La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/01/2012 | FRANCE | N°10/00140

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre a, 12 janvier 2012, 10/00140


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre A



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2012



N°2012/11















Rôle N° 10/00140







S.A FINANCIERE FIDEURAM





C/



[U] [S]

S.A.R.L SOCIETE FINANCIERE D'INVESTISSEMENTS ET DE REALISATIONS

S.A.R.L FIDUCIAIRE ANALYSE ET CONSEILS

[N] [B]

SARL PRISME




















<

br>









Grosse délivrée

le :

à :

SCP BOTTAI

SCP SIDER







Arrêt en date du 12 Janvier 2012 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15/09/2009, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 319 rendu le 29/05/2008 par la Cour d'Appel d' Aix-en-Proven...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre A

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2012

N°2012/11

Rôle N° 10/00140

S.A FINANCIERE FIDEURAM

C/

[U] [S]

S.A.R.L SOCIETE FINANCIERE D'INVESTISSEMENTS ET DE REALISATIONS

S.A.R.L FIDUCIAIRE ANALYSE ET CONSEILS

[N] [B]

SARL PRISME

Grosse délivrée

le :

à :

SCP BOTTAI

SCP SIDER

Arrêt en date du 12 Janvier 2012 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15/09/2009, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 319 rendu le 29/05/2008 par la Cour d'Appel d' Aix-en-Provence

( 8ème Chambre C ).

DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION

S.A FINANCIERE FIDEURAM,

venant aux droits de la SA BANQUE PRIVEE FIDEURAM WARGNY, anciennement dénommée FINANCIERE WARGNY,,

dont le siége social est [Adresse 7]

représentée par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour,

assisté par Me Philippe GUMERY avocat au barreau de PARIS

DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur [U] [S]

né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 9] ([Localité 9])

de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

assisté par Me Pascal NEVEU, avocat au barreau de NICE

S.A.R.L SOCIETE FINANCIERE D'INVESTISSEMENTS ET DE REALISATIONS, 'SOFIR',

agissant par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

assistée par Me Pascal NEVEU, avocat au barreau de NICE

S.A.R.L FIDUCIAIRE ANALYSE ET CONSEILS, (FAC)

agissant par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 4]

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

assistée par Me Pascal NEVEU, avocat au barreau de NICE

Monsieur [N] [B]

pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité de gérant de la SARL PRISME

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 8] (02) ([Localité 8]), demeurant [Adresse 5]

représenté par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour,

assisté par Me Christian BOITEL, avocat au barreau de NICE substitué par Me Gilles BROCA, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 17 Novembre 2011 en audience publique .Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Catherine ELLEOUET-GIUDICELLI, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries devant la Cour composée de :

Monsieur Guy SCHMITT, Président,

Madame Catherine ELLEOUET - GIUDICELLI, Conseiller

Madame Catherine DURAND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2012..

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2012

Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par exploits du 2 août 2001, M. [U] [S], la S.A.R.L. SOCIETE FINANCIERE D'INVESTISSEMENTS ET DE REALISATIONS, dite société SOFIR, les époux [X] et la S.A.R.L. FIDUCIAIRE D'AUDIT ET DE CONSEILS, dite société FAC, ont fait assigner, devant le Tribunal de commerce de NICE, la S.A. FINANCIERE WARGNY, la S.A.R.L. EUROP BOURSE SERVICES et M. [N] [B], tant en son nom personnel qu'en sa qualité de gérant de la S.A.R.L. PRISME, pour obtenir l'indemnisation de pertes qu'ils avaient subies sur leurs comptes ouverts dans les livres de la S.A. FINANCIERE WARGNY, en l'état d'ordres de bourse donnés par M. [B] par l'intermédiaire de la société EUROP BOURSE SERVICE.

La société EUROP BOURSE SERVICE ayant été mise en liquidation judiciaire en cours de procédure, les demandeurs se sont désistés de leur action à son encontre.

Le Tribunal, après avoir ordonné en 2003 un sursis à statuer, dans l'attente du résultat d'une plainte pénale déposée par la société EBS à l'encontre de M. [B], et une expertise pour établir dans quelles conditions les ordres avaient été passés et rechercher s'il existait des préjudices et les chiffres, a, par jugement du 19 mai 2006, condamné conjointement et solidairement la S.A. FINANCIERE WARGNY et M. [B] à payer, avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance et anatocisme, les sommes de :

- 12 751,85 euros à M. [S],

- 124 201,30 euros à la société SOFIR,

- 124 161,51 euros à la société FAC,

- 77 268,87 euros aux époux [X],

ainsi qu'une somme de 2000 euros, à chacun des demandeurs, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société FINANCIERE WARGNY, sous sa nouvelle dénomination 'S.A. BANQUE PRIVEE FIDEURAM WARGNY', a relevé appel de cette décision.

Dans un arrêt du 29 mai 2008, la Cour d'appel de ce siège, dans une autre composition, a prononcé la nullité du jugement déféré faute de reprise même sommaire des moyens des défendeurs et même de visa de leurs conclusions, et se considérant cependant saisie par l'effet dévolutif de l'appel, a rejeté les demandes de dommages et intérêts formulées par M. [S], la société SOFIR et la société FAC et condamné la société FIDEURAM WARGNY à payer aux époux [X] une somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que 6000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société WARGNY avait, dans cette procédure, appelé en cause Me [T] [M], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EUROP BOURSE SERVICE.

Par un arrêt du 15 septembre 2009, la Cour de Cassation a cassé cette décision en indiquant que : ' pour rejeter les demandes de M. [S] et des sociétés Sofir et Fac, l'arrêt retient qu'il n'était pas possible de déduire des manquements de la société à ses obligations de surveillance et de contrôle de la société EBS sa connaissance d'une gestion illicite de portefeuille ; qu'il retient encore que c'était en parfaite connaissance de cause de son caractère illicite et des risques s'y attachant, que M. [S] avait confié à M. [B] le mandat de gestion de ses capitaux et ceux des sociétés Sofir et Fac en violation des termes de la convention de gestion qu'il avait conclue avec la société EBS, de sorte qu'il n'était pas fondé à se prévaloir à titre personnel et en qualité de représentant de cette dernière société, d'un préjudice qu'il avait lui-même contribué à créer par une faute qui avait absorbé celle de la société', mais en retenant 'qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les fautes successives de la société, relevées par l'expert et par décision définitive de l'Autorité des marchés financiers n'avaient pas permis à M. [B] d'effectuer les actes illicites de gestion de portefeuille au préjudice de M. [S] et des sociétés Sofir et Fac, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à cette décision'.

Le 4 janvier 2010, la société Banque privée FIDEURAM WARGNY a ressaisi la Cour, puis le 6 janvier 2010 elle a déposé une déclaration rectificative sous le nom de S.A. FINANCIERE FIDEURAM.

Le 3 novembre 2010, elle s'est désistée de son appel à l'encontre de Me [M], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EUROP BOURSE FINANCE et le dessaisissement partiel de la Cour a été constaté par une ordonnance du 9 novembre 2010.

Dans des conclusions du 11 octobre 2011, tenues ici pour intégralement reprises, elle demande à la Cour :

- à titre principal, d'infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive de M. [S] et des sociétés Fac et SOFIR,

- à titre subsidiaire, de constater que l'instance aurait dû être suspendue jusqu'à la régularisation de la procédure à l'encontre de Me [M], liquidateur judiciaire de la société EBS, que le désistement d'instance de M. [S] et des sociétés FAC et SOFIR à l'encontre de cette société n'était pas valable, de constater, qu'en tout état de cause, elle ne s'était pas, elle, désistée de ses demandes à l'encontre de la société le EBS et qu'elle était donc recevable et bien fondée à les formuler devant la Cour,

- à titre très subsidiaire :

Sur le parfait respect de la société FINANCIERE WARGNY, aux droits de laquelle vient la société FINANCIERE FIDEURAM, de ses obligations contractuelles :

constater que la société FINANCIERE WARGNY, aux droits de laquelle vient la société FINANCIERE FIDEURAM, a parfaitement rempli sa mission de dépositaire de compte - teneurs de comptes conservateurs,

constater qu'elle a parfaitement respecté l'obligation d'information qui était la sienne au regard, notamment, des compétences et des connaissances particulières de M. [S] de la société Fac et de la société s'offrir en matière fiscale,

constater qu'il n'est apporté la preuve d'aucun manquement contractuel de sa part et que les griefs retenus à son encontre par l'A.M.F. et les 'anomalies' relevées par l'expert sont indifférents et n'ont aucun rôle causal dans le présent litige,

débouter, en conséquence M. [S] et les sociétés FAC et SOFIR de l'ensemble de leurs demandes,

Sur l'absence de responsabilité et/ou de garantie de la société FINANCIERE WARGNY:

constater qu'en dépit des termes clairs des conventions conclues avec la société WARGNY et la société EBS, M. [S], la société FAC et la société SOFIR ont volontairement confié la gestion de leurs comptes à M. [B] et à la société PRISME FINANCE, tout en reconnaissant parallèlement être à l'origine d'un certain nombre d'ordres de bourse,

constater que la preuve d'actes de démarchage irréguliers de M. [B] ou de la société PRISME FINANCE, à l'égard de M. [S] et des sociétés FAC et SOFIR n'est pas rapportée,

constater que M. [S], la société FAC et la société SOFIR ont agi en toute connaissance de cause puisqu'ils étaient aussi expert-comptable et conseil de M. [B] et de la société PRISME et avaient rédigé les statuts de cette société et la convention avec EBS,

débouter en conséquence M. [S], la société FAC et la société SOFIR de leurs demandes en l'état de leur comportement gravement fautif,

subsidiairement dire qu'elle ne peut être tenue pour responsable d'actes qu'elle avait expressément interdits à la société ESB et condamner en conséquence cette société, la société PRISME FINANCE et M. [B] a indemniser directement M. [S] et des deux sociétés,

Sur les préjudices allégués :

constater que M. [S] et les deux sociétés n'apportent pas la preuve de leurs préjudices et les dépôts de l'été porté aussi de ce fait,

En tout état de cause, condamner solidairement M. [S], la société FAC et la société SOFIR à lui payer 60'000 € en application de l'article 700 du code nouveau code de procédure civile.

Dans ces écritures, elle soutient essentiellement que M. [S] et les sociétés n'ont pas comme, ils auraient dû le faire, donné personnellement les ordres, mais ont délégué cette possibilité à des tiers de manière illégale et que, de toute façon, les fautes qui lui sont reprochées sont sans incidence sur les préjudices allégués.

Dans des conclusions du 11 octobre 2011, tenues aussi pour intégralement reprises, M. [S], la société FAC et la société SOFIR demandent la confirmation du jugement, qu'il soit donné acte à la société FINANCIERE FIDEURAM de ce qu'elle vient aux droits de la société WARGNY et, en conséquence sa condamnation conjointe et solidaire, avec M. [B], à payer avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et anatocisme, les sommes de :

- 12 751,85 euros à M. [S],

- 124 201,30 euros à la société SOFIR,

- 124 161,51 euros à la société FAC,

ainsi qu'une somme globale de 30 000 euros pour résistance abusive, 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens, compris les frais d'expertise d'un montant de 34'050,60 euros.

Ils soutiennent que le désistement qu'ils avaient formulé à l'encontre de la société EBS était parfait, que la société WARGNY a manqué aux règles imposées aux professionnels par l'article L 533 - 4 du Code des marchés financiers puisqu'elle s'était adjoint des collaborateurs incompétents comme M. [B] et la société ESB, n'avait pas contrôlé l'activité de M. [B], avait même exécuté certains ordres sur instructions téléphoniques de ce dernier, sans exiger d'ordres écrits des clients, avait accepté que M. [B] et ESB se livrent à des opérations de démarchage alors que cela leur était interdit et avait manqué à ses obligations d'information et de conseil, alors que M. [S], pour sa part, n'avait commis aucune faute.

Dans des écritures du 10 mars 2011, tenues aussi pour intégralement reprises, M. [B], déclarant agir tant en son nom personnel qu'en sa qualité de gérant de la S.A.R.L. PRISME, mais en réalité semble-t-il de liquidateur amiable de cette société, demande à la Cour de dire que le jugement, qui n'a pris en compte ni ses conclusions ni ses prétentions est nul, d'évoquer l'ensemble du litige, de constater que les demandeurs ne justifient d'aucune faute d'une particulière gravité imputable à M. [B] et détachable de ses fonctions de gérant de la S.A.R.L. PRISME et en conséquence prononcer sa mise hors de cause et les débouter de l'ensemble de leurs demandes.

A titre reconventionnel, il sollicite la condamnation de M. [S] et des sociétés FAC et SOFIR à lui payer 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens y compris ceux de l'arrêt cassé.

Dans ces écritures M. [B] soutient qu'il ne s'est livré à aucun démarchage, qu'il n'a pas géré illicitement le portefeuille de M. [S] puisqu'il avait un mandat de gestion émanant de ce dernier qui, en sa qualité d'expert comptable, savait parfaitement ce qu'il faisait, et que, de toute façon il n'existe pas de préjudice, puisque pendant la période où il a géré le portefeuille de M. [S] et de ses sociétés de nombreuses plus-values ont été réalisées.

L'ordonnance de clôture est du 3 novembre 2011.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Attendu que le jugement déféré, s'il reprend de façon succincte les seuls arguments des demandeurs, renvoie expressément au jugement du 5 septembre 2003 pour l'exposé des faits et de la procédure, que ce jugement exposait, lui, les arguments des défendeurs qui, pour l'essentiel, n'avaient pas été modifiés, puisque la société WARGNY invoquait son absence de responsabilité dans le litige et que M. [B] demandait déjà sa mise hors de cause,

que le jugement déféré a aussi répondu, succinctement, à ces arguments, même s'il l'a fait parfois tacitement, puisqu'il a retenu la seule intervention de M. [B] dans l'opération, ne relevant aucune participation de la S.A.R.L. PRISME,

qu'il ne sera donc pas annulé et seuls les moyens de réformation soutenus à son encontre seront examinés,

que ce jugement doit d'autant moins être annulé que les époux [X], qui sont eux aussi bénéficiaires d'une condamnation prononcée par cette décision, n'ont pas été mis en cause après la saisine de la Cour de renvoi par la société FIDEURAM, alors qu'ils l'avaient été devant la première formation d'appel ;

Attendu que l'argumentation de la société FINANCIERE FIDEURAM relative au caractère imparfait du désistement des demandeurs à l'encontre de la société EBS et de son intérêt à voir cette société maintenue dans la procédure, doit être considérée comme abandonnée dans la mesure où la société FIDEURAM s'est expressément, devant la Cour, désistée de toute demande contre la société EBS ;

Attendu qu'en février et mai 1999, M. [S] et les sociétés FAC et SOFIR ont ouvert dans les livres de la société FINANCIERE WARGNY des comptes, que les conventions signées à ces occasions, si elles donnaient à la banque une mission d'administration et d'encaissement des produits, excluaient expressément les actes de disposition des titres, précisant que de tels actes ne pouvaient être accomplis que sur instructions du titulaire du compte et sous sa responsabilité exclusive,

qu'il y était aussi précisé que les titulaires ne pouvaient confier la gestion des portefeuilles qu'à un prestataire de service d'investissement agréé et dûment mandaté ;

Attendu qu'en février 1999 était conclue entre la société FINANCIERE WARGNY et la société Europ Bourse Services, une convention de 'transmetteur d'ordres' dont l'objet était ainsi défini 'Financière WARGNY confie au transmetteur d'ordre agissant à titre exclusif, au nom et sous la responsabilité de la Financière WARGNY, conformément à l'article 2 - 1 du règlement général du Conseil des marchés financiers, le soin de recevoir pour lui transmettre les ordres émis par les clients pour lesquels il a reçu mandat de transmission d'ordres et qui ont ouvert un compte dans les livres de la Financière WARGNY.',

que l'expert judiciaire a relevé que dans ce document figurait notamment au titre des personnes habilité à faire fonctionner les comptes M. [N] [B], que si ce dernier conteste avoir eu connaissance de ce contrat et l'avoir signé, il n'en demeure pas moins qu'il a créé un 'point bourse' à [Localité 9] et signé une convention de partenariat avec la société EBS le 4 janvier 1999,

que M. [S] et les sociétés FAC et SOFIR ont conclu eux, avec la société EBS, des contrats de transmission d'ordres qui précisaient que la société EBS était autorisée à transmettre les ordres qu'ils donnaient à la société WARGNY, mais qu'ils n'étaient, en aucun cas des mandats de gestion,

que de son côté 'M. [N] [B] (S.A.R.L. PRISME...)' a conclu le 4 janvier 1999 une convention de partenariat avec les sociétés Europe Finances Services et Europ Bourse Services rédigée en ces termes : ' les sociétés EFS-EBS et M. [B] décident d'un commun accord la création à [Localité 9], [Adresse 6] d'un cabinet étendant les activités des sociétés EFS et EBS à la région PACA. Cette exploitation aura lieu sous la responsabilité opérationnelle directe de M. [B], mais sous le nom des sociétés EFS -EBS', les parties convenant dans ce même acte d'une rétrocession à hauteur de 80 % à M. [B] des commissions de transmetteur d'ordre perçues par les sociétés ;

Attendu que, malgré la mention équivoque de la convention du 4 janvier 1999, que M. [B] explique dans ses écritures par le fait que la société PRISME était alors en formation, il est certain que, dans cet acte, c'est bien M. [B] qui contracte avec les sociétés EFS-EBS, et qui, surtout, prend en charge personnellement la responsabilité opérationnelle de l'exploitation, qu'en outre, les documents qu'il produit et qui émanent de M. [S] ou de ses sociétés sont adressés soit à la société EUROP BOURSE SERVICE à son attention personnelle, soit à son nom propre, soit à 'Monsieur [N] [B], PRISME FINANCE', mais jamais à la société PRISME directement,

que l'encaissement des commissions ou le paiement de la TVA par la société PRISME ne suffit pas à établir que la gestion irrégulière de portefeuille soit le fait de cette société,

que donc, et dans la mesure où il est toujours intervenu en son nom personnel, et non comme gérant de la S.A.R.L. PRISME, sa demande de mise hors de cause, qu'il reprend devant la Cour, doit être écartée et ses arguments relatifs à l'absence de faute détachable de ses fonctions de gérant de la société PRISME, de ce fait sans portée, ne seront pas examinés ;

Attendu que M. [B] a déclaré lui-même à l'expert qu'il établissait une liste de prospects envoyée à EBS qui transmettait à WARGNY, laquelle envoyait des dossiers et de la documentation, qu'une telle pratique, doublée par ailleurs de la démonstration par deux attestations de collaboratrices de M. [S], Mm [V] et Mme [G], que M. [B] se présentait sur le lieu de travail de celui-ci pour récupérer les chèques et faire signer des documents, s'analyse en un acte de démarchage, même vis à vis de M. [S] que M. [B] connaissait de longue date et à qui il avait recours professionnellement, démarchage irrégulier puisque M. [B] n'avait pas d'habilitation à cette fin,

qu'il est aussi établi qu'il a donné des ordres concernant les comptes de M. [S] et de ses sociétés, sans mandat exprès et écrit, comme le lui imposaient les dispositions du Code Monétaire et Financier, et sans aucun agrément pour ce faire du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, qu'il a donc exercé une activité de gestion de portefeuille illicite en passant des ordres de bourses pour le compte de clients, ordres transmis par l'intermédiaire de la société EBS à la société WARGNY, et que cette dernière a exécutés ;

Attendu que si la société FIDEURAM soutient que, comme l'a retenu l'Autorité des Marchés financiers, la société WARGNY a parfaitement rempli ses obligations qui consistaient seulement dans la réception, l'enregistrement et l'exécution des ordres, mais qu'il résulte aussi de la décision rendue, le 6 mai 2004, par la commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers, qui n'a pas certes autorité de la chose jugée dans le présent litige, mais qui établit de façon incontestable un certain nombre de faits, que la société WARGNY a manqué aux obligations réglementaires qui lui imposaient d'évaluer la compétence professionnelle et de surveiller l'activité d'un mandataire chargé d'une mission de transmetteur d'ordres et de veiller à ce que tout ordre de mouvement sur les comptes dont elle était dépositaire émane bien du titulaire de ce compte,

que, dans la mesure où elle était responsable du contrôle de l'activité de la société EBS, le fait que cette activité ait été ou non déléguée à son insu à M. [B] ne saurait l'exonérer de cette responsabilité, pas plus qu'elle ne peut s'en exonérer en invoquant l'absence de protestations des intimés à la réception des avis d'opération et des relevés de comptes, puisque ce silence ne constitue qu'une simple présomption d'approbation qui peut être remise en cause par la preuve de l'absence de mandat régulier,

qu'au-delà des constatations et des sanctions prononcées par l'AMF, l'expert a pu recueillir des témoignages qui démontrent que les contrôles internes qu'elle a diligenté à l'époque des ordres contestés, ont démontré que le 'point bourse' de [Localité 9] où exerçait M. [B] n'avait pas d'enregistreur vocal des ordres téléphoniques et seulement un carnet d'ordres et que, pour ce qui concerne les ordres émanant des intimés, l'expert a constaté qu'aucun ticket d'ordre portant la signature de M. [S] ne lui avait été transmis et que ni M. [S], ni même M. [B] n'ont jamais invoqué l'existence d'ordres écrits donnés par M. [S] pour son compte ou pour celui de ses sociétés,

que l'expert a aussi constaté que M. [B] n'avait pas respecté la procédure de l'horodatage qui imposait au professionnel de dater l'ordre à l'heure de sa réception et non, comme le faisait M. [B] au moment de sa transmission,

que l'expert note aussi que la société WARGNY n'a jamais, alors qu'elle connaissait l'existence du 'point bourse' de [Localité 9], vérifié la validité des procédures de fonctionnement utilisées ;

Attendu qu'en ne remplissant pas les obligations ci-dessus décrites la société WARGNY a permis qu'il y ait dans les comptes qu'elle avait en dépôt des mouvements qui n'avaient pas été décidés par les déposants,

qu'elle a donc engagé sa responsabilité aux côtés de celle de M. [B] et doit être condamnée solidairement, avec lui, à réparer les dommages occasionnés ;

Attendu que pour se soustraire à une condamnation à indemniser les intimés, M. [B] et la société FIDEURAM soutiennent qu'en réalité M. [S] avait bien donné mandat à M. [B] de gérer ses comptes, mais que là encore cet élément est indifférent au litige puisque le mandat pour être régulier devait être confié à un prestataire de service d'investissement agréé et que le contrôle de cet agrément relevait aussi de la responsabilité de la société WARGNY ;

Attendu que la qualité d'expert comptable de M. [S], si elle pouvait permettre de supposer une connaissance de sa part dans le domaine des placements boursiers, n'en dispensait pas moins la société WARGNY de son obligation d'information et de conseil à son encontre, et est de toute façon sans incidence dans le présent litige puisque celui-ci concerne non pas des décisions prises par M. [S] pour lui-même ou pour les sociétés qu'il gérait, mais des ordres qui n'ont été ni donnés ni expressément approuvés par lui et dont le contrôle de la régularité relevait de la responsabilité de la société WARGNY dépositaire des titres,

que sont aussi sans incidence sur le litige la longue amitié ou les relations professionnelles entre M. [S] et M. [B] , puisque les pertes résultent d'ordres irréguliers qui n'auraient pas dû être exécutés par la société WARGNY ;

Attendu que le rapport d'expertise de M. [H], critiqué par l'appelante quant aux conditions dans lesquelles l'expertise a été réalisée, mais pas sur les chiffres retenus par l'expert au titre de la partie de sa mission destinée à évaluer le préjudice, a parfaitement établi, contrairement à ce que soutient M. [B], le montant des pertes subies par M. [S] et ses sociétés qu'il a calculé à hauteur de la différence entre les capitaux placés et les capitaux récupérés, après déduction des prélèvements opérés par les titulaires des comptes, que ce calcul permet de prendre en compte la perte liée à la gestion irrégulière des titres et mais aussi les plus values que cette gestion irrégulière a pu permettre de réaliser, comme le soutient M. [B], étant observé que le préjudice des intimés n'est pas constitué par une perte de chance, mais bien par cette perte financière effective et certaine ;

Attendu qu'en conséquence le jugement déféré doit être intégralement confirmé ;

Attendu que les intimés ne justifient pas à l'appui de leur demande de dommages et intérêts d'un préjudice autre que celui qui sera réparé par l'octroi d'une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant, CONDAMNE solidairement la S.A. FINANCIERE FIDEURAM et M. [N] [B] à payer à M. [S] et aux sociétés SOFIR et FAC, une somme globale de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Les CONDAMNE aux dépens y compris les frais d'expertise, taxés par ordonnance du 6 juillet 2006, et ceux afférents à l'arrêt cassé et autorise la S.C.P. SIDER, titulaire d'un office d'avoué à procéder à leur recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/00140
Date de la décision : 12/01/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8A, arrêt n°10/00140 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-01-12;10.00140 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award