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18/05/2012 | FRANCE | N°11/21425

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre a, 18 mai 2012, 11/21425


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 18 MAI 2012



N° 2012/ 279













Rôle N° 11/21425







SAS CARI





C/



[E] [I]

SAS AGORA EINSTEIN





















Grosse délivrée

le :

à :

SCP COHEN

SCP BADIE SIMON THIBAUD















Décision déférée à la Cour :>


Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 05 Décembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 11/00005.





APPELANTE



SAS CARI prise en la personne de son Président, Monsieur [N] [B], demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Plaidant par la SELARL LE R...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 18 MAI 2012

N° 2012/ 279

Rôle N° 11/21425

SAS CARI

C/

[E] [I]

SAS AGORA EINSTEIN

Grosse délivrée

le :

à :

SCP COHEN

SCP BADIE SIMON THIBAUD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 05 Décembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 11/00005.

APPELANTE

SAS CARI prise en la personne de son Président, Monsieur [N] [B], demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Plaidant par la SELARL LE ROUX / BRIN / MORAINE, avocats au barreau de MARSEILLE, et la SELARL GASTAUD- LELLOUCHE - HANOUN, avocats au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [E] [I], demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Plaidant par Me Bernard GRELON, avocat au barreau de PARIS et Me Marie DOLARD, avocat au barreau de PARIS,

SAS AGORA EINSTEIN pris en la personne de son représentant légal en exercice demeurant [Adresse 1]

représenté par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

Plaidant par Me Bernard GRELON, avocat au barreau de PARIS et Me Marie DOLARD, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Mars 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Daniel ISOUARD, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président

Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Conseiller

Madame Sylvie PEREZ, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Mai 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Mai 2012,

Signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 2 septembre 2005, la société Agora Einstein a donné en location commerciale à la société Cari à compter du 1er janvier 2006 pour une durée de douze ans sans possibilité de résiliation triennale, un immeuble d'environ 3 600 mètres carrés situé à [Adresse 3] moyennant un loyer annuel de

420 000 euros hors taxes. Ces deux sociétés avaient comme dirigeant Monsieur [I].

Début 2010, une modification s'est opérée parmi l'actionnariat de la société Cari et les fonctions de dirigeant social de Monsieur [I] pour cette société ont pris fin le 8 mars 2010.

Le 30 novembre 2011 la société Cari a assigné la société Agora Einstein et Monsieur [I] en annulation du bail commercial et réparation de son préjudice. Par jugement du

5 décembre 2011, le tribunal de commerce de Grasse l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, l'a condamnée à payer les loyers saisis entre ses mains et la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à la société Agora Einstein d'une part et à Monsieur [I] d'autre part.

Les 21 et 23 décembre 2011 la société Cari a interjeté appel de cette décision. Elle sollicite sa réformation sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de Monsieur [I] en dommages-intérêts et :

- l'annulation du bail commercial conclu le 2 septembre 2005,

- la fixation de l'indemnité d'occupation à un montant annuel de 300 000 euros hors taxes,

- la condamnation de la société Agora Einstein à lui restituer la somme de 604 000 euros représentant la différence entre les loyers perçus et l'indemnité d'occupation telle que fixée ci-dessus,

- la condamnation de la société Agora Einstein à lui payer la somme de 980 000 euros, montant des travaux, embellissements et améliorations réalisés par elle durant le bail,

- la condamnation in solidum de la société Agora Einstein et de la société Cari à lui payer la somme de 5 770 000 euros de dommages-intérêts en réparation des pertes générées par l'opération litigieuses,

- la condamnation de la société Agora Einstein et de Monsieur [I] chacun à lui payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fonde sa demande d'annulation du bail sur sa cause illicite. Elle expose que Monsieur [I], dirigeant de la société Cari a élaboré un montage financier ayant pour effet d'avantager la société Agora Einstein dont il est associé et dirigeant au détriment de la société Cari. Pour étayer ce grief elle soutient que le bail commercial n'entrait par son champ d'activité habituel et son objet social, que les conditions des conventions conclues par Monsieur [I] sont anormales, qu'elles ne présentaient aucun intérêt pour elle et que leur finalité a été d'enrichir la société Agora Einstein et Monsieur [I] à son détriment.

Elle prétend que la société Agora Einstein qui avait connaissance du caractère frauduleux du bail a engagé sa responsabilité et de même que Monsieur [I] contre lequel son action n'est pas prescrite en raison de ses fautes de gestion.

La société Agora Einstein et Monsieur [I] concluent à la confirmation du jugement attaqué.

À titre subsidiaire, ils demandent si le bail était reconnu nul, la fixation de l'indemnité d'occupation à la somme de 420 000 euros hors taxes par an avec révision annuelle ou si une somme moindre était retenue la condamnation de la société Cari à payer une partie des recettes de l'immeuble et la somme de 300 000 euros au titre de la jouissance des travaux durant l'occupation de l'immeuble.

Ils soulèvent la prescription de l'action en dommages-intérêts contre Monsieur [I] et contestent avoir commis un quelconque manquement à leur obligation ou toute autre faute envers la société Cari.

Ils réclament la condamnation de la société Cari à payer à Monsieur [I] la somme de 400 000 euros dommages-intérêts pour préjudice moral et à chacun d'eux celle de 30 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ils exposent que la société Cari lorsqu'elle était dirigée par Monsieur [I] a désiré développer le secteur des services et notamment l'activité de gestion de sites, que cette nouvelle activité imposait son installation dans un nouvel immeuble et que c'est pour cela que l'immeuble de Sophia-Antipolis a été pris à bail auprès de la société Agora Einstein créée à cet effet et constituée essentiellement d'actionnaires de la société Cari.

Ils soulignent que Monsieur [I] possédait les mêmes intérêts dans les sociétés Agora Einstein et Cari, que les associés étaient informés de la signature du bail et l'ont approuvé et que la conclusion de ce bail était conforme à l'intérêt de la société Cari.

* *

* * *

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'annulation du bail :

La société Cari fonde sa demande d'annulation du bail commercial du 2 septembre 2005 sur sa cause illicite qui résulterait selon elle de sa conclusion dans le seul intérêt de la société Agora Einstein et de Monsieur [I] et non pas du sien.

Pour cela elle expose que ce bail a eu pour effet d'avantager la société Agora Einstein à son détriment.

Mais la licéité de la cause pour rapport à l'intérêt social s'apprécie lors de la conclusion du bail et le défaut de rentabilité de l'opération envisagée ne peut établir l'absence de cause.

1°) sur le caractère inhabituel de l'activité exercée dans l'immeuble par rapport au métier et à l'objet social de la société Cari :

La destination de l'immeuble devait correspondre à l'objet social de la société Cari et notamment 'pépinière d'entreprise, promotion de site, formation organisation de manifestations et de congrès, toute activité de service et de formation, toute activité liée à l'événementiel'.

La société Cari prétend que la location et la gestion d'un centre d'affaires étaient étrangères à ses activités habituelles et n'entrait pas dans son objet social.

Ses statuts tels que modifiés par l'assemblée générale extraordinaire du 12 novembre 2004 incluaient dans son objet social 'la gestion et l'exploitation de tout site dans le cadre d'une délégation de service public (notamment les ports, parkings, aéroports, et plus généralement toutes constructions publiques), l'acquisition, la prise à bail et la gestion de biens immobiliers, la participation à toute activité liée à l'étude, au développement et à la réalisation d'activité d'exposition, réunion et manifestation professionnelle...'

Dans un premier temps, la société Cari n'a pas exploité directement ce site mais a confié cette exploitation à la société Cari Events qui apparaît comme une de ses filiales. Ensuite elle l'a absorbée fin 2006 par transmission universelle de patrimoine et ont été ajoutées à ses statuts 'la fourniture de prestations de services aux entreprises en tant que centre d'affaires et entreprise de domiciliation... la fourniture aux entreprises de toute la logistique indispensable à l'exercice de leur activité professionnelle, la fourniture de prestations de services d'accueil à caractère évènementiel... la fourniture de prestations de formation en tant qu'organisme de formation professionnelle, la gestion immobilière, l'exploitation et l'animation de sites divers, dans le cadre d'une mission de service privé ou d'une mission de service public'.

Ainsi l'exploitation du site par la société Cari soit par l'intermédiaire de sa filiale, la société Cari Events, soit directement correspondait à son objet social.

Elle prétend aussi que l'exploitation de l'immeuble loué l'éloignait de ses activités habituelles qui résident dans le bâtiment et les travaux publics.

Cela est exact mais les documents produits manifestent sa volonté de diversifier cette activité et d'y adjoindre des activités de services permettant de montrer sa compétence en matière de gestion de site immobilier. En effet les attestations de Messieurs [X], [D], [S], cadres de l'entreprise établissent que l'opération Agora s'inscrivait dans le cadre de développement de la notoriété de la société Cari et était connue du fonds d'investissement Ciclad 3 FCPR, principal actionnaire ainsi le confirme l'attestation de Monsieur [O], fondé de pouvoir de ce fonds.

Ainsi la prise à bail de l'immeuble Agora par la société Cari ressort d'une décision s'inscrivant dans son développement et non pas principalement pour permettre à la société Agora Einstein que dirigeait Monsieur [I] de percevoir des loyers.

2°) sur le caractère inhabituel des conventions passées par Monsieur [I] :

La société Cari se plaint des diverses conventions conclues par Monsieur [I] et souligne tout d'abord les clauses inhabituelles du bail commercial.

Il est évident que l'immeuble a été acquis par la société Agora Einstein qui venait de se constituer pour être donné en location à la société Cari.

Mais cette dissociation du foncier et de l'exploitation de l'entreprise n'a rien d'inhabituel et en l'espèce le fondé de pouvoir du fonds d'investissement explique que son fonds ne désirait pas participer à un investissement immobilier.

La durée de douze ans du bail correspondait à ce type d'opération et présentait des avantages et des inconvénients pour les deux parties. Certes la clause ne permettant pas la résiliation triennale apparaît comme plus inhabituelle dans un bail commercial de douze ans mais outre que l'article L. 145-4 du Code de commerce l'autorise expressément, elle s'explique par le caractère d'investissement en vue d'une nouvelle activité de la société Cari.

La clause prévoyant que 'Tous travaux, embellissements et améliorations quelconques qui seraient faits par le preneur...resteront en fin de bail la propriété' du bailleur s'avère habituelle dans les baux commerciaux et la société Cari ne peut valablement l'invoquer à l'appui de ses prétentions.

Le prix du bail (420 000 € l'an) apparaît normal pour ce type d'immeuble offert à la location par le précédent propriétaire (la société France Télécom) pour un loyer annuel de 450 000 euros. D'ailleurs la société Cari ne prétend pas que ce loyer ne correspond pas au marché et ne verse aucun document établissant une valeur locative moindre.

D'autre part la société Cari se réfère aux contrats conclus en son nom par Monsieur [I] avec la société Action Team (prestations de services) dirigée par sa fille et la société A Télécom (prestations téléphoniques et informatiques) dont son gendre était le gérant.

Si ces contrats ont généré des flux financiers au profit de ses proches, cela n'a rien illicite et ne saurait constituer une anomalie alors qu'elle ne soutient pas que les prestations n'étaient pas réelles et au prix du marché ; certes l'audit informatique a recommandé une solution interne mais Monsieur [I] explique ne pas l'avoir retenue en raison des difficultés sérieuses qu'elle présentait compte tenu de sa complexité et du manque de compétence de la société Cari en ce domaine.

