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22/09/2011 | FRANCE | N°10/01630

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 22 septembre 2011, 10/01630


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 22 SEPTEMBRE 2011

HF

N° 2011/521













Rôle N° 10/01630







[F] [C]





C/



SELU [B] [W]





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP ERMENEUX-CHAMPLY-

LEVAIQUE





SCP BOISSONNET- ROUSSEAU









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aisine de la cour suite à l'arrêt de Cour de Cassation en date du 17 Décembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° E09/10321 lequel a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt n° 546 rendu par la 1ère chambre A de la cour d'appel d'Aix en Provence à l'encontre du jugement en date du 04 octobre 2007 du trib...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 22 SEPTEMBRE 2011

HF

N° 2011/521

Rôle N° 10/01630

[F] [C]

C/

SELU [B] [W]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX-CHAMPLY-

LEVAIQUE

SCP BOISSONNET- ROUSSEAU

Sur saisine de la cour suite à l'arrêt de Cour de Cassation en date du 17 Décembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° E09/10321 lequel a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt n° 546 rendu par la 1ère chambre A de la cour d'appel d'Aix en Provence à l'encontre du jugement en date du 04 octobre 2007 du tribunal de grande instance de Marseille.

DEMANDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

Madame [F] [C]

demeurant Chez Madame [Adresse 1]

Représentée par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour,

Assistée de Me Jean-Michel GARRY, avocat au barreau de TOULON

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

LA SELU [R] [W]

venant aux droits de la SELARL [K] [W], mandataire judiciaire, dont le siège social est [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège.

Représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY-LEVAIQUE, avoués à la Cour, Assistée de Me Jean-Pierre FABRE, avocat au barreau de PARIS.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 15 Juin 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Michel NAGET, Conseiller

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2011,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société Compagnie Européenne du Traitement de l'Habitat (CETH), dont madame [C] était la gérante salariée, était mise en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de Toulon du 4 janvier 1999, et madame [B] [W] était désignée en qualité de liquidateur.

Sur la requête de madame [W] ès-qualité, par jugement du 1er octobre 2001, le tribunal de commerce de Toulon disait que 'la Selarl [Y] [K] et [B] [W] prise en la personne de Maître [W] [B] (...) conduira la mission précédemment confiée à Maître

[W] [B]'.

Madame [C] a été en arrêt maladie du 7 janvier 1999 au 7 janvier 2002, puis en invalidité.

Reprochant au liquidateur de n'avoir pas déclaré son arrêt de maladie dans les trente jours, la privant ainsi, en raison de l'application d'une déchéance contractuelle, du versement par une société de prévoyance auquel la société CETH était liée par une convention d'assurance de groupe, d'une indemnité complémentaire, elle assignait la Selarl [K]-[W] devant le tribunal de grande instance de Marseille pour voir retenir la responsabilité professionnelle de la Selarl [K]-[W] et la voir condamner à lui verser une certaine somme en réparation de son préjudice.

Par jugement du 4 octobre 2007, le tribunal la déboutait de l'ensemble de ses demandes, déboutait la Selarl [K]-[W] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts, et la condamnait aux dépens et au paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle relevait appel dudit jugement par déclaration du 13 novembre 2007, lequel était confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de la présente cour du 12 novembre 2008.

Cet arrêt était cassé et annulé en toutes ses dispositions par un arrêt du 17 décembre 2009 de la Cour de cassation, et la cause et les parties renvoyées dans cette cour autrement composée, au motif qu'ayant retenu que n'était pas établie l'existence d'une obligation à la charge du mandataire liquidateur de déclarer l'arrêt maladie de Mme [C], alors que le mandataire liquidateur, en sa qualité de représentant de l'entreprise souscriptrice de l'assurance de groupe, tenue envers les adhérents d'une obligation d'information et de conseil, devait conseiller à l'assurée d'effectuer la déclaration de sinistre et que, selon les constatations de son arrêt, il s'en était abstenu, la cour avait violé l'article 1382 du Code civil.

*

Vu la déclaration de saisine de cette cour par madame [C] le 25 janvier 2010;

Vu les conclusions notifiées le 26 janvier 2011 par la Selu [B] [W], venant aux droits de la Selarl [K]-[W], et le 8 février 2011 par madame [C];

Vu la clôture prononcée le 1er juin 2011;

MOTIFS

1) La Selu [W], n'ayant pas repris dans leur dispositif la fin de non recevoir, tenant à son défaut de qualité, développée dans le corps de ses dernières conclusions du 26 janvier 2011, la cour n'en est pas saisie, conformément aux termes de l'article 954 du Code civil dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 2011 (applicables dès cette date), suivant lesquels les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

2) Contrairement à ce que soutient la Selu [W], il incombait à madame [W], dès sa désignation en qualité de mandataire liquidateur, d'assumer toutes les obligations de la société liquidée, et à cet effet de prendre l'initiative de s'enquérir et de prendre connaissance de toutes les conventions auxquelles celle-ci était partie.

Ayant été informée de l'arrêt maladie de madame [C] au plus tard le 25 janvier 1999, ainsi qu'il résulte d'une 'attestation de salaire pour le paiement des indemnités journalières maladie et maternité' datée de ce jour et portant son cachet de mandataire, elle avait l'obligation, non pas de déclarer elle-même l'arrêt maladie à la société de prévoyance (aucune convention ou correspondance versée au dossier ne permet de le retenir), mais d'y inviter madame [C] elle-même alors que cette dernière se trouvait dans un délai encore utile (jusqu'au 7 février 1999), et non de l'en dissuader, comme ce qui a dû être la conséquence de l'assurance donnée par l'une de ses préposées, suffisamment attestée par trois témoignages précis et concordants d'anciens salariés, qu'elle s'en chargerait.

La faute de madame [W] doit donc être retenue.

3) Le préjudice résulté de cette faute consiste en une perte de chance pour madame [C] d'avoir pu, en procédant elle-même à la déclaration de son arrêt de travail, percevoir les prestations contractuellement dues par la société de prévoyance, et il n'est pas douteux qu'elle y aurait pourvu en temps utile si elle avait été invitée, et non pas dissuadée, de le faire.

La Selu [W] ne peut conclure à un défaut de lien de causalité entre la faute et le préjudice au motif qu'il appartenait à madame [C] de contester en justice le bien-fondé de la déchéance que la société de prévoyance lui opposait, et qu'elle aurait ainsi concouru à la réalisation de son préjudice, alors que, si, aux termes de l'article L 113-2 ,4°du Code des assurances, l'assuré doit donner avis à l'assureur, dès qu'il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie, mais que si, lorsqu'elle est prévue par une clause du contrat, la déchéance pour déclaration tardive ne peut être opposée à l'assuré que si l'assureur établit que le retard dans la déclaration lui a causé un préjudice, il n'est pas possible de retenir que madame [C] aurait eu gain de cause si elle avait actionné la société de prévoyance en contestation de la déchéance, ou même seulement d'évaluer ses chances de réussite, faute de la moindre indication sur la nature et la pertinence des moyens que la société de prévoyance aurait pu opposer à cette contestation.

Elle ne peut non plus soutenir que la faute n'aurait entraîné aucun préjudice au regard de la nature psychiatrique de l'affection dont souffre madame [C] (dépression), alors que l'exclusion de garantie invoquée ne vise que les 'séjours dans les établissements psychiatriques et assimilés, de rééducation (...) et en maison de repos', et que les demandes ne visent aucun remboursement relatif à de tels séjours.

Enfin elle ne fait pas utilement valoir que la mise en invalidité en 2002 constituerait un nouveau sinistre, que madame [C] n'était plus salariée lorsqu'elle a fait l'objet d'un classement en invalidité, que le contrat de prévoyance avait été résilié antérieurement du fait de la liquidation judiciaire de l'employeur, et qu'enfin la couverture avait été suspendue dès 1999 en raison de cotisations impayées, alors qu'il est prévu à la convention conclue avec la société de prévoyance que 'les garanties s'exercent sur les conséquences des affections, infirmités ou accidents dont la première constatation ou la survenance est postérieure à la prise d'effet', que madame [C] a été jusqu'à ce jour, sans discontinuité, en arrêt de travail, puis en invalidité, depuis le 7 janvier 1999, et qu'il n'est ni allégué ni établi qu'à cette date le contrat de prévoyance était suspendu.

4) En fonction des éléments en sa possession (l'indication des salaires nets perçus par madame [C] en 1998 et des indemnités journalières versées par la caisse de sécurité sociale), la cour est en mesure de déterminer, en ce qui concerne la période d'incapacité temporaire totale ( du 7 janvier 1999 au 7 janvier 2002), et compte tenu d'une franchise de 4 jours (ainsi qu'il ressort d'un courrier de la société de prévoyance du 5 avril 2002), et sachant que le contrat de prévoyance prévoit une indemnisation calculée 'sur la base du salaire net de cotisations sociales', un différentiel qui aurait dû être supporté par la société de prévoyance égal à une somme totale de 18.018,61 euros (6.641,93 en 1999; 5.723,34 en 2000;5.546,96 en 2001; 106,38 en 2002).

En ce qui concerne la période d'incapacité permanente totale à compter du 7 janvier 2002, sachant qu'aux termes de la convention constitue une invalidité permanente totale le fait pour l'assuré d'être classé par la sécurité sociale dans le 2 ème ou la 3 ème catégorie d'invalides ou lorsque cet organisme lui reconnaît une invalidité permanente d'un taux compris entre 33 % et 66% (ce qui est le cas en l'espèce), et que dans cette occurrence la garantie consiste dans le versement 'd'une rente d'après la même base que celle prévue pour l'ITT', la cour, sur les éléments fournis par madame [C] (l'indication des salaires nets perçus en 1998 et de certains arrérages mensuels de rente versés par la sécurité sociale), n'est en mesure de chiffrer ce qui aurait dû être pris en charge par la société de prévoyance que pour les seules années 2002, 2007, et 2008, et encore seulement de façon partielle, à hauteur d'une somme globale de 27.410,23 euros (13.282,53 pour 2002; 7.236,19 pour 2007; 6.891,51 pour 2008).

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, rappel étant fait que le préjudice indemnisable ne résulte que d'une perte de chance, pour la période courue du 7 janvier 1999 au jour du prononcé de l'arrêt, la cour fixe la réparation due par la Selu [W] à la somme de 40.000 euros.

En ce qui concerne la demande de madame [C] tendant à son indemnisation, du prononcé de l'arrêt jusqu'à l'âge de sa retraite, la cour la rejette, faute pour madame [C] d'avoir fourni des éléments suffisants (en particulier la justification de ce qu'elle est toujours en situation d'invalidité de 2° catégorie, et le montant des derniers arrérages perçus de la sécurité sociale) de nature à permettre de calculer de manière effective ce qui aurait pu être prise en charge dans l'avenir par la société de prévoyance.

5) Madame [C] ne justifie d'aucun préjudice moral et doit être déboutée de sa demande d'indemnisation à cet égard.

6) La Selu [W] supporte les dépens de première instance et les dépens d'appel et il est équitable d'allouer à madame [C] une somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

**

Il suit de l'ensemble de ce qui précède que le jugement doit être infirmé sauf en ce qu'il a rejeté la demande de madame [C] en réparation d'un préjudice moral, et la demande reconventionnelle de la Selu [W] en dommages et intérêts.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 17 décembre 2009;

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande de madame [C] en réparation d'un préjudice moral, et la demande reconventionnelle de la Selu [W] en dommages et intérêts.

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

Condamne la Selu [B] [W] à payer à madame [C] la somme de 40.000 euros.

Déboute madame [C] du surplus de sa demande de dommages et intérêts.

Dit que la Selu [B] [W] supporte les dépens de première instance et les dépens d'appel.

Dit qu'il sera fait application au profit de la SCP d'avoués Boissonnet-Rousseau des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Condamne la Selu [B] [W] à payer à madame [C] la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 10/01630
Date de la décision : 22/09/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°10/01630 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-22;10.01630 ?
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