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30/06/2011 | FRANCE | N°10/11639

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 30 juin 2011, 10/11639


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2011

FG

N° 2011/ 436













Rôle N° 10/11639







[Adresse 8]





C/



[E] [J]

[S] [O]

[R] [W]

[L] [M]





















Grosse délivrée

le :

à :

















Décision déférée à la Cour :



Ju

gement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 17 Mai 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 07/5210.





APPELANTE





[Adresse 8],

Association reconnue d'utilité publique prise en sa délégation régionale dont le siège est [Adresse 6]

agissant poursuites et diligences de son représentant légal y domicilié





Représentée...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2011

FG

N° 2011/ 436

Rôle N° 10/11639

[Adresse 8]

C/

[E] [J]

[S] [O]

[R] [W]

[L] [M]

Grosse délivrée

le :

à :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 17 Mai 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 07/5210.

APPELANTE

[Adresse 8],

Association reconnue d'utilité publique prise en sa délégation régionale dont le siège est [Adresse 6]

agissant poursuites et diligences de son représentant légal y domicilié

Représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour,

Assistée de Me Isabelle RAFEL, de la SCP A. VIDAL NAQUET avocats associés au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Monsieur [E] [J]

demeurant [Adresse 1]

Monsieur [S] [O]

demeurant [Adresse 4]

Monsieur [R] [W]

demeurant [Adresse 5]

Monsieur [L] [M]

demeurant [Adresse 2]

Représentés tous les quatre par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour,

Ayant pour avocat Me Thierry CHAREYRE, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 01 Juin 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Michel NAGET, Conseiller

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Madame Agnès BUCQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

L'association La Croix Rouge Française a exploité un établissement privé de soins médicaux dénommé Hôpital du [7] sis [Adresse 3].

M.[E] [J], M.[I] [H] ,[O],M.[R] [W] et M.[L] [M], tous quatre chirurgiens plasticiens, chirurgie réparatrice et esthétique, exerçant à titre libéral, exerçaient leur activité au sein de L'Hôpital du [7] géré dans le cadre de contrats d'exercice libéral à durée indéterminée.

Des difficultés sont intervenues avec les services de sécurité sociale et de contrôle hospitalier au sujet de l'activité de chirurgie esthétique, alors l'association Croix Rouge française était en train de négocier la cession de son activité chirurgicale à l'association Hôpital [9].

Il en est résulté une cessation de cette activité en janvier 2006, avant même la fermeture des blocs opératoires des locaux de l'hôpital du [7] le 12 juin 2006, du fait du transfert de l'activité de chirurgie à l'hôpital [9].

Le 4 mai 2007, MM. [J], [O], [W] et [M] ont fait assigner la Croix Rouge Française devant le tribunal de grande instance de Marseille en responsabilité contractuelle.

Par jugement en date du 17 mai 2010, le tribunal de grande instance de Marseille a :

- constaté le caractère abusif de la rupture des contrats d'exercice libéral liant [E] [J], [R] [W], [S] [O] et [L] [M] d'une part et la Croix Rouge française d'autre part,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [E] [J] la somme de 32.000 €,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [R] [W] la somme de 24.000 €,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [S] [O] la somme de 2.000 €,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [L] [M] la somme de 10.000 €,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [E] [J] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [R] [W] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l la Croix Rouge française à verser à [S] [O] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Croix Rouge française à verser à [L] [M] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande formée par la Croix Rouge française sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamné la Croix Rouge française aux dépens, qui seront recouvres conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration de la SCP DE ST-FERREOL TOUBOUL, avoués, en date du 21 juin 2010, la Croix Rouge Française a relevé appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 2 mai 2011, l'association Croix Rouge Française demande à la cour d'appel de :

- réformer le jugement,

- débouter MM.[J], [O], [W] et [M] de l'ensemble de leurs demandes,

- à titre subsidiaire, vu l'absence de preuve rapportée du résultat net généré par leur activité au sein de l'hôpital du [7], les débouter de leurs demandes indemnitaires ni certaines, ni liquides, ni exigibles, et débouter M.[M] de toute demande dans la mesure où il a transféré toute son activité au sein de l'hôpital [9] dans lequel il exerce actuellement,

- à titre infiniment subsidiaire, dire qu'un préavis a couru et diminuer en conséquence la demande indemnitaire,

- condamner MM. [J], [O], [W] et [M] au paiement d'une somme de 3.000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner MM.[J], [O], [W] et [M] aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP de SAINT-FERREOL et TOUBOUL, avoués.

La Croix Rouge rappelle que s'agissant de contrats d'exercice libéral à durée indéterminée, chaque partie pouvait y mettre fin à tout moment et sans motif. Elle estime que cette fin des contrats a été annoncée suffisamment à l'avance de la cession d'activité de l'hôpital du [7] et d'un transfert d'activité à l'hôpital [9].

La Croix Rouge estime avoir donné aux médecins concernés un préavis raisonnