COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 03 NOVEMBRE 2011
HF
N° 2011/657
Rôle N° 10/16100
[T] [G] divorcée [H]
C/
[U] [H]
Grosse délivrée
le :
à :
SCP COHEN GUEDJ
Me Jean-Marie JAUFFRES
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 16 Juillet 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 00/10276.
APPELANTE
Madame [T] [G] divorcée [H]
née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 4] (ALGERIE) ,
demeurant [Adresse 9]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/000643 du 20/01/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE)
représentée par Me Jean-Marie JAUFFRES, avoué à la Cour,
assistée de Me Alain BOYER, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [U] [H]
né le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 7] (81),
demeurant [Adresse 6]
représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, assisté de Me Jean-Louis BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 05 Octobre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2011,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE, ET PRETENTIONS
Monsieur [H] et madame [G], mariés en [Date mariage 5] 1971 sous le régime légal de communauté, sont divorcés, sur une assignation du 7 octobre 1992, suivant jugement du 22 novembre 1994, confirmé par arrêt de cette cour du 23 septembre 1999.
Des difficultés ont opposé les parties sur la liquidation de leur communauté.
Deux expertises ont été réalisées, en particulier pour l'évaluation d'un immeuble commun et d'une indemnité d'occupation.
Vu l'appel le 31 août 2010 par madame [G] du jugement prononcé le 16 juillet 2010 par le tribunal de grande instance de Marseille ayant notamment :
rappelé que la date de dissolution de la communauté, en application de l'article 262-1 du Code civil dans sa rédaction alors applicable, correspondait à la date de l'assignation en divorce du 7 octobre 1992 ;
fixé la valeur vénale de l'immeuble commun, à la date la plus rapprochée du partage, à la somme de 183.000 euros ;
fixé la valeur vénale des meubles meublants à la date la plus rapprochée du partage à la somme de 2.058,06 euros ;
dit que madame [G] est redevable envers l'indivision post-communautaire d'une indemnité d'occupation mensuelle de 762,25 euros indexée conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, depuis le premier janvier 2000 ;
dit que monsieur [H] est redevable envers son épouse au titre des charges de copropriété incombant au propriétaire de l'immeuble et sous réserve des justificatifs afférents aux années 2001, 2006 et 2009 que madame [G] devra produire devant le notaire, de la somme de 6.854,41 euros ;
dit que monsieur [H] est redevable à l'égard de madame [G] des sommes de 2.199,96 euros au titre de l'assurance et de 42.257,80 euros au titre du prêt immobilier ;
dit que madame [G] est redevable à l'égard de monsieur [H] de la somme de 629,01 euros au titre des taxes foncières et ordures ménagères ;
débouté madame [G] de sa demande tendant à obtenir la moitié des avoirs qui auraient existé à la date de la dissolution de la communauté sur le compte ouvert à la Banque Postale au nom de monsieur [H] n° 076640H ;
débouté monsieur [H] de sa demande de récompense de la communauté à son égard ;
débouté madame [G] de ses demandes de récompense de la communauté à son égard ;
débouté madame [G] de sa demande d'indemnité au titre de travaux de réparation des équipements de l'immeuble commun, et de ses demandes au titre de la prestation compensatoire et des dommages et intérêts dus par monsieur [H] ;
attribué préférentiellement à madame [G] l'immeuble commun ;
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens par elle exposés et que les frais d'expertise seront partagés par moitié ;
Vu les conclusions notifiées ou signifiées le 31 mai 2011 par madame [G], et le 27 juillet 2011 par monsieur [H] ;
Vu la clôture prononcée le 21 septembre 2011 ;
MOTIFS
1/ Au vu du second rapport d'expertise, déposé en avril 2007, des offres de vente publiées dans les premiers mois de cette année pour des appartements d'une superficie équivalente et situés dans le même immeuble (la plupart d'entre elles comprenant les frais d'agence), de l'absence de garage mais de la présence d'une terrasse de 16 m², entièrement vitrée, permettant de potentialiser la vue panoramique sur [Localité 8] et sa rade, et de l'état ancien et vétuste des équipements, la valeur de l'immeuble est fixée à la somme de 200.000 euros.
2/ En l'absence de la moindre indication sur la nature et le nombre des meubles meublants, et aucune valeur « forfaitaire » ne pouvant être fixée, monsieur [H] est débouté de sa demande en ce qui concerne ce poste.
3/ Les parties n'apportent pas de contestation convaincante de la valeur locative proposée par l'expert (762,25 euros par mois) à compter du mois de janvier 2002, eu égard notamment à l'ancienneté de l'occupation à titre exclusif de madame [G] (depuis 1992), et du fait, souligné par l'expert, que « les valeurs locatives n'ont pas suivi la hausse du marché immobilier et sont restées assez stables ».
Comme l'a exactement retenu le tribunal, cette indemnité doit être indexée comme proposé par l'expert, à compter du premier janvier 2000.
4/ Monsieur [H] est fondé à contester la prétention de madame [G] à se voir dire créancière au titre de son paiement de la quote-part de charges de copropriété non afférentes à son occupation, qu'elle n'évalue que de manière forfaitaire, à concurrence de 35 % du montant de l'ensemble des charges, sans justifier que les sommes qu'elle réclame correspondent de façon effective aux charges de copropriété imputables aux seuls copropriétaires.
5/ Monsieur [H] n'apporte aucune justification des paiements qu'il invoque concernant les taxes foncières de sorte que sa critique à l'encontre de l'évaluation de sa créance à ce titre par l'expert, retenue par le tribunal, n'est pas admise.
6/ Madame [G] ne peut prétendre avoir une créance sur l'indivision post-communautaire en raison de la fraction correspondant à sa quote-part des mensualités du prêt immobilier à partir de sa mise en invalidité et de leur prise en charge par son assurance, et elle ne justifie par ailleurs du paiement par elle de la quote-part de monsieur [H] qu'à compter du mois de juillet 1992 (le justificatif d'un versement en espèces pour le mois d'avril 1992 n'étant pas suffisamment probant de ce qu'elle en ait été l'auteur), comme l'a retenu de façon exacte le tribunal.
En revanche le tribunal a commis une erreur en disant monsieur [H] débiteur envers madame [G] de la totalité du remboursement du solde du prêt et non de la moitié, de sorte qu'il devra être dit débiteur de la somme de 2.199,96 euros au titre de l'assurance, et de la somme de 21.128,90 euros (et non 42.257,80 euros) au titre du prêt.
7/ Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, il a été justifié par la Banque Postale d'un solde créditeur de 3.122,83 euros sur le compte n°[XXXXXXXXXX02] à la date du 7 octobre 1992 (point de départ de l'indivision post-communautaire), qui constitue donc un actif de l'indivision.
Ce compte étant personnel à monsieur [H], il est débiteur de cette somme envers l'indivision.
8/ L'attestation de la mère de monsieur [H], suivant laquelle elle lui aurait remis la somme de 50.000 francs en espèces « afin qu'il les utilise en vue de l'achat, des aménagements et des dépenses consécutives à cette acquisition » n'est pas à elle seule suffisante à prouver, en dehors de toute autre pièce de nature bancaire ou comptable (en provenance notamment du notaire), qu'il a employé cette somme pour l'acquisition de l'immeuble commun.
Il est donc débouté de sa demande de récompense à ce sujet.
De la même façon, madame [G] ne justifie pas que les fonds qu'elle a versés entre les mains du notaire pour l'acquisition de l'immeuble commun aient été des fonds propres (qu'elle aurait détenus dès avant son mariage), étant relevé à ce sujet que la justification par le crédit agricole de ce qu'elle détenait avant son mariage un plan d'épargne logement est sans effet utile dès lors que les sommes remises au notaire ne sont provenues que d'un livret de caisse d'épargne et d'un compte (et non pas d'un plan) d'épargne logement.
Elle est donc également déboutée de sa demande de récompense à ce titre.
9/ Madame [G] justifie de son apport personnel à la communauté d'une somme de 105.000 francs (16.007,14 euros) qu'elle a reçue de ses parents à titre de don, par la production d'une attestation de ces derniers (dont les signatures ne sont pas en elles-mêmes contestées par monsieur [H]), et de diverses pièces bancaires s'y rapportant.
Elle est donc créancière de cette somme sur l'indivision (et non sur monsieur [H] comme elle le soutient à tort).
10/ Madame [G] justifie (par des factures à son nom) de dépenses de conservation ou d'amélioration de l'appartement indivis, à l'exception de travaux de peinture qu'elle doit supporter seule en contrepartie de sa jouissance, pour une somme de 9.426,99 euros (10.178,56 ' 751,57).
Elle est donc créancière de cette somme envers l'indivision.
11/ Contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, les articles 1478 et 1479 du Code civil ne privent pas le juge du pouvoir de fixer des créances personnelles d'un époux sur l'autre, en vue de leur imputation dans le cadre de la liquidation de leur régime matrimonial.
Monsieur [H] n'en ayant pas contesté le quantum, il sera fait droit à la demande de madame [G] de la voir dire créancière de celui-ci, en vertu de condamnations antérieures, d'une somme de 5.173,28 euros au titre d'une prestation compensatoire, et d'une somme de 2.385,08 euros au titre de dommages et intérêts.
12/ Ce point ne faisant pas l'objet de contestation, l'appartement indivis est attribué préférentiellement à madame [G], qui n'est toutefois pas fondée à demander, dès à présent, et avant la réalisation du partage définitif, la publication de sa qualité de pleine propriétaire, ce qui correspond à une demande de fixation au jour du présent arrêt de sa jouissance divise, alors qu'il reste des comptes à faire entre les parties, ce dont il devrait résulter une dette de sa part envers l'indivision ou monsieur [H].
13/ Le caractère abusif de la procédure de madame [G] n'est pas admis, et monsieur [H] est débouté de sa demande de dommages et intérêts.
14/ Chaque partie conserve la charge de ses dépens et frais irrépétibles de première instance et d'appel, à l'exception des frais d'expertise et de consultation judiciaire qui seront partagés par moitié entre elle.
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Il suit de l'ensemble de ce qui précède que le jugement doit être infirmé sauf en ce qu'il a renvoyé les parties devant le notaire désigné, rappelé que la date de la dissolution de la communauté correspond à la date de l'assignation en divorce du 7 octobre 1992, dit que madame [G] est redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 762,25 euros indexée conformément aux préconisations de l'expert à compter du premier janvier 2000, dit que monsieur [H] est redevable envers madame [G] d'une somme de 2.199,96 euros au titre de l'assurance, dit que madame [G] est redevable envers monsieur [H] d'une somme de 629,01 euros au titre des taxes foncières et ordures ménagères, débouté monsieur [H] de sa demande de récompense sur la communauté, débouté madame [G] de sa demande de récompense sur la communauté au titre de fonds propres employés pour l'acquisition de l'immeuble commun, attribué préférentiellement l'immeuble indivis à madame [G], débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires, dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens par elle exposés et que les frais d'expertise seront partagés par moitié, dit que les dépens seront distraits au profit des avocats constitués.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe
Infirme le jugement sauf en ce qu'il a renvoyé les parties devant le notaire désigné, rappelé que la date de la dissolution de la communauté correspond à la date de l'assignation en divorce du 7 octobre 1992, dit que madame [G] est redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 762,25 euros indexée conformément aux préconisations de l'expert à compter du premier janvier 2000, dit que monsieur [H] est redevable envers madame [G] d'une somme de 2.199,96 euros au titre de l'assurance, dit que madame [G] est redevable envers monsieur [H] d'une somme de 629,01 euros au titre des taxes foncières et ordures ménagères, débouté monsieur [H] de sa demande de récompense sur la communauté, débouté madame [G] de sa demande de récompense sur la communauté au titre de fonds propres employés pour l'acquisition de l'immeuble commun, attribué préférentiellement l'immeuble indivis à madame [G], débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires, dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens par elle exposés et que les frais d'expertise seront partagés par moitié, dit que les dépens seront distraits au profit des avocats constitués.
Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,
Fixe la valeur vénale de l'appartement indivis à la somme de 200.000 euros.
Déboute monsieur [H] de sa demande de fixation d'une valeur vénale de meubles meublants.
Déboute madame [G] d'une demande de fixation d'une créance envers monsieur [H] au titre des charges de copropriété.
Dit que monsieur [H] est redevable envers madame [G] d'une somme de 21.128,90 euros au titre d'un remboursement de prêt immobilier.
Dit que monsieur [H] est débiteur envers l'indivision d'une somme de 3.122,83 euros au titre d'un solde créditeur de compte n° [XXXXXXXXXX02] à la Banque Postale.
Dit que madame [G] est créancière de l'indivision d'une somme de 16.007,14 euros au titre d'un apport de fonds propres.
Dit que madame [G] est créancière de l'indivision d'une somme de 9.426,99 euros au titre de travaux dans l'appartement indivis.
Dit que madame [G] est créancière de monsieur [H] d'une somme de 5.173,28 euros au titre de son obligation au versement d'une prestation compensatoire, et d'une somme de 2.385,08 euros au titre de son obligation au paiement de dommages et intérêts.
Déboute monsieur [H] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Dit que les parties supportent pour moitié les frais de consultation judiciaire.
Dit que chacune des parties supportent la charge de ses dépens et frais irrépétibles d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT