COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
15e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 15 SEPTEMBRE 2011
N°2011/431
Rôle N° 10/12368
[O] [F]
[R] [G]
SARL RACING AUTO SERVICE SPORT (R.A.S. SPORT)
C/
SA GAN ASSURANCES
SARL TELIS
SA ALLIANZ IARD
Grosse délivrée
le :
à :
la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL
la SCP LIBERAS - BUVAT - MICHOTEY
la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE
ref-05092011-PM
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 22 Juin 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/454.
APPELANTS
Monsieur [O] [F]
né le [Date naissance 3] 1967 à [Localité 11],
demeurant [Adresse 2]
comparant en personne, assisté de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, Me Pierre VARENNE, avocat au barreau de GRASSE
Monsieur [R] [G]
né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 9], demeurant [Adresse 7]
représenté par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, Me Pierre VARENNE, avocat au barreau de GRASSE
SARL RACING AUTO SERVICE SPORT (R.A.S. SPORT), agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice,
dont le siège social est : [Adresse 10]
représentée par la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la Cour, Me Pierre VARENNE, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEES
GAN ASSURANCES,
dont le siège social est : [Adresse 5]
représentée par la SCP LIBERAS BUVAT MICHOTEY, avoués à la Cour
SARL TELIS,
dont le siège social est : [Adresse 4]
représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour, Me Ghislaine MOULAI, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Jean christophe STRATIGEAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
SA ALLIANZ IARD,
dont le siège social est : [Adresse 6]
représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour, Me Ghislaine MOULAI, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Jean Christophe STRATIGEAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 30 Juin 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Serge KERRAUDREN, Président, et Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, chargés du rapport.
Monsieur Serge KERRAUDREN, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Serge KERRAUDREN, Président
Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller
Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2011.
Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DE L'AFFAIRE :
La Société RACING AUTO SERVICE SPORT ( R.A.S. SPORT ) assurée auprès du GAN, a été victime d'un vol dans ses locaux, sis [Localité 12], dans la nuit du 27 au 28 février 2008.
A cette occasion lui ont été dérobés :
- un véhicule de compétition Peugeot 306 Maxi appartenant à M. [O] [F], dirigeant de l'entreprise R.A.S. SPORT,
- un véhicule de compétition PEUGEOT 206 WRC appartenant à M. [R] [G],
- une camionnette Fiat Ducato appartenant à la société R.A.S. SPORT ainsi que du matériel appartenant à la société R.A.S. SPORT et à Messieurs [G] et [F], matériel se trouvant notamment dans la camionnette Ducato retrouvée vide.
Le GAN a pris en charge l'indemnisation du véhicule de M. [G] et du matériel volé.
En revanche, il a opposé un refus concernant l'indemnisation du véhicule 306 Peugeot Maxi de M. [O] [F] considérant qu'il s'agissait d'un véhicule contractuellement qualifié de 'propre' car appartenant au dirigeant de l'entreprise et, de ce fait, non couvert par le vol.
Contestant ce refus de garantie M. [O] [F], M. [G] et la société R.A.S. SPORT ont assigné le GAN devant le Tribunal de Grande Instance de NICE afin d'obtenir sa condamnation à indemniser le vol du véhicule Peugeot 306 Maxi à hauteur de 207.000,00 euros outre les intérêts. Ils ont aussi demandé la condamnation in solidum de la société TELIS, qui avait fourni le système d'alarme et de télésurveillance et de son assureur, la compagnie AGF, à rembourser les franchises.
Pa jugement du 22 juin 2010, le Tribunal de Grande Instance de NICE a statué comme suit :
-ordonne la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 09/00454 et 10/00871 et dit qu'elles figureront désormais sous le seul numéro 09/ 00454,
-déclare la procédure régulière et recevable.
Vu le contrat d'assurance liant la société R.A.S. SPORT à la compagnie GAN ASSURANCES :
-dit que le véhicule 306 Peugeot Maxi, propriété de M. [O] [F], constitue un véhicule propre et que la garantie de la compagnie GAN ASSURANCES est acquise,
condamne la compagnie GAN ASSURANCES à payer à M. [O] [F] la somme de 69.521,00 euros assortie des intérêts au taux légal.
Vu les articles 1382 et suivant du Code civil :
-condamne in solidium la société TELIS et la société d'assurances ALLIANZ IARD anciennement AGF à verser à la société R.A.S. SPORT la somme de 964,36 euros, représentant la franchise restée à sa charge au titre du vol des marchandises et matériels dans le garage et à M. [R] [G] la somme de 2.788,00 euros au titre de la franchise restée à sa charge au titre du vol du véhicule WRC,
-dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement,
-condamne in solidum la société GAN ASSURANCES IARD, la SARL TELIS et la société d'assurances ALLIANZ IARD anciennement AGF à payer à M. [O] [F], M. [R] [G] et la SARL RACING AUTO SERVICE SPORT ( R.A.S. SPORT ) la somme de 1.200,00 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile,
-condamne la société GAN ASSURANCES IARD, la SARL TELIS et la société d'assurances ALLIANZ IARD anciennement AGF aux entiers dépens de l'instance.
M. [O] [F], M. [G] et la société R.A.S. SPORT ont relevé appel de ce jugement et ils ont conclu en dernier lieu le 2 mai 2011.
La société GAN a conclu le 25 janvier 2011.
La compagnie ALLIANZ IARD et la société TELIS ont conclu le 25 février 2011.
La Cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.
MOTIFS :
Attendu que la décision déférée n'est pas critiquée en ce qu'elle a déclaré la procédure 'régulière et recevable' ; qu'il y a lieu à confirmation de ce chef ;
Attendu que les conditions particulières du contrat liant la société R.A.S. SPORT à la compagnie GAN, du 17 décembre 2007, comportent la mention expresse selon laquelle le souscripteur reconnaît avoir reçu un exemplaire des dispositions générales et annexes A 2107, A 2103 et A 2101 relatives aux garanties choisies ;
Attendu que les parties divergent sur la qualification du véhicule Peugeot 306 Maxi de M. [F], dont il n'est pas contesté qu'il a été volé dans les locaux de la société R.A.S. SPORT dans la nuit du 27 au 28 février 2008 ;
Attendu que, selon les conventions spéciales A 2101 relatives à l'assurance automobile, les véhicules assurés sont respectivement les 'propres véhicules' et les 'véhicules confiés', qu'en cas de souscription par une société, ce qui est le cas en l'espèce, sont notamment considérés comme propres véhicules ceux appartenant à la personne physique désignée au contrat comme son représentant légal, ce qui est le cas de M. [F] sur les dispositions particulières du 17 décembre 2007 ; que les véhicules confiés sont ceux confiés au souscripteur en raison de ses activités professionnelles définies aux conditions particulières ; que l'activité déclarée par le souscripteur est la 'préparation de véhicules de compétition';
Attendu que M. [F] et la société R.A.S. SPORT admettent que le véhicule précité est un 'propre' mais soutiennent qu'il peut aussi être considéré comme un véhicule confié, ce que conteste l'assureur ;
Attendu que celui-ci affirme qu'un véhicule ne peut entrer cumulativement dans les deux catégories, sans pour autant se référer à une clause contractuelle qui édicterait que les qualifications sont exclusives l'une de l'autre ;
Attendu en effet que les dispositions générales du contrat n'écartent nullement l'hypothèse selon laquelle un 'propre véhicule' pourrait être confié à la société R.A.S. SPORT en vue de sa préparation à la compétition, plus particulièrement lorsqu'il ne s'agit pas du véhicule du souscripteur lui-même mais celui de son représentant légal ; que, dans ce cas, l'assuré peut donc se prévaloir de la garantie due au titre des véhicules confiés, étant observé qu'il n'est pas spécifié que le véhicule confié doit l'être par un tiers ;
Attendu que l'assureur ne discute pas être tenu de garantir le vol des véhicules confiés ; que M. [F] justifie par une facture de R.A.S. SPORT du 27 février 2008, de ce que son véhicule avait été remis à cette société pour révision et réparations, ce qui n'est pas contesté par l'assureur ;
Attendu que les appelants s'opposent à l'application d'un plafond de garantie, réclamée par l'assureur, au motif que celui-ci y aurait renoncé pour l'ensemble des dommages résultant du même sinistre puisqu'il a indemnisé M. [G] au-delà de ce plafond ; que la compagnie GAN ne répond pas sur ce point ;
Attendu que le contrat prévoit une limitation de garantie, non seulement par sinistre mais aussi par véhicule ; que, si l'assureur n'a pas appliqué le plafond de garantie pour M. [G], il ne ressort d'aucun élément qu'il y ait aussi renoncé de manière non équivoque pour M. [F], propriétaire d'un autre véhicule qui donne lieu à une indemnisation distincte ; qu'il s'ensuit que le plafond de garantie de 69.521,00 euros est applicable à M. [F] ;
Attendu que l'assureur oppose vainement l'absence d'expertise puisque d'une part il n'a pas estimé nécessaire d'y faire procéder, conformément au contrat, d'autre part la valeur du véhicule au jour du sinistre était largement supérieure au montant précité, la compagnie d'assurance ne discutant pas le prix d'achat de 155.000,00 euros quelques mois avant le vol ni l'état de ce véhicule de compétition ;
Attendu que la somme allouée portera intérêts au taux légal non pas à compter du 18 juillet 2008, date à laquelle il était seulement demandé à l'assureur quand il procéderait à l'indemnisation, mais à compter de l'assignation du 28 janvier 2010 valant sommation de payer au sens de l'article 1153 du Code civil ;
Attendu que les appelants recherchent la responsabilité quasi-délictuelle de la société TELIS qui a conclu un contrat de télésurveillance avec la société NMS le 25 septembre 2007 ;
Attendu en effet que les tiers à un contrat peuvent invoquer l'exécution défectueuse de celui-ci lorsqu'elle leur a causé un dommage ; qu'il convient donc de se référer aux obligations souscrites par la société TELIS dans la convention précitée ;
Attendu que cette société s'est engagée à assurer la télésurveillance par l'écoute d'un 'atelier' situé [Adresse 8] ; qu'en cas de réception d'un message d'alerte, elle devait informer l'abonné, M. [F] étant ici expressément désigné en premier lieu comme destinataire de l'alerte ;
Attendu que les appelants font valoir que le système de télésurveillance n'a pas fonctionné normalement, dans la nuit du 27 au 28 février 2008, ce qui a rendu le vol possible ;
Mais Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats que, le 28 février 2008, à 0 heure 13 minutes 36 secondes, la société TELIS a réceptionné une alarme intrusion en provenance de l'entrée atelier ; qu'après contre-appel sur site resté sans réponse, la société TELIS a avisé M. [F], ce qu'admet celui-ci ; qu'il a prétendu s'être rendu sur place immédiatement mais n'avoir rien constaté d'anormal, alors que les constatations effectuées ensuite ont révélé que les voleurs pour pénétrer dans les lieux, ont fracturé les serrures de la grille métallique et de la porte d'entrée de l'atelier et ont gravement endommagé les montants en aluminium ;
Attendu que les appelants prétendent que le système d'alarme pouvait facilement être neutralisé par la simple mise en place d'un carton devant le radar surveillant la zone atelier ;
Mais attendu que les procès verbaux de constatation du 28 février 2008, qui mentionnent que l'alarme fonctionnait, font seulement état de ce que les voleurs ont pu pénétrer dans les locaux puis occulter le radar, sans expliquer la raison pour laquelle ils auraient pris soin de remettre normalement le système en service après avoir commis leur forfait, puisque l'installation a normalement fonctionné le matin à 6 heures 31 minutes ; qu'un technicien a d'ailleurs constaté le bon fonctionnement de l'installation le 28 février 2008 ;
Attendu qu'il ressort de ces éléments qu'il n'est pas établi que le système de télésurveillance n'ait pas normalement fonctionné, contrairement à ce qu'affirment les appelants ;
Attendu que ceux-ci ne peuvent utilement reprocher à la société TELIS un manquement au devoir de conseil et le choix de ce système puisque, selon l'article premier du contrat, l'abonné a reconnu avoir librement et sous sa seule responsabilité déterminé le choix et la qualité des matériels de détection et transmission dont il a demandé l'installation, tant en fonction du niveau de protection qu'il a jugé utile qu' au regard du budget qu'il a entendu y consacrer ; qu'en outre l'article 7 du contrat stipule que la responsabilité du distributeur ne pourra être engagée du fait des dommages pouvant résulter directement ou indirectement d'une insuffisance du matériel de détection (volumétrique ou autre), en téléintrusion, dont l'abonné assume seul la détermination ;
Attendu que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, il n'est pas établi que la société TELIS ait été avisée de ce que les lieux comportaient un atelier de réparation automobile, c'est-à-dire un risque plus élevé, alors que le contrat a été conclu avec une société de 'NETTOYAGE MAINTENANCE SERVICES' pour un 'atelier', sans autre précision ; que, sur ce point, les appelants ne prouvent par la production d'une attestation de client que la société TELIS était intervenue sur les lieux avant le sinistre, alors qu'il aurait été aisé, dans ce cas, de communiquer le fiche d'intervention de ce technicien, de même qu'est versée aux débats celle précitée du 28 février 2008 ;
Attendu en définitive qu'aucune faute ne peut être retenue à la charge de la société TELIS, seulement tenue d'une obligation de moyens comme le rappelle l'article 7 de son contrat ; que les appelants, de même que la compagnie GAN, doivent être déboutés de leurs réclamations formées à son encontre ; que le jugement déféré sera réformé à cet égard ;
Attendu enfin qu'il est équitable d'indemniser M. [F] pour ses frais irrépétibles de procédure ; que les autres réclamations présentées au même titre seront rejetées ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
-déclaré la procédure régulière et recevable,
-condamné la compagnie GAN ASSURANCES à payer à M. [F] la somme de 69.521,00 euros avec intérêts au taux légal,
Le réformant pour le surplus, statuant à nouveau et ajoutant,
Dit que les intérêts au taux légal sur la somme de 69.521,00 euros courront à compter du 28 janvier 2010,
Condamne la compagnie GAN à payer à M. [F] la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toutes prétentions contraires ou plus amples des parties,
Condamne la compagnie GAN ASSURANCES aux dépens de première instance et dit que ceux d'appel seront supportés par M. [F], M. [G] et la société RACING AUTO SERVICE SPORT, avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause
LE GREFFIERLE PRESIDENT .