COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 19 AVRIL 2012
FG
N° 2012/284
Rôle N° 11/09773
[F] [Y]
C/
ORDRE DES AVOCATS DE MARSEILLE
L' AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR
Grosse délivrée
le :
à :
SCP TOLLINCHI VIGNERON TOLLINCHI
Me Jean-Marie JAUFFRES
SCP COHEN GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Avril 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 09/7516.
APPELANT
Monsieur [F] [Y]
né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 6] (ALGERIE),
demeurant [Adresse 3]
représenté par la SCP TOLLINCHI VIGNERON TOLLINCHI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Richard MARCOU, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES
ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE MARSEILLE
sis [Adresse 5]
pris en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié,
représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Thomas D'JOURNO de la SELARL CARISSIMI-PROVANSAL-D'JOURNO-GUILLET, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur L' AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR
représentant L'ETAT FRANCAIS, en ses bureaux DIRECTION DES AFFAIRES JURIDIQUES [Adresse 2]
représenté par Me Jean-Marie JAUFFRES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Marie-Laure BREU-LABESSE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 22 Mars 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2012.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2012,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,
M.[F] [Y], né le [Date naissance 4] 1947, ancien inspecteur des impôts, est devenu conseil juridique et a été inscrit comme avocat au barreau d'Avignon le 14 février 1991.
Il a quitté le barreau d'Avignon et a été inscrit le 11 juillet 1995 au tableau des avocats au barreau de Marseille.
En mars 1998 la caisse nationale des barreaux français a saisi le bâtonnier du barreau des avocats de Marseille compte tenu d'un impayé de 192.658 francs de cotisations plus les cotisations 1998.
M.[F] [Y] a été convoqué et cité devant le conseil de l'Ordre.
Par décision du 16 juin 1998, le conseil de l'Ordre, constatant que M.[Y] restait redevable de 258.739 francs de cotisations CNBF, l'a omis du tableau en application de l'article 105-2° du décret du 27 novembre 1991.
Cette décision lui a été signifiée par huissier de justice le 2 juillet 1998.
Constatant que M.[Y] ne s'était toujours pas acquitté de l'intégralité de ses cotisations et avisé de ce qu'il aurait exercé ses fonctions d'avocat malgré l'omission du tableau, le conseil de l'Ordre a ouvert à son encontre en mai 2000 une procédure disciplinaire.
Par décision 15 novembre 2000, le conseil de l'Ordre des avocats de Marseille a sanctionné disciplinairement M.[Y] pour avoir continué à exercer une activité d'avocat malgré l'omission du tableau en prononçant à son égard une interdiction d'exercer pendant trois ans.
M.[Y] a formé recours contre cette décision devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Par arrêt du 26 janvier 2001, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a annulé la décision du conseil de l'Ordre des avocats de Marseille du 15 novembre 2000 pour manquement à l'impartialité. La cour d'appel d'Aix-en-Provence a ensuite décidé d'évoquer l'affaire et a prononcé à l'encontre de M.[Y] une interdiction d'exercer la profession d'avocat pendant trois années.
Sur pourvoi de M.[Y], la Cour de cassation, première chambre civile, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 26 janvier 2001 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence aux motifs que la cour n'avait pas, après avoir annulé la décision du conseil de l'Ordre, invité les parties à présenter leurs observations sur le fond.
L'affaire a été renvoyée devant la cour d'appel de Montpellier.
Par arrêt définitif en date du 22 novembre 2004, statuant sur renvoi de cassation, la cour d'appel de Montpellier a constaté que la décision d'omission du tableau du 16 juin 1998 n'avait pas été régulièrement notifiée à M.[Y], compte tenu de ce que l'acte de signification ne mentionnait pas les modalités et délais de recours, de sorte que la décision d'omission du tableau n'était pas exécutoire, et en conséquence, a dit n'y avoir lieu à poursuites à son encontre.
Le 5 juin 2009, M.[F] [Y] fait assigner l'Ordre des avocats au barreau de Marseille devant le tribunal de grande instance de Marseille, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, estimant avoir été abusivement empêché d'exercer la fonction d'avocat pendant plusieurs années, aux fins de voir sa responsabilité civile engagée et de le voir condamner à lui payer au total 3.203.613,79 € à titre de dommages et intérêts.
Le 23 décembre 2009, l'Ordre des avocats au barreau de Marseille a fait appeler en garantie l'Agent Judiciaire du Trésor.
Par jugement en date du 7 avril 2011 le tribunal de grande instance de Marseille a:
- débouté M.[Y] de l'intégralité de ses demandes
- déclaré en conséquence sans objet l'appel en garantie formé par l'Ordre des avocats au barreau de Marseille à l'encontre de l'Agent Judiciaire du Trésor,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit ne pas y avoir lieu à exécution provisoire,
- mis les dépens à la charge de M.[Y], exception faite des dépens d'appel en garantie, restant à la charge de l'Ordre des avocats du barreau de Marseille.
Par déclaration de la SCP TOLLINCHI, PERRET-VIGNERON et BUJOLI-TOLLINCHI, avoués, en date du 31 mai 2011, M.[F] [Y] a relevé appel de ce jugement à l'encontre de l'Ordre des avocats au barreau de Marseille.
Par déclaration de la SCP Hervé COHEN Laurent COHEN & Paul GUEDJ, avoués, l'Ordre des avocats du barreau de Marseille a formé appel provoqué à l'égard de l'Agent Judiciaire du Trésor.
Par ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 8 février 2012, M.[F] [Y] demande à la cour d'appel de :
- réformer le jugement,
- dire que l'omission du tableau de l'Ordre des avocats du barreau de Marseille de juin 1998 à septembre 2005 est constitutive de faute du fait de la nullité de la convocation préalable à la décision d'omission, de la nullité de la décision d'omission elle-même et de la nullité de la notification de cette décision,
- dire que l'exécution de ces décisions nulles poursuivie par l'Ordre des avocats du barreau de Marseille de 1998 à 2005 est la cause de l'entier préjudice financier subi par M.[Y],
- condamner par voie de conséquence l'Ordre des avocats au barreau de Marseille à lui payer
- au titre de la perte de revenus professionnels :
- pour 1998 : 82.962,75 € (6 mois), avec intérêts de droit du 1/01/99 et capitalisation
- pour 1999 : 175.316,37 € avec intérêts de droit du 1/01/00 et capitalisation,
- pour 2000 : 201.613,82 € avec intérêts de droit du 1/01/01 et capitalisation,
- pour 2001 : 231.855,90 € avec intérêts de droit du 1/01/02 et capitalisation,
- pour 2002 : 266.634,24€ avec intérêts de droit du 1/01/03 et capitalisation,
- pour 2003 : 306.629,40 € avec intérêts de droit du 1/01/04 et capitalisation,
- pour 2004 : 361.770,67 € avec intérêts de droit du 1/01/05 et capitalisation,
- pour 2005 : 241.521,14 € (7 mois), avec intérêts de droit du 1/01/06 et capitalisation,
- au titre de la perte du cabinet d'avocat : 387.289,57 €,
- au titre de la perte de notoriété : 762.084,64 €,
- au titre des difficultés matérielles d'existence : 304.898,04 €,
- au titre du préjudice moral : 100.000 €,
- condamner l'Ordre des avocats au barreau de Marseille à lui payer la somme de 35.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner l'Ordre des avocats au barreau de Marseille aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP TOLLINCHI, PERRET-VIGNERON et BUJOLI-TOLLINCHI.
M.[Y] prétend que l'Ordre des avocats du barreau de Marseille a fit preuve d'animosité à son égard.
Il considère que l'Ordre a commis une faute en tant que juge disciplinaire en ne vérifiant pas le caractère définitif de la décision d'omission du tableau et en ne respectant pas son obligation d'impartialité. Il estime que l'instruction du rapporteur a été imprécise, que l'Ordre a violé les principes généraux des droits de la défense.
Il estime que l'Ordre a commis une faute en tant qu'administrateur, que la convocation de M.[Y] devant le conseil de l'Ordre était nulle, ainsi que la citation à comparaître.
Il considère que la décision d'omission relève d'un détournement de procédure, que le conseil n'a pas vérifié la régularité de la citation, qu'il n'y a pas eu vraiment d'instruction, et rappelle que la notification de la décision était nulle.
M.[Y] expose que l'Ordre l'a de fait omis du tableau de 1999 à 2005.
M.[Y] considère que ce sont les fautes commises lors de l'omission du tableau par le conseil de l'Ordre qui sont à l'origine de l'intégralité du préjudice.
Par ses conclusions, notifiées et déposées le 15 septembre 2011, l'Ordre des avocats du barreau de Marseille demande à la cour d'appel, au visa de l'article L.141-1 du code de l'organisation judiciaire de :
- dire bien fondé l'appel en cause et en garantie de l'Agent Judiciaire du Trésor,
- dire irrecevables les prétentions de M.[Y] dirigées à l'encontre de l'Ordre des avocats au barreau de Marseille,
- mettre hors de cause l'Ordre des avocats au barreau de Marseille,
- à titre subsidiaire, débouter M.[Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- à titre infiniment subsidiaire, condamner l'Agent Judiciaire du Trésor à relever et garantir indemne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au bénéfice de l'exécution provisoire,
- condamner tout succombant à lui régler la somme de 4.000 € de frais irrépétibles et à payer les dépens, avec distraction au profit de la SCP Hervé COHEN Laurent COHEN & Paul GUEDJ.
L'Ordre des avocats au barreau de Marseille fait valoir que le Conseil de l'Ordre a statué sur le plan disciplinaire comme instance judiciaire et que sa mise en cause ne peut se faire qu'au titre du fonctionnement du service de la justice.
L'Ordre des avocats fait observer que l'irrégularité de la notification de la décision d'omission avait pour seule conséquence de laisser courir le délai de recours. Il fait remarquer que l'Ordre n'avait pas par la suite à relever d'office une irrégularité de la notification.
L'Ordre des avocats fait observer que la seule décision exécutoire a été l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 23 février 2001.
Sur le préjudice allégué, l'Ordre fait valoir que M.[Y] ne pourrait se prévaloir que du préjudice de perte de chance de percevoir des revenus et que les allégations de perte de revenus de M.[Y] sont irréalistes.
Par ses conclusions, notifiées et déposées le 18 octobre 2011, M.l'Agent Judiciaire du Trésor demande à la cour d'appel, au visa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, subsidiairement de l'article L.141-1 du code de l'organisation judiciaire, de :
- dire prescrite l'action en responsabilité diligentée contre l'Etat représenté par l'Agent Judiciaire du Trésor, et en conséquence rejeter les prétentions du Conseil de l'Ordre de Marseille,
- subsidiairement, débouter le Conseil de l'Ordre des fins de son appel en garantie mal fondé,
- dire qu'aucune faute lourde ne peut être alléguée à l'encontre de l'Etat,
- condamner tous succombants au paiement d'une somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner tous succombants en tous les dépens, avec distraction au profit de M°JAUFFRES.
M.l'Agent Judiciaire du Trésor rappelle que la prescription de l'action contre l'Etat est de quatre ans, que la constatation du fait dommageable constitue en l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 22 novembre 2004, que le délai de prescription a couru à compter du 1er janvier 2005 et était expiré le 31 décembre 2008, de sorte que la mise en cause de l'Agent Judiciaire du Trésor du 23 décembre 1999 est tardive.
Subsidiairement l'Agent Judiciaire du Trésor estime que l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 23 février 2001 ne peut être considéré comme une faute lourde, le mal jugé ou le mal apprécié par la cour ne pouvant être dit constitutif d'une faute lourde.
L'affaire a été communiquée au Parquet général qui, le 9 septembre 2011, a déclaré s'en rapporter à l'appréciation de la cour d'appel.
L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 8 mars 2012.
MOTIFS,
L'action de M.[Y] est une action en responsabilité civile délictuelle dirigée contre l'Ordre des avocats au barreau de Marseille.
Il estime que l'Ordre des avocats a commis une faute :
- en omettant M.[Y] du tableau,
- en interdisant disciplinairement M.[Y] d'exercer.
-I) la décision disciplinaire :
La décision disciplinaire d'interdiction d'exercer est une décision judiciaire, le conseil de l'Ordre des avocats étant, à l'époque, juridiction de première instance de la discipline des avocats.
Cette décision a été annulée par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en son arrêt du 26 janvier 2001. Mais la cour a décidé d'évoquer et elle a prononcé aussi une interdiction d'exercer.
Il s'est avéré, après renvoi de cassation, et au vu de l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, cour d'appel de renvoi, du 22 novembre 2004, que cette décision n'était pas fondée.
La faute reprochée relative à la décision disciplinaire relève de l'activité juridictionnelle. Elle ne peut en aucune façon être considérée comme une faute délictuelle.
La responsabilité de la juridiction judiciaire concerne l'Etat. La responsabilité de celui-ci à ce titre ne peut être recherchée que sur le fondement de la faute lourde au sens de l'article L.141-1 du code de l'organisation judiciaire, faute lourde qui ne peut résulter du prononcé d'une décision judiciaire susceptible de recours.
De plus, la prescription était acquise en application de la déchéance quadriennale résultant de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, alors que le fait dommageable avait été constaté par arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 22 novembre 2004, que la prescription qui avait en conséquence couru à compter du 1er janvier 2005 était acquise le 31 décembre 2008 et que la mise en cause de l'Agent Judiciaire du Trésor était du 23 décembre 2009.
En tout état de cause, M.[F] [Y] n'a pas mis en cause l'Etat.
L'Etat a été appelé en garantie inutilement par l'Ordre des avocats.
-II) La décision administrative :
La décision d'omission du tableau prise le 16 juin 1998 est une décision prise en application des articles 104 et suivants du décret du 27 novembre 1991.
Il ne s'agit pas d'une décision disciplinaire. Ce n'est pas en tant que juge disciplinaire que le conseil de l'Ordre a pris cette décision.
Cette attribution relative à l'omission du tableau relève de son rôle d'administration précisé à l'article 17-1° de la loi du 31 décembre 1971 relatif au règlement intérieur et au tableau.
Une telle décision d'omission du tableau est cependant soumise à recours devant la cour d'appel selon les modalités prévues à l'article 16 du décret, dans le mois de la notification de la décision, étant précisé que le délai d'appel suspend l'exécution de la décision du conseil de l'Ordre.
L'article 106 du décret précise que l'omission du tableau ne peut être prononcée sans que l'intéressé ait été entendu ou appelé selon les modalités prévues à l'article 103.
Cet article 103 prévoit une convocation par lettre recommandée avec avis de réception au moins huit jours à l'avance.
M.[Y] a été convoqué à deux reprises par lettre recommandée avec avis de réception revenues non réclamées.
Le conseil de l'Ordre l'a fait citer par huissier de justice le 12 mai 1998 pour le 16 juin 1998.
M.[Y] ne s'est pas présenté à la séance du conseil de l'Ordre du 16 juin 1998.
Le conseil de l'Ordre a fait notifier sa décision d'omission du tableau par signification de M°[X], huissier de justice du 2 juillet 1998.
La cour d'appel de Montpellier, sur renvoi de cassation, par arrêt du 22 novembre 2004, a dit que la décision d'omission du tableau du 16 juin 1998 n'avait pas été régulièrement notifiée à M.[Y], compte tenu de ce que l'acte de signification ne mentionnait pas les modalités et délais de recours, de sorte que la décision d'omission du tableau n'était pas exécutoire.
Il résulte de cet arrêt que l'omission du tableau du 16 juin 1998 n'était pas exécutoire.
Cependant M.[F] [Y] a forcément eu connaissance de cette décision, puisqu'il a été par la suite poursuivi disciplinairement pour non respect cette décision d'omission du tableau.
M. [F] [Y] était présent en personne à l'audience disciplinaire du conseil de l'Ordre du 15 novembre 2000. Il n'a pas alors mis en cause l'irrégularité de la notification de la décision d'omission du tableau, décision qu'il aurait pu contester alors que le délai de recours contre cette décision ne courait pas.
Devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, lors de l'audience du 26 janvier 2000, ayant abouti à l'arrêt du 23 février 2001, M.[F] [Y] était présent en personne et n'a toujours pas soulevé le moyen relatif à l'irrégularité de la notification de la décision d'omission. Il lui était toujours temps de la contester alors que le délai de recours n'avait toujours pas commencé de courir.
Ce n'est que devant la cour d'appel de Montpellier, en 2004, que M.[F] [Y], bien conseillé, a eu l'idée de soulever ce moyen d'irrégularité de la notification et que la cour d'appel a dit que l'omission n'était pas exécutoire.
L'Ordre des avocats ne précise pas avoir fait signifier de nouveau cette décision.
L'irrégularité de la signification du 2 juillet 1998 n'est pas une faute commise par le Conseil de l'Ordre mais par l'huissier significateur. Ce n'est pas le Conseil de l'Ordre qui a procédé lui même à cette signification, mais l'huissier de justice.
La vérification de la régularité de la signification par le Conseil de l'Ordre lors de la procédure disciplinaire relevait de la compétence dudit conseil en tant que juridiction disciplinaire et non en tant qu'organisme d'administratif. Cette faute éventuelle d'absence de vérification concerne l'activité judiciaire et il a été vu plus haut que la responsabilité de l'Ordre ne pouvait être recherchée à ce titre.
Aucune faute n'a été commise par l'Ordre des avocats.
M.[Y] est responsable de son propre préjudice alors qu'il était, pendant toutes ces années, en mesure de contester la décision d'omission du tableau prise par le Conseil de l'Ordre et qu'il s'est abstenu de le faire, alors qu'il avait parfaitement connaissance de cette décision et qu'il pouvait se prévaloir de l'irrégularité de la signification pour faire déclarer son recours recevable.
M.[Y] a attendu plusieurs années, alors qu'il était convoqué devant la cour d'appel de Montpellier, pour se décider à soulever cette irrégularité qu'il n'avait visiblement pas remarqué auparavant, dans le but, atteint, d'échapper à toute sanction disciplinaire.
M.[Y] avait continué d'exercer quelques temps après cette décision d'omission irrégulièrement notifiée, ce qu'il avait reconnu devant le conseil de l'Ordre et devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence. Ce n'est que la sanction disciplinaire d'interdiction d'exercer, sanction annulée, qui l'a réellement empêché d'exercer. Mais cette sanction était judiciaire et il a été vu qu'aucune action en responsabilité n'était possible sous l'aspect judiciaire de la décision.
Quant à la critique des modalités des convocations et de la citation préalables à la décision d'omission, elles devaient être développées dans le cadre d'une contestation de cette décision d'omission. Dans la mesure où il n'a pas contesté cette décision, ces critiques sont sans effet.
L'action de M.[Y] n'est pas fondée.
Le jugement sera confirmé, avec adjonction de motifs.
M.[Y] supportera les dépens exposés par l'Ordre des avocats et indemnisera celui-ci de ses frais irrépétibles.
L'Ordre des avocats, qui a appelé inutilement en la cause l'Agent Judiciaire du Trésor supportera les dépens exposés par ce dernier et l'indemnisera de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement rendu le 7 avril 2011 par le tribunal de grande instance de Marseille, avec adjonction de motifs, en ce qu'il a débouté M.[F] [Y] de l'intégralité de ses demandes, déclaré en conséquence sans objet l'appel en garantie formé par l'Ordre des avocats au barreau de Marseille à l'encontre de l'Agent Judiciaire du Trésor, mis les dépens de première instance à la charge de M.[F] [Y], exception faite des dépens de première instance d'appel en garantie de l'Agent Judiciaire du Trésor, restant à la charge de l'Ordre des avocats du barreau de Marseille,
Le réforme et y ajoute sur les frais irrépétibles,
Condamne M.[F] [Y] à payer à l'Ordre des avocats au barreau de Marseille, au titre des frais irrépétibles confondus de première instance et d'appel, la somme de trois mille euros (3.000 €) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne l'Ordre des avocats au barreau de Marseille à payer à l'Agent Judiciaire du Trésor, au titre des frais irrépétibles confondus de première instance et d'appel, la somme de trois mille euros (3.000 €) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant, sur les dépens d'appel,
Condamne M.[F] [Y] à payer les dépens d'appel exposés par l'Ordre des avocats au barreau de Marseille, avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne l'Ordre des avocats au barreau de Marseille à payer les dépens d'appel exposés par l'Agent Judiciaire du Trésor, avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT