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16/05/2012 | FRANCE | N°11/03424

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre b, 16 mai 2012, 11/03424


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2012



N° 2012/266



Rôle N° 11/03424



Compagnie d'assurances ACE EUROPEAN GROUP LIMITED

Compagnie d'assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE ET SPECIALITY

Compagnie d'assurances HANSE MARINE VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances HELVETIA VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances KRAVAG LOGISTIC VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances MANNHEIMER VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances ZURICH VERSICHERUNG AG

Compag

nie d'assurances PANTAENIUS SAM



C/



[O] [J] épouse [E]

[S] [E]

ALLIANZ GLOBAL CORPORATE AND SPECIALITY IARD



Grosse délivrée

le :

à : SELARL ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 16 MAI 2012

N° 2012/266

Rôle N° 11/03424

Compagnie d'assurances ACE EUROPEAN GROUP LIMITED

Compagnie d'assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE ET SPECIALITY

Compagnie d'assurances HANSE MARINE VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances HELVETIA VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances KRAVAG LOGISTIC VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances MANNHEIMER VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances ZURICH VERSICHERUNG AG

Compagnie d'assurances PANTAENIUS SAM

C/

[O] [J] épouse [E]

[S] [E]

ALLIANZ GLOBAL CORPORATE AND SPECIALITY IARD

Grosse délivrée

le :

à : SELARL BOULAN

SCP ERMENEUX

SCP BOISSONNET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 20 Mai 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/3975.

APPELANTES

Compagnie d'Assurances ACE EUROPEAN GROUP LIMITED

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

sise [Adresse 10] . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE ET SPECIALITY

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

sise [Adresse 8] . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances HANSE MARINE VERSICHERUNG AG

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

[Adresse 14] . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances HELVETIA VERSICHERUNG AG

prise en la personne de son dirigeant en exercice

sise Pro. [Adresse 6] - . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances KRAVAG LOGISTIC VERSICHERUNG AG

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

sise [Adresse 9] . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances MANNHEIMER VERSICHERUNG AG

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

sise [Adresse 12] . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances ZURICH VERSICHERUNG AG

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

sise [Adresse 17] . ALLEMAGNE

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Compagnie d'Assurances PANTAENIUS SAM

prise en la personne de son Dirigeant en exercice

sise [Adresse 5]

représentée par la SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP BLANC CHERFILS, avoués à la cour

plaidant par Me Christophe NURIT, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame [O] [J] épouse [E]

née le [Date naissance 4] 1928 à [Localité 11]

demeurant [Adresse 3]

représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [S] [E]

appelant incidemment

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 16]

demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Julien SCAPEL, avocat au barreau de MARSEILLE

ALLIANZ GLOBAL CORPORATE AND SPECIALITY IARD

prise en la personne de son représentant habilité

RCS NANTERRE B 487 424 608

appelante incidemment

sise [Adresse 15]

représentée par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Julien SCAPEL, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Avril 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Gilles ELLEOUET, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christine DEVALETTE, Présidente

Monsieur Gilles ELLEOUET, Conseiller

Monsieur Michel CABARET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Lydie BADEL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2012

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2012,

Signé par Madame Christine DEVALETTE, Présidente et Madame Lydie BADEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Le 13 septembre 2005, le bateau CALIENTE de marque [L] de type Endurance 39, amarré à Port [7], appartenant à Mme [J] veuve [E] et utilisé par son fils M.[S] [E], assuré auprès de la société Allianz Global Corporate et Specialty, a été détruit par un incendie qui s'est propagé à plusieurs bateaux voisins dont le bateau MAKIRA de marque [L], de type Endurance 41 battant pavillon italien et ayant pour port d'attache [13], appartenant à la société de droit italien Mercantile Leasing et donné en leasing à Monsieur [G] [M].

Par ordonnance du 11 juillet 2006, le président du tribunal de commerce de Toulon a autorisé Monsieur [S] [E] a constituer, en application de l'article 61 de la loi du 13 janvier 1967, un fonds de limitation d'un montant de 99.847,79 € et a nommé Maître [T] [W] comme liquidateur de ce fonds.

Par ordonnance du 22 octobre 2007, le président du tribunal de commerce de Toulon a constaté la constitution du fonds de limitation.

