La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/2011 | FRANCE | N°10/20243

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15e chambre a, 09 décembre 2011, 10/20243


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 09 DECEMBRE 2011



N°2011/605













Rôle N° 10/20243







[V] [K]

[N] [S] épouse [K]





C/



CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 11]

[T] [P]

SCP [P]































Grosse délivrée

le :

à : la SCP SIDER



la SCP DE S

AINT FERREOL - TOUBOUL



la SCP COHEN-GUEDJ









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 02 Novembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/08065.







APPELANTS



Monsieur [V] [K]

né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

15e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 09 DECEMBRE 2011

N°2011/605

Rôle N° 10/20243

[V] [K]

[N] [S] épouse [K]

C/

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 11]

[T] [P]

SCP [P]

Grosse délivrée

le :

à : la SCP SIDER

la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL

la SCP COHEN-GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 02 Novembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/08065.

APPELANTS

Monsieur [V] [K]

né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité 12], demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour, assisté de Me Muriel RICORD, avocat au barreau de GRASSE

Madame [N] [S] épouse [K]

née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 10] (ALGERIE), demeurant [Adresse 3]

représentée par la SCP SIDER, avoués à la Cour, assisté de Me Muriel RICORD, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 11], pris en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié, demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de Me Virginie ROSENFELD, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître [T] [P] notaire associé de la SCP [P], né le [Date naissance 6] 1948 à [Localité 8] (ALGERIE), demeurant [Adresse 9]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, assisté de Me Philippe KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

partie intervenante

SCP [P]

demeurant [Adresse 9]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, assistée de Me Philippe KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

partie intervenante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 19 Octobre 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame France-Marie BRAIZAT, Président, et Monsieur Christian COUCHET, Conseiller, chargés du rapport.

Madame France-Marie BRAIZAT, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame France-Marie BRAIZAT, Président

Monsieur Christian COUCHET, Conseiller

Monsieur Olivier BRUE, Conseiller

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Décembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Décembre 2011.

Signé par Madame France-Marie BRAIZAT, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par acte notarié reçu par Maître [P], notaire à [Localité 7], la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] a consenti aux époux [K] un prêt de 250.000 euros, remboursable en 216 mensualités de 1.952,09 euros pour financer l'achat du lot n° 19 du programme VILLAGE VERT de ROUSSET.

Des échéances du prêt étant demeurées impayées, la Caisse de Crédit Mutuel de l'Etang de Berre a d'abord, le 1er septembre 2009, fait pratiquer une saisie attribution entre les mains de la société Groupe Suites Résidences, locataire d'un appartement appartenant aux époux [K], pour obtenir paiement de la somme de 8.199,45 euros correspondant en principal aux échéances impayées du prêt du 10 juillet 2009, mesure dénoncée le 03 septembre 2009.

Les époux [K] ont contesté cette saisie et ont assigné la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] le 29 septembre 2009 devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan pour en demander la mainlevée.

Puis, après s'être prévalue de la déchéance du terme, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] a, par deux actes en date respectivement des 10 décembre et 22 décembre 2009, procédé à des saisies attributions, la première entre les mains de la société SUITES INN et une autre entre les mains de la société LES RESIDENCES DU SOLEIL, locataires de locaux appartenant aux époux [K] et situés à [Adresse 14], et ce pour obtenir le paiement de la somme de 240.383,45 euros.

Ces saisies ont été dénoncées les 16 et 30 décembre 2009.

Les époux [K] ont également contesté ces deux saisies et ont assigné la banque le 15 janvier 2009 devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan en mainlevée de ces mesures.

Dans le cadre des deux instances, ils faisaient valoir notamment qu'une plainte pénale avait été déposée et qu'il convenait de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de celle-ci, qu'une procédure avait été engagée au fond devant le tribunal de grande instance de Marseille et qu'il y avait lieu de se dessaisir au profit de cette juridiction, qu'en outre de nombreuses irrégularités affectaient l'acte de prêt ainsi que l'acte de vente auquel il était lié, et enfin que les saisies étaient abusives compte tenue des garanties dont disposaient déjà la banque.

La Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] a appelé en intervention forcée Maître [P] et la SCP [P].

Par jugement du 02 novembre 2010, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan a ordonné la jonction des deux procédures, rejeté les demandes de sursis à statuer et de dessaisissement au profit du tribunal de grande instance de Marseille, déclaré recevables en la forme les contestations élevées contre les saisies litigieuses, rejeté les demandes de mainlevée fondées sur l'absence de force exécutoire du titre et sur le caractère abusif des saisies, dit n'y avoir lieu à examiner les demandes subsidiaires contre Maître [P] et la SCP [P], condamné les époux [K], in solidum, à verser 1.000 euros à la Caisse de Crédit National de [Localité 11] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les a condamné en outre aux dépens.

Les époux [K] ont interjeté appel le 12 novembre 2010 à l'encontre de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11].

Le 1er avril 2011, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] a formé un appel provoqué à l'encontre de Maître [P] et de la SCP [P].

Aux termes de leurs conclusions déposées le 09 mars 2011 les époux [K] demandent à la Cour de :

Vu les dispositions de l'article 302 du Code de procédure civile,

Vu la plainte et les 16 mises en examen consécutives à ce jour,

Vu la mise en examen du Notaire ayant passé l'acte de prêt pour faux en écriture publique et usage desdits faux par personne dépositaire de l'autorité publique,

Surseoir à statuer jusqu'à la fin de l'instance pénale,

Vu le faux existant dans le contrat de prêt sur la qualité du mandataire ayant représenté les époux [K], qualifié en 2003 de Clerc de Notaire et dans un acte de 2007 de secrétaire notariale,

Dire que le contrat de prêt sur lequel s'est fondé la saisie attribution pratiquée est dépourvu de toute force exécutoire,

En conséquence,

Réformer en toutes ses dispositions la décision attaquée,

Dire l'assignation en intervention forcée à l'encontre de Maître [P] et de la SCP Notariale totalement irrecevable,

Condamner la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] à payer aux époux [K] une indemnité de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens, ceux d'appel distraits...

Par conclusions du 22 août 2011, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] demande à la Cour de :

Vu les dispositions des articles 112 et suivants du Code de procédure civile,

Vu la loi du 09 juillet 1991 et le décret du 31 juillet 1992,

Vu les dispositions des articles 1134 et suivants du code civil et notamment 1319 de ce même code,

Vu les dispositions de l'article 66 du décret du 31 juillet 1992 et sous réserve que l'on justifie des formalités envers les huissiers poursuivants,

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Se déclarer incompétent,

Débouter Monsieur et Madame [K] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Les déclarer prescrits, irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs prétentions,

Constater qu'ils ne remettent pas en cause leur titre de propriété,

Sommation est faite aux époux [K] de verser leurs déclarations d'impôts et avis d'imposition depuis 2003,

Déclarer commun et opposable l'arrêt à venir aux notaires,

Condamner tous succombant, à la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

Par conclusions du 18 octobre 2011, Maître [P] et la SCP [P] demandent à la Cour de confirmer le jugement entrepris et subsidiairement de surseoir à statuer dans la présente instance jusqu'à ce que la juridiction pénale se soit prononcée définitivement sur les faits dénoncés.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il convient tout d'abord de rappeler que les époux [K] prétendent avoir été victimes, à l'instar de plusieurs centaines de personnes, des agissements frauduleux d'une société APOLLONIA et de ses agents commerciaux qui, après les avoir démarchés, les auraient incités, dans le dessein de financer leurs retraites, à acquérir des lots dépendants de résidences hôtelières, en l'état futur d'achèvement ;

Qu'ils ont assigné en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Marseille la société APOLLONIA, des banques dont le Crédit Mutuel de [Localité 11], des promoteurs ; qu'une instance pénale est également en cours dans le cadre de laquelle ont été mis en examen des membres de la société APOLLONIA, ainsi que des notaires ;

Sur la demande de sursis à statuer

Attendu que l'article 4 du Code de procédure pénale ne concerne que l'action civile au fond et non la poursuite d'une voie d'exécution ;

Qu'en outre, il n'apparaît pas opportun de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de l'instance pénale en cours devant le tribunal de grande instance de Marseille ; que la demande de sursis à statuer doit être rejetée ;

Sur la compétence

Attendu que selon l'article L 213-6 du Code de l'organisation judiciaire, 'le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestation relatives à leur mise en oeuvre'... ;

Qu'ainsi, le Juge de l'exécution était bien compétent pour connaître de la contestation relative au caractère exécutoire de l'acte de prêt notarié fondant les saisies attributions litigieuses ;

Sur l'exception de connexité soulevée par Maître [P] et la SCP [P]

Attendu que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a rejeté l'exception de connexité ;

Sur les irrégularités du titre exécutoire

Attendu que les époux [K] ont, par acte notarié, reçu le 03 juin 2003 par Maître [P], donné procuration a tous clercs de l'étude de ce dernier pour les représenter lors de l'acquisition du bien immobilier sis à [Adresse 13], et lors de la signature du prêt ;

Attendu que l'article 8 du décret du 26 novembre 1971, relatif aux actes établis par les notaires et applicable en l'espèce avant sa modification par décret du 10 avril 2005, dispose que 'les procurations sont annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte. Dans ce cas il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes' ;

Attendu que l'acte de prêt notarié du 03 novembre 2003 porte la mention suivante, en page 2 : 'l'emprunteur : A ce non présent mais représenté par Madame [I] [A], Clerc de notaire, domiciliée professionnellement à [Adresse 2] - en vertu des pouvoirs qu'il lui a confié aux termes d'une procuration reçue par Maître [P] [T], notaire à [Localité 7], le 03 juin 2003" -

Attendu qu'il n'est pas indiqué que la procuration est annexée à l'acte ni qu'elle est déposée au rang des minutes des notaires ;

Qu'à cet égard, il sera relevé que les dispositions du 26 novembre 1971 n'opèrent pas de distinction de ce chef entre les actes déposés 'au rang des minutes' et les copies exécutoires ;

Attendu que cette irrégularité essentielle porte atteinte à la force exécutoire de l'acte qui sert de fondement aux poursuites et qui ne vaut seulement que comme écriture privée en vertu de l'article 1318 du Code civil et non pas comme un titre exécutoire au sens de l'article 3-4° de la loi du 09 juillet 1991 ;

Attendu que les saisies attributions diligentées par la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] sont donc irrégulières et qu'il convient d'en donner mainlevée, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens des parties, qui sont superfétatoires ;

Attendu que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de mainlevée des saisies fondée sur l'absence de force exécutoire du titre et sur le caractère abusif des saisies et en ce qu'il a condamné les époux [K] aux dépens et sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

Attendu qu'il n'y a pas lieu, en équité, à faire application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que partie perdante, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a ordonné la jonction des procédures et rejeté les demandes de sursis à statuer et de dessaisissement,

Statuant à nouveau,

Dit que l'acte de prêt du 03 novembre 2003 ne constitue pas un titre exécutoire régulier,

Déclare nulles et de nul effet les saisies attributions effectuées :

- le 1er septembre 2009 entre les mains de la société Groupe SUITES RESIDENCES,

- le 10 décembre 2009 entre les mains de la société SUITE INN,

- le 22 décembre 2009 entre les mains de la société LES RESIDENCES DU SOLEIL,

Ordonne leur mainlevée aux frais de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11],

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 11] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 15e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/20243
Date de la décision : 09/12/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 5A, arrêt n°10/20243 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-12-09;10.20243 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award