COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
15e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 16 SEPTEMBRE 2011
N° 2011/429
Rôle N° 11/05879
[H] [D] [F] [K] [M]
[D] [L] [G] [I] épouse [M]
C/
SA CIE GENERALE DE GARANTIE
MONSIEUR LE TRESORIER DE [Localité 7]
SA GROUPAMA BANQUE
Grosse délivrée
le :
à : la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN
la SCP PRIMOUT - FAIVRE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 14 Mars 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 10/888.
APPELANTES
Madame [H] [D] [F] [K] [M]
née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]
représentée par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour, assistée de Me Dominique ESTEVE-, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame [D] [L] [G] [I] épouse [M]
née le [Date naissance 4] 1936 à [Localité 8], demeurant [Adresse 1]
représentée par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour, assistée de Me Dominique ESTEVE, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
SA CIE GENERALE DE GARANTIE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 3]
défaillant
MONSIEUR LE TRESORIER DE MARTIGUES, demeurant [Adresse 9]
Assignée à personne habilitée le 03/05/2011
défaillant
SA GROUPAMA BANQUE venant aux droits de la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE, par suite d'un apport partiel d'actif, poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité, demeurant [Adresse 5]
Assignée à personne habilitée le 16/05/2011
représentée par la SCP PRIMOUT-FAIVRE, avoués à la Cour, assistée de Me Mireille GRANIER, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 08 Juin 2011 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame France-Marie BRAIZAT, Président
Monsieur Christian COUCHET, Conseiller
Monsieur Olivier BRUE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2011.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2011,
Signé par Madame France-Marie BRAIZAT, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par jugement d'orientation du 14 mars 2011 le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, au visa de la procédure de saisie immobilière poursuivie par la SA COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE à l'encontre de Mme [D] [I] veuve [M] et de Mme [H] [M], en vertu d'un commandement de saisie immobilière délivré le 27 novembre 2009, a ordonné la vente aux enchères publiques de l'immeuble saisi sur la mise à prix fixée par le créancier, et précisé que l'audience d'adjudication serait tenue le lundi 27 juin 2011.
Par déclaration du 31 mars 2011 Mme [D] [I] veuve [M] et Mme [H] [M] ont relevé appel de ce jugement.
Par requête du 4 avril 2011 les appelantes ont sollicité l'autorisation d'assigner à jour fixe, à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 8 avril 2011.
Par conclusions signifiées d'abord le 4 avril 2011 puis le 8 juin 2011 Mme [D] [I] veuve [M] et Mme [H] [M] ont fait valoir, après le rappel des faits et de la procédure, l'argumentation suivante :
A - Sur la nullité du commandement aux fins de saisie
Les dames [M] entendent obtenir la nullité du commandement délivré aux motifs qu'il ne mentionnerait pas l'organe représentatif et le siège social et ce, sur le fondement des articles 56 et 648 du code de procédure civile.
Les appelantes contestent le droit de la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE d'agir en paiement à leur encontre, contestent, en l'état, la créance invoquée, et considèrent que l'irrégularité susvisée leur cause un grief caractérisé qui doit entraîner la nullité de l'acte (article 117 du code de procédure civile), s'agissant d'une formalité d'ordre public ou substantielle.
B - Sur la nullité du titre exécutoire
La dame [H] [M] soutient que l'acte, qui lui a été notifié le 10 novembre 2009 auquel est annexé le titre d'exécution de la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE, ne portait pas de date lisible.
Par un arrêt du 18 juin 2009 la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a énoncé, au visa de l'article L. 213-6 alinéa 1er du code de l'organisation judiciaire, que le juge de l'exécution peut se prononcer sur la nullité d'un engagement résultant d'un acte notarié exécutoire, invoqué pour l'absence prétendue de l'une des conditions requises par la loi pour la validité de sa formation.
C - Sur le recours à l'encontre de la caution
Les appelantes ont toujours soutenu et réitèrent leur position sur le fait que la caution n'a recours, à l'encontre du débiteur principal, que si elle a préalablement payé le créancier, et ce en application des articles 2305 et 2306 du code civil.
D - Sur la résiliation du contrat
Les appelantes soutiennent que la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE n'a pas respecté les conditions de mise en oeuvre de la résiliation du contrat telle que visées aux pages 25 à 28 de l'acte notarié, et observent cependant que si des mises en demeure ont été adressées, les termes du contrat n'ont pas été respectés, alors que dès la première défaillance, il appartenait à la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE d'adresser la 1ère mise en demeure sous quinzaine.
Faute de paiement une seconde mise en demeure de payer, par acte extrajudiciaire, devait être adressée, au nom et pour le compte du garant subrogé, et le commandement de saisie immobilière n'est, dès lors, pas fondé en droit.
E - Sur le décompte de la créance
Il a souvent été jugé que l'absence d'une des mentions prescrites constitue un vice de forme, qui n'entraîne la nullité que lorsque la preuve d'un grief est démontrée, et en l'espèce ladite absence cause un grief aux concluantes qui ignorent le montant détaillé de la somme dont elles seraient recevables, ignorant le montant du principal , des intérêts et des frais.
Selon l'article 50 de la loi du 9 juillet 1991, le créancier qui fait procéder à une saisie-vente doit être muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible.
Les appelantes demandent en conséquence à la cour de :
- in limine litis vu les dispositions de l'article 545 du code de procédure civile de recevoir leur exception de l'irrecevabilité des écritures de la SA GROUPAMA BANQUE, notifiées le 1er juin 2011, laquelle ne justifie pas de son intervention aux lieu et place de la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE, et de déclarer irrecevable la demande de ladite société,
- subsidiairement, les recevoir en leurs demandes, fins, conclusions et contestations, de nullité du commandement de saisie immobilière du 27 octobre 2009 de la COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE, et de nullité de l'acte notarié du 17 septembre 1992,
- en conséquence, déclarer nulle et de nul effet la procédure diligentée par la société COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE,
- d'infirmer le jugement rendu en date du 14 mars 2011, de débouter la société intimée de toutes ses demandes, et de la condamner à leur verser la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions au fond déposées et notifiées le 1er juin 2011 la SA GROUPAMA BANQUE réplique :
I. Sur la nullité du commandement de payer valant saisie du 27 novembre 2009
L'indication erronée de l'organe représentant légalement une personne morale dans une procédure, lorsque cette mention est prévue à peine de nullité, ne constitue qu'un vice de forme (cass. 18/05/2010).
À l'évidence cette prétendue irrégularité ne peut causer un préjudice aux appelantes qui avaient connaissance des poursuites engagées au travers des multiples mises en demeure communiquées et des échanges de courriers (pièces n°7 à 17). C'est donc avec une particulière mauvaise foi que ces dernières reprennent l'argumentation qu'elles ont vainement développée devant le 1er juge.
La société concluante verse néanmoins aux débats les copies des conseils d'administration des 20 février 2008 et 29 septembre 2009 qui ont décidé des derniers transferts (pièces n°1, 2 et 3), et en ce qui concerne la représentation de la société une copie des pouvoirs conférés le 1er avril 2008 et enregistrés à Paris le 9 du même mois, par le PDG en exercice Monsieur [E] (pièce n°1) a été communiquée
II. Sur la prétendue nullité du titre exécutoire
La société concluante a communiqué l'original de l'acte notarié régulièrement publié aux hypothèques non seulement lors de la délivrance du commandement de saisie immobilière mais également dans le cadre de la procédure de première instance comme devant la cour, et de surcroît la cour constatera la particulière mauvaise foi des débitrices qui communiquent elles-mêmes la copie du titre exécutoire.
III. Sur le recours à l'encontre de la caution
Force est de constater que non seulement la société poursuivante s'est substituée aux débirentiers mais encore s'est portée caution solidaire renonçant au principe de discussion, et en outre, en application de l'article 2309 du code civil la caution, même avant d'avoir payé, peut agir contre le débiteur pour être par lui indemnisée, dès lors que la dette est devenue exigible.
IV. Sur la résiliation du contrat
Elle produit aux débats les mises en demeure justifiant avoir respecté les termes du contrat, et de plus il convient de rappeler les dispositions des articles 114 et 117 du code de procédure civile aux termes desquelles il résulte que l'omission de l'une des mentions constituerait un vice de forme qui n'entraîne la nullité que si la preuve d'un grief est rapportée.
Là encore, Mesdames [M] sont défaillantes dans l'administration de la preuve.
V. Sur le décompte de la créance
La société concluante entend rappeler qu'est annexé au commandement aux fins de saisie immobilière le décompte de sa créance, qui ne souffre d'aucune contestation, et le montant des intérêts comme des accessoires réclamés résultant des éléments du dossier, et conclut à voir :
- déclarer infondé l'appel interjeté par Mesdames [M] à l'encontre du jugement du 14 mars 2011, et confirmer purement et simplement ce jugement en toutes ses dispositions,
- débouter purement et simplement Madame [D] [M] et Madame [H] [M] de toutes leurs fins, demandes, conclusions et contestations, et de leurs demandes de nullité du commandement de saisie immobilière du 27 octobre 2009 et de l'acte notarié du 17 septembre 1992,
- déclarer valable la procédure diligentée par la société requérante, et condamner les débitrices à lui verser chacune sur le fondement de l'article 700 la somme de 2.000€.
Autorisée à l'audience du 8 juin 2011 à répondre aux dernières écritures des appelantes, la société intimée, par note en délibéré du 22 juin 2011, a indiqué que le moyen d'irrecevabilité, soulevé tardivement, ne saurait être retenu comme ayant précisé lors de sa constitution du 5 avril 2011 venir aux droits de la Compagnie générale de garantie par suite d'un apport partiel d'actif intervenu le 17 décembre 2010, ainsi qu'en justifient les pièces 27 et 28 communiquées sur ce point, et a précisé que les articles 1120 et 1134 du code civil ne sont pas applicables en l'espèce, de sorte que le moyen devra être purement et simplement rejeté.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Les parties sont en l'état du jugement d'orientation rendu le 14 mars 2011 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, qui, au visa de la procédure de saisie immobilière poursuivie par la SA COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE en vertu d'un commandement de saisie immobilière délivré le 27 novembre 2009 à l'encontre de Mme [D] [I] veuve [M] et de Mme [H] [M], a ordonné la vente aux enchères publiques de l'immeuble saisi sur la mise à prix fixée par le créancier, et précisé que l'audience d'adjudication serait tenue le lundi 27 juin 2011.
S'agissant du moyen d'irrecevabilité, soulevé par les appelantes et sur lequel les parties ont été en mesure de conclure contradictoirement, l'analyse des pièces n° 27 et 28 communiquées par la SA COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE révèle que suivant procès-verbal du 17 décembre 2010 l'assemblée générale extraordinaire de Groupama Banque a d'abord pris connaissance 'du projet de traité d'apport partiel d'actif signé le 16 novembre 2010 avec la société Compagnie Générale de Garantie, aux termes duquel cette dernière fait apport, à titre d'apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions, avec effet rétroactif au 1er octobre 2010, de son activité de caution évaluée au montant net de 5 222 476,54 €', et approuvé à l'unanimité ce traité dans toutes ses dispositions, avec dépôt dudit projet au greffe du tribunal de commerce de Paris au nom de la société Compagnie Générale de Garantie, et au greffe du tribunal de commerce de Bobigny au nom de la société Groupama Banque le 17 novembre 2010.
Il en résulte que la SA Groupama Banque, ainsi que le précisait sa constitution d'avoué notifiée le 8 avril 2011, vient régulièrement aux droits de la société Compagnie Générale de Garantie, ce qui justifie de rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par les appelantes.
Il est établi en l'espèce que la mesure de saisie immobilière a été engagée sur le fondement de la copie exécutoire d'un acte authentique dressé par Maître [J] notaire associé à Paris le 17 septembre 1992, objet d'une publication à la conservation des hypothèques et contenant contrat constitutif de rentes viagères avec intervention de la SA COMPAGNIE GENERALE DE GARANTIE ès qualités de garant du versement des rentes, et d'actes de signification intervenus sur le fondement de l'article 877 du code civil d'abord le 21 avril 2009 en ce qui concerne le commandement de payer signifié par acte du 20 avril 2008 et l'acte notarié puis le 10 novembre 2009 à nouveau au sujet de cet acte notarié.
Il sera observé que le commandement de payer comporte la mention de la copie exécutoire de l'acte authentique du 17 septembre 1992, ainsi que les renseignements se rapportant au siège social et au représentant de la société requérante, laquelle a régulièrement communiqué les extraits des procès-verbaux des conseils d'administration des 20 février 2008 et 29 septembre 2009 qui ont validé les changements de siège social, et justifié des pouvoirs établis par son président-directeur général le 1er avril 2008, le tout amenant, ainsi que l'a parfaitement relevé le premier juge, à rejeter la demande de nullité dudit commandement soulevée par les débitrices, qui, de surcroît, n'invoquent aucun grief à ce titre.
De plus la copie exécutoire de l'acte du 17 septembre 1992 fait expressément apparaître la date de celui-ci, parfaitement visible et de nature en conséquence à rejeter l'argumentation développée par les appelantes ayant eu pleine connaissance de ce titre exécutoire.
La société intimée démontre par ailleurs avoir adressé aux consorts [M], par courriers recommandés avec avis de réception des 16 mars 1998, 3 juin et 17 novembre 1999, 5 septembre 2000, 16 novembre 2001 et 4 février 2002, des mises en demeure d'avoir à régulariser les arriérés résultant du rejet de nombreux prélèvements pour non-paiement des rentes trimestrielles, tout en les avisant qu'à défaut de paiement la procédure de saisie immobilière sur le bien donné en garantie serait engagée.
Il s'avère qu'en réponse à de telles relances des acomptes ont été payés par Mme [H] [M] courant février 2000 puis courant février 2002, ce qui caractérise l'absence de toute contestation de ces chefs, et légitime le rejet de l'argumentation des appelantes concernant les prétendues irrégularité de la résiliation du contrat et irrecevabilité du recours de la caution, étant observé sur ce point que la Compagnie intimée, régulièrement substituée aux débirentiers en sa qualité de caution, dispose du droit d'agir sur le fondement de l'article 2309 du code civil aux fins de recouvrement de sa créance devenue exigible suite aux défaillances des débitrices.
Enfin le décompte de créance mentionné par le commandement de payer régulièrement délivré par acte d'huissier de justice du 27 novembre 2009, énumère explicitement le total des capitaux viagers substitutifs, des honoraires de substitution, du principal restant dû au 31 mai 2009, des intérêts au taux légal majoré arrêtés au 31 mai 2009, des frais d'impayés restant dus et des autres frais et honoraires, à l'encontre desquels les appelantes ne formulent aucune critique détaillée, de sorte que leurs moyens invoqués de ce chef sont rejetés.
Le jugement entrepris est en conséquence confirmé dans toutes ses dispositions.
L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne Mme [D] [I] veuve [M] et Mme [H] [M] aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président