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14/03/2012 | FRANCE | N°10/21201

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 14 mars 2012, 10/21201


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2012



N°2012/299



Rôle N° 10/21201







Société LOGIDIS COMPTOIRS MODERNES





C/



[M] [W]

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE



DRJSCS





































Grosse délivrée le :

à :





Me Camille-Frédéric PRADEL, avocat au barreau de PA

RIS



Me Pierre AUDA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



CPCAM DES BOUCHES DU RHONE







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOUCHES DU RHONE en date du 16 Novembre 2010,enregistré au répertoire gén...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2012

N°2012/299

Rôle N° 10/21201

Société LOGIDIS COMPTOIRS MODERNES

C/

[M] [W]

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE

DRJSCS

Grosse délivrée le :

à :

Me Camille-Frédéric PRADEL, avocat au barreau de PARIS

Me Pierre AUDA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOUCHES DU RHONE en date du 16 Novembre 2010,enregistré au répertoire général sous le n° 20806661.

APPELANTE

Société LOGIDIS COMPTOIRS MODERNES en son nom propre et venant aux droits de la Société LOGIDIS en son établissement de [Adresse 5], prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Camille-Frédéric PRADEL, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Laurence LEVETTI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [M] [W], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Pierre AUDA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 3]

représenté par Mme [N] [Z] en vertu d'un pouvoir général

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

DRJSCS, demeurant [Adresse 1]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette AUGE, Président

Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller

Madame Florence DELORD, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2012

Signé par Madame Bernadette AUGE, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[M] [W] a saisi le Tribunal des affaires de Sécurité Sociale (TASS) des Bouches du Rhône d'un recours tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, société LOGIDIS, dans le cadre de l'accident du travail en date du 18 mars 2005.

Le Tribunal par jugement en date du 16 novembre 2010, a fait droit au recours, et notamment ordonné la majoration au maximum de la rente qui, seule, restera à la charge de la branche AT/MP, ainsi qu'une expertise aux fins de déterminer les préjudices complémentaires.

La société « LOGIDIS Comptoirs modernes » a relevé appel de cette décision, le 24 novembre 2010.

Entretemps, soit le 6 janvier 2011, était déposé le rapport d'expertise réalisé par l'expert [U].

Le conseil de l'appelant expose que les éléments de la faute inexcusable semblent ne pas être réunis, subsidiairement sollicite une juste appréciation des préjudices esthétique, d'agrément, pretium doloris, s'oppose à la constatation d'un quelconque préjudice professionnel, ainsi qu'à un complément d'expertise aux fins de détermination d'éventuels préjudices hors Livre IV du code de la sécurité sociale, et enfin sollicite l'inopposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge de l'accident par la caisse.

Il sollicite une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

De son côté la Caisse s'en remet sur la détermination de la faute inexcusable, émet des réserves sur les demandes indemnitaires formées par le requérant, et entend notamment rejeter la demande en inopposabilité formée par la société employeur.

[M] [W] demande pour sa part la confirmation de la reconnaissance de la faute inexcusable, et sollicite l'évocation du litige par la cour aux fins de liquidation des préjudices indemnitaires, et de mise en place d'une nouvelle expertise pour évaluation des préjudices figurant dans la nomenclature Dintilhac.

Il sollicite également une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer aux écritures des parties reprises oralement à l'audience.

La DRJSCS régulièrement convoquée n'a pas comparu.

SUR CE

Sur la faute inexcusable

Attendu que le 18 mars 2005, [M] [W] salarié « chargeur contrôleur » de la société LOGIDIS, conduisait un chariot de manutention et a percuté un autre chariot élévateur stationné fourches en l'air, contrairement à toutes règles de sécurité, l'une de ces fourches lui sectionnant la jambe gauche ;

Attendu que par jugement en date du 24 octobre 2007 à ce jour définitif, le tribunal correctionnel d'Aix en Provence a condamné la société LOGIDIS à une amende délictuelle, du chef de blessures involontaires sur la personne de [M] [W] ;

Attendu, concernant la faute inexcusable, que l'employeur est tenu en vertu du contrat de travail le liant à son salarié d'une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne la santé et la sécurité de ses salariés du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ou de l'activité confiée à celui ci ;

Que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Attendu qu'il est établi par une jurisprudence constante que la condamnation pénale de l'employeur des chefs de blessures involontaires et infractions aux règles de sécurité, signifie à la fois la conscience que l'auteur de la faute avait du danger, ainsi que l'absence de mesure de protection nécessaire, et caractérise l'existence d'une faute inexcusable ;

Que le premier juge a rappelé à bon droit cette jurisprudence ;

