COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AVANT DIRE DROIT
DU 20 JANVIER 2012
N° 2012/ 36
Rôle N° 09/20838
S.C.I. LE VERT BOCAGE
S.C.I. LES NOISETIERS
C/
Syndicat copropriétaires [Adresse 4]
Grosse délivrée
le :
à :la S.C.P. MAYNARD - SIMONI
S.C.P. BADIE-SIMON-THIBAUD-JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 29 septembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 08/113.
APPELANTES
S.C.I. [Adresse 3] représentée par son gérant, domicilié en cette qualité au siège social,
représentée par la S.C.P. MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Sandrine LENCHENTIN DE GUBERNATIS, avocat au barreau de NICE
S.C.I. LES NOISETIERS, [Adresse 3] représentée par son gérant, domicilié en cette qualité au siège social,
représentée par la S.C.P. MAYNARD SIMONI, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Amance PERROT, avocat au barreau de GRASSE
INTIME
Syndicat des Copropriétaires [Adresse 4], pris en la personne de son syndic Cabinet Immobilier Catherine JOHNSON Résidence [Adresse 5],
représenté par Me Sébastien BADIE de la S.C.P. BADIE-SIMON-THIBAUD-JUSTON avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Plaidant par la S.C.P. ROSENFELD F / ROSENFELD G / ROSENFELD V, avocats au barreau de MARSEILLE,
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COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 05 janvier 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur André FORTIN, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président
Monsieur André FORTIN, Conseiller
Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2012.
ARRÊT
Contradictoire,
Magistrat Rédacteur : Monsieur André FORTIN, Conseiller
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2012,
Signé par Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
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La S.C.I. 'Le vert bocage', propriétaire d'un terrain situé à Mandelieu, y a fait édifier deux ensembles immobiliers en copropriété, l'un dénommé 'Le Lavandin I' et l'autre dénommé '[Adresse 4]'.
Le second, '[Adresse 4]' était constitué, sur le terrain commun, de deux bâtiments physiquement indépendants, le bâtiment 'C' composé d'appartements et le second, le bâtiment D, consistant en deux villas accolées, respectivement lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] de la copropriété. Un chemin d'accès permet d'accéder à ces deux bâtiments.
Le règlement de copropriété de cet ensemble dénommé '[Adresse 4]' comportait une clause aux termes de laquelle il était rappelé que les lots N° [Cadastre 1] et [Cadastre 2] ne participeront à aucune charge de copropriété de quelque nature qu'elle soit. Les propriétaires des dits lots contribueront néanmoins à l'entretien du chemin d'accès à ces lots, proportionnellement à leurs tantièmes du sol.
Cette clause a été réputée non écrite par un arrêt de la présente Cour prononcé le 4 novembre 2004, lequel arrêt a précisé que les propriétaires des lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] constituant le bâtiment 'D' de cette copropriété devront désormais, à partir de la date du dit arrêt, payer leur quote-part de charges conformément aux dispositions de l'article 10 alinéa 1 et 2 de la Loi du 10 juillet 1965.
Par ailleurs, par acte authentique des 11 janvier et 13 avril 2006, la S.C.I. 'Les noisetiers' a acquis de la S.C.I. 'Le vert bocage' les lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2].
Soutenant que la S.C.I. 'Les noisetiers' était débitrice de charges, par exploit délivré le 23 août 2006, le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' a fait assigner cette S.C.I. 'Les noisetiers' à comparaître devant le Tribunal d'instance de Cannes en paiement de ces charges. Le Tribunal d'instance de Cannes, par jugement prononcé le 29 novembre 2007, a renvoyé la procédure devant le Tribunal de grande instance de Nice.
Devant ce Tribunal, le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' a sollicité paiement de la somme de 25.910,03 €, compte de charges arrêté au 3 juin 2009 avec intérêts au taux légal, outre une somme supplémentaire à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, cependant que la S.C.I. 'Les noisetiers' s'opposait à ces demandes.
Par jugement prononcé le 29 septembre 2009, le Tribunal de grande instance de Nice :
- condamnait la S.C.I. 'Les noisetiers' à payer au syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' la somme de 25.910,02 € suivant décompte arrêté au 3 juin 2009, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 23 août 2006,
- la condamnait encore à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts,
- la condamnait encore à lui payer la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamnait enfin aux dépens,
- ordonnait l'exécution provisoire.
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Par déclaration au greffe de la présente Cour le 19 novembre 2009, la S.C.I. 'Le vert bocage' qui avait entendu intervenir volontairement à l'instance mais dont les conclusions d'intervention volontaire avait été déclarées irrecevables par le premier juge comme ayant été déposées postérieurement à l'ordonnance de clôture, et la S.C.I. 'Les noisetiers' ont interjeté appel de ce jugement prononcé le 29 septembre 2009 par le Tribunal de grande instance de Nice.
La S.C.I. 'Les noisetiers' entend :
- qu'il soit dit qu'elle est à jour du paiement des charges au 31 décembre 2011,
- qu'elle soit déclarée recevable à agir en sa demande d'expertise,
- que soit ordonnée une expertise ayant pour objet la détermination de la répartition des charges générales et spéciales entre les bâtiments 'C' et 'D' permettant de fixer la quote-part des charges afférentes aux lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] dans chaque catégorie de charges,
- qu'il soit statué ce que de droit quant aux frais d'expertise et les mettre à la charge du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II',
- que le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' soit condamné à payer à chacune des S.C.I. 'Les noisetiers' et 'Le vert bocage' la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- qu'il soit encore condamné aux dépens.
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La S.C.I. 'Le vert bocage' entend :
- que le jugement entrepris soit infirmé,
- que son intervention volontaire soit déclarée recevable,
- que le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' soit déclaré irrecevable à demander quelque condamnation que ce soit à son encontre et au profit du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin I',
- que le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' soit condamné à lui payer la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- que le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' soit condamné sous astreinte à exécuter la résolution N° 9 de l'assemblée générale du 5 mai 1993 tendant à ce qu'il fût fait appel à un arbitre expert,
- qu'en tant que de besoin soit ordonnée une expertise en vue de proposer une répartition des charges générales et spéciales entre les bâtiments 'C' et 'D',
- que la consignation pour cette expertise soit mise à la charge du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II',
- qu'il lui soit donné acte qu'elle formule les plus expresses réserves sur le montant des charges réclamées par le syndic,
- que le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' soit condamné à lui rembourser la somme de 18.522,46 € indûment perçue,
- que soit, en tant que de besoin, désigné un expert afin de faire le compte entre les parties,
- que le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' soit débouté de ses demandes pour le surplus,
- qu'il soit condamné à lui payer la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- qu'il soit condamné aux dépens.
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Le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' demande à la Cour :
- de confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
- de condamner la S.C.I. 'Le vert bocage' à payer, du chef du lot 169 et avec intérêt légal, la somme de 4.067,26 € au profit du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin I',
- de condamner la S.C.I. 'Le vert bocage', au titre de son solde au détriment du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' à lui payer la somme globale de 30.898,07 € avec intérêts,
- de condamner chacune des S.C.I. 'Les noisetiers' et 'Le vert bocage' à lui payer la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- de les condamner encore aux entiers dépens de première instance et d'appel.
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MOTIFS DE LA DÉCISION
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Vu les moyens articulés par les parties au soutien de leurs prétentions,
1/ Attendu qu'il y a lieu de déclarer irrecevable l'appel de la S.C.I. 'Le vert bocage' qui n'était pas partie en première instance ;
2/ Attendu, cependant, qu'il y a lieu de lui donner acte de son intervention volontaire en appel qui n'est d'ailleurs pas contestée ;
3/ Attendu qu'il y a lieu, nul ne pouvant sauf mandat et/ou autorisation de la Loi et/ou du juge, représenter une partie ou formuler des demandes pour elle, de déclarer irrecevables, d'une part la S.C.I. 'Les noisetiers' à demander la condamnation du syndicat des copropriétaires intimé à payer à la S.C.I. 'Le vert bocage' la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, d'autre part le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' à demander la condamnation de la S.C.I. 'Le vert bocage' à payer, du chef du lot 169 et avec intérêt légal, la somme de 4.067,26 € au profit du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin I' ;
4/ Attendu que le règlement de copropriété de l'ensemble immobilier '[Adresse 4]', porte, pour ce qui regarde les parties communes, sur la totalité du terrain d'assise et des bâtiments, sans distinction et notamment sans prévoir de parties communes générales ou spéciales et de charges correspondantes, ce qui aurait pu se concevoir ;
Et attendu que ce règlement (hormis la clause qui a été réputée non écrite en 2004) constitue la loi des parties, étant observé qu'il établit des tantièmes de parties communes en sorte qu'il n'est nul besoin d'ordonner une expertise, la répartition selon ces tantièmes et conformément à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, s'imposant ;
Attendu, à cet égard, qu'il ne peut pas plus être utilement soutenu que les charges appelées seraient affectées d'une répartition erronée, puisque au vu des relevés individuels soumis aux débats ce sont bien les tantièmes prévus par le règlement de copropriété qui sont appliqués et qu'encore une fois il n'est pas prévu de charges communes spéciales à tel ou tel bâtiment à l'intérieur de l'ensemble immobilier '[Adresse 4]' ;