Par acte du 30 avril 2008, les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA ainsi que la société Pantaenius SAM ont assigné devant le tribunal de grande instance de Draguignan, Mme [O] [J], veuve [E] et Monsieur [S] [E] en paiement in solidum de la somme de 265.000 € en principal, outre 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 17 avril 2009,Madame [J] veuve [E] a assigné la société Allianz Global Corporate et Speciality en garantie de toute condamnation et en paiement de la somme de 10'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 20 mai 2010, le tribunal de grande instance de Draguignan a:

- dit Monsieur [S] [E] et Madame [J] veuve [E] forclos en leur exception de nullité de l'assignation

- rejeté les fins de non recevoir soulevées

- débouté les compagnies d'assurance ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich VersicherungAG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA ainsi que la société Pantaenius SAM de leur demande dirigée contre Madame [J] veuve [E];

-condamné les compagnies d'assurance ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich VersicherungAG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA, la société Pantaenius SAM à payer à Madame [J], veuve [E], la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- dit que Monsieur [S] [E] en sa qualité de détenteur du bateau Calliente est responsable des conséquences de l'incendie;

- fixé à la somme de 265.000 € le montant de leur créance à produire auprès de Maître [W] ès-qualités de liquidateur du fonds de limitation constitué par Monsieur [S] [E];

-condamné M. [S] [E] à payer aux compagnies d'assurance ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA, à la société Pantaenius SAM la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamné les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA, la société Pantaenius SAM aux dépens relatifs à la mise en cause de Madame [J] veuve [E];

-condamné Monsieur [S] [E] au surplus des dépens.

Les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, la société Pantaenius SAM ont relevé appel de ce jugement le 24 février 2011.

Vu les conclusions du 24 mai 2011 des compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG et Pantaenius SAM

Vu les conclusions du 12 juillet 2011 de Mme [O] [E].

Vu les conclusions du 22 juillet 2011 de M.[S] [E] et de la compagnie d'assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE AND SPECIALITY IARD

En l'absence de révocation de l'ordonnance de clôture du 20 mars 2012, les conclusions du 22 mars 2012 des compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG et Pantaenius SAM et les conclusions du 29 mars 2012 de M. [S] [E] et de la compagnie d'assurances ALLIANZ GLOBAL CORPORATE AND SPECIALITY IARD seront déclarées d'office irrecevables, la cour statuant au vu des dernières écritures des appelantes du 24 mai 2011 et des intimés du 12 et du 22 juillet 2011.

SUR QUOI

Les appelantes concluent à la réformation du jugement entrepris soutenant que M.[E] a commis une faute inexcusable en ayant sciemment omis d'ôter la ligne de quai en son absence, en laissant le bateau sous tension, sans surveillance et sans avoir même déconnecté interrupteur magnétothermique du chargeur de batterie, ce qui permet d'écarter toute application de la limite de responsabilité du propriétaire du navire de mer.

Elles demandent à la cour de condamner in solidum Mme [J] Veuve [E] propriétaire du navire, M. [S] [E] utilisateur et de la compagnie d'assurances ALLIANZ au paiement de la somme de 265'000 € avec les intérêts de droit à compter de la date du sinistre et celle de 10'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M.[E] et la compagnie ALLIANZ appelants à titre incident, concluent à la réformation du jugement, soutenant que la responsabilité de M. [E] a été retenue à tort, en l'absence de faute de sa part.

Mme Veuve [E] conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA ainsi que la société Pantaenius SAM de leur action à son encontre.

Sur l'irrecevabilité de toute demande en paiement:

M.[S] [E] a été autorisé à constituer un fonds de limitation de 99.847,79 € par ordonnance du 11 juillet 2006, l'ordonnance du 22 octobre 2007 constatant la constitution dudit fonds.

Les appelantes ont produit leurs créances entre les mains de Maître [W] ès-qualités de liquidateur du fonds de limitation.

Les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG et Pantaenius SAM

soutiennent que ce fonds ne leur est pas opposable au vu des dispositions suivantes de l'article 58 § 3 de la loi du 3 janvier 1967 aux termes desquelles," Il [ le propriétaire du navire] n'est pas en droit de limiter sa responsabilité s'il est prouvé que le dommage résulte de son fait ou de son omission personnels, commis avec l'intention de provoquer un tel dommage ou commis témérairement et avec conscience qu'un tel dommage en résulterait probablement.".

Les appelantes ne soutiennent pas qu'il a été mis volontairement le feu au navire.

Elles ne rapportent pas la preuve, au vu du rapport contradictoire amiable établi par M.[Z], que M.[E] avait en sa possession le manuel du propriétaire constructeur [L] édictant les consignes de sécurité, consignes qu'il n'aurait pas respectées en toute connaissance de cause, et notamment des risques d'incendie.

Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a déclaré le fonds de limitation mis en oeuvre opposable aux compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG et Pantaenius SAM en retenant qu'elles ne peuvent obtenir de condamnation à paiement mais seulement la fixation de leur créance.

Sur les responsabilités encourues

Les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG et Pantaenius SAM recherchent la responsabilité pour faute sur le fondement de l'article 1384 alinéa 2 du code civil et de l'article 58 de la loi du 3 janvier 1967 de Madame [J] veuve [E], propriétaire du navire et de son fils [S] [E] soutenant que ce dernier a commis des fautes en relation directe avec le sinistre en laissant le bateau à flot pour hivernage alimenté en électricité à quai sans débrancher les appareils électriques à bord ni respecter les consignes de sécurité du constructeur Cranchi dont il avait nécessairement connaissance et sans avoir contacté le personnel du port pour l'informer de son oubli afin de débrancher la ligne de quai.

Madame [J] veuve [E] fait valoir qu'elle n'avait pas la garde du bateau et qu'en toute hypothèse aucune faute ne peut être reprochée à son fils.

M. [S] [E] soutient que la cause de l'incendie demeure incertaine et qu'il n'y a aucun lien de causalité entre sa prétendue faute et le sinistre et qu'en toute hypothèse, il n'a commis aucune faute car il a confié l'entretien de son navire au concessionnaire de la marque [L] et a pris soin de débrancher l'ensemble des équipements et de déclencher les disjoncteurs au niveau du quai comme du navire, de sorte que le bateau n'était plus sous tension, la ligne de quai à poste ayant été laissée pour éviter qu'elle ne tombe à l'eau.

M.[E] soutient également que le concessionnaire ne lui a pas indiqué qu'il ne devait pas laisser le navire sous tension et que la remise sous tension du navire est le fait de la société d'économie mixte qui gère le port, d'autant que le bateau avait été visité la veille de l'incendie puisqu'il devait être tiré à sec par la société Express Yacht qui disposait des clefs.

Aux termes de l'article 1384 alinéa 2 du code civil, celui qui détient à un titre quelconque tout ou partie des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, ne sera responsable vis à vis des tiers des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable.

Au jour du sinistre, c'est M.[S] [E] qui avait l'usage du navire et qui a, ensuite constitué le fonds de limitation.

L'article 1384 alinéa 2 susvisé, est applicable lorsqu'il existe une relation directe entre l'incendie et le dommage subi par des tiers. C'est donc à juste titre que le premier juge a débouté les compagnies d'assurances de leur action à l'encontre de Mme [E] qui n'avait pas la garde du navire et dont la responsabilité ne pouvait être engagée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Les éléments versés aux débats, et notamment l'enquête de police ainsi que le rapport d'expertise amiable de M.[Z], parfaitement analysés par les premiers juges, sont suffisants pour permettre à la cour de statuer, sans avoir à prendre en compte, le rapport d'expertise judiciaire [F], qui n'est pas intervenu au contradictoire de M.[M], de la société MERCANTILE LEASING et de leurs assureurs.

En effet, il est ainsi incontestablement établi que:

- l'incendie a pris naissance à bord du bateau CALIENTE

- les premières constatations techniques permettent de situer le foyer de l'incendie dans le carré avant

- le dossier technique effectué par Monsieur [I] [D] dans le cadre de l'enquête de police conclut que le départ de feu est situé au niveau du tableau électrique sans cependant qu'il soit possible de déterminer avec certitude si la cause de l'incendie provient d'une défaillance des sécurités électriques du bateau ou au niveau de la borne de quai alimentant ce même bateau;

- l'électricien de la capitainerie du port, Monsieur [A] y [B], entendu également dans le cadre de l'enquête a précisé avoir rappelé l'ensemble des vérifications faites par ses soins après l'incendie, en indiquant expressément que" s'il y avait eu un défaut quelconque sur la borne concernée (d'isolement ou de court circuit) je n'aurai pas pu la remettre en fonction, je l'aurais vu de suite" ;

- aucun élément ne permet d'accréditer une origine criminelle au sinistre ni d'établir la présence de tierce personne à bord du CALIENTE.

L'incendie d'origine électrique qui a pris naissance à bord du bateau, s'est déclenché alors que la ligne de quai n'était pas débranchée et que les bornes de quai ne présentaient pas de défaut.

M.[E] s'absentant pour plusieurs semaines, a laissé à quai le bateau avec la ligne de quai branchée, sans établir qu'il avait actionné le disjoncteur, alors qu'il a reconnu, lors de son audition du 11 septembre 2011, être en possession de la notice technique [L], laquelle avertissait notamment l'utilisateur de ne jamais laisser la ligne de quai insérée lorsque l'embarcation est sans surveillance.

C'est ainsi à juste titre que le premier juge a retenu la négligence fautive de M.[E].

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré M.[E] responsable de l'incendie et a fixé le montant de la créance sur le fonds de limitation des compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA ainsi que la société Pantaenius SAM, à la somme de 265 000 €, correspondant au montant non contesté de l'indemnisation après déduction de la valeur d'épave, de la somme de 94 365,49 € à la société Mercantile Leasing et de 170 634,51 € à M. [M].

L'équité ne commande pas, en cause d'appel, l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré

Dit n'y avoir lieu, en cause d'appel, à l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne les compagnies d'assurances ACE European Group Limited, Allianz Global Corporate et Speciality, Hanse Marine Versicherung AG, Helvetia Versicherung AG, Kravag Logistic Versicherung AG, Mannheimer Versicherung AG et Zürich Versicherung AG, assureurs de Monsieur [G] [M] et de la société Mercantile Leasing SPA ainsi que la société Pantaenius SAM aux entiers dépens recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre b
Numéro d'arrêt : 11/03424
Date de la décision : 16/05/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°11/03424 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-16;11.03424 ?
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