COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 10 NOVEMBRE 2011
D.D-P
N° 2011/669
Rôle N° 10/05507
[I] [J] épouse [M]
C/
[T] [B] veuve [J]
[S] [J]
[C] [J] divorcée [O]
[A] [J]
[E] [J]
[K] [J] épouse [D]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL
SCP COHEN GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 22 Février 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/07012.
APPELANTE
Madame [I] [J] épouse [M]
née le [Date naissance 7] 1923 à [Localité 22] (51),
demeurant [Adresse 9]
représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, assistée de Me Paul GUETTA, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Madame [T] [B] veuve [J],
née le [Date naissance 1] 1934 à [Localité 20], demeurant [Adresse 15] prise en sa qualité d'héritière de son époux Monsieur [X] [J] décédé le [Date décès 4]1991
Monsieur [S] [J],
né le [Date naissance 14] 1956 à [Localité 20], demeurant [Adresse 17], pris en sa qualité d'héritier de son père Monsieur [X] [J], décédé le [Date décès 4]1991
représentés par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour,
assistés de Me Evelyne RAYBAUD, avocat au barreau de NICE
Madame [C] [J] divorcée [O],
demeurant [Adresse 10]
prise en sa qualité d'héritière de son père Monsieur [Z] [J] décédé le [Date décès 13] 1988 et de sa mère Madame [F] [L] décédée le [Date décès 16] 2009
Non comparante
Monsieur [A] [J],
demeurant [Adresse 8]
pris en sa qualité d'héritier de son père Monsieur [Z] [J] décédé le [Date décès 13] 1988 et de sa mère Madame [F] [L] décédée le [Date décès 16] 2009
Non comparant
Madame [E] [J],
demeurant [Adresse 19]
prise en sa qualité d'héritière de son père Monsieur [Z] [J] décédé le [Date décès 13] 1988 et de sa mère Madame [F] [L] décédée le [Date décès 16] 2009
Non comparante
Madame [K] [J] épouse [D],
demeurant [Adresse 18]
prise en sa qualité d'héritière de son père Monsieur [Z] [J] décédé le [Date décès 13] 1988 et de sa mère Madame [F] [L] décédée le [Date décès 16] 2009
Non comparante
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Octobre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2011.
ARRÊT
Par défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2011,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M.[W] [J] et Mme [U] [P] se sont mariés en Italie le [Date mariage 12] 1925, sous le régime légal italien conforme au régime français de la séparation de biens.
Ils se sont installés en France où ils ont eu trois enfants : [I], [Z] et [X].
Ils ont acquis trois appartements en France, indivisément entre eux pour moitié chacun. [I] [J] épouse [M] occupe l'un de ces appartements, à [Localité 21], depuis 1973.
Par acte en date du 28 avril 1971, les époux [J] se sont fait mutuellement donation de leurs biens avec option soit d' un quart en pleine propriété et le reste en usufruit, ou bien de la totalité en usufruit.
M. [W] [J] est décédé le [Date décès 11] 1975, laissant pour lui succéder ses trois enfants, et sa veuve, qui a opté pour l'usufruit de la totalité des biens.
Mme [U] [P] veuve [J] est décédée à son tour le [Date décès 6] 1979 laissant pour lui succéder ses trois enfants, et en l'état d'un testament olographe du 15 novembre 1977 léguant à [I] [J] la quotité disponible de sa succession, sur laquelle doit s'imputer d'abord l'appartement qu'elle occupe.
Sur assignation en date du 7 décembre 1979, par jugement en date du 13 avril 1982 le testament a été annulé et une expertise a été ordonnée .
La cour d'appel céans, par arrêt définitif du 12 mars 1984, a infirmé le jugement en ce qu'il a déclaré nul le testament et l'a confirmé pour le surplus.
M. [Z] [J] est décédé le [Date décès 13] 1988, laissant pour lui succéder sa veuve, [F] [L], et ses quatre enfants : [A], [K], [E] et [C] [J].
M. [X] [J] est décédé le [Date décès 3] 1991, laissant pour lui succéder sa veuve, [T] [B], et ses deux fils : [S] et [N] [J].
M. [N] [J] est décédé le [Date décès 2] 1995, laissant pour lui succéder sa mère et son frère.
L'hoirie [J] critiquant ce rapport a sollicité une nouvelle expertise pour procéder à une évaluation des biens doit se faire au jour du partage, et la vente des biens en l'état du désaccord existant entre les héritiers.
Le tribunal de grande instance de Nice, par jugement du 27 juin 1995, a rejeté la demande de nouvelle expertise et de vente des biens, dit que les époux [M] n'étaient redevables d'aucune indemnité d'occupation, et désigné la SCP de notaires Carbon-Massiera pour procéder aux opérations de comptes liquidation du partage des de succession.
Par arrêt définitif , suite à rejet du pourvoi, en date du 26 février 1997, la cour d'appel de ce siège a:
- constaté que la succession de M. [W] [J] est composée de la moitié de la valeur de chacun des trois immeubles acquis au cours du mariage, et que les droits des trois enfants sur cette succession sont égaux,
' dit que sur cette évaluation actuelle de 595'000 F, la part respective de chacune des branches 198'333 F,
' constaté que l'actif de la succession de Mme [U] [J] est composé de
* la moitié de la valeur de chacun des trois appartements,
*valeur des meubles s'élevant à 11'9 50 F,
*du montant du livret de caisse d'épargne s'élevant à 16'782,78 F,
*du solde créditeur de comptes de dépôts ouverts dans les livres du Crédit Lyonnais s'élevant à 83 2,78 F ,
* du solde créditeur du compte de dépôts ouvert dans les livres du Crédit agricole s'élevant à 10'771, 08 francs,
*de la somme de 20'692 F que Mme [M] doit rapporter au partage,
soit au total 656'028,64 F ,
' constaté que Mme [J] a légué sa fille la quotité disponible de la succession, soit le quart de l'actif tel que précisé à l' article précédent représentant la somme de 164 007,16 F,
' constaté que Mme [J] n'a pu léguer à fille un appartement dont elle n'était propriétaire que pour moitié,
' dit que conformément volonté de la défunte, le legs de la quotité disponible doit en priorité s'imputer sur l'appartement occupé par Mme [M] et que celui-ci sera donc placé en nature dans son lot,
' dit que les droits des deux autres branches dans la succession de Mme [J] sur cette évaluation actuelle s'élèvent à 164 007,16 F,
'ordonné au titre du partage en nature que chacun des deux appartements restants sera placé dans l'un et l'autre des deux lots à composer selon certaines modalités,
'dit qu'il sera dû à l'indivision par Mme [I] [J] épouse [M] une indemnité pour l'occupation de l'appartement du rez de chaussée du [Adresse 9] sur la base de 1200 frs, à réévaluer chaque année en fonction de l'indice INSEE de la construction, à compter du mois de juillet 1979 jusqu'à la date du partage effectif,
' et renvoyé les parties devant le notaire liquidateur.
Un rapport d'expertise judiciaire sur l'appartement occupé par Mme [I] [J] vu a été déposé le 14 juin 2006 par M. [V] [Y], estimant sa valeur à 126 000 €.
Le 18 décembre 2008, Mmes [B], [L], [D], [C] et [E] [J], et MM. [S] et [A] [J] (les héritiers de MM. [Z] et [X] [J]) ont fait assigner Mme [I] [J] épouse [M] aux fins de trancher les difficultés de partage suite à procés verbal de difficulté du 28 septembre 2007.
Mme [F] [L] veuve [J] est décédée le [Date décès 5] 2009.
Par jugement contradictoire en date du 22 février 2010, le tribunal de grande instance de Nice a :
- rejeté les contestations formées par [I] [J] épouse [M] à l'encontre du projet de partage dressé par M°[R] [H], notaire,
- fait entièrement sien ce projet de partage,
- renvoyé, en conséquence, pour signature les parties devant ce notaire, lequel est re-désigné pour procéder aux opérations de comptes-liquidation-partage des successions [J] en cause,
- dit que le notaire procédera à ses opérations sous le contrôle du magistrat en charge de la présidence de la 3ème chambre civile du tribunal de grande Instance de Nice,
- dit qu'il appartiendra au notaire d'actualiser ses comptes à la date du partage et de prendre en considération le décès de [F] [L] veuve [J] survenu le [Date décès 16] 2009,
- condamné [I] [J] épouse [M] à régler aux requérants 3000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté le surplus des demandes,
- et ordonné la distraction des dépens en frais privilégiés de partage.
Par déclaration au greffe en date du 19 mars 2010, Mme [I] [J] épouse [M] a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions notifiées le 21 juillet 2010 elle demande à la cour de :
- de réformer le jugement entrepris,
vu les articles 815-10, 2224 et 1153-1 du Code civil,
- de faire application de la prescription quinquennale quant à l'indemnité d'occupation qui serait due,
-de dire qu'il ne peut être calculé d'intérêts de retard, en l'absence de condamnation à une indemnité d'occupation,
- de réduire l'indemnité d'occupation de 50 %, étant propriétaire du bien à cette proportion, sous réserve de ses autres droits résultant de la reconstitution de la pleine propriété,
- de dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- et de condamner les intimés aux entiers dépens, ceux d'appel distraits.
Par conclusions notifiées le 14 avril 2011, Mme [T] [B] veuve [J] et M. [S] [J] demandent à la cour de confirmer le jugement querellé, et de condamner Mme [M] à leur payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel distraits.
Mmes [C] [J] (assignée à personne présente à son domicile), [E] (assignée aussi à personne présente à son domicile), [K] [J] épouse [D] (citée à personne le 11 août 2010), et M. [A] [J] (assigné par exploit déposé à l'étude de l'huissier instrumentaire le 16 août 2010) n'ont pas constitué avoué.
L'ordonnance de clôture est datée du 28 septembre 2011.
La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.
MOTIFS,
Attendu que Mme [I] [J] soutient en premier lieu que le dispositif de l'arrêt du 26 février 1997 elle n'a fait l'objet d'aucune condamnation de ce chef et qu'ainsi le notaire ne pouvait la considérer comme débitrice en indemnités d'occupation et intérêts moratoires à la somme de 136'943,22 € (comptes arrêtés au 31 décembre 2006) ;
Mais attendu que par l' arrêt précité la cour a arrêté le principe et le quantum de l' indemnité d'occupation due par Mme [I] [J] à l'indivision remontant à plus de 5 ans ; qu'en effet en la matière il ne peut jamais être prononcé de 'condamnation', les décisions rendues avant le partage ayant pour objet de fixer le droit de chacun des indivisaires dans la ou les successions dont s'agit, et de permettre ainsi au notaire commis de procéder aux opérations de comptes-liquidation- partage ;
Attendu que l'arrêt en date du 26 février 1997 a donc autorité de chose jugée sur les sommes dues par Mme [I] [J] au titre de l'indemnité d'occupation pour la période allant du mois de juillet 1979 jusqu'au jour dudit arrêt ;
Attendu qu'en revanche pour la période postérieure à cette date, la prescription quinquennale s'applique, en raison de la nature de la créance, au recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de la nouvelle demande en paiement présentée par requête du 18 décembre 2008 ; que l'hoirie [J] ne peut donc prétendre au paiement de l'arriéré de l'indemnité d'occupation pour la période qui a couru du 27 février 1997 jusqu'au 17 décembre 2003 inclus;
Attendu ensuite que Mme [I] [J] soutient que sa dette d'indemnité d'occupation au profit de l'indivision doit être minorée du montant de sa part dans l'indivision ; et que si tel n'était pas le cas on lui ferait supporter une indemnité d'occupation relativement à un bien dont était propriétaire désignée de manière irréfutable ;
Mais attendu que par l'arrêt infirmatif précité, la cour en arrêtant le principe d'une indemnité d'occupation, lui a déjà répondu que 'Mme [U] [J] ne pouvait disposer par testament que de ce dont elle était propriétaire, soit de la moitié de l'appartement litigieux lui appartenant, la nue-propriété de l'autre moitié appartenant à ses enfants, et qu'elle n'a donc pu léguer cet appartement en totalité à sa fille , et qu'il en résulte que quelle que soit l'étendue de ses droits, Mme [I] [J] épouse [M] ne peut prétendre être propriétaire depuis le décès de sa mère de l'appartement qu'elle occupe' ; et que d'autre part, la cour en fixant souverainement, comme l'a relevé la Cour de cassation en son arrêt de rejet du pourvoi formé, le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 1200 F indexés a déjà eu égard au fait que Mme [I] [J] avait légué à sa fille la quotité disponible de ses biens, de sorte que ce montant ne saurait être minoré de 50 %, ce qui porterait encore atteinte à l'autorité de la chose jugée ;
Attendu que cet arrêt a fait courir les intérêts au taux légal sur les montants qu'elle a fixés ;
Attendu en définitive qu'il y a lieu de réformer partiellement le jugement entrepris ;
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt de défaut par suite de la défaillance de Mme [C] [J], Mme [E] [J] et M. [A] [J], prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté toutes les contestations formées par Mme [I] [J] épouse [M] à l'encontre du projet de partage dressé par Me [R] [G], notaire,
et fait entièrement sien ce projet de partage ;
Statuant à nouveau,
Dit que ledit projet de partage doit tenir compte de ce que la prescription quinquennale s'applique à l' indemnité d'occupation due par Mme [I] [J] épouse [M] à l' indivision [J] au titre de l'appartement qu'elle occupe pour la période allant du 27 février 1997 jusqu'au 17 décembre 2003 inclus et qu'aucune somme ne peut lui être réclamée, ou venir en déduction de celles qui lui sont dues, pour cette période ;
Confirme pour le surplus sur le jugement déféré,
Y ajoutant
Vu l' article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu de faire application de ce texte,
Déclare les dépens d'appel frais privilégiés de partage et ordonne leur distraction au profit des avoués de la cause qui en auront fait l' avance sans provision, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT