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21/10/2011 | FRANCE | N°10/02464

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 21 octobre 2011, 10/02464


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 21 OCTOBRE 2011



N° 2011/431













Rôle N° 10/02464







S.C.I. DU PORTALET

[B] [N] épouse [U]





C/



MONSIEUR LE COMPTABLE DU SERVICE IMPÔTS DES PARTICULIERS DE [Adresse 6]





































Grosse délivrée

le :

à :la S.C

.P. COHEN-GUEDJ



Me JAUFFRES









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 19 janvier 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/1594.





APPELANTES



S.C.I. DU PORTALET, [Adresse 1]

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicil...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 21 OCTOBRE 2011

N° 2011/431

Rôle N° 10/02464

S.C.I. DU PORTALET

[B] [N] épouse [U]

C/

MONSIEUR LE COMPTABLE DU SERVICE IMPÔTS DES PARTICULIERS DE [Adresse 6]

Grosse délivrée

le :

à :la S.C.P. COHEN-GUEDJ

Me JAUFFRES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 19 janvier 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 08/1594.

APPELANTES

S.C.I. DU PORTALET, [Adresse 1]

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège,

représentée par la S.C.P. COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, plaidant par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON

Madame [B] [N] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 10/005495 du 28/04/2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX EN PROVENCE)

représentée par la S.C.P. COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, plaidant par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON

INTIME

Monsieur LE COMPTABLE DU SERVICE des IMPÔTS DES PARTICULIERS DE [Adresse 7]

venant aux droits du TRÉSORIER DE [Adresse 5],

représenté par Me Jean Marie JAUFFRES, avoué à la Cour, ayant la S.C.P. ROUILLOT avocats au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 20 septembre 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président, et Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président

Monsieur André FORTIN, Conseiller

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Magistrat Rédacteur : Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2011.

Signé par Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Faits et procédure :

Par acte notarié du 27 avril 2006, Madame [U] a vendu, moyennant le prix de 183.000 euros à la S.C.I. DU PORTALET, alors représentée par M. [U], (S.C.I. constituée par la belle-mère et la belle-soeur de Madame [U]) un appartement, une cave ainsi qu'un garage dans l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 1], situé à [Localité 4].

Faisant état de ce qu'il détenait alors une créance contre Monsieur et Madame [U] à la suite d'un contrôle de l'administration fiscale réalisé au titre des impôts sur les revenus 2000,2001 et 2002 pour un montant supérieur à 200.000 €, et de ce que la vente avait été passée en fraude de ses droits, Monsieur Le Trésorier de [Adresse 5] a donc assigné, par-devant le tribunal de grande instance de Nice, d'une part, la S.C.I. DU PORTALET et d'autre part, Madame [U], afin de voir prononcer la nullité de la vente immobilière.

Par jugement du 19 janvier 2010, le tribunal de grande instance de Nice a statué ainsi qu'il suit :

- déclare bien fondée l'action paulienne de Monsieur Le Trésorier de [Adresse 5],

- prononce la nullité de la vente passée le 27 avril 2006 au profit de la S.C.I. DU PORTALET par Madame [U],

- dit que le présent jugement sera publié au premier bureau de la conservation des hypothèques de [Localité 4],

- condamne Madame [U] et la S.C.I. DU PORTALET au paiement de la somme de 800 €

à Monsieur Le Trésorier de [Adresse 5] par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonne l'exécution provisoire de la décision,

- condamne Madame [U] et la S.C.I. DU PORTALET aux dépens.

Par déclaration du 8 février 2010, la S.C.I. DU PORTALET et Madame [U] ont relevé appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 26 août 2011, les appelants demandent à la Cour de :

- recevoir l'appel,

- réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau,

- débouter le Trésorier de [Localité 4] de ses demandes,

- le condamner au versement d'une somme de 2.392 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la S.C.P. Cohen Guedj, avoués.

Par conclusions déposées le 20 janvier 2011, Monsieur Le Comptable du service des impôts des particuliers de [Adresse 6], venant aux droits de Monsieur Le Trésorier de [Adresse 5] demande à la Cour de :

- révoquer l'ordonnance de clôture rendue le 17 janvier 2011,

- vu l'article 1167 du Code civil, les faits exposés et les pièces versées,

- débouter les appelants de leurs demandes,

- confirmer le jugement entrepris,

- déclarer inopposable au Trésorier de [Adresse 5] l'acte de vente du 27 avril 2006,

- ordonner la publication de l'arrêt au premier bureau de la conservation des hypothèques de [Localité 4],

- condamner solidairement la S.C.I. DU PORTALET et Madame [U] à payer au concluant la somme de 1.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Jauffres, avoué.

L'ordonnance de clôture a été prise le 5 septembre 2011.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'appel :

La recevabilité de l'appel n'est pas contestée ; rien au dossier ne conduit la Cour à le faire d'office. L'appel sera donc déclaré recevable.

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture :

Au jour des débats la procédure ayant été clôturée à la date du 5 septembre 2011, la demande de ce chef est désormais sans objet.

Sur le fond :

En droit, l'article 1167 du Code civil dispose : 'les créanciers peuvent aussi en leur nom personnel attaqué les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits'.

En l'espèce, il résulte des éléments et pièces versés à la procédure :

- que Monsieur et Madame [U] ont fait l'objet d'une 'proposition de rectification rectificative' datée du 28 avril 2006, quant à leur déclaration de revenus pour les années 2000, 2001, et 2002 en suite de vérifications diligentées en octobre 2005,

- que, certes, la vente du bien de Madame [U] s'est faite, le 27 avril 2006, avant la réception de l'envoi par l'administration fiscale de la proposition de rectification, (cette proposition étant datée du 28 avril 2006 et ayant été reçue le 9 mai 2006), mais que le contrôle fiscal de leurs revenus, qui avait donc donné lieu à des vérifications en octobre 2005, avait par ailleurs été mis en oeuvre bien avant, puisqu'il faisait suite à une notification concernant la SNC La Cravache d'Or en date du 10 décembre 2003, et que Madame [U], qui est associée et gérante de cette société, connaissait les griefs qui lui étaient faits ainsi que les risques de redressement encourus, la proposition de rectification du 28 avril 2006 mentionnant précisément qu''un débat oral contradictoire et dense avait eu lieu entre les représentants de la société assistés de leurs conseils d'une part et le service vérificateur',

- que la S.C.I. DU PORTALET, qui a acquis l'immeuble, a vu ses statuts constitués le 2 janvier 2006 ; qu'elle est domiciliée à la même adresse que Madame [U] ; qu'elle est composée uniquement de membres proches de la famille de Madame [U], à savoir, sa belle-mère et sa belle-soeur et qu'au jour de l'acte, elle était représentée par Monsieur [U], son époux, également débiteur fiscal au titre des impôts sur le revenu.

- que la vente a eu lieu moyennant le prix de 183.000 € et que sur ce prix, la banque HSBC avait un privilège de prêteur de deniers pour 89.168,89 €,

- qu'ensuite de cette vente, Madame [U] qui se trouvait déjà en difficultés, d'une part, pour s'acquitter des échéances du prêt contracté pour financer son acquisition(unique raison selon ses écritures de la transaction ) et d'autre part, qui affirme avoir eu également besoin de fonds pour satisfaire aux échéances de la Société Cerrutea's café et de la SNC La cravache d'or, d'ailleurs respectivement mises en redressement judiciaire le 15 mai 2006 et le 12 juin 2006 (cf page 12 de ses conclusions où elle expose que sur le prix de la vente, elle a du verser, au mois de juin 2006, une somme de 40.000 €, sur le compte de la première société pour régler ses créances et que le reste de la somme a été apporté à la deuxième société mais qu'elle ne dispose plus des documents comptables de celle-ci qui ont été appréhendés par le liquidateur) n'a donc pas pris l'initiative de régler la dette envers le trésor public, la conjonction de ces éléments démontrant incontestablement son insolvabilité au moins apparente au jour de l'acte.

Dans ces conditions, il sera considéré :

- que la vente à la S.C.I. DU PORTALET est intervenue alors que celle ci, qui a un caractère familial évident et dont il n'est d'ailleurs pas démontré qu'elle gère d'autres biens, ne pouvait ignorer la dette de Madame [U],

- que l'administration fiscale disposait, pour sa part, d'un principe de créance certain à raison des éléments dégagés par le contrôle fiscal, initié en décembre 2003 et rectifié au mois d'octobre 2005,

- que par ailleurs, la transaction litigieuse, en diminuant les garanties susceptibles d'être prises par le Trésor public et en remplaçant le bien immeuble par un autre plus facile à dissimuler, a eu pour effet de permettre au débiteur de faire échapper un bien aux poursuites de son créancier, ce que Madame [U] ne pouvait ignorer eu égard aux circonstances ci-dessus relatées de la vente et du contrôle fiscal, peu important à cet égard que le prix de la vente corresponde à sa valeur réelle.

Ainsi, la chronologie des faits et le caractère purement familial de la transaction démontrent non seulement la connaissance par le débiteur du préjudice ainsi causé au créancier, mais aussi la complicité du tiers, la circonstance que la vente ait, certes, permis de désintéresser la banque HSBC, qui bénéficiait de toutes façons du privilège de prêteur de deniers n'étant pas de nature à anéantir le caractère frauduleux de l'acte à l'égard du trésor public.

Les conditions de l'article 1167 du code civil sont ainsi suffisamment caractérisées par Monsieur le Comptable du service des impôts des particuliers de [Adresse 6], peu important qu'il n'ait pris aucune sûreté antérieurement à l'acte critiqué.

Les appelants seront, en conséquence, déboutés des fins de leur recours et le jugement déféré sera confirmé, sauf à dire que l'acte de vente ainsi passé avec la S.C.I. DU PORTALET est seulement inopposable à Monsieur Le Comptable de [Adresse 6].

La publication du présent arrêt à la conservation des hypothèques de [Localité 4], premier bureau, sera ordonnée.

En raison de leur succombance, les appelants supporteront, in solidum, les dépens de la procédure d'appel et seront condamnés, in solidum à verser, en équité à Monsieur Le comptable du service des impôts des particuliers de [Adresse 6] la somme supplémentaire de 1.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Reçoit l'appel,

Déboute les appelants des fins de leur recours et confirme le jugement critiqué en toutes ses dispositions, sauf à dire que la vente n'est pas nulle mais seulement inopposable à Monsieur Le comptable du service impôts des particuliers de [Adresse 6],

Y ajoutant :

Condamne, in solidum, Madame [U] et la S.C.I. DU PORTALET à payer à Monsieur Le comptable du service impôts des particuliers de [Adresse 6] la somme de 1.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne la publication du présent arrêt au premier bureau de la conservation des hypothèques de [Localité 4] en marge de l'acte du 16 mai 2006 volume 2006 P numéro 42 32,

Rejette les demandes plus amples des parties,

Condamne Madame [U] et la S.C.I. DU PORTALET, in solidum, aux dépens de la procédure d'appel, distraits au profit de Me Jauffres, avoué.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

S. AUDOUBERTJ-P. ASTIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/02464
Date de la décision : 21/10/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°10/02464 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-21;10.02464 ?
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