Attendu que les seules questions qui pourraient se poser serait d'une part celle de savoir si telle catégorie de charges imputées aux lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] relèverait de services collectifs ou d'éléments d'équipement commun qui ne leur profiteraient pas ou qui présenteraient une utilité moindre pour ces lots que celle résultant des tantièmes qui leur sont affectés, et serait d'autre part celle relative à une imputation comptable erronée ou oubliée au débit ou au crédit de chaque compte individuel de chacune des S.C.I. ou encore une méconnaissance sur le plan comptable de l'imputation de charges à l'une ou à l'autre au regard de la chronologie de leurs propriétés respectives ;
Attendu, ainsi, qu'il convient d'ordonner réouverture des débats à l'effet, pour le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' d'établir deux relevés chronologiques à compter de la date d'effet de l'arrêt du 4 novembre 2004, tout d'abord des appels de charges, un pour chacune de la S.C.I. 'Le vert bocage' et de la S.C.I. 'Les noisetiers', avec indication précise de la nature de chaque poste comptable mentionné et en second lieu des paiements effectués, et à l'effet, pour chacune de ces S.C.I. de critiquer, s'il y a lieu, poste par poste, ces imputations et, en cas d'absence d'imputation de certains paiements qu'elles auraient faits ou qui auraient été obtenus par d'autres voies, de prouver comme il convient les dits paiement ou les dits encaissements omis, le tout pour ce qui concerne les lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] ainsi que les lots accessoires qui relèvent du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' ;
5/ Attendu, par ailleurs, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il n'y aurait aucun intérêt à condamner le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' à exécuter la résolution N° 9 de l'assemblée générale du 5 mai 1993 tendant à ce qu'il fût fait appel à un arbitre expert pour résoudre le problème posé alors par la spécificité des lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2], puisqu'en effet, à cette époque, il n'avait pas été statué sur le caractère licite ou non de la clause selon laquelle il était rappelé que les lots N° [Cadastre 1] et [Cadastre 2] ne participeront à aucune charge de copropriété de quelque nature qu'elle soit. Les propriétaires des dits lots contribueront néanmoins à l'entretien du chemin d'accès à ces lots, proportionnellement à leurs tantièmes du sol, de sorte qu'une telle expertise aurait pu, dans un esprit de conciliation, permettre une modification du règlement de copropriété avec constitution de parties communes générales et spéciales et régler le litige, alors que ce litige à finalement été réglé par l'arrêt de 2004 qui a réputé non écrite la clause litigieuse ;
Attendu qu'il résulte encore de ce qui vient d'être dit que l'expertise aujourd'hui sollicitée ne présente derechef aucun intérêt puisque les tantièmes sont établis et qu'il suffit de vérifier poste par poste si les imputations faites aux lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] relèvent bien de celles visées par l'article 10 alinéa 2 de la Loi savoir les charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes ;
Attendu, ainsi, qu'il y a lieu de rejeter ces deux prétentions de condamnation sous astreinte et d'expertise judiciaire ;
Et attendu que toutes autres demandes et les dépens doivent être réservés.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT, CONTRADICTOIREMENT, EN MATIÈRE CIVILE ET EN DERNIER RESSORT,
Déclare irrecevable l'appel de la S.C.I. 'Le vert bocage',
Reçoit l'appel de la S.C.I. 'Les noisetiers',
Donne acte à la S.C.I. 'Le vert bocage' de son intervention volontaire en appel,
Déclare irrecevables d'une part la SCI 'Les noisetiers' à demander la condamnation du syndicat des copropriétaires intimé à payer à la S.C.I. 'Le vert bocage' la somme de 1.500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, d'autre part le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' à demander la condamnation de la S.C.I. 'Le vert bocage' à payer, du chef du lot 169 et avec intérêt légal, la somme de 4.067,26€ au profit du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin I',
Rejette les demandes de condamnation sous astreinte et d'expertise judiciaire formulées par les SCI 'Les noisetiers' et 'Le vert bocage',
Ordonne réouverture des débats à l'audience de la 4ème chambre 'A' de la présente Cour du 13 septembre 2012 à 14 h 40 à l'effet :
- Pour le syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II' d'établir deux relevés chronologiques à compter de la date d'effet de l'arrêt du 4 novembre 2004, tout d'abord des appels de charges, un pour chacune de la S.C.I. 'Le vert bocage' et de la S.C.I. 'Les noisetiers', avec indication précise de la nature de chaque poste comptable mentionné et en second lieu des paiements effectués par chacune d'elle,
- Pour chacune de ces S.C.I. de critiquer, s'il y a lieu, poste par poste, ces imputations et, en cas d'absence d'imputation de certains paiements qu'elles auraient fait ou qui auraient été obtenus par d'autres voies, de prouver comme il convient les dits paiement ou les dits encaissements omis,
le tout pour ce qui concerne les lots [Cadastre 1] et [Cadastre 2] ainsi que les lots accessoires qui relèvent du syndicat des copropriétaires 'Le Lavandin II',
Réserve toutes autres demandes et les dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S. AUDOUBERTJ-P. ASTIER