La société Cari évoque aussi divers contrats conclus par Monsieur [I] en son nom avec différents prestataires dont le bénéficie restera à la société Agora Einstein en sa qualité de propriétaire. D'une part cela n'est pas exact pour certains d'entre eux (mobiliers, 'uvres d'art) dont elle conservera l'objet lors de la libération de l'immeuble ; d'autre part les autres contrats correspondent à la gestion de l'immeuble et présentaient des avantages pour le locataire (système de surveillance, pose de panneaux photovoltaïques).

Il n'est pas inutile de constater que la société Cari, lors de son rachat par ces actuels actionnaires, n'a pas levé la promesse d'achat que la société Agora Einstein lui avait faite sur l'immeuble litigieux ; pourtant cela lui aurait permis de mettre fin au bail et retrouver toute liberté en ce qui concerne l'exploitation de l'immeuble et notamment la poursuite de son actuelle activité en ces lieux.

La société Cari se plaint aussi de la méconnaissance par Monsieur [I] des obligations édictées par l'article L. 227-10 du Code de commerce en ne soumettant pas les conventions qu'il a passées aux associés. Mais Monsieur [I] n'a pas conclu de conventions entre lui-même et la société Cari, société par actions simplifiée, et ce texte ne lui imposait pas de présenter un rapport aux associés sur le bail ou les autres contrats. Au surplus il ressort de témoignages d'associés qu'ils ont eu connaissance du bail.

3°) sur l'absence de profit de l'opération :

La société Cari se plaint de l'importance de l'exploitation très déficitaire de l'immeuble qui aurait occasionné des pertes d'un montant de plus de 5 millions d'euros depuis le début de la location. Il convient de noter qu'elle inclut dans ce déficit les résultats de l'année 2010 où se situe le changement d'actionnaires et la cessation des fonctions de Monsieur [I].

D'une part, comme il a déjà été énoncé, c'est lors de la conclusion du contrat que doit s'apprécier sa nullité et le prétendu échec de l'exploitation de l'immeuble ne saurait enlever au bail sa cause.

D'autre part, l'appréciation du résultat de l'opération est difficile à cerner car ce n'est pas parce qu'elle ne s'avère pas rentable pour l'entreprise qu'elle n'aurait pas dû être entreprise et même était contraire à ses intérêts. La société Agora Einstein et Monsieur [I] prétendent que l'exploitation du site Agora a été positive pour la société Cari car elle montrait son savoir-faire dans la gestion de site et lui a apporté des contrats en lui permettant de se positionner sur le marché des services ; il est impossible d'apprécier ce qui a pu déterminer les contractants de conclure un marché avec la société Cari et la part de l'exploitant du site Agora dans leur choix ou ce qu'il lui apporte en terme d'image.

Il convient de relever que pour avoir toujours été importantes, les pertes d'exploitation du site Agora n'ont jamais menacé la pérennité de la société Cari ni même empêché qu'elle reste bénéficiaire. Pour les années 2007, 2008 et 2009 ces pertes représentent entre 4,60 % et 25 % de son bénéfice et équivalent entre 2,2 % et 3,7 % de ses frais généraux. Ainsi ces pertes apparaissent supportables et la poursuite de l'exploitation ressort des pouvoirs d'appréciation du dirigeant.

Ainsi aucune conséquence ne peut être tirée des pertes occasionnées par le site Agora.

4°) sur l'enrichissement anormal et disproportionné de Monsieur [I] :

La société Cari invoque l'enrichissement de Monsieur [I] à son détriment exposant que depuis le bail la valeur de la société Agora Einstein de 37 000 euros à sa création est passée à la somme de 800 000 euros grâce au remboursement de l'emprunt contracté pour l'achat de l'immeuble dont le remboursement s'effectue par le paiement du loyer.

L'enrichissement d'une partie à un contrat ne saurait être fautif et constituer un signe d'un manquement à ses obligations.

