COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 17 FÉVRIER 2012
N° 2012/101
Rôle N° 10/17321
SAS AGENCE DE LA PLAGE
C/
[I] [F]
Grosse délivrée
le :
à :la S.C.P. LIBERAS - BUVAT - MICHOTEY
la S.C.P. ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 30 août 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/04976.
APPELANTE
SAS AGENCE DE LA PLAGE, [Adresse 3], prise en la personne de son Directeur Général en exercice,
représentée par la S.C.P. LIBERAS BUVAT MICHOTEY, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE plaidant par la S.C.P. ASSUS-JUTTNER, avocats au barreau de NICE,
INTIMÉE
Madame [I] [F]
née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 4] (75), demeurant [Adresse 2]
représentée par la S.C.P. ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, ayant Me Laurence PARENT-MUSARRA, avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 janvier 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président
Monsieur André FORTIN, Conseiller
Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 février 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Magistrat Rédacteur Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 février 2012,
Signé par Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits et procédure :
Madame [I] [F] est propriétaire d'un appartement à [Localité 5] qu'elle a confié en gestion locative d'abord à l'Agence Centrale de la Colle sur Loup, puis à la S.A.R.L. AGENCE DE LA PLAGE.
Son appartement a été ainsi donné en location meublée, le 19 avril 2005, par un contrat de bail qui devait se terminer le 31 janvier 2007, et qui a fait l'objet d'un avenant permettant la poursuite de la location jusqu'au 31 juillet 2007, Madame [F] voulant reprendre son bien pour un usage personnel à compter du 1er août 2007. Or, l'appartement n'a été libéré par le locataire que le 10 février 2008.
Madame [F] a alors fait assigner la Société AGENCE DE LA PLAGE en paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ensuite des fautes qu'elle lui reproche.
Par jugement du 30 août 2010, le tribunal de grande instance de Grasse a statué ainsi qu'il suit :
- accueille partiellement la demande de Madame [F],
- dit que la S.A.R.L. AGENCE DE LA PLAGE devra lui régler la somme de 11.000 €,
- dit que la S.A.R.L. AGENCE DE LA PLAGE devra régler à Madame [F] la somme de 1.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonne l'exécution provisoire,
- rejette tous autres chefs de demande,
- dit que la Société AGENCE DE LA PLAGE supportera les dépens de la procédure.
Par déclaration du 28 septembre 2010, la Société AGENCE DE LA PLAGE a relevé appel de cette décision.
Par conclusions déposées le 28 janvier 2011, la Société AGENCE DE LA PLAGE demande à la Cour de :
- infirmer le jugement dont appel,
-A titre principal,
- constater que la demande de prorogation du bail de Madame [F] est en date du 6 février 2006, qu'elle n'est pas le rédacteur de l'avenant, que le mandat de gestion à son égard n'a pris effet que le 1er juillet 2006,
- ce faisant, dire qu'aucun devoir de conseil ne peut être mis à charge,
en outre,
- constater que l'article L 632-1 du code de la construction et de l'habitation a pour seul objet la protection du preneur, que seul ce dernier peut l'invoquer, que la locataire n'est pas partie à l'instance, et que Madame [F] ne peut invoquer cette disposition,
A défaut,
-constater que cette disposition a vocation à s'appliquer en matière de location meublée et que le caractère meublé n'a pas été la cause déterminante du preneur,
- ce faisant, dire que cette disposition n'est pas applicable en l'espèce,
- à défaut, constater qu'elle ne peut s'appliquer dans le cadre d'une prorogation expresse,
À défaut,
- constater que le preneur a renoncé à cette disposition d'ordre public de protection après en avoir bénéficié et que cette disposition n'est pas applicable,
- en conséquence, dire que l'agence de la plage n'a commis aucun manquement au mandat de gestion,
- en outre, constater l'absence de manquement aux obligations de compte rendu de gestion et de représentation aux assemblées générales,
- à défaut, constater l'absence de lien de causalité entre l'obligation de compte rendu de gestion, ainsi que l'obligation de représenter Madame [F] aux assemblées générales et les préjudices allégués par Madame [F],
- en tout état de cause, constater les fautes du preneur, dire que l'agence de la Plage n'est pas responsable des préjudices allégués et débouter Madame [F] de ses demandes,
à titre subsidiaire,
- constater que les pièces de Madame [F] se contredisent, qu'elle a été hébergée à titre gracieux par des amis, qu'elle ne prouve pas la réalité ni l'étendue de ses préjudices, qu'elle n'est pas fondée à en obtenir réparation,
- constater la validité de l'acte de caution, son caractère accessoire à l'avenant,
- constater que Madame [F] a renoncé à obtenir l'indemnisation auprès de la caution solidaire,
- constater la présence d'un dépôt de garantie au bail du 19 avril 2005,
- constater que Madame [F] a renoncé à imputer ses préjudices sur le dépôt de garantie et que la protection des revenus a pris fin accessoirement avec le mandat de gestion du 2 février 2008,
- à défaut, constater que les conditions de mise en oeuvre de cette protection ne sont pas réunies,
- en conséquence, dire que Madame [F] n'est pas fondée à obtenir réparation auprès de l'agence de la Plage et la débouter de ses demandes,
- condamner Madame [F] à lui payer la somme de 2.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Libéras.
Par conclusions déposées le 20 avril 2011, Madame [F] demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
- condamner la Société AGENCE DE LA PLAGE à lui payer la somme de 2.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens distraits au profit de la S.C.P. Ermeneux Champly Levaique, avoués.
L'ordonnance de clôture a été prise le 27 décembre 2011.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'appel :
La recevabilité de l'appel n'est pas contestée ; rien au dossier ne conduit la Cour à le faire d'office. L'appel sera donc déclaré recevable.
Sur le fond :
Madame [F] a initialement donné son bien en gestion locative à l'agence Centrale. À compter du 1er juillet 2006, c'est la Société AGENCE DE LA PLAGE qui est devenue son mandataire.
Le contrat de location meublée, conclu avec Madame [S], et concernant ledit appartement a été signé par la première de ces agences, le 19 avril 2005, pour une durée de 19 mois et demi devant se terminer le 31 janvier 2007.
Il n'est pas contesté que Madame [F], qui habitait alors La Guyane, avait sollicité, dès le 7 février 2006, l'Agence Centrale pour que le bail initial soit prolongé jusqu'à son retour en métropole qu'elle fixait alors au 31 août 2007, puis, qu'elle a avisé l'agence immobilière, par un courrier du 12 juin 2006, qu'elle souhaitait habiter son appartement à partir du 1er août 2007 et enfin, que le 1er septembre 2006, elle autorisait la signature de l'avenant avec la locataire en place moyennant un prix inférieur au loyer initial, soit '556 €, c'est à dire 100 € de moins, plus les charges de février à juillet 2007 inclus'.
L'avenant au contrat de bail a donc été effectivement signé avec le concours de l'Agence de la Plage, le 9 novembre 2006, pour une durée de six mois devant expirer au 31 juillet 2007, avec un loyer mensuel de 610 € charges comprises.
L'article L. 632-1 du code de la construction et de l'habitation, dont Madame [F] se prévaut pour alléguer la faute de son mandant lors de la signature de l'avenant prolongeant la durée du bail, n'était pas applicable à l'espèce dès lors que le bail litigieux avait été expressément convenu pour 19 mois et demi, qu'il a ensuite fait l'objet d'un avenant accepté par le locataire et définissant de façon précise les conditions de sa prolongation (durée de 6 mois et loyers) alors que le bailleur entendait reprendre le bien loué pour son usage personnel, ces circonstances l'excluant du bénéfice des dispositions de ce texte, d'où il résulte que sa seule signature, qui ne permettait donc pas au locataire de se maintenir dans les lieux, ainsi qu'il l'a fait, jusqu'au mois de février 2008, n'est pas la cause de la situation reprochée par Madame [F], laquelle ne saurait, en conséquence, rechercher la responsabilité de l'AGENCE DE LA PLAGE sur ce motif.
Les autres manquements invoqués relativement aux compte rendus de gestion et à la représentation de Madame [F] à l'assemblée générale des copropriétaires sont sans lien de causalité avec les préjudices matériels qu'elle invoque, tirés de ses frais de garde meubles, de location d'un autre appartement ou des dégradations invoquées relativement à son bien, ni avec le préjudice moral du fait de son attente pour reprendre la disposition de son bien.
Madame [F] fait toutefois état à cet égard de l'impossibilité pour elle de savoir si elle a été entièrement remplie de ses droits. Or, elle ne conteste pas les 2 décomptes de l'agence, qu'elle verse, elle-même, aux débats, ne formulant, en effet, aucune critique des écritures y apparaissant, de nature à fonder une demande précisément chiffrée sur ce grief.
Par ailleurs, Madame [F] reproche à l'AGENCE DE LA PLAGE de ne pas avoir fait signer l'avenant par la caution et de lui avoir ainsi fait perdre une garantie financière. Or, Madame [F] ne démontre pas avoir vainement recherché son locataire pour une dette que la caution aurait pu être amenée à couvrir, ce qui prive de fondement toute demande de ce chef.
Enfin, Madame [F] n'établit pas non plus qu'elle a sollicité l'AGENCE DE LA PLAGE pour que la garantie complémentaire, souscrite le 12 juin 2006, joue, et elle ne prouve de toutes façons pas que les conditions contractuelles de sa mise en oeuvre étaient réunies.
Le jugement déféré sera donc infirmé.
En raison de sa succombance, Madame [F] supportera les entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.
L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Reçoit l'appel,
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :
Rejette les demandes de Madame [F],
Rejette les demandes plus amples des parties,
Condamne Madame [F] à supporter les dépens de la procédure de première instance et d'appel distraits pour ces derniers au profit de la S.C.P. Libéras Buvat Michotey, avoués.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
S. AUDOUBERTJ-P. ASTIER