COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 17 FÉVRIER 2012
N° 2012/102
Rôle N° 10/17460
[F] [E] épouse [U]
[N] [X] [U] épouse [C]
[D] [V] [G] [U]
C/
Syndicat des copropriétaires LES JARDINS DU CAP
SAS CABINET ESPARGILLIERE
Grosse délivrée
le :
à :la S.C.P. LIBERAS - BUVAT - MICHOTEY
la S.C.P. MAYNARD - SIMONI
la S.C.P. JOURDAN - WATTECAMPS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 07 septembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 07/5486.
APPELANTS
Madame [F] [E] épouse [U]
née le [Date naissance 2] 1925 à [Localité 10] (ALGÉRIE), demeurant [Adresse 3]
Madame [N] [X] [U] épouse [C]
née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 9], demeurant [Adresse 6]
Monsieur [D] [V] [G] [U]
né le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 11] (TUNISIE), demeurant [Adresse 7]
représentés par la S.C.P. LIBERAS BUVAT MICHOTEY, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Nicolas BOUCHARD, avocat au Barreau de PARIS du Cabinet GRAIGNIC
INTIMES
Syndicat des copropriétaires Copropriété [Adresse 8], pris en la personne de son syndic en exercice le CABINET ESPARGILLIERE SAS sis [Adresse 5],
représenté par la S.C.P. MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Claude LAUGA, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Alexis CROVETTO-CHASTAGNER, avocat au barreau de NICE
SAS CABINET ESPARGILLIERE, [Adresse 5] prise en la personne de son Directeur Général en exercice,
représentée par la S.C.P. J F JOURDAN - P G WATTECAMPS, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Françoise ASSUS-JUTTNER, avocat au barreau de NICE
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 janvier 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur André FORTIN, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président
Monsieur André FORTIN, Conseiller
Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 février 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Magistrat Rédacteur : Monsieur André FORTIN, Conseiller
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 février 2012,
Signé par Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
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Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U] sont propriétaires du lot N° 51 de l'ensemble immobilier en copropriété dénommé la résidence 'Les Jardins du Cap' dont le syndic est la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE'. Ce lot N° 51 consiste en un appartement en rez-de-jardin avec le droit à la jouissance exclusive, privative, particulière et à perpétuité de terrasses jouxtant l'appartement au nord et au sud et de jardins au nord et au sud d'une superficie totale de 59 m² environ, tels que figurant sur le plan joint à l'acte. Ce jardin est clos et un portillon a été aménagé dans cette clôture qui permettait d'accéder directement à la plage de la piscine commune.
Au cours d'une assemblée générale des copropriétaires réunie le 20 juillet 2007, ont été votées diverses résolutions et notamment :
- Une résolution N° 18 aux termes de laquelle la hauteur maximale des haies était fixée à 1,30m côté trottoir et 1,70m côté hall d'entrée de l'immeuble avec fixation des dates de taille et, à défaut, faculté pour la copropriété d'y procéder elle-même en facturant cette taille en charges particulières,
- Une résolution N° 19 relative aux travaux de sécurisation de la piscine suivant la Loi du 3 janvier 2003 prévoyant l'installation de barrières périphériques normalisées (NFP 90-306) sur les murets séparant les parties communes (plage, piscine et jardin) des jardins à jouissance privative en lieu et place du barreaudage existant en référence au plan N° 1 et 3 du permis de construire du 27 mars 1975 et aux plans d'exécution de l'architecte.
Par exploit délivré le 26 septembre 2007, les consorts [U] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' ainsi que la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' à comparaître devant le Tribunal de grande instance de Grasse pour voir annuler ces résolutions.
Une nouvelle assemblée générale des copropriétaires s'étant réunie le 26 février 2009 qui, par sa résolution N° 4, a ratifié les travaux de mise en conformité de la piscine tels qu'exécutés par la société ASTIC PISCINE pour un montant de 14.546,82€ et dont la conformité à la réglementation en vigueur avait pu être constatée par la société AUDIT AZUR, par exploit délivré le 17 avril 2009, les consorts [U] ont derechef fait assigner le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' et la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' à comparaître devant le Tribunal de grande instance de Grasse pour voir annuler cette assemblée, laquelle n'avait pour objet que cette ratification, et pour se voir donner acte de ce qu'ils seraient prêts à renoncer à leur demande de nullité si le syndicat des copropriétaires complétait sa mise en conformité par l'installation d'un portillon d'accès direct à la piscine et d'un pédiluve dans un délai de deux mois de la décision à intervenir et passé ce délai, sous astreinte.
Le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' et la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' ayant conclu au débouté et formulé des demandes reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts, par jugement prononcé le 7 septembre 2010, le Tribunal de grande instance de Grasse :
- ordonnait la jonction des deux instances,
- déboutait Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U] de toutes leurs demandes,
- déboutait tant le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' que la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' de leurs demandes reconventionnelles respectives en paiement de dommages et intérêts,
- condamnait Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U], in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' la somme globale de 1.500€ et à la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' celle de 1.500 € , le tout en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamnait encore aux dépens,
- disait n'y avoir lieu à exécution provisoire.
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Par déclaration au greffe de la présente Cour le 30 septembre 2010, Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U] ont interjeté appel de ce jugement prononcé le 7 septembre 2010 par le Tribunal de grande instance de Grasse.
Ils entendent :
- que le jugement entrepris soit infirmé,
- que soient annulées les délibérations N° 18 et 19 de l'assemblée générale des copropriétaires du 20 juillet 2007 ainsi que l'assemblée générale extraordinaire du 26 février 2009,
- que, tant le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' que la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' soient déboutés de leurs demandes,
- que le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' soit condamné, sous astreinte de 200 € à compter de la signification de l'arrêt, à rétablir l'accès direct du jardin privatif [U] à la piscine selon rapport d'assistance technique D'AUDIT azur du 19 mars 2009,
- que ce syndicat soit condamné à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,
- qu'il soit dit qu'en application de l'article 10-1 de la Loi du 10 juillet 1965, ils seront dispensés de toute répartition des causes de condamnations prononcées à l'encontre du syndicat des copropriétaires et de toute participation aux frais de procédure exposés par ce syndicat à l'occasion de la présente instance,
- que la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' soit condamnée à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,
- que le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' et la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' soient condamnés solidairement à leur payer la somme de 15.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- qu'ils soient encore condamnés avec la même solidarité aux entiers dépens.
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Le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' demande à la Cour :
- de confirmer le jugement entrepris,
- de débouter Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U] de l'ensemble de leurs demandes,
Reconventionnellement,
- de les condamner in solidum à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- de les condamner encore, avec la même solidarité, à lui payer la somme de 20.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
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La SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' demande à la Cour :
- de confirmer le jugement dont appel,
- de débouter les consorts [U] de l'ensemble de leurs demandes, aucune faute du syndic n'étant établie,
- d'infirmer le jugement entrepris concernant sa demande en paiement de dommages et intérêts,
En conséquence,
- de condamner solidairement les consorts [U] à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre celle de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- de les condamner encore aux dépens.
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MOTIFS DE LA DÉCISION
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Vu les moyens articulés par les parties au soutien de leurs prétentions,
1/ Attendu que le portillon objet du litige, qui n'a d'ailleurs pas été retiré, seul l'accès qu'il permettait ayant été compromis par la clôture de sécurité apposée sur parties communes par la copropriété, a pour objet de clore un jardinet qui ne constitue nullement une partie privative mais qui, partie commune, est affecté à la jouissance privative des titulaires du lot N° 51, propriété des consorts [U] ;
Attendu que les dits consorts [U] qui font valoir que le droit qu'ils ont sur ce jardinet est un droit réel, invoquent, puisque l'existence du dit portillon ne figure pas dans les actes, l'acquisition par prescription d'un droit d'accès de leur jardin 'privatif' à la piscine ;
Attendu, cependant, que l'acquisition d'un droit ou d'une servitude de passage par prescription ne saurait se concevoir entre deux parties communes, la première fût-elle à usage privatif, en sorte que le droit que les consorts [U] prétendent à tort avoir acquis, ne pourrait résulter que du règlement de copropriété, de leurs actes ou d'une délibération d'assemblée générale, ce qui n'est pas le cas ;
2/ Attendu que la résolution N° 19 de l'assemblée générale du 20 juillet 2007 n'affecte donc nullement un droit qui aurait été acquis par les consorts [U] et, par ailleurs, ne constitue nullement un abus de majorité dès lors qu'elle a été prise en exécution de la réglementation en vigueur et pour des motifs de sécurité collective, alors qu'au contraire, la solution avancée, d'ailleurs après coup (rapport d'assistance technique D'AUDIT azur du 19 mars 2009), par les consorts [U], en ce qu'elle réduirait, par l'établissement obligatoire d'un pédiluve, la surface de la plage de la piscine, ne relèverait pas de l'intérêt collectif ;
Attendu, au demeurant, qu'il appartient aux dits consorts [U] de proposer cette solution qui n'a été évoquée que bien postérieurement aux assemblées générales contestées, à une telle assemblée générale par une question à inscrire à l'ordre du jour ;
3/ Et attendu que, pour ces mêmes motifs, il ne saurait y avoir lieu à annulation de l'assemblée générale des copropriétaires réunie le 26 février 2009 qui, par sa résolution N° 4, a ratifié les travaux de mise en conformité de la piscine tels qu'exécutés par la société ASTIC PISCINE pour un montant de 14.546,82 € et dont la conformité à la réglementation en vigueur avait pu être constatée par la société AUDIT AZUR, dès lors que ces travaux n'ont nullement affecté matériellement le jardinet dévolu à la jouissance privative du lot N° 51 et le portillon, certes devenu sans intérêt ;
4/ Attendu que c'est en se fourvoyant sur le même point tenant à la nature de leur droit sur le jardinet, que les consorts [U] soutiennent, relativement à la résolution N° 18 de l'assemblée générale du 20 juillet 2007, que le législateur a interdit à l'assemblée générale de prendre des décisions de nature à affecter les droits des copropriétaires sur leurs parties privatives pour en déduire que la délibération contestée imposait une modification aux modalités de jouissance de leurs parties privatives, alors que son objet est de réglementer les plantations sur des parties communes, fussent-elles à jouissance privative ;
Attendu, dès lors, qu'il y a lieu de s'en tenir aux prescriptions à cet égard du règlement de copropriété, comme l'a justement fait le premier juge en relevant que le dit règlement énonçait que les propriétaires qui bénéficient de la jouissance exclusive des jardins devront en respecter l'aspect général. Ils ne pourront modifier les plantations sans l'accord du syndic. En cas de carence, les travaux d'entretien et de remise en état pourront être commandés à leurs frais par le syndic, pour en déduire que l'assemblée générale pouvait valablement délibérer sur cette question ;
Attendu, par ailleurs, qu'il n'y a aucun abus de majorité à prévoir qu'à un endroit les haies devront être taillées à 1,30 mètres du sol et à un autre à 1,70 mètres dès lors que les jardins à usage privatifs sont à un endroit semi enterrés en sorte que, pour obtenir une perspective harmonieuse, il convenait de différencier la hauteur réglementée des haies du sol à leur partie sommitale ;
Et attendu que, comme l'a exactement explicité le premier juge, l'article 672 du code civil n'est pas applicable en l'espèce, s'agissant d'une copropriété ;
5/ Attendu, cependant, que ni le syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' ni la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' ne démontrent, au soutien de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts pour procédure et comportement abusif, un quelconque préjudice autre que celui, purement procédural, qui a vocation à être indemnisé par l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu, ainsi, qu'il y a lieu de confirmer encore le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté leurs demandes de ce chef et de rejeter ces mêmes prétentions en appel ;
Vu les articles 696, 699 et 700 du code de procédure civile,
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT, CONTRADICTOIREMENT, EN MATIÈRE CIVILE ET EN DERNIER RESSORT,
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement prononcé le 7 septembre 2010 par le Tribunal de grande instance de Grasse,
Condamne Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U], in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires 'Les Jardins du Cap' la somme de 3.500 € et à la SA 'Cabinet ESPARGILLIERE' celle de 2.500 € le tout en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne cependant encore Monsieur [D] [U], Madame [N] [U] épouse [C] et Madame [F] [E] épouse [U] aux dépens d'appel, en ordonne distraction dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S. AUDOUBERTJ-P. ASTIER