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19/01/2012 | FRANCE | N°10/03839

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 19 janvier 2012, 10/03839


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 19 JANVIER 2012

D.D-P

N° 2012/40













Rôle N° 10/03839







S.C.I. CABINET HARDY





C/



LES AMANDIERS

S.C.P. [Y]





















Grosse délivrée

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à :



SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL



SCP BOTTAI GEREUX BOULAN



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SCP COHEN GUEDJ





Sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 28 Février 2008 enregistré au répertoire général sous le n° S06/16277 lequel a cassé et annulé l'arrêt au fond n°2006/59 rendu le 24 janvier 2006 par la 1ère chambre C de la cour d'appel d'Aix en Provenc...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 19 JANVIER 2012

D.D-P

N° 2012/40

Rôle N° 10/03839

S.C.I. CABINET HARDY

C/

LES AMANDIERS

S.C.P. [Y]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL

SCP BOTTAI GEREUX BOULAN

SCP COHEN GUEDJ

Sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 28 Février 2008 enregistré au répertoire général sous le n° S06/16277 lequel a cassé et annulé l'arrêt au fond n°2006/59 rendu le 24 janvier 2006 par la 1ère chambre C de la cour d'appel d'Aix en Provence (RG 01/10326) à l'encontre du jugement rendu le 13 mars 2001 par le tribunal de grande instance de GRASSE (RG 87/02177).

DEMANDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

S.A.R.L. CABINET HARDY,

dont le siège social est [Adresse 1]

MARSEILLE , représenté par sa liquidatrice amiable Mme [Z] y domicilié.

représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, ayant pour avocat Me Edgard ABELA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

DEFENDERESSES DEVANT LA COUR DE RENVOI

S.C.I. LES AMANDIERS,

demeurant [Adresse 3]

prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié.

représentée par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour, ayant pour avocat Me Eric DEMUN, avocat au barreau de GRASSE

S.C.P. [Y],

Notaires ,

[Adresse 2]

prise en la personne de son représentant légal.

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, ayant pour avocat Me Jean-Pierre BERDAH, avocat au barreau de NICE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Décembre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2012,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 3 février 1983, par acte établi par Me [Y], notaire membre de la SCP [Y], la société cabinet HARDY et la SCI Les Amandiers ont réitéré le compromis de vente qu'elles avaient conclu le 20 octobre précédent. Il était stipulé, d'abord, la constitution d'une copropriété du bien appartenant à la société Cabinet Hardy, ensuite la division de ce bien, sur lequel était édifié un immeuble bâti qu'entendait conserver cette société, en six lots, et enfin la cession, entre autres, à la SCI, du sixième lot consistant dans le droit de construire sur le terrain non bâti, un immeuble de 30 logements, la société Hardy transférant à la SCI le permis de construire qui lui avait été délivré auparavant.

Par jugement définitif en date du 24 mars 1987, le tribunal de grande instance de Grasse annulait, pour erreur sur la substance de la chose vendue, la vente intervenue le 3 février 1983 par acte de Me [Y], notaire, entre la Sarl Cabinet HARDY, vendeur, et la SCI LES AMANDIERS, acquéreur, portant sur le lot n°6 de l'état descriptif de la copropriété horizontale pour le prix de 1 600 000F.

Le tribunal relèvait que l'administration ayant notifié à la SCI son refus définitif du transfert du permis de construire, la division foncière opérée, par l'acte du 3 février 1983a remis en cause l'autorisation précédemment accordée.

Le tribunal omettait dans le dispositif de la décision, d'ordonner la remise des parties dans leur état antérieur à la vente.

Le 5 novembre 1987, la SCI LES AMANDIERS a fait assigner la Sarl Cabinet HARDY et

MeWIDENLOCHER pour demander la restitution du prix et réparation au notaire du préjudice résultant de l'annulation de la vente.

La SCI a ensuite fait assigner , de nouveau, la société Cabinet Hardy afin de voir constater par ailleurs que le compromis de vente du 20 octobre 1982 valait vente.

Après dépôt d'un rapport d'expertise judiciaire sur l'évaluation des préjudices de toute nature subis par les deux parties, par jugement contradictoire en date du 13 mars 2001, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- débouté la SCI LES AMANDIERS de sa demande de dommages et intérêts formulée à l'encontre de la Sarl Cabinet HARDY,

- condamné solidairement la Sarl Cabinet HARDY agissant par son liquidateur amiable M.[N] [B] et la SCP [Y] à payer à la SCI AMANDIERS la somme de 1 600 000 francs,

- condamné la SCP [Y] à payer à la SCI LES AMANDIERS les intérêts au taux légal afférents à la somme de 1 600 000 francs du 3 février 1983 au 24 mars 1987, ainsi que la somme de 400 000 francs,

- condamné la SARL CABINET HARDY agissant par son liquidateur amiable M.[N] [B], à payer à la SCI LES AMANDIERS les intérêts au taux légal afférents à la somme de 1 600 000 francs du 24 mars 1987 jusqu'au jour du parfait paiement,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- et condamné solidairement la SCP [Y] et la Sarl Cabinet HARDY agissant par son liquidateur amiable M.[N] [B] à payer à la SCI LES AMANDIERS la somme de 20 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par déclaration remise au greffe le 4 mai 2001, la Sarl Cabinet HARDY a relevé appel de ce jugement.

Par arrêt contradictoire en date du 24 janvier 2006, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a

- confirmé le jugement déféré en ce qu'il a condamné la Sarl Cabinet HARDY à payer à la SCI LES AMANDIERS la somme de 1 600 000 Francs (243 918,43 €),

- l'a infirmé pour le surplus et statuant à nouveau,

- condamné la SARL CABINET HARDY à payer à la SCI LES AMANDIERS les intérêts au taux légal sur la somme de 243 918,43 € à compter du 5 novembre 1987 date de l'assignation introductive d'instance valant première sommation de payer,

- condamné la SCI LES AMANDIERS à payer à la Sarl Cabinet HARDY la somme de 15 244,90 € au titre des travaux nécessaires pour parachever la remise en état des lieux,

- débouté la Sarl Cabinet HARDY et la SCI LES AMANDIERS de leurs autres demandes,

- dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour,

- débouté les parties de leurs demandes réciproques présentées sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ,

- et partagé entre les parties les dépens de l'instance,

Sur pourvoi formé par la société Cabinet Hardy, la Cour de cassation, par arrêt en date du 28 février 2008 a :

- cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Cabinet Hardy à payer à la SCI Les Amandiers les intérêts au taux légal sur la somme de 243 918,43 euros à compter du 5 novembre 1987 et débouté la société Cabinet Hardy de ses demandes indemnitaires dirigées contre la SCI Les Amandiers et contre la SCP [Y], l'arrêt rendu le 24 janvier 2006 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

- remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

- condamné la SCI Les Amandiers et la SCP [Y] chacune pour moitié aux dépens,;
- et rejeté les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration aux fins de saisine du 26 février 2010, la Sarl Cabinet HARDY a saisi la cour de ce siège.

Par conclusions déposées le 6 décembre 2011, la Sarl Cabinet HARDY demande à la cour , au visa des dispositions de l'article 1382 du code civil , :

- de dire n'y avoir lieu au paiement d'intérêts sur la somme de 243 918,43 €,

- de condamner la SCP [Y] à payer la somme de 200 448 € au titre du préjudice financier subi par la Sarl Cabinet HARDY,

- de condamner la SCI LES AMANDIERS au paiement d'une somme de 575 626 € au titre du préjudice subi par la Sarl Cabinet HARDY du chef des missions des experts PEPRATX et JACOB,

- condamner la SCI LES AMANDIERS au paiement des sommes suivantes:

* 575 626 € du chef des missions PREPATX et JACOB,

* 325 418 € au titre des frais de remise en état telle qu'évaluée par l'expert [M],

* 1 152 581 € au titre du préjudice financier subi,

- et de condamner les intimés au paiement d'une somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont ceux d'appel distraits.

Par conclusions déposées le 4 mai 2011, la SCP [Y] demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris,

- de condamner la SCI LES AMANDIERS à restituer les sommes perçues de Me [Y], soit 359 600,08 €, outre 70 689,12 € au titre des intérêts jusqu'en 2002, et les intérêts de droit depuis ce règlement du 19 avril 2002,

subsidiairement,

- de condamner la Sarl Cabinet HARDY à la restitution du montant desdites sommes à Me [Y], avec intérêts à compter du paiement effectif, soit le 10 novembre 2001,

- de débouter la Sarl Cabinet HARDY de ses demandes dirigées contre Me [Y] et la SCP [Y],

- de condamner la SCI LES AMANDIERS et la Sarl Cabinet HARDY au paiement d'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont ceux d'appel distraits.

Par conclusions déposées le 24 novembre 2011, la SCI LES AMANDIERS demande à la

cour :

- de juger l'appel de la SARL HARDY irrecevable comme tardif,

subsidiairement,

- de dire et juger que la non restitution du prix de vente après le jugement du 24 mars 1987, par ladite SARL a constitué une faute civile engageant sa responsabilité et que l'érosion monétaire constitue un préjudice certain pour la SCI LES AMANDIERS,

- en conséquence, de condamner la SARL HARDY au paiement des intérêts de retard au taux légal sur la somme de 243 918,43 € à compter du 5 novembre 1987 constituant la première mise en demeure,

- de débouter la SARL HARDY de l'intégralité de ses demandes,

- et de la condamner la SARL HARDY à lui payer la somme de 4 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel distraits .

L'ordonnance de clôture est datée du 8 décembre 2011.

La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.

MOTIFS,

Sur la recevabilité

Attendu en premier lieu que la SCI Les Amandiers ne justifie pas avoir notifié au représentant légal de la SARL HARDY, en fonction au moment de l'acte, l'arrêt de cassation en date du 28 février 2008 ; qu'il s'ensuit la recevabilité de la déclaration aux fins de saisine de la cour de ce siège et le rejet de la fin de non-recevoir soulevée ;

Sur la demande en paiement des intérêts sur la somme de 1 600 000F

Attendu que par assignation parallèle du 17 mars 1989, la SCI Les Amandiers a saisi le tribunal de grande instance de Grasse pour faire juger qu'en dépit de la nullité de l'acte du 3 février 1983, il convenait de juger le compromis de vente initial du 20 octobre 1982 avait continué à produire ses effets et qu'il valait vente ; que pour parvenir à cet objectif la SCI a retiré sa demande de restitution du montant du prix d'achat, soit 1'600'000 F et des intérêts de retard afférents ;

Attendu que par jugement du 20 juin 1989, le tribunal de grande instance de Grasse a donné acte à la SCI Les Amandiers du retrait de sa demande de restitution de la somme de 1'600'000 F et a validé le compromis du 20 octobre 1982 ;

Attendu que statuant sur l'appel de cette décision par la société Cabinet Hardy, par arrêt en date du 29 septembre 1992, la cour de ce siège l'a réformée et a débouté la SCI Les Amandiers de toutes ses demandes - en relevant notamment que l'objet de la convention, soit le permis de construire, ayant disparu et ne pouvant pas non plus être reconstitué à l' identique, c'est à bon droit que la société soutenait que la confirmation du jugement entrepris aboutirait en réalité à consacrer une cession différente de celle initialement convenue - ;

Attendu que suite au dépôt du rapport d'expertise, l'instance a été reprise et que chacune des parties a repris alors dans ses écritures les demandes originaires sur lesquelles il avait été statué par le jugement déféré ;

Mais attendu que le désistement d'action éteint immédiatement l'action et conserve cet effet nonobstant la circonstance que le jugement en ayant donné acte, qui n'a qu'un effet déclaratif, ait été par la suite infirmé ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence d'accueillir la fin de non-recevoir tirée de ce que la société Les Amandiers a renoncé à son droit d'agir en vue du paiement des intérêts sur la somme à restituer ;

Attendu que le jugement déféré sera donc réformé en ce qu'il a condamné la société HARDY à payer à la SCI les intérêts sur la somme de 243 918,43€ à compter du 3 février 1983 jusqu'au jour du parfait paiement ;

Sur les demandes indemnitaires de la SARL Hardy dirigées contre la SCI Les Amandiers

Attendu que les préjudices financiers et commerciaux exposés après l'annulation de la vente sont imputables aux parties auxquelles il appartenait d'exécuter de bonne foi le jugement prononçant cette annulation ;

Attendu qu'en effet, après le prononcé du jugement du 24 mars 1987 annulant la vente, ni la société Cabinet Hardy, ni la SCI Les Amandiers n'ont réellement tenté d'exécuter de bonne foi le jugement en remettant les choses en leur état antérieur à la vente à défaut de trouver un nouvel accord ; que le vendeur n'a pas spontanément offert de restituer le prix, et la SCI, qui avait entrepris des travaux de terrassement sans attendre la décision de l'administration sur le transfert à son profit du permis de construire, n'a pas spontanément offert de restituer les lieux après leur remise en état ; qu' à l'opposé, la société Cabinet Hardy, qui n'avait pas voulu donner suite à une tentative de régularisation de la situation, a tenté de son côté, alors qu'elle n'avait pas restitué les prix, de disposer du terrain en cause au profit de la société Villa Lisa pour reprendre ce projet de construction et, de son côté, la SCI Les Amandiers, qui avait été contrainte par l'administration de cesser des travaux illicitement entrepris, a engagé parallèlement à la présente instance une action pour faire déclarer valable la vente constatée par le compromis du 27 janvier 1982 ;

Attendu cependant que les agissements de la société Cabinet Hardy ont été la cause déterminante de ceux de la SCI Les Amandiers ; que n'ayant pas cherché à exécuter de bonne foi le jugement du 24 mars 1987 qui remettait clairement les parties dans leur état antérieur , la société ne peut reprocher à la SCI ses actions et initiatives, notamment d'avoir inscrit une sûreté judiciaire sur le bien en cause pour garantir sa créance et d'avoir immobilisé que le bien ;

Attendu le dommage supplémentaire invoqué par la société Cabinet Hardy, postérieur au jugement du 24 mars 1987, étant imputable à sa propre faute, sa demande tendant à l'indemnisation d'un préjudice dont elle est à l'origine, doit être écartée ;

Attendu qu'en ce qui concerne les demandes se rapportant à des frais et débours exposés par la SARL Cabinet Hardy avant ledit jugement, qui a annulé la vente par pour une erreur sur la substance dont ce vendeur n'était pas responsable et qui a rejeté sa demande de dommages et intérêts présentée contre la SCI Les Amandiers , ces dépenses ne sont pas imputables à faute de la SCI ;

Attendu qu'en ce qui concerne les frais de remise en état des lieux, , ceux-ci ont été définitivement fixés à la somme de 15 244, 90€ par l'arrêt du 26 janvier 2006, confirmé sur ce point par la Cour de cassation ; que la demande de la société Cabinet Hardy de voir augmenter ce montant ne peut qu'être écartée ;

Sur les demandes indemnitaires de la SARL Hardy dirigées contre le notaire

Attendu que la société Cabinet Hardy sollicite l'octroi de dommages et intérêts contre la SCP [Y] tendant à l'indemnisation du préjudice consistant dans l'immobilisation de son bien entre la date sa vente et celle de la décision d'annulation de celle-ci ;

Attendu qu'en sa qualité d'officier public, le notaire est tenu de concilier les parties et d'assurer efficacité des actes passés ;

Attendu au cas d'espèce qu'il résulte de l'acte litigieux que la SARL Cabinet Hardy avait décidé de conserver la propriété de l'immeuble bâti, avec jouissance d'une partie du terrain entourant cet immeuble et de céder à M. [A], puis à la SCI Les Amandiers lors de sa constitution, le bénéfice du permis de construire permettant ainsi à cette dernière de réaliser l'immeuble sur la surface résiduelle du terrain ;

Attendu que le tribunal relève exactement qu'une telle division « virtuelle » du terrain tendant à utiliser un permis de construire délivré pour une superficie de 2988 m² sur un terrain de 1988 m², implique une grande prudence de la part du notaire sollicité pour un tel montage, souvent considéré par l'administration comme un détournement de règles d'urbanisme ; que le notaire rédacteur de l'acte, au lieu de vendre un lot de copropriété horizontale sur une assiette totale de 2988 m² a mis en oeuvre une véritable division parcellaire en vendant le lot n° 6 d'une superficie de 1988 m² qui correspond en fait à la surface de jouissance privative ; que s'agissant de la vente d'une parcelle de 1988 m² il appartenait au notaire de demander la délivrance d'un certificat d'urbanisme afférent à la parcelle de 1988 m², lequel n'aurait pas manqué d'être négatif ;

Attendu que s'agissant de la vente d'un permis de construire aux fins de construire sur un terrain indivis de plusieurs bâtiments à chacun desquels seraient détachées 10'000èmes individis de terrain, il appartenait au notaire de mettre en garde ses clients sur les risques d'utiliser une telle méthode au regard des règles d'urbanisme ;

Attendu en conséquence que Me [Y], en rédigeant un tel acte, sans mettre en garde les parties sur les conséquences politiques du montage proposé, en particulier au regard le permis de construire, alors que l'élément substantiel de la vente était la constructibilité du terrain, a commis une faute ;qu'il ne saurait s'en exonérer en soutenant que l'acte est fidèle à la volonté commune des parties, professionnelles de l'immobilier ;

Attendu qu'il en est résulté l'immobilisation du bien antérieure au jugement d'annulation ; que la SARL Cabinet Hardy n'a pu entre-temps faire fructifier la totalité de son patrimoine, alors que ce dernier avait été acquis en qualité de marchand de bien ; que le préjudice lié à l'immobilisation, basé sur la valeur vénale année 1983 de la maison d'habitation de deux étages de 350 m2 habitables et du terrain, doit être évalué à 762 245€ et 240 000€, fois 5% sur 4 ans, jusqu'au 24 mars 1987, soit 200 449€ ;

Attendu que la SCP [Y] devra donc supporter la charge de ces quatre années d'immobilisation allant de l'acte de février 1983 jusqu'au jugement du 24 mars 1987, aucune faute de la SCI Les Amandiers n'étant à relever durant cette période, ni aucune faute de la part du notaire n'étant à déplorer depuis l'annulation de la vente ;

Attendu qu'il y a lieu en définitive de réformer partiellement le jugement déféré ;

Attendu que la SCP [Y] succombant devra supporter la charge des dépens d'appel, en ce compris ceux de l'arrêt cassé ;

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 28 février 2008 qui a cassé partiellement et annulé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 24 janvier 2006, en ce qu'il a condamné la société Cabinet Hardy à payer à la SCI les Amandiers les intérêts au taux légal sur la somme de 243 918,43 € à compter du 5 novembre 1987 et en ce qu'il a débouté la société Cabinet Hardy de ses demandes indemnitaires dirigées contre la SCI Les Amandiers et contre la SCP [Y],

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 13 mars 2001 devenu donc définitif en ce qu'il a débouté la SCI Les Amandiers de sa demande de dommages et intérêts formulés à l'encontre de la SARL Cabinet Hardy, et en ce qu'il a condamné la SARL Cabinet Cabinet Hardy à payer à la SCI Les Amandiers la somme de 1'600'000 F (243 918,43 €) au titre de la restitution du prix de vente,

Vu l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 24 janvier 2006 devenu définitif en ce qu'il a condamné la SCI Les Amandiers à payer à la SARL Cabinet Hardy la somme de 15 244,90 € au titre des travaux nécessaires pour parachever la remise en état des lieux, et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de statuer sur des demandes de restitution de sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour,

Rejette la fin de non-recevoir soulevée,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SARL Cabinet Hardy, agissant par son liquidateur amiable M. [N] [B], à payer à la SCI Les Amandiers les intérêts au taux légal afférents à la somme de 1'600'000 F du 27 mars 1987 jusqu'au jour du parfait paiement, et en ce qu'il a condamné la SCP [Y] à payer à la SCI Les Amandiers la somme de 1600'000 F et les intérêts au taux légal afférents à cette somme du 3 février 1983 au 24 mars 1987 ainsi que la somme de 400'000 F,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Déboute la SCI Les Amandiers de sa demande présentée contre la SARL Cabinet Hardy

tendant à l'octroi des intérêts au taux légal sur la somme de 1'600'000 F (243 218,43 € ) à compter du 5 novembre 1987,

Condamne la SCP [Y] à payer à la SCI SARL Cabinet Hardy la somme de 200 448€

au titre de son préjudice d'immobilisation,

Déboute la SARL Cabinet Hardy de ses demandes indemnitaires présentées contre la SCI Les Amandiers,

Déboute la SCP [Y] de toutes ses demandes,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu de faire application de ce texte,

Condamne la SCP [Y] aux dépens d'appel, en ce compris ceux de l'arrêt cassé, et dit qu'ils seront recouvrés conformément dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 10/03839
Date de la décision : 19/01/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°10/03839 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-19;10.03839 ?
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