COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 16 MAI 2012
HF
N° 2012/325
Rôle N° 11/08948
COMMUNE DE [Localité 2]
C/
Association VVF VILLAGE VACANCES FAMILLES
Grosse délivrée
le :
à :
SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE
SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 31 Mars 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 08/506.
APPELANTE
COMMUNE DE [Localité 2],
représentée par son Maire en exercice M. [H] [F],
domicilié en cette qualité [Adresse 3]
représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué (e) aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués, ayant pour avocat la SCP WAGNER avocat au barreau de NICE.
INTIMEE
Association VVF VILLAGE VACANCES FAMILLES, pris en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]
représentée par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué (e) aux lieu et place de la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués, ayant pour avocat Me MATTEOLI du CMS BUREAU FRANCIS LEFEVRE avocats au barreau des Hauts de Seine.
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 04 Avril 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2012
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2012,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS
La commune de [Localité 2] (Alpes Maritimes) réalisait en 1982 sur son territoire un village de vacances composé de 40 gîtes familiaux, outre un pavillon central, des locaux collectifs, des logements de fonction, des espaces verts, des parkings, et une aire de jeux.
Par acte du 10 octobre 1982, la commune et l'association « Villages Vacances Familles » (VVF) signaient une convention confiant à cette dernière la gestion du village pendant trois 30 ans, mettant notamment à sa charge le paiement d'une certaine somme annuelle à titre de « provisions pour grosses réparations », devant « servir à la maintenance du patrimoine, concernant notamment le clos et le couvert ».
La commune connaissait une situation financière très difficile à la fin des années 1980, ce qui nécessitait sa mise sous tutelle financière par la préfecture en 1989 et 1990.
Au début des années 1990, VVF faisait connaître à la commune son souhait de se désengager si d'importants travaux de rénovation, touchant notamment les toitures, l'évacuation des eaux pluviales, et les cheminements, n'étaient pas réalisés, et indiquait par un courrier du 22 février 1994 que « l'exploitation du gîte à la fin de l'exercice 1994/95 ne pourra pas être assuré par V.V.F dans les conditions actuelles ».
Une délibération de la commune du 12 novembre 1993 autorisait le maire à signer un avenant à la convention du 19 octobre 1982 afin de « suspendre pendant deux ans (1994 et 1995) la provision « grosses réparations » que VVF verse à la commune ».
Dans un courrier du 14 septembre 1994, VVF réitérait son souhait de se désengager en invoquant d'une part des charges financières trop lourdes, dues notamment aux « dotations de grosses réparations que VVF paye à la commune », précisant à ce sujet que « les dotations payées à la commune lors du mandat communal précédant ont été utilisées à d'autres fins que celles d'entretien des bâtiments du gîte (et que ce sont ainsi) 718.510 F qui des années 1982 à 1989 ont été soustraits à leur destination », et d'autre part le non paiement de sa « rémunération technique » prévue à la convention (article 6).
Dans un courrier du 29 juin 1995, VVF indiquait que les discussions engagées « depuis près de trois ans sur l'avenir du gîte de [Localité 2] (n'ayant) pu être concrétisées par un accord définitif » et que les « efforts que nous avons menés, tant sur le plan commercial que sur celui de la gestion, ne nous ont pas permis de trouver une solution viable à la poursuite de l'exploitation du gîte qui s'avère impossible dans les conditions actuelles », et confirmait, comme elle l'avait indiqué deux ans plus tôt au cas où aucun accord ne pourrait être trouvé, cesser l'exploitation du gîte à compter du 1er novembre 1995, et résilier en conséquence la convention conclue le 10 octobre 1982.
Dans un courrier du 13 septembre 1995, VVF confirmait sa décision de résilier la convention, proposait, sur de nouvelles bases, une poursuite d'exploitation d'un an renouvelable tacitement, et indiquait qu'une association Cap'Vacances pourrait être intéressée par la reprise en gestion du gîte, et qu'elle pourrait accompagner le transfert en raison de ses liens avec cette association.
A la suite de la rupture des relations entre les parties, l'exploitation du gîte sera reprise, dans des conditions différentes, par cette association Cap'Vacances.
*
La commune, ayant initialement assigné VVF en réparation de préjudices consécutifs à la rupture de la convention devant la juridiction administrative, et cette dernière s'étant estimée incompétente, l'assignait devant le tribunal de grande instance de Nice.
Vu son appel le 19 mai 2011 du jugement l'ayant déboutée de ses demandes, condamnée aux dépens et au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu ses conclusions signifiées le 19 août 2011, et les conclusions signifiées le 18 octobre 2011 par VVF ;
Vu la clôture prononcée le 4 avril 2012 ;
MOTIFS
1/ La cour adopte les motifs pertinents du premier juge, et y ajoute :
il ressort des délibérations du conseil municipal des 29 juin 1992, 12 novembre 1993, et 27 mars 1993, que le village de vacances était dans un état « particulièrement dégradé », nécessitant une intervention « d'urgence », pour un montant de travaux très importants (3.588.640 francs), et sans que soit contesté un rappel de la remarque de VVF selon laquelle elle avait « versé avant 1989 pendant sept ans des provisions pour grosses réparations qui n'ont jamais été réinvesties sur le site contrairement aux dispositions de la convention » ;
il ressort du tableau produit par la commune récapitulant les montants annuels de travaux réalisés de 1983 à 1995, que, même de 1990 à 1993, les sommes engagées pour les « grosses réparations » ont été bien inférieures à celles perçues de VVF pendant la même période au titre des redevances « grosses réparations » ;
si la commune avait pris la mesure de la situation au début des années 1990, et mis en 'uvre des évaluations et des procédures (notamment administratives) pour permettre d'y remédier (en 1992 et 1993), il n'est pas établi que ces dernières aient commencé à produire un quelconque résultat effectif et concret, sur le terrain, ou même qu'un terme crédible ait été donné à VVF à ce sujet (qui a indiqué dans son courrier du 14 septembre 1994 avoir perdu « 924.000 F en cumulant les résultats des 4 exercices 89/90/91/92 »), avant qu'elle ne prenne la décision de rompre la convention ;
Il résulte de l'ensemble de ces motifs que la dégradation du site, due à un manquement persistant de la commune à ses obligations contractuelles, ne pouvait permettre à VVF de gérer le site convenablement et d'en retirer un chiffre d'affaires lui permettant d'équilibrer ses charges financières, qu'elle a averti la commune de ses difficultés, qu'elle a contribué à l'expertise des travaux propres à remédier à la situation, qu'elle a patienté en consentant à poursuivre pendant quelques années une activité déficitaire, et qu'elle a fini par prendre la décision de se désengager, en l'absence de résultats tangibles, de sorte qu'il ne peut qu'être jugé qu'elle n'a, à aucun moment, agi de mauvaise foi, et n'a pas commis de faute en résiliant unilatéralement la convention.
La commune est donc déboutée de ses demandes.
2/ La commune supporte les dépens de première instance et les dépens d'appel.
Il est équitable d'allouer à VVF une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile (dont 1.500 euros au titre de la première instance).
**
Il suit de l'ensemble de ce qui précède que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe
Confirme le jugement.
Dit que la commune de [Localité 2] supporte les dépens d'appel.
Dit qu'il sera fait application au profit de la SCP d'avoués de Saint-Ferréol-Touboul et de la SCP d'avocats Badie-Simon-Thibaud & Juston des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Condamne la commune de [Localité 2] à payer à l'association VVF la somme de 1.500 euros sur le fondement en appel des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT