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08/09/2011 | FRANCE | N°10/05835

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre c, 08 septembre 2011, 10/05835


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C



ARRÊT AU FOND



DU 08 SEPTEMBRE 2011



N° 2011/ 567













Rôle N° 10/05835





[V] [E]





C/



SAS Clinique [2]









































Grosse délivrée le :



à :



-Me Christian LARROUZE, avocat au barreau de MARSEILLE

>
-Me Benjamin DUFFOUR, avocat au barreau de PARIS





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 03 Mars 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/2340.







APPELANT



Monsieur [V] [E], demeurant [Adresse 3]



comparant en personne, assisté de Me Christian ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 08 SEPTEMBRE 2011

N° 2011/ 567

Rôle N° 10/05835

[V] [E]

C/

SAS Clinique [2]

Grosse délivrée le :

à :

-Me Christian LARROUZE, avocat au barreau de MARSEILLE

-Me Benjamin DUFFOUR, avocat au barreau de PARIS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 03 Mars 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/2340.

APPELANT

Monsieur [V] [E], demeurant [Adresse 3]

comparant en personne, assisté de Me Christian LARROUZE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS Clinique [2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Benjamin DUFFOUR, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 26 Mai 2011 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Christian BAUJAULT, Président

Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Conseiller rapporteur

Monsieur Patrick ANDRE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2011.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Septembre 2011.

Signé par Monsieur Christian BAUJAULT, Président et Madame Florence ALLEMANN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

M. [E] était salarié de la clinique [2] depuis le 1er septembre 1982, dans son dernier état en qualité de directeur administratif, cadre supérieur, au salaire mensuel brut moyen de 7'021,26 € ;

Cette clinique a été achetée en novembre 2007 par le groupe VITALIA ;

Il a refusé, le 21 avril 2008, le poste de directeur juridique du groupe que l'employeur lui a proposé ;

Il a été convoqué le 23 juin 2008 à un entretien préalable du 3 juillet, avec entre temps arrêt maladie du 24 juin au 15 septembre 2008, lequel a été suivi d'un nouvel arrêt du 8 janvier 2009 à la fin de son préavis ;

Il a été licencié par lettre du 10 juillet 2008 avec dispense d'exécution de son préavis de six mois pour insuffisance professionnelle dans la direction des services administratif, juridique, comptable et financier (non respect des délais réglementaire relatifs aux autorisations administratives et signature d'avenants tarifaires par l'ancien gérant )ainsi que dans le respect des procédures internes du groupe et dans la gestion interne de l'établissement (retards et défaillances dans la fourniture des statistiques, informations ou analyses comme demandes de travaux ,de même dans la supervision du système de gestion des risques ) ;

'''

Par jugement du 3 mars 2010, le Conseil de Prud'hommes de Marseille a :

- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et s'analyser en un licenciement abusif du fait du manque d'appréciation du préjudice subi par l'employeur,

- condamné ce dernier à payer 36'997,26 € de dommages-intérêts ainsi que 1000 € de frais de procès,

- débouté le salarié de toutes ses autres demandes.

'''

Vu les conclusions, reprises à l'audience, de M. [E] aux fins de réformation partielle sur les demandes suivantes :

- licenciement économique déguisé,

- 200 000 € de dommages-intérêts de licenciement,

- 50 000 € de dommages-intérêts pour le préjudice moral subi,

- 78,22 € de complément de salaire de janvier 2009,

- 18,77 € de prime d'ancienneté du salaire du mois de janvier 2009,

- 4019,97 € au titre des RTT non prises,

- 2674,91 € de solde de congés payés,

- 1588,01 € de complément de gratification,

- 2323,36 € de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 3757 € de salaires garantis du 13 janvier au 7 février 2009,

- intérêts de droit à compter de la demande,

- remise des bulletins de salaire et de l'attestation Pôle emploi rectifiés sous astreinte,

- 5'000 € de frais de procès.

'''

Vu les conclusions, reprises à l'audience, de la clinique [2] aux fins de réformation partielle par rejet des condamnations prononcées au profit de M. [E] sur la base d'un licenciement fondé une réelle et sérieuse, avec allocation de 3000 € de frais de procès ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Quant à la procédure, M. [E] n'établit pas le défaut d'évocation lors de l'entretien préalable des deux premiers griefs du licenciement en sorte que l'irrégularité formelle qu'elle aurait seulement constituée ne peut pas être retenue.

Sur le fond le licenciement apparaît trouver sa cause exacte dans les motifs personnels énoncés dans la lettre précitée et non dans les motifs économiques avancés par le salarié, en l'occurrence le refus de la modification de son contrat de travail et la restructuration de l'entreprise ;

D'une part, ce refus par le salarié du poste proposé de directeur juridique du groupe a été suivi de la renonciation de l'employeur à cette modification du contrat sans apparaître, par ailleurs, constituer un élément occulte de détermination du licenciement ultérieur ;

D'autre part, la restructuration d'ordre économique de l'entreprise par la suppression du poste de directeur administratif n'apparaît pas elle-même caractérisée ni être le motif véritable, et toujours occulte, de ce licenciement ;

En effet il s'avère que si le rachat par le groupe VITALIA de la clinique [2] a donné lieu à de nouvelles définitions des fonctions et tâches, celles-ci sont directement issues de cette opération juridique en ce qu'elle a emporté passage de la clinique [2] du statut d'entreprise indépendante à celui d'entité appartenant à un groupe ;

Ainsi les postes de président et de directeur général sous l'autorité hiérarchique directe desquels se trouvait M. [E] ont été maintenus malgré la délivrance d'une délégation de pouvoirs du premier au second ;

De même le poste de directeur administratif occupé par M. [E] n'a pas été supprimé mais a été attribué à M. [T], sous la nouvelle qualification de directeur, même si ses tâches d'ordre juridique ont été transférées à la fonction nouvellement créée de directeur juridique du groupe, refusée par M. [E] auquel elle avait été proposée comme ci-dessus précisé ;

Il s'avère également que le but de sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise n'a pas été à l'origine des modifications aussi opérées, lesquelles sont intervenues en l'absence de difficultés économiques en cours ou prévisibles dans l'entreprise comme de toute réduction d'effectif, l'employeur faisant état de la progression de celui-ci de 30 unités en 2008 ;

Enfin la politique systématique d'éviction des cadres imputée à l'employeur ne paraît pas caractérisée, même si M. [E] invoque localement le départ de cinq des sept salariés membres de l'encadrement, les causes véritables de ces départs étant ignorées et l'employeur lui opposant les seuls changements de 7 directeurs sur le rachat d'une cinquantaine de cliniques ;

Le premier motif de licenciement n'est effectivement étayé par aucune pièce autre que la fiche de fonctions de directeur administratif qui ne prévoit que la formalisation des dossiers des demandes d'autorisation et de renouvellement en sorte que toutes les contestations avancées par le salarié ne peuvent pas être vérifiées ni, partant, être toutes certainement écartées ;

Le deuxième motif est avéré dans la mesure, d'une part, où seul le nouveau responsable en titre , désigné depuis le 19 octobre 2007, était qualifié pour signer les avenants tarifaires et, d'autre part, où M. [E] aurait effectivement dû traiter lui-même la demande de la CPAM du 21 janvier 2008 relative à la transmission d'un K BIS plutôt que de se contenter de la transmettre le 24 janvier à l'ancien dirigeant et le 11 février au conseil de la nouvelle société et de tarder ensuite à s'en préoccuper, comme s'il n'était qu'un agent d'exécution dans l'ignorance des modifications statutaires de la société ;

Le troisième motif est matériellement démontré sur les reproches d'insuffisances qu'il contient par les divers courriels et échanges de courriels de 2008 produits par l'employeur, et ci-après indiqués, sans que les contestations et explications avancées par le salarié permettent de les écarter dans leur matérialité ou imputabilité à ce dernier ;

Il en est ainsi du retard dans la production des statistiques d'activité ayant provoqué la non validation des commentaires des reportings mensuels et le refus du reporting de mai 2008 (échange de courriels du 16 mai, courriel du 13 juin).

Il en est de même des diverses relances pour la production des informations ou analyses relatives aux contrats(courriel de troisième rappel du 4 mars 2008), au document de synthèse (20 et 30 juin), à l'activité et à la clôture des comptes à fin juin (13 et 17 juin), aux statistiques d'occupation des lits (9 juin), à l'organisation des services (30 avril), au contrat intérim QUICK ( 7 et 17 avril ) ainsi qu'au rapport d'étape du contrat d'objectif (divers courriels de mars) ;

Il en est également ainsi de l'absence de réponse aux demandes de travaux et de réparation émises au cours des mois de novembre et décembre 2007, janvier et février 2008 par le cadre des blocs opératoires et les demandes faites par la direction à ce sujet les 8 et 17 avril 2008 après communication, le 26 mars 2008, du budget 2008 et de l'enveloppe d'investissement de 2008 ;

Quant au quatrième grief, l'annuaire de crise réclamé dès le 26 mars 2008 et après divers rappels en avril 2008 n'a pas été réalisé avant sa première version du 24 juin ;

M. [E] justifie de l'existence d'un plan blanc du 30 octobre 2006 et d'une transmission, avec ses excuses pour le retard, du plan blanc qui cependant comporte deux mentions de mise à jour du 18 février 2008 et du 24 juillet 2007, cette dernière que l'employeur lui oppose sans cependant que les éléments du dossier permettent à la cour de déterminer s'il s'est ou non uniquement agi de la transmission du document de 2007 avec seulement mention d'une seule nouvelle date de mise à jour;

Les faits ainsi établis constituent des éléments concrets qui permettent de vérifier que l'employeur a, sans détournement de pouvoir ni abus de droit, objectivement exercé par sa décision de licenciement reposant sur l'insuffisance professionnelle du salarié son pouvoir patronal d'appréciation de la non adaptation de M. [E] aux nouvelles conditions d'exercice de son travail demandées à ce dernier sans modification de son contrat et qui n'appelaient pas, compte tenu de leur objet et de l'étendue de l'expérience du salarié, une quelconque formation de ce dernier ;

Il y a lieu, dès lors, de retenir un licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, lequel n'exige pas un préjudice chiffrable de l'employeur, par réformation du jugement ;

En conséquence la demande d'indemnisation du licenciement sera rejetée comme celle de réparation du préjudice moral pour abus dans l'exercice de ce droit, les circonstances et conditions de la mise en oeuvre de cette décision ne s'avérant pas présenter un caractère brutal ni vexatoire, en particulier quant à la dispense d'exécution du préavis ;

Sur les demandes salariales

La demande complément de salaire du mois de janvier 2009 s'avère justifiée comme suit :

4972,75 x 12/30 = 1989,10

- 1918,88

= 78,22

La demande de prime d'ancienneté est également justifiée comme suit :

4972,75 x 24 % = 1193,46 x 12/30 = 477,38

-458,61

= 18,77

Quant au RTT

L'employeur justifie du paiement des RTT dues, soit 6 jours en février et 8 jours en décembre pour, respectivement, 1859 € et 2504 € ;

Quant aux congés payés

A l'examen du décompte et des éléments de base du calcul avancés par le salarié la somme de 2674,91 € est due au titre de la règle du 10e en l'espèce plus favorable ;

Sur le complément de gratification

Cette demande n'est pas fondée, M. [E] se fondant sur les versements à lui antérieurement faits malgré son arrêt maladie à la différence de la règle commune dans l'entreprise, lesquels ne correspondent pas à un usage à défaut précisemment de généralité et n'apparaissent pas présenter pour l'employeur un caractère obligatoire qui ne résulte pas des seuls versements précités ;

Sur la garantie de salaire pendant l'arrêt maladie

Cette demande est justifiée, la convention collective nationale de l'hospitalisation privée prévoyant en son article84 une garantie de ressources intégrale sans délai de carence pour les cadres en sorte que la période initiale de franchise de 30 jours de l'assurance n'est pas opposable à M. [E]; il en résulte une créance de 3757 € déduction faite des indemnités journalières de la sécurité sociale

et des impositions applicables ;

Sur le complément d'indemnité conventionnelle de licenciement

Cette demande sera rejetée comme injustifiée, le versement par l'employeur de 105 319 € correspondant au maximum de 15 mois fixé par l'article 47 de la convention collective précitée ;

La remise des bulletins de salaire et de l'attestation Pôle emploi rectifiés en fonction des dispositions de cet arrêt sera prescrite sans astreinte ;

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de M. [E] qui succombe sur l'essentiel de ses demandes sans application, par considération d'équité, de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par mise à disposition au greffe, publiquement, contradictoirement et en matière prud'homale,

Reçoit les appels formés à titre principal est incident,

Confirmant pour partie le jugement entrepris, le réformant sur le surplus et statuant à nouveau:

- Dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- Condamne la clinique [2] à payer à M. [E] les sommes suivantes :

-78,22 € et 18,77 € à titre de rappels de salaire et de prime d'ancienneté du mois de janvier 2009,

-2674,91 € de solde d'indemnité compensatrice de congés payés,

-3757 € de complément de salaire garanti du 13 janvier au 7 février 2009,

- Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la demande introductive d'instance,

- Ordonne la délivrance par la clinique [2] à M. [E] des bulletins de salaire et de l'attestation pôle emploi rectifiés conformément aux dispositions du présent arrêt,

- Déboute M. [E] de toutes ses autres demandes,

- Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamne M. [E] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre c
Numéro d'arrêt : 10/05835
Date de la décision : 08/09/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9C, arrêt n°10/05835 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-08;10.05835 ?
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