Attendu également que selon les dispositions de l'article L 4131-4 du code du travail, évoquant la situation de danger grave et imminent, le bénéfice de la faute inexcusable de l'employeur est de droit pour le travailleur victime d'un accident ou d'une maladie professionnelle, alors que lui-même ou un représentant du personnel au CHSCT, avait signalé à l'employeur le risque qui s'est matérialisé ;

Qu'il n'est pas inintéressant en l'espèce de noter que le secrétaire du CHSCT de la société employeur avait signalé par 21 courriers adressés à la direction, les risques provoqués par la circulation des chariots élévateurs ;

Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur sera confirmée ;

Sur l'opposabilité à la société LOGIDIS, de la décision de prise en charge de l'accident par l'organisme social

Attendu que la société LOGIDIS soutient que la caisse a eu recours à un délai complémentaire d'instruction, qu'elle aurait ainsi pris la décision de reconnaître le caractère professionnel de l'accident sans nouvelle information auprès de l'employeur, et qu'elle a mis ce dernier dans l'impossibilité d'exercer son droit d'obtenir sur sa demande, conformément à l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale, le dossier constitué dans le cadre de cette procédure de reconnaissance ;

Attendu qu'aucune autre pièce n'est apportée en procédure par l'appelant sur ce point, alors qu'il doit être rappelé que lorsque l'organisme social diligente une instruction préalable, de nombreuses autres pièces doivent nécessairement exister, telles que précisées par l'article R 441-13 du code de la sécurité sociale qui en fixe la liste exacte ;

Qu'en l'espèce, la prolongation du délai d'instruction n'a eu qu'une cause administrative, à savoir l'absence de possession par la caisse du certificat médical initial ;

Attendu qu'au sens de l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale, la Caisse peut accepter immédiatement la prise en charge de l'accident au titre du risque professionnel, sur le fondement d'une déclaration d'accident du travail adressée sans réserve par l'employeur et complétée du certificat médical descriptif des lésions dont faisait état cette déclaration ; qu'elle n'est dans ce cas pas tenue d'une obligation d'information de l'employeur ;

Qu'en l'espèce, non seulement aucune des pièces prouvant réellement l'existence d'une instruction préalable n'est produite par l'appelant, tel que démontré ci-dessus, mais en outre la caisse apporte la preuve d'une prise en charge immédiate, en date du 8 juin 2005 ;

Qu'ainsi, en l'absence d'une instruction préalable, l'information de l'employeur devient sans objet ;

Qu'en conséquence la décision de prise en charge devra être déclarée opposable à la société LOGIDIS ;

Attendu par ailleurs que la demande de confirmation par la société LOGIDIS de la décision du premier juge, en ce qu'il a dit que la majoration de la rente résultant de la faute inexcusable restera à la charge de la branche AT/MP de la caisse primaire, n'est pas contestée par cette dernière ; que ce point sera en conséquence confirmé ;

Sur les demandes indemnitaires

Attendu que le rapport d'expertise sollicité par le premier juge, et réalisé par l'expert [U], a été déposé le 6 janvier 2011 ;

Qu'entre temps le présent appel a été interjeté, et que le premier juge n'a pas statué sur les demandes indemnitaires ;

Qu'il en résulte que la cour estime que le principe du double degré de juridiction doit être respecté, notamment dans le cadre d'une procédure comportant de nombreux postes soumis à appréciation et discussion ;

Qu'il en est de même concernant la demande d'expertise complémentaire sur les éventuels préjudices hors Livre IV du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il sera ainsi renvoyé devant le premier juge pour qu'il soit statué sur ces divers postes de demandes ;

Attendu que la décision déférée sera confirmée sur la reconnaissance de la faute inexcusable, sur la majoration de la rente résultant de la faute inexcusable, celle-ci restant à la charge de la branche AT/MP de la caisse primaire ; qu'il sera infirmé pour le surplus, tel que précisé dans le présent dispositif ;

Attendu qu'eu égard aux circonstances de la cause, il est équitable de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que la procédure devant les juridictions de la sécurité sociale est gratuite et sans frais conformément aux dispositions de l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale, il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale,

Déclare recevable l'appel de la société LOGIDIS COMPTOIRS MODERNES,

Confirme le jugement en ses dispositions sur la reconnaissance de la faute inexcusable, sur la majoration de la rente résultant de la faute inexcusable, celle-ci restant à la charge de la branche AT/MP de la caisse primaire,

Infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que la décision de prise en charge par la caisse primaire de l'accident du travail de [M] [W] est opposable à la société LOGIDIS, et ce, avec toutes conséquences de droit,

Dit qu'il est renvoyé devant le premier juge pour qu'il soit statué sur l'ensemble des divers postes de demandes indemnitaires,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 10/21201
Date de la décision : 14/03/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°10/21201 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-14;10.21201 ?
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