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28/03/2012 | FRANCE | N°11/00358

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 28 mars 2012, 11/00358


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2012



N°2012/338

Rôle N° 11/00358







[I] [R]





C/



CPAM DU VAR



DRJSCS











































Grosse délivrée le :

à :





Me Nathalie AMILL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN



SELARL GARRY & ASSOCIES, avoca

ts au barreau de TOULON







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Arrêt de Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VAR en date du 29 Novembre 2010,enregistré au répertoire général sous le n° 20802655.





APPELANT



Monsieur [I] [R], demeurant [Adresse 5]



représenté...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2012

N°2012/338

Rôle N° 11/00358

[I] [R]

C/

CPAM DU VAR

DRJSCS

Grosse délivrée le :

à :

Me Nathalie AMILL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

SELARL GARRY & ASSOCIES, avocats au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VAR en date du 29 Novembre 2010,enregistré au répertoire général sous le n° 20802655.

APPELANT

Monsieur [I] [R], demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Nathalie AMILL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE

CPAM DU VAR, demeurant [Adresse 6]

représenté par la SELARL GARRY & ASSOCIES, avocats au barreau de TOULON

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

DRJSCS, demeurant [Adresse 1]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 22 Février 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Florence DELORD, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette AUGE, Président

Madame Florence DELORD, Conseiller

Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2012

Signé par Madame Bernadette AUGE, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [R], déclaré comme acteur et relevant du statut des intermittents du spectacle, a été victime d'un accident du travail le 29 avril 2007, au cours d'un spectacle équestre organisé par son employeur l'association « Théâtre de Verdure... », domiciliée à son adresse personnelle, [Adresse 5], à [Localité 3] (83).

Il a perçu des indemnités journalières jusqu'au 24 juin 2007, à raison de 215 euros par jour.

Selon une annotation figurant sur la demande d'enquête de la Caisse (15 juillet 2008), l'arrêt de travail a été suspendu pendant la période estivale en 2007 avec certificat autorisant la reprise au 7 juillet 2007 ' (aucune explication médicale n'est donnée), arrêt suivi d'une aggravation à partir du 18 octobre 2007, « toujours en cours au 9 juillet 2008, avec prescription jusqu'au 24 août 2008 ».(en fait : soins jusqu'au 30 septembre 2008, selon certificat médical du 22 août 2008 prescrivant la reprise du travail).

Alors que le contrôle médical l'avait déclaré consolidé avec séquelles indemnisables le 3 juillet 2008, Monsieur [R] a contesté cette décision en fournissant des certificats médicaux.

La décision a alors été annulée et le repos lui a été prescrit jusqu'au 24 août 2008.

Les agents de la Caisse ayant découvert que son nom apparaissait dans les programmes des spectacles équestres de la région, ont procédé à une enquête qui a confirmé que, malgré son état de santé, Monsieur [R] avait conservé une réelle activité équestre, au moins à partir des fêtes du 1er mai 2008 à [Localité 2].

Aussi, le 6 août, ils ont procédé à un contrôle en assistant à tout le spectacle des Nocturnes Médiévales de [Localité 4], et ils ont constaté sa participation active au spectacle (discours d'ouverture, démonstration d'art équestre, présentation des numéros, surveillance du spectacle notamment au cours d'une panne d'électricité....).

L'ayant interrogé, après les trois heures du spectacle, l'intéressé a déclaré qu'il avait circulé à cheval, certes, mais au pas, qu'il avait reçu l'autorisation de son médecin traitant et qu'il n'était pas rémunéré mais simple bénévole.

Quelques jours plus tard, les mêmes agents ont contacté le responsable d'un autre spectacle devant se dérouler le 17 août, et ils ont appris que, Monsieur [R] avait pris une part active à la préparation du spectacle depuis un an, aboutissant à une convention signée le 14 mai 2008, qu'il assurerait bien ce spectacle, mais surtout qu'il donnait des spectacles privés dans sa propriété de [Localité 3] depuis une dizaine d'années.

Un deuxième contrôle a donc été réalisé le 5 septembre 2008 auprès de l'adjoint au maire de [Localité 3] (Monsieur [P]), qui a confirmé que Monsieur [R] avait coordonné tout le défilé du 17 août (cavaliers, charettes, etc...), en se déplaçant en vélo, au moins dans la matinée.

Le responsable de l'association Théâtre de Verdure, Monsieur [W], a déclaré, le 10 septembre, que le siège de l'association se trouvait dans la propriété de Monsieur [R], et qu'il avait des contrats d'acteur premier rôle cascadeur pour tous les spectacles produits par l'association.

Il a ajouté qu'il était engagé pour chaque spectacle produit par l'association et qu'il était rémunéré par cachet à chaque spectacle.

Le registre du personnel de l'association mentionnait bien Monsieur [R] (et une autre personne, trésorière) comme intermittent du spectacle sur la période « 8 octobre 2006 à 6 septembre 2008 ».

Le contrôle s'est poursuivi auprès de l'URSSAF et il s'est confirmé que Monsieur [R] était déclaré dans les DADS de l'association Théâtre de Verdure et que les cotisations des années 2006 et 2007 le concernant étaient versées.

La Caisse lui a notifié par lettre recommandée du 29 octobre 2008 qu'il avait enfreint les obligations prévues par l'article L 323-6 du code de la sécurité sociale les 1er mai, 6 août et 17 août 2008 et a demandé le remboursement des prestations versées du 1er mai au 6 août 2008 soit la somme de 19632,71 euros.

La Caisse lui a également notifié par lettre recommandée du 8 janvier 2009 que la Commission des pénalités financières avait prononcé à son encontre une pénalité de 5178 euros sur le fondement de l'article R 147-7 du code de la sécurité sociale. Le dossier ne permet pas de dire si un recours a été exercé contre cette sanction.

Dans le même temps, la Caisse a également saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale du Var d'une demande de condamnation au remboursement des indemnités journalières.

Monsieur [R] a fait appel du jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale en date du 29 novembre 2010 qui l'a condamné au paiement de ce montant de 19632,71 euros.

Par ses dernières conclusions développées oralement à l'audience du 22 février 2012, il a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de dire qu'il n'a exercé aucune activité non autorisée au sens de l'article L 323-6 du code de la sécurité sociale et en tout cas sans élément intentionnel, et, subsidiairement, de dire que les demandes ne peuvent porter sur la période antérieure au contrôle du 6 août 2008, et que la sanction est disproportionnée à la faute invoquée du fait de sa bonne foi.

Il a demandé à la Cour de condamner la Caisse à 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions du 22 février 2012 développées oralement à l'audience du même jour, la Caisse a demandé à la Cour de confirmer le jugement, et de condamner l'appelant à 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La DRJSCS régulièrement avisée n'a pas comparu

MOTIFS DE LA DECISION

A titre préalable, il convient de préciser que la profession « officielle » de Monsieur [R], à l'époque des faits, était celle d'acteur (il est actuellement à la retraite), et qu'il relevait, à ce titre, du statut des intermittents du spectacle.

Ces éléments figurent clairement sur le bulletin de paye du mois de juillet 1998 et sur la déclaration d'accident du travail du 30 avril 2007, seuls documents établis par son employeur (association Théâtre de Verdure), et produits par le salarié.

Le responsable de cette association confirme d'ailleurs avoir conclu un contrat avec Monsieur [R] en qualité d'acteur premier rôle cascadeur.

La profession d'acteur recouvre une palette d'activités plus étendues que celle de cascadeur, ce qui constitue un élément de fait non négligeable dans ce litige.

L'article L 323-6 du code de sécurité sociale précise les conditions de versement des indemnités journalières de sécurité sociale :

- observer les prescriptions du praticien,

- se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical,

- respecter les heures de sorties autorisées par le praticien,

- s'abstenir de toutes activités non autorisées.

En cas d'inobservation volontaire de ces obligations, ce même article donne à la Caisse Primaire d'assurance maladie la possibilité de retenir tout ou partie des indemnités journalières dues à l'assuré.

Ainsi, toute activité salariée ou non susceptible d'être considérée comme un travail est interdite pendant les périodes de repos médicalement prescrits, sauf en cas d'autorisation préalable du médecin traitant.

La Caisse a énuméré les activités qu'elle considérait comme des infractions au texte précité.

Ainsi, le 1er mai 2008, il a participé à la bénédiction des chevaux à [Localité 2], et il a été photographié, costumé, à cheval et dirigeant le cortège ; la manifestation a duré trois heures.

L'appelant a reconnu cette participation mais a invoqué la liberté religieuse pour la justifier.

La Cour n'a pas trouvé de pièce prévoyant que le culte religieux organisé ce 1er mai 2008 aurait imposé aux fidèles de défiler à cheval.

L'argument relatif à l'atteinte portée à la liberté religieuse est donc infondée.

La production d'une attestation devant la Cour (pièce 65), non conforme à l'article 202 du code de procédure civile, ne contient aucun argument suffisamment sérieux pour accréditer sa thèse selon laquelle il aurait défilé au pas.

Du 12 au 16 juillet 2008, au cours du Festival de Sédières la troupe de [I] [R] a été annoncée comme participant à la Fable Equestre.

Monsieur [R] fait valoir que seule sa troupe était présente et il conteste sa participation à ces spectacles.

La Caisse fait valoir que, contrairement à une troupe de danseurs, une troupe équestre se produit sous la direction de son chef.

La Cour relève une évidente contradiction dans la position de Monsieur [R] puisqu'il avait reçu, quelques jours plus tôt, l'autorisation de son médecin (certificats du 3 juillet) de participer à ce genre de spectacle, programmé de longue date.

Le 6 août 2008, Monsieur [R] a participé durant 3 heures au spectacle en y prenant une part active.

Pour la Caisse, si cette intervention avait eu lieu en dehors d'une période d'arrêt de travail, elle aurait donné lieu à une rémunération car il n'a pas été contesté par l'appelant qu'elle correspondait bien à son activité professionnelle.

Pour cette date, l'appelant a invoqué « le » certificat médical du 3 juillet 2008 qui lui interdisait les activités de dressage, d'attelage et de cascadeur, mais l'autorisait à pratiquer toute activité équestre non violente.

Ainsi, et de l'aveu-même de l'appelant, ses activités antérieures à ce certificat (celles du 1er mai 2008) n'étaient donc pas autorisées.

La Cour constate également que les divers arrêts de travail (depuis 2007) et certificats médicaux de prolongation ne contiennent aucune mention relative aux heures de sortie : celles-ci n'étaient donc pas autorisées.

Mais, à supposer que l'absence d'indication puisse éventuellement signifier « sorties libres », ces documents n'équivaudraient pas à une autorisation générale donnée au malade de participer à toute activité de son choix pendant l'arrêt maladie.

Par ailleurs, la Cour constate que, pour une raison qui n'a pas été expliquée, Monsieur [R] s'est fait remettre par son médecin traitant (généraliste) deux certificats quasiment identiques datés du même jour, 3 juillet, et qu'il n'en a pourtant communiqué aucun des deux à la Caisse suite au contrôle du 6 août 2008, ni dans les jours qui ont suivi, alors que ces documents étaient destinés, dit-il, à justifier d'une autorisation de son médecin de participer aux spectacles incriminés.

Ces documents du 3 juillet s'inscrivent dans la période où la Caisse considérait que l'état de Monsieur [R] était consolidé (3-7 juillet 2008) et pouvait reprendre ses activités, mais où l'intéressé prétendait le contraire en s'appuyant sur ces deux certificats médicaux.

Le docteur [S], médecin du travail, a d'ailleurs conclu, le 3 juillet 2008, à l'inaptitude au travail d'écuyer-cascadeur, tout en acceptant la reprise à un poste n'entraînant aucune sollicitation importante du rachis cervical (y compris les vibrations transmises par sa colonne vertébrale).

Ce même médecin avait déjà fait le même constat le 29 janvier 2008, puisqu'il notait : « une cervicalgie apparaissant rapidement si les vibrations sont transmises au rachis, avec céphalée postérieure d'intensité grandissante », ce qui l'amenait déjà à conclure à une inaptitude au poste d'écuyer-cascadeur.

La Cour constate au surplus que les deux certificats médicaux du 3 juillet 2008, établis par le médecin traitant insistent surtout sur la liste des activités interdites (cascades, trot, galop, etc..), sont très peu explicites quant aux activités autorisées (dressage non violent par exemple) et ne mentionnent pas expressément les dates des spectacles auxquels Monsieur [R] avait prévu de participer.

Or, Monsieur [R] connaissait parfaitement et depuis plusieurs mois (organisation oblige..), leurs dates et la nature précise de ce qui devait être son rôle au cours de ces spectacles : prendre la tête d'un cortège et organiser un défilé à cheval, présenter les diverses prestations et numéros d'autres artistes, etc....

Compte tenu de ces divers éléments, la Cour considère que ces deux certificats médicaux du 3 juillet 2008 ne sauraient constituer l'« autorisation préalable » prévue par les textes, quand bien même leur rédacteur, le docteur [H], aurait jugé nécessaire de rédiger, le 9 mars 2011, donc en cours de procédure, un autre document validant rétroactivement ces deux mêmes certificats de 2008 (pièce 58 de l'appelant).

Il convient de retenir que Monsieur [R] exerçait la profession d'acteur, soit une qualification plus étendue que celle de cascadeur.

Les activités pratiquées dans la période litigieuse (défiler sur un cheval et en costume, présenter et animer un spectacle équestre, etc...), étaient en relation directe avec son activité d'acteur, et, si ces interventions avaient eu lieu en dehors d'une période d'arrêt de travail, elles auraient bien donné lieu à rémunération car elles entraient dans le cadre de cette activité (la Cour n'est pas saisie du problème de la pénalité financière qui ne relève que des juridictions administratives).

La Cour retient donc que Monsieur [R] qui se trouvait en arrêt-maladie depuis son accident du 29 avril 2007 savait qu'il n'était pas autorisé à pratiquer ses activités professionnelles en dehors des périodes d'arrêt de travail (festivités de l'été 2007, par exemple), et que, malgré le contrôle du 6 août 2008, bien que parfaitement informé qu'il ne devait se livrer à aucune activité durant son congé maladie, il avait néanmoins participé activement aux manifestations du 17 août 2008.

Concernant les événements antérieurs au 6 août 2008, l'appelant estime, à titre subsidiaire, que la Caisse ne peut rien réclamer car elle n'a rien constaté par elle-même.

La Cour rejette cet argument qui ne repose sur aucun texte, et constate qu'au contraire, les documents versés aux débats confirment que c'est bien Monsieur [R] qui a été photographié par les journalistes chargés de rédiger l'article relatif aux fêtes du 1er mai 2008, ce qu'il ne conteste d'ailleurs que sans grande conviction puisqu'il se prévaut de la liberté religieuse pour tenter de justifier sa présence (voir ci-dessus).

En conséquence, la Cour constate que Monsieur [R] a délibérément violé les obligations prévues par l'article L 323-6 du code de sécurité sociale, et ceci dès le 1er mai 2008, et qu'il n'a pas rapporté les éléments qui auraient permis de considérer que la sanction consistant à restituer les indemnités journalières serait disproportionnée à sa faute.

La Cour confirme en conséquence le jugement déféré, déboute l'appelant de ses demandes et fait droit à la demande de la Caisse.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant en matière de sécurité sociale,

Confirme le jugement déféré.

Et y ajoutant,

Déboute l'appelant de toutes ses demandes.

Le condamne à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 11/00358
Date de la décision : 28/03/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°11/00358 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-28;11.00358 ?
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