le cadre des opérations conclues en 1994 qu'en vertu d'un pouvoir qui ne comportait pas pour lui la possibilité de consentir à la vente des actions qu'il acquérait pour le compte de la société,
que cette limitation du mandat, tout comme le fait que M. [N] n'agissait pas dans le cadre de l'objet social de la société SODIVAR, était incontestablement connue de M. [W] puisque la vente des parts n'était nécessaire que du fait de leur acquisition par la société SODIVAR, acquisition dans laquelle il était intervenu en qualité de gérant de la société [W] BANDOL, et dans laquelle M. [N] avait agi en qualité de 'Président du Conseil, dûment habilité aux fins des présentes, aux termes d'une délibération de la collectivité des associés en date du 20 octobre 1994 demeurée annexée aux présentes après mention',
que d'ailleurs M. [W] a lui-même fait conclure dans la procédure qui a abouti à sa révocation des fonctions de gérant de la S.C.I. LA REPE 'pour agréer l'opération, ce sont les établissements de crédit-bail qui ont exigé qu'une participation de 10 % dans la SCI LA REPE soit transmise à la société SODIVAR. C'est sous cette condition que les établissements de crédit-bail ont agréé la société SODIVAR en qualité de nouveau sous locataire. C'est donc dans ce conteste particulier que la société SODIVAR a fait l'acquisition de 10 % du capital social de la SCI LA REPE, alors qu'il n'existait aucune raison de faire entrer la société SODIVAR dans le capital de la SCI LA REPE, qui était une société patrimoniale et familiale. C'est la raison pour laquelle, les parties ont signé simultanément le 23 octobre 1994 les actes suivants, qui constituaient un ensemble indivisible :
- l'acte de cession du fonds de commerce, emportant transfert du bail de sous-location à la société SODIVAR,
- l'acte de cession de parts sociales au profit de la société SODIVAR,
- et son corollaire, à savoir un protocole contenant la promesse de la société SODIVAR de revendre ces parts sociales, au même prix (indexé), dès la fin du contrat de crédit-bail immobilier.'
qu'il connaissait donc parfaitement, quand a été signé l'acte litigieux, les conditions dans lesquelles M. [N] intervenait et la limite des pouvoirs de ce dernier,
que la preuve de cette connaissance réside aussi dans le fait que, alors que l'acte n'aurait pas été illégal aux regards des conditions posées par les crédits bailleurs, cet acte n'a pas été intégré dans l'ensemble contractuel conclu le même jour,
que M. [W] qui connaissait, en l'état de l'ensemble des actes signés le même jour, la volonté de la société SODIVAR d'obtenir le maximum de garantie lors de l'acquisition du fonds de commerce, garanties qu'il juge maintenant excessives et superfétatoires en l'état de la propriété commerciale dont elle bénéficie, ne pouvait ignorer que l'acte dont il avait obtenu la signature par M. [N], nonobstant l'absence de pouvoir de ce dernier pour ce faire, priverait à terme la société SODIVAR d'une partie des garanties dont elle avait voulu s'entourer, notamment celles de pouvoir, en sus de la propriété commerciale dont la perte se résout en indemnité et non en renouvellement automatique du bail, acquérir d'autres parts sociales de la société LA REPE et opposer un veto à des projets de vente de l'immeuble ou de non-renouvellement de son bail et lui portait donc préjudice,
que l'engagement de M. [N] pris à l'égard d'un tiers qui connaissait les limites de ses pouvoirs et le préjudice qu'occasionnerait cet engagement à la société qui n'y avait pas consenti et qui n'avait même en réalité donné mandat à M. [N] que de signer en son nom des actes dans un sens totalement différent, ne peut dès lors être opposé à la société SODIVAR,
qu'il le peut d'autant moins que si la cause de l'acte aurait pu résider dans le fait que la société [W] BANDOL n'avait consenti à signer les actes de vente du fonds et des actions, ainsi que le bail de sous-location, que moyennant la signature de l'acte litigieux, cette cause ne pourrait valoir pour une vente prévue au profit de M. [W] personnellement,
que c'est donc à tort que le premier juge a retenu que l'acte du 23 octobre 1994 engageait la société SODIVAR,
qu'il y a lieu en conséquence de réformer le jugement déféré ;
Attendu que la société SODIVAR ne démontre pas à l'appui de sa demande de dommages et intérêts, un préjudice autre que celui qui sera réparé par l'octroi d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
REFORME le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
DIT que l'acte du 23 octobre 1994 est inopposable à la société SODIVAR et déboute en conséquence M. [Z] [W] de l'ensemble de ses demandes,
DÉBOUTE la société SODIVAR de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive mais CONDAMNE M. [W] à lui payer une somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE M. [W] aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :