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13/01/2012 | FRANCE | N°10/12417

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 13 janvier 2012, 10/12417


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 13 JANVIER 2012



N° 2012/ 20













Rôle N° 10/12417







COMMUNE DE [Localité 9]





C/



[J] [S] [R] [H]





















Grosse délivrée

le :

à :la S.C.P. PRIMOUT - FAIVRE



la S.C.P. BLANC-CHERFILS

















Décisio

n déférée à la Cour :

Arrêt de la Cour de Cassation en date du 18 mai 2010 sur arrêt de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 17 mars 2009



DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION



COMMUNE DE [Localité 9], [Adresse 8], représentée par son Maire en exercice,

représentée par la S.C.P. PRIMOUT FAIVRE, avoués à la Cour, pla...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 13 JANVIER 2012

N° 2012/ 20

Rôle N° 10/12417

COMMUNE DE [Localité 9]

C/

[J] [S] [R] [H]

Grosse délivrée

le :

à :la S.C.P. PRIMOUT - FAIVRE

la S.C.P. BLANC-CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de la Cour de Cassation en date du 18 mai 2010 sur arrêt de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 17 mars 2009

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

COMMUNE DE [Localité 9], [Adresse 8], représentée par son Maire en exercice,

représentée par la S.C.P. PRIMOUT FAIVRE, avoués à la Cour, plaidant par Me Eve BRITSCH-SIRI, avocat au barreau de TOULON

DÉFENDEUR SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur [J] [S] [R] [H]

né le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 9], demeurant [Adresse 6]

représenté par la S.C.P. BLANC CHERFILS, avoués à la Cour, plaidant par Me Hubert AMIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me François SUSINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 novembre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président

Monsieur André FORTIN, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2012.

ARRÊT

Contradictoire,

Magistrat Rédacteur : Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2012,

Signé par Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Mr [J] [H] a assigné la Commune de [Localité 9] en revendication de la propriété d'un chemin rural traversant les parcelles de terre dont il a reçu donation de ses parents ;

Par jugement du 18 janvier 2007 le Tribunal d'instance de TOULON a statué ainsi :

'DIT que l'assiette du chemin dit "chemin de [Localité 11]" est la propriété privée de M. [J] [H] ;

CONDAMNE la commune de [Localité 9] représentée par son maire à payer à M. [J] [H] la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

DIT que les dépens seront supportés par la commune de [Localité 9] représentée par son maire' ;

La Commune de [Localité 9] ayant relevé appel de cette décision le 1er mars 2007, par arrêt du 17 mars 2009 la Cour d'appel de céans, 4ème chambre B, a statué ainsi :

'Reçoit l'appel, régulier en la forme,

Ledit bien fondé,

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Déboute Monsieur [H] de ses demandes,

Dit que le chemin dit [Localité 11] est un chemin rural communal dépendant de la commune de [Localité 9],

Condamne Monsieur [H] à payer à la commune intimée la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Le condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de la S.C.P. PRIMOUT - FAIVRE' ;

Mr [J] [H] ayant formé un pourvoi, par arrêt du 18 mai 2010 la Cour de cassation a cassé et annulé cette décision dans toutes ses dispositions, et a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE autrement composée, au motif qu'en relevant que plusieurs actes administratifs établissent le classement du chemin litigieux comme chemin rural reconnu, et en retenant que 'les titres antérieurs au classement dont excipe M. [H] sont inopérants pour prévaloir sur ledit classement, alors que le classement d'un chemin en voirie communale n'est pas un acte translatif de propriété', la Cour a violé l'article L 161-1 du Code rural ;

La Commune de [Localité 9] a saisi la Cour d'appel de renvoi le 1er juillet 2010 ; l'affaire a été attribuée à la 4ème chambre A ;

Au terme de dernières conclusions du 20 octobre 2010 qui sont tenues pour intégralement reprises ici, la Commune de [Localité 9] formule les demandes suivantes :

'Vu les articles L 161 -2 et suivants du Code Rural,

Constater que le chemin [Localité 11] a été incorporé au réseau communal depuis 1959, soit depuis plus de 30 ans!

Constater que le chemin [Localité 11] figure au cadastre comme chemin rural communal.

Constater que Mr [H] ne peut plus invoquer de titre en l'absence d'action en revendication exercée dans le délais de 30 ans.

Réformer le jugement dont appel.

Dire et juger que le chemin [Localité 11] est un chemin communal.

Condamner Mr [H] au paiement de la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les dépens distraits au profit de la S.C.P. PRIMOUT FAIVRE Avoués sous son affirmation de droit pour ceux d'appel' ;

Au terme de dernières conclusions du 7 juin 2011 qui sont tenues pour intégralement reprises ici, Mr [J] [H] formule les demandes suivantes :

'Vu l'arrêt de la Cour de Cassation du 18 mai 2010,

Vu les articles L.161-1, 161-2 et 161-3 du Code rural,

Vu les articles 1261 et suivants du Code civil,

CONFIRMER purement et simplement le jugement rendu par le Tribunal d'Instance de TOULON en date du 18 janvier 2007,

DIRE ET JUGER que le chemin dénommé Chemin de [Localité 11] situé sur le territoire de la Commune de [Localité 9] est un chemin privé, propriété de Monsieur [J] [H],

DEBOUTER la Commune de [Localité 9] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

LA CONDAMNER à payer à Monsieur [H] la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER la Commune aux entiers dépens distraits au profit de la S.C.P. BLANC CHERFILS, Avoués près la Cour d'Appel, sur son affirmation de droit d'y avoir pourvu, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile' ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 octobre 2011 ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée ; les éléments soumis à la Cour ne permettent pas d'en relever d'office l'irrégularité ;

Par acte notarié du 7 février 1952 Mr [Z] et Madame [F], son épouse, ont vendu à Mr [Y] [H], acquéreur pour le compte de la communauté, une propriété rurale, comprenant notamment : 'Une terre d'un seul tenant, sise à [Adresse 10], d'une superficie totale de sept hectares quatre vingt deux ares quatre vingt seize centiares environ... traversée de part en part, du nord au midi, vers son milieu, par un chemin qui est la propriété exclusive de la propriété présentement vendue' ;

Par acte notarié du 9 juillet 1986 Mr [Y] [H] et Madame [X], son épouse, ont fait donation à Mr [J] [H], leur fils, notamment de ce bien, défini de la manière suivante : 'Article deuxième : Une propriété sise [Adresse 10], comprenant : 1°) Une maison d'habitation... 2°) Neuf garages sur la parcelle C[Cadastre 4] et douze garages et un hangar agricole sur la parcelle C [Cadastre 5]. 3°) Parcelles en nature de terre et de pré et de vigne. L'ensemble d'un seul tenant cadastré section C, lieudit "[Adresse 10]" : n° [Cadastre 3]... n° [Cadastre 7]... n° [Cadastre 1]... n° [Cadastre 4]... n° [Cadastre 5]... Contenance totale : 7 ha 77 a 52 ca' ; on voit que la référence à la 'propriété exclusive' du chemin n'y est pas reprise ;

La Commune de [Localité 9] n'invoque ni ne produit aucun titre de propriété préférable à ceux de Mr [J] [H] ; le chemin litigieux était donc, à l'origine, privé ; toutefois la Commune de [Localité 9] invoque le prescription acquisitive ;

En droit, la propriété s'acquiert aussi par prescription ; la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ; pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ; le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans ;

En l'espèce, par délibération du 11 juin 1959 le Conseil municipal de [Localité 9] a décidé 'd'incorporer' plusieurs chemins à la voirie communale, 'les uns empierrés et revêtus, les autres dont la réfection figure au programme de remise en état à réaliser dans un proche avenir', notamment le chemin litigieux, dit 'Chemin de [Localité 11]', en les classant comme chemins ruraux reconnus ; d'une autre délibération du 10 avril 1961 il ressort que la liste 'des chemins ruraux reconnus à incorporer dans la voirie communale' a été affichée pendant huit jours, du 15 au 23 mars 1961, et 'qu'aucune observation n'a été présentée', en vertu de quoi le Conseil municipal de [Localité 9] a décidé 'd'adopter le tableau des dits chemins ruraux tel qu'il avait été dressé par délibération du 11 juin 1959, afin qu'ils soient incorporés dans la voirie communale' ; depuis, le Chemin de [Localité 11] figure dans la liste des chemins ruraux reconnus du 7 février 1967, et apparaît au cadastre comme 'chemin rural', reliant un autre chemin rural au sud, au chemin départemental n° 2 au nord, aux abords duquel il longe la coopérative vinicole ;

Ces actes marquent la volonté de la Commune de [Localité 9] de posséder le chemin litigieux, par incorporation à la voirie communale, et donc au domaine privé de la commune, puisque les chemins ruraux sont les chemins 'appartenant aux communes' ; or non seulement la famille [H] ne s'est pas opposée à cette possession continue et non interrompue, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, avant l'assignation du 18 juillet 2006, soit pendant bien plus de trente ans, mais elle l'a acceptée, la rendant ainsi également paisible ;

En effet, tout d'abord sur le plan de situation au vu duquel Mr [Y] [H] à obtenu l'autorisation de construire une villa le 12 juin 1964, le chemin litigieux, quoique non dénommé, sépare les parcelles n° [Cadastre 7] et [Cadastre 1], anciennement d'un seul tenant, en deux ; ensuite sur les plans de situation au vu desquels le même à obtenu l'autorisation de construire un ensemble de six garages le 12 mai 1976 et un hangar agricole le 19 août 1982, le chemin litigieux est expressément dénommé 'Chemin rural dit de [Localité 11]' ; enfin et surtout l'autorisation de construire délivrée à Mr [Y] [H] le 16 août 1977 était assorti de la prescription suivante : 'Cession gratuite de terrain : En application des dispositions de l'article R 332-15 du code de l'urbanisme, le terrain nécessaire à l'élargissement du chemin départemental n° 2 et du chemin rural de [Localité 11] sera cédé gratuitement à la collectivité publique...' ; or elle a été utilisée, ainsi qu'il résulte des mentions de l'acte de donation du 9 juillet 1986 ('Les articles 1er et 3ème appartiennent en propre à Monsieur [H] [Y]... les constructions (de l'article 3ème) pour avoir été édifiées depuis suivant permis délivré le 16 août 1977...') ;

Dès lors, la Commune de [Localité 9] a acquis la propriété du chemin litigieux par prescription ; le jugement entrepris sera donc infirmé, et Mr [J] [H], qui n'a pas pu accomplir lui-même d'acte de possession en empruntant un chemin rural, affecté à l'usage du public, sera débouté de ses demandes ;

L'équité ne commande pas de faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Mr [J] [H] qui succombe doit supporter les dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, par mise à disposition au Greffe,

Reçoit l'appel de la Commune de [Localité 9] ;

Infirme le jugement entrepris, et statuant à nouveau,

Dit que le chemin de [Localité 11] à [Localité 9] est un chemin rural, appartenant à la Commune de [Localité 9] ;

Déboute Mr [J] [H] de son action en revendication ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne Mr [J] [H] aux dépens, et dit que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par la S.C.P. PRIMOUT - FAIVRE conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

LE GREFFIERLE PRESIDENT

S. AUDOUBERTJ-P. ASTIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/12417
Date de la décision : 13/01/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°10/12417 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-13;10.12417 ?
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