La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/07/2011 | FRANCE | N°10/22872

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 13 juillet 2011, 10/22872


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 13 JUILLET 2011

MN

N° 2011/469













Rôle N° 10/22872







[E] [M]





C/



M. LE PROCUREUR GENERAL PRES DE LA COUR

D' APPEL D'AIX EN PROVENCE



















Grosse délivrée

le :

à :la SCP SIDER



















Décision défér

ée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 15 Décembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/05588.







APPELANT



Monsieur [E] [M]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 9] (ARMENIE)

demeurant [Adresse 5]





Représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

Ayant pou...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 13 JUILLET 2011

MN

N° 2011/469

Rôle N° 10/22872

[E] [M]

C/

M. LE PROCUREUR GENERAL PRES DE LA COUR

D' APPEL D'AIX EN PROVENCE

Grosse délivrée

le :

à :la SCP SIDER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 15 Décembre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/05588.

APPELANT

Monsieur [E] [M]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 9] (ARMENIE)

demeurant [Adresse 5]

Représenté par la SCP SIDER, avoués à la Cour,

Ayant pour avocat Me Frédéric ROSSLER, avocat au barreau de NICE

INTIME

LE PROCUREUR GENERAL

PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

[Adresse 11]

représenté par Madame POUEY, substitut général.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Avril 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Michel NAGET, Conseiller

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2011 et qu'à cette date le délibéré par mise à disposition au greffe était prorogé au 13 Juillet 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Juillet 2011,

Signé par Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller et Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Rappel des faits et de la procédure :

Monsieur [E] [M], né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 9] (Arménie) a, le [Date mariage 1] 1999, contracté mariage à [Localité 10] avec Madame [W] [S], née le [Date naissance 2] 1933 à [Localité 6].

Ce mariage a été déclaré nul, pour défaut de consentement, par jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 18 septembre 2007, aujourd'hui définitif, au motif que les époux n'y avaient donné leur consentement que dans le but de permettre à Monsieur [M] d'obtenir un titre de séjour.

Entre temps, et le premier avril 2000, est née à [Localité 10] [J] [M], de [E] [M] et de [I] [Y], elle-même née le [Date naissance 4] 1981 à [Localité 8] (Arménie), avec laquelle celui-ci avait continué d'entretenir une vie de couple, bien qu'il eût épousé une autre personne.

D'autre part, le 22 juillet 2002, Monsieur [M] a souscrit, par devant le Juge du Tribunal d'Instance de Lille, une déclaration en vue d'obtenir la nationalité française, qui a été enregistrée le premier août 2003, sous le numéro 16.471/03.

C'est dans ces conditions que le Procureur de la République auprès du Tribunal de Grande Instance de Nice a, suivant assignation du 22 septembre 2009, introduit une demande qui tendait à faire déclarer caduque cette déclaration de nationalité, comme conséquence de l'annulation du mariage, et ce n'est que de façon subsidiaire, qu'il en demandait l'annulation de son enregistrement.

Par jugement en date du 15 décembre 2010, le Tribunal, accédant à cette demande, a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription, opposée par Monsieur [E] [M], et a déclarée caduque la déclaration souscrite par lui le 22 juillet 2002.

Il a donc dit que [E] [M] n'avait pas la nationalité française et que mention de son jugement serait porté en marge de l'acte de mariage, de même que sur son acte de naissance, et sur celui de [W] [S].

Le Tribunal a encore ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil, en ce qui concerne la déclaration en litige.

Enfin, Monsieur [E] [M] a été condamné aux dépens.

Monsieur [E] [M] a interjeté appel de cette décision, suivant déclaration reçue au Greffe de la Cour le 21 décembre 2010.

Par conclusions déposées le 4 mars 2011, il en demande la réformation, et conclut au rejet des prétentions du Ministère Public.

De son côté, ce dernier a requis la confirmation du jugement entrepris, et subsidiairement seulement l'annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité en litige.

M O T I F S :

A l'appui de son appel, Monsieur [M] ne fait valoir qu' un seul moyen fondé sur la prescription biennale prévue par l'article 26-4 du code civil, en expliquant que la découverte de sa fraude 'résulte du prononcé du jugement du 18 septembre 2007". Ainsi, l'action en nullité de la déclaration de nationalité serait donc tardive, pour n'avoir été introduite que le 22 septembre 2009.

En l'espèce, il résulte des énonciations du jugement rendu le 18 septembre 2007 que le mariage célébré le [Date mariage 1] 1999 entre Monsieur [E] [M] et Madame [W] [S] était entaché d'une fraude flagrante, puisque ces deux personnes n'ont jamais vécu ensemble, si peu que ce soit, le prétendu mari ayant entretenu, à la même époque, un concubinage avec une autre personne, dont il devait avoir un enfant, un an et trois mois plus tard.

Or, l'article 25-1 du code civil, sur lequel le Ministère Public fonde sa demande dispose que 'Le mariage déclaré nul ... ne rend pas caduque la déclaration prévue à l'article 21-2 au profit du conjoint qui l'a contracté de bonne foi'. Ce texte signifie, que cette déclaration est au contraire caduque, vis-à-vis de l'époux de mauvaise foi, comme c'est le cas ici. Dans ce cas, la caducité résulte directement de l'annulation du mariage.

Par contre, l'article 26-4 du code civil, qui édicte la prescription biennale alléguée par l'appelant, concerne l'action en annulation de l'enregistrement de la déclaration de nationalité, d'où il suit que l'annulation du mariage suffit à elle seule à entraîner la caducité de la déclaration prévue par l'article 21-2 du code civil. La décision entreprise sera donc confirmée en ce que le Tribunal a constaté cette caducité.

En second lieu, le point de départ de la prescription édictée par l'article 26-4 susvisé se situe à compter de la découverte de la fraude, lorsque la déclaration est frauduleuse.

En l'espèce, il est établi que le Bureau des nationalités qui était le seul service susceptible de centraliser les renseignements relatifs à la fraude commise par Monsieur [M] à [Localité 10], et au jugement d'annulation de son mariage prononcé à [Localité 7], n'a été avisé, par un courrier du Parquet de Grasse que le 8 octobre 2007. Le délai prévu par l'article 26-4 susvisé du code civil ayant pour point de départ la découverte de la fraude, l'action, en ce qu'elle tend à la nullité de l'enregistrement de la déclaration de nationalité (elle-même caduque) n'est pas prescrite.

En effet, pour que la fraude puisse apparaître, il fallait savoir que d'une part le mariage de Monsieur [M] était nul, et que d'autre part, c'est en se servant de sa qualité d'époux de Madame [S] que l'intéressé s'était fait reconnaître la nationalité française. Or, le jugement qui a annulé le mariage est postérieur de plus de cinq ans à la déclaration de nationalité en litige, en sorte que lorsqu'elle a été souscrite et enregistrée, rien ne permettait encore de déceler la fraude.

En second lieu, lorsque l'annulation du mariage a été prononcée le 18 septembre 2007, rien ne permettait non plus de connaître l'existence d'une déclaration de nationalité souscrite le 22 juillet 2002 devant une juridiction d'un autre ressort. Du reste, les motifs du jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Grasse, expliquent que 'les époux ont donné leur consentement au mariage uniquement pour permettre à [E] [M] d'obtenir un titre de séjour', mais ne comporte aucune allusion à la déclaration en litige, effectuée devant le Juge du Tribunal d'Instance de Lille, en sorte qu'à l'évidence, le Tribunal a statué dans l'ignorance du fait que le mariage frauduleux avait également servi à acquérir la nationalité française. Il aura donc fallu procéder aux formalité de publication à l'Etat Civil, pour pouvoir déceler dans son ensemble, l'irrégularité qui a permis à l'intéressé d'usurper une nationalité à laquelle il n'avait pas droit.

Dans ces conditions, la Cour ne saurait suivre l'analyse de l'appelant, selon laquelle, le délai de deux ans prévus par l'article 26-4 aurait pour point de départ la date du jugement d'annulation, rendu par le Tribunal de Grande Instance de Grasse, le texte de cette décision révélant qu'au contraire, la fraude était passée inaperçue, en ce qu'elle concerne la nationalité de son auteur.

Ainsi, non seulement le jugement entrepris doit être confirmé en ses dispositions par lesquelles le Tribunal a constaté la caducité de la déclaration souscrite le 22 juillet 2002, et ordonné que mention de sa décision soit portée sur les pièces d'état civil de l'intéressé, mais il convient également de prononcer l'annulation de l'enregistrement de ladite déclaration, conformément à l'article 26-4 du code civil.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, mis à disposition au Greffe,

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré.

Déclare Monsieur [E] [M] recevable, mais mal fondé en son appel du jugement rendu le 15 décembre 2010, par le Tribunal de Grande Instance de Nice.

Confirme, en conséquence le dit jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant :

Annule l'enregistrement effectué le premier août 2003, sous le numéro 16.471/03, (dossier numéro 2002DX21053), de la déclaration souscrite par l'appelant le 22 juillet 2002 devant le Tribunal d'Instance de Lille.

Laisse les dépens d'appel à la charge de Monsieur [M].

Le Greffier Le Conseiller pour le Président empêché

S.Audoubert H.Fournier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 10/22872
Date de la décision : 13/07/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°10/22872 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-07-13;10.22872 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award