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15/02/2012 | FRANCE | N°10/00156

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14e chambre, 15 février 2012, 10/00156


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 15 FÉVRIER 2012



N°2012/186

Rôle N° 10/00156





Société FREEMAN SUD-EST



C/



[P] [X]

CPAM DU VAR

[W] [H]

[U] [K]

[R] [O]



DRJSCS

MUTUELLE DU MANS





Grosse délivrée le :

à :





SCP SPADOLA - LEGOUT AVOCATS ASSOCIES (ASS), avocats au barreau de MARSEILLE



Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Mireille TOUFANY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Madame [U] [K]



Maître [R] [O]



SCP ROLAND LESCUDIER / WILFRID LESCUDIER / J-L LE SCUDIER, avocats au barreau de MARSEILLE




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COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

14e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 15 FÉVRIER 2012

N°2012/186

Rôle N° 10/00156

Société FREEMAN SUD-EST

C/

[P] [X]

CPAM DU VAR

[W] [H]

[U] [K]

[R] [O]

DRJSCS

MUTUELLE DU MANS

Grosse délivrée le :

à :

SCP SPADOLA - LEGOUT AVOCATS ASSOCIES (ASS), avocats au barreau de MARSEILLE

Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Mireille TOUFANY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [U] [K]

Maître [R] [O]

SCP ROLAND LESCUDIER / WILFRID LESCUDIER / J-L LE SCUDIER, avocats au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VAR en date du 27 Novembre 2009,enregistré au répertoire général sous le n° 20601249.

APPELANTE

Société FREEMAN SUD-EST, demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP SPADOLA - LEGOUT AVOCATS ASSOCIES (ASS), avocats au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame [P] [X] et ses enfants, demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

CPAM DU VAR, demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Jacques DEPIEDS, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître [W] [H], mandataire liquidateur de la société GENERALE DE CONSTRUCTION SOGECO, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Mireille TOUFANY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [U] [K], gérante de droit de la Société SOGECO, demeurant [Adresse 1]

non comparante

Maître [R] [O], es qualités de Mandataire ad hoc de la Société METHODEK., demeurant [Adresse 3]

non comparant

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

DRJSCS, demeurant [Adresse 2]

non comparant

MUTUELLE DU MANS, demeurant [Adresse 8]

représentée par la SCP ROLAND LESCUDIER / WILFRID LESCUDIER / J-L LE SCUDIER, avocats au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Florence DELORD, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette AUGE, Président

Madame Florence DELORD, Conseiller

Monsieur Jean-Luc CABAUSSEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Février 2012.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Février 2012

Signé par Madame Bernadette AUGE, Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 21 janvier 2005, Monsieur [X] qui travaillait en qualité d'ouvrier électricien, sous contrat d'intérim conclu avec la société FREEMAN Sud-Est, et mis à disposition de la SARL METHODEK, sous-traitante du lot « électricité » d'un chantier de construction situé à [Localité 10], « [Adresse 9] », a été victime d'un accident du travail suite à de fortes bourrasques ayant provoqué l'affaissement d'un mur en béton mal stabilisé, que les ouvriers de la SARL Société Générale de Construction (Sogéco), chargée du lot « maçonnerie- gros oeuvre », avaient édifié la veille.

Il est décédé immédiatement, sous le poids des matériaux.

Les gérants de la société Sogéco (Mme [K] et Monsieur [B]) ont été poursuivis et condamnés pénalement du chef d'homicide involontaire par les jugements des 29 novembre 2006 et 9 janvier 2008, ce dernier ayant été frappé d'appel. Les parties n'ont pas été en mesure de préciser l'issue de cette procédure.

Les ayants droit de la victime ont engagé une procédure pour faute inexcusable de l'employeur devant le Tribunal des Affaires de sécurité sociale du Var qui, par jugement du 27 novembre 2009, a retenu la faute inexcusable de la société Freeman Sud Est, a ordonné la majoration de la rente de la veuve au maximum et a fixé les indemnités aux montants suivants :

- au titre de l'action successorale : 25 000 euros

- au titre du préjudice morale de Mme [X] : 40 000 euros

- au titre du préjudice moral de chacun des trois enfants : 20 000 euros.

Le tribunal a condamné la société Freeman Sud Est à rembourser à la Caisse les sommes dont elle aura fait l'avance, en reconnaissant son droit d'exercer une action récursoire à l'encontre de la société Méthodek, auteur de la faute inexcusable.

Le tribunal a condamné la société Freeman Sud Est à payer à Madame [X] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie a fait appel de ce jugement par acte reçu le 5 janvier 2010 (procédure enregistrée sous le numéro 10/00243).

La société Freeman a fait appel de ce jugement (procédure enregistrée sous le numéro 10/00156).

A l'audience du 19 octobre 2011, les parties ont été d'accord pour que les deux procédures soient jointes.

La Cour a procédé à cette jonction dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, sous le numéro 10/00156.

Par ses conclusions déposées le 19 octobre 2011 et reprises oralement à l'audience de plaidoirie du 11 janvier 2012, la société Freeman a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de dire qu'aucune faute inexcusable n'a été commise, ni par elle ni par l'entreprise utilisatrice, Méthodek, et de débouter les ayants droit de la victime.

Subsidiairement, elle a conclu à la réduction des indemnités pour préjudice moral et au rejet de l'indemnité au titre de l'action successorale, et elle a demandé la condamnation de Madame [X] à 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions déposées le 21 décembre 2011 et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, Madame [X] agissant pour elle-même et pour ses enfants mineurs a demandé à la Cour de confirmer le jugement et de condamner l'appelante à 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions déposées et reprises oralement à l'audience de plaidoirie du 11 janvier 2012, la société Mutuelles du Mans, intervenant volontairement en qualité d'assureur « responsabilité civile - faute inexcusable » de la société Freeman Sud Est, a demandé à la Cour de déclarer son intervention recevable, d'infirmer le jugement, de dire que la société Freeman n'avait pas commis de faute inexcusable, et de la mettre hors de cause.

Subsidiairement, elle a conclu à la réduction des indemnités pour préjudice moral et au rejet de l'indemnité au titre de l'action successorale, avec restitution des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement.

Elle a demandé à la Cour de condamner la société Méthodek à garantir la société Freeman de toute condamnation, la faute inexcusable ayant été commise par ses ouvriers, et elle a demandé la condamnation de tout succombant à 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses conclusions déposées le 19 octobre 2011et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, Maître [H], mandataire judiciaire désigné en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sogéco a demandé à la Cour de constater qu'aucune demande n'était dirigée à l'encontre de Sogéco, de la mettre hors de cause, et, subsidiairement de réduire les sommes fixées à titre d'indemnités.

Par ses conclusions déposées le 19 octobre 2011 et reprises oralement à l'audience la Caisse a déclaré s'en rapporter sur la faute inexcusable de l'employeur ainsi que sur les montants alloués, sauf à réformer le jugement sur l'indemnisation de Madame [X] au titre de l'action récursoire, et elle a demandé la condamnation de la société Freeman à la rembourser des sommes dont elle sera tenue de faire l'avance.

Maître [O], liquidateur de la société Méthodek, régulièrement convoqué n'a pas comparu.

La DRSCJS régulièrement avisée n'a pas comparu.

MOTIFS DE LA DECISION

La société Freeman appelante fait valoir qu'aucune faute inexcusable ne peut lui être reprochée puisque la cause du décès résultait de la négligence ou de la faute d'une entreprise avec laquelle elle n'avait aucun lien, et que seuls ses dirigeants avaient été poursuivis et condamnés pénalement.

Madame [X] fait valoir que la société Freeman et la société Méthodek savaient que Sogéco avait déjà été condamnée pour blessures involontaires sur d'autres chantiers, qu'elles avaient une obligation de suivi et de contrôle, et que la société Méthodek avait commis une faute inexcusable en n'assurant pas l'encadrement de ses ouvriers notamment au moment de l'accident : la société Freeman devait donc être déclarée responsable en sa qualité d'employeur.

La Cour rappelle que la faute inexcusable de l'employeur ne se présume pas et que celui qui invoque l'existence d'une telle faute est tenu d'en rapporter la preuve.

La Cour constate que la société d'intérim, employeur de la victime avait mis à la disposition de la société Méthodek deux électriciens parfaitement compétents (Monsieur [X] qui a été tué ainsi qu'un autre ouvrier, Monsieur [D], qui a été blessé) et que ceux-ci ont été formés aux risques encourus sur un chantier (attestation du conducteur de travaux de Méthodek).

Or, la sirène d'alarme annonçant de fortes bourrasques s'était déclenchée à plusieurs reprises et le responsable de Sogéco a ordonné aux ouvriers de poursuivre leur travail.

Monsieur [X], au lieu de se mettre à l'abri, a obéi aux ordres du chef de chantier de Sogéco, restant sur place au moment de l'effondrement des banches.

Au cours de l'enquête, tous les témoins ont été entendus et les lieux ont été examinés.

L'inspectrice du travail a ainsi relevé de graves anomalies imputables à la société Sogéco uniquement puisque les compas servant à fixer les banches de béton entre elles n'étaient pas verrouillées, les fortes poussées de vent ayant fini par faire vaciller l'ensemble des deux très hautes parois, entre lesquelles travaillait Monsieur [X].

Seul le chef de chantier de la société Sogéco avait à la fois la compétence technique et le pouvoir de vérifier que le travail d'arrimage des banches avait été réalisé conformément aux règles de sécurité par ses ouvriers.

Aucune poursuite n'a d'ailleurs été engagée à l'encontre de la société Méthodek, et seuls les gérants de Sogéco ont été poursuivis et condamnés pénalement du chef d'homicide et de blessures involontaires.

Enfin, aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que la société Freeman et la société Méthodek auraient pu savoir que la société Sogéco aurait déjà fait l'objet d'un avertissement de l'inspection du travail suite à un accident mortel survenu sur l''un de ses chantiers en 2004, d'autant que le maître d'oeuvre était la société Urba Marseille et le coordinateur du chantier le Bureau Véritas.

La cause de l'accident résulte donc uniquement des négligences fautives du personnel d'une société étrangère à l'employeur et à la société utilisatrice, et sur lesquels ces dernières n'exerçaient aucun pouvoir de surveillance ou de contrôle.

Madame [X] n'a pas rapporté la preuve que la société Freeman ou la société Méthodek avaient ou auraient dû avoir conscience du danger auquel pouvait être exposé le salarié, ni qu'elles n'ont pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

En conséquence, la Cour infirme le jugement déféré, déboute Madame [X] et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant en matière de sécurité sociale,

Infirme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Déboute Madame [X] de son action aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 10/00156
Date de la décision : 15/02/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°10/00156 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-15;10.00156 ?
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