La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2011 | FRANCE | N°09/12063

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 18 novembre 2011, 09/12063


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 18 NOVEMBRE 2011



N° 2011/727













Rôle N° 09/12063





SAS AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE





C/





[P] [P]

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Gisèle PORTOLANO



Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE






Copie certifiée conforme délivrée le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 05 Juin 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/2331.







APPELANTE



SAS AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE, dont le siège social est situé au [Ad...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 18 NOVEMBRE 2011

N° 2011/727

Rôle N° 09/12063

SAS AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE

C/

[P] [P]

Grosse délivrée

le :

à :

Me Gisèle PORTOLANO

Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 05 Juin 2009, enregistré au répertoire général sous le n° 08/2331.

APPELANTE

SAS AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE, dont le siège social est situé au [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège et en son établissement secondaire, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Gisèle PORTOLANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Bérengère BERNART, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur [P] [P],

demeurant [Adresse 3]

comparant en personne,

assisté de Me Odile LENZIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Septembre 2011 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Michel VANNIER, Président Rapporteur

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Madame Laure ROCHE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Fabienne MICHEL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2011..

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2011.

Signé par Monsieur Michel VANNIER, Président et Madame Fabienne MICHEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Avenance Enseignement et Santé (ci-après Avenance), entreprise de restauration occupant plus de 11 salariés, assujettie à la convention collective étendue du personnel des entreprises de restauration de collectivités, a signé avec monsieur [P], le même jour 18 septembre 2000, deux contrats à durée indéterminée, l'un en qualité de responsable de la restauration, statut agent de maîtrise et classification IV A, et l'autre en qualité de directeur de restaurant, statut cadre, classification VA ; c'est cette dernière fonction qu'il occupait dans les derniers temps de la relation contractuelle.

Monsieur [P] présentait sa démission par lettre recommandée en date du 18 avril 2006 ainsi rédigée :

'Je vous fais part, par la présente, de ma décision de démissionner du poste de Directeur de Restaurant que j'occupe actuellement au sein de la société Avenance, depuis le 23 septembre 2000.

Ma décision est motivée par vos agissements répétés à mon égard, et dont je vous ai à plusieurs reprises fait part par courrier en recommandé avec accusé de réception, ainsi que par la non rémunération de mes heures supplémentaires. Ces pratiques ont dégradé progressivement mes conditions de travail et m'ont contraint à cette décision mûrement réfléchie.

Cette démission deviendra effective, après l'exécution de mon préavis de 3 mois auquel je suis tenu conformément aux termes de mon contrat de travail. Ce dernier débutera, à compter de la date de la première présentation de cette lettre recommandée.

Aussi, je vous saurais gré de bien vouloir préparer pour cette date effective le solde de mon compte ainsi que mon certificat de travail.'

Courant 2006, le salarié saisissait le conseil de prud'hommes de Marseille qui, par jugement en date du 5 juin 2009, jugeait que la rupture devait s'analyser en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamnait Avenance à payer à monsieur [P], sur la base d'un salaire brut moyen mensuel de 2.581,75 euros :

- 1.441,12 euros d'indemnité de licenciement,

- 7.743,24 euros au titre du préavis et 774,32 euros de congés payés afférents,

- 20.000,00 euros de dommages-intérêts,

- 800,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Avenance, qui a régulièrement interjeté appel de cette décision par lettre recommandée postée le 25 août 2009, demande à la cour de réformer le jugement déféré, de constater que la lettre de rupture est une démission claire et non équivoque, de rejeter toutes les demandes de monsieur [P] et de le condamner à lui payer 2.500,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [P], qui a formé appel incident, conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a requalifié la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse mais à sa réformation quant au quantum des sommes alloués et il sollicite que l'employeur soit condamné à lui payer, avec intérêt de droit à compter du jour de l'introduction de la demande en justice et bénéfice de l'anatocisme :

- 50.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réele et sérieuse.

- 7.743,23 euros au titre des indemnités compensatrices de préavis et 774,32 euros au titre des congés payés afférents,

- 1.441,12 euros au titre des indemnités conventionnelles de licenciement,

- 38 994,00 euros au titre des heures supplémentaires et repos compensateurs sur heures supplémentaires depuis janvier 2004 et 3.899,40 euros de congés payés afférents,

- 3.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non paiement de ses heures supplémentaires,

- 3.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 1.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer à la décision déférée et aux écritures déposées oralement reprises à l'audience du 29 septembre 2011.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur les heures supplémentaires :

La preuve des heures de travail n'incombant spécialement à aucune des parties, il appartient au salarié qui réclame le paiement d'heures supplémentaires de fournir des éléments de nature à étayer sa demande et à l'employeur de verser les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés.

En l'espèce, monsieur [P] - qui devait aux termes d'un avenant du 13 novembre 2000 établir sous sa responsabilité un décompte mensuel des heures de travail réellement effectuées - produit à l'appui de sa réclamation ses plannings de travail hebdomadaire transmis chaque semaine à son directeur de secteur, ses feuilles d'émargement pour les mois de septembre 2005 à avril 2006 inclus, de multiples courriels démontrant ses nombreuses heures de travail tardives y compris les fins de semaine, les attestations des salariés [M], [N], [O] et [F] relatant sa surcharge de travail ainsi qu'un décompte détaillé des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2004, 2005 et 2006.

En réponse, l'employeur ne verse aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés puisqu'il se contente d'affirmer qu'en sa qualité de cadre, monsieur [P] n'a pas respecté la 'procédure particulière qui nécessite [...] un accord de la Direction' mais il ne détaille pas cette procédure particulière dont il ne justifie d'ailleurs pas l'existence et il ne conteste pas non plus avoir bien reçu les décomptes mensuels de travail remplis par monsieur [P] et faisant ressortir l'accomplissement d'heures supplémentaires.

Les fonctions de monsieur [P] nécessitant l'accomplissement d'heures supplémentaires, le silence de sa direction qui ne pouvait ignorer leur réalisation et son absence de contestation de la méthode de calcul retenue par le salarié, sont autant d'éléments qui conduisent à l'infirmation de la décision déférée de ce chef ; il sera donc alloué à monsieur [P] la somme réclamée de 38.994,00 euros au titre des heures supplémentaires, des heures de nuit et des repos compensateurs, outre celle de 3.899,40 euros de congés payés afférents ainsi que celle de 500,00 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice nécessairement subi du fait du non paiement de ces sommes.

- sur la rupture du contrat de travail :

Lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient.

En l'espèce, l'absence de paiement pendant trois années des heures supplémentaires accomplies par monsieur [P] et l'importance des sommes allouées de ce chef, ainsi qu'au titre des heures de nuit et des repos compensateurs sont des faits d'une telle gravité qu'ils justifient à eux-seuls la requalification de la démission en une prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur sans qu'il soit besoin d'analyser les autres griefs développés par le salarié, au demeurant justement analysés et caractérisés par les premiers juges.

La rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 20.000,00 euros allouée par le jugement déféré à monsieur [P] à titre de dommages-intérêts sera confirmée, cette somme venant réparer intégralement son préjudice matériel et moral, l'intéressé - qui ne justifie pas de ce qu'a été son devenir professionnel après la rupture - ne démontrant pas avoir subi un préjudice d'un montant supérieur.

- sur les autres demandes :

L'employeur soutient sans être contredit par monsieur [P] - dont les conclusions sont muettes sur ce point - avoir intégralement rempli le salarié de ses droits en ce qui concerne l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents ; de ce chef, la décision déférée sera dès lors infirmée.

Les sommes qui sont dues en exécution du contrat de travail portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, convocation qui vaut sommation de payer, soit en l'espèce à partir du 10 juillet 2006

Les sommes dues à titre indemnitaire portent intérêts à compter de la décision qui les ordonne et il n'est pas justifié en l'espèce de faire remonter le point de départ des intérêts à la date de la demande en justice.

Les sommes allouées à monsieur [P] eront capitalisées conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a jugé que la démission de monsieur [P] devait s'analyser en une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a alloué au salarié de ce chef la somme de 20.000,00 euros de dommages-intérêts,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne la société Avenance Enseignement et Santé à payer à monsieur [P] :

- 38.994,00 euros au titre des heures supplémentaires, des heures de nuit et des repos compensateurs et 3.899,40 euros de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2006 et bénéfice de l'anatocisme,

- 500,00 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société Avenance Enseignement et Santé à payer à monsieur [P] 1.500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus et la condamne aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 09/12063
Date de la décision : 18/11/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°09/12063 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-18;09.12063 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award