Les documents produits notamment les attestations de cadres de la société Cari et du fondé de pouvoir du fonds d'investissement montrent que cette société a désiré diversifier son activité dans la gestion d'immeuble et l'événementiel, que le fonds d'investissement n'a pas voulu participer à l'opération immobilière ne désirant pas investir dans ce secteur et qu'il a été décidé de créer la société Agora Einstein qui achèterait l'immeuble au moyen d'un emprunt et le lourait à la société Cari. Cette opération ne présente aucune anomalie.

Monsieur [I] au travers de diverses sociétés détenait une proportion comparable de parts sociales (environ 25 %) dans la société Agora Einstein et dans la société Cari ; il ne possédait aucun avantage particulier à favoriser l'une par rapport à l'autre et la cession des parts de cette dernière à ses actuels actionnaires n'était pas envisagée en 2005.

Il est vrai que l'exploitation du site Agora apparaît assurer de meilleurs profits à la société Agora Einstein qu'à la société Cari mais cela provient des aléas des affaires et ne saurait établir un comportement fautif lors de la signature du bail ou des principaux contrats. Rien ne montre que les pertes survenues depuis, étaient prévisibles en 2005 ou proviennent d'une faute de gestion.

Ainsi la demande la société Cari en annulation du bail doit être rejetée.

Sur la demande en dommages-intérêts contre la société Agora Einstein :

Les motifs énoncés ci-dessus établissent l'absence de faute de la société Agora Einstein dans la conclusion du bail. Dès lors la société Cari ne peut qu'être déboutée de sa demande en dommages-intérêts contre elle.

Sur l'action contre Monsieur [I] :

La société Cari recherche la responsabilité personnelle de Monsieur [I] d'une part comme dirigeant de la société Agora Einstein et d'autre part d'elle-même.

Selon l'article L. 225-254 du Code de commerce 'l'action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, tant sociale qu'individuelle, se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé, de sa révélation'.

L'action de la société Cari n'apparaît pas prescrite dans la mesure où elle se fonde à l'égard de Monsieur [I], dirigeant de la société Agora Einstein, dans la continuation du bail malgré son aspect désavantageux et comme dirigeant de la société Cari contre certains contrats conclus en 2009.

La responsabilité d'un dirigeant social envers les tiers victimes d'une faute de la société ne peut être engagée que pour une faute séparable de ses fonctions et qui lui soit personnellement imputable. En l'espèce aucune faute ne pouvant être reprochée à la société Agora Einstein, l'action contre Monsieur [I] en sa qualité de dirigeant de cette société s'avère nécessairement non fondée.

Également les motifs énoncés ci-dessus lors de l'examen de la nullité du bail montrent que Monsieur [I] n'a commis aucune faute dans la gestion de la société Cari ; le développement de l'activité de service par la société Cari et la conclusion du bail qui était nécessaire pour cette activité se justifiant par le désir de cette société de se diversifier.

Ainsi la société Cari doit être déboutée de son action contre Monsieur [I].

Sur la demande en dommages-intérêts de Monsieur [I] :

En poursuivant Monsieur [I], la société Cari n'a fait qu'exercer son droit de s'adresser à justice ; son action n'a été accompagnée d'aucun comportement tendant à faire douter de son honnêteté ou portant atteinte à sa considération. Monsieur [I] doit être débouté de sa demande en dommages-intérêts.

Succombant à son recours, la société Cari doit être condamnée à payer à la société Agora Einstein et Monsieur [I] la somme de 5 000 euros à chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

* *

* * *

* *

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du 5 décembre 2011 du tribunal de commerce de Grasse ;

Précise seulement que l'action contre Monsieur [I] est recevable mais mal fondée ;

Y ajoutant :

Condamne la société Cari à payer à la société Agora Einstein et à Monsieur [I] la somme de 5 000 euros à chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société Cari aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 11/21425
Date de la décision : 18/05/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°11/21425 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-18;11.21425 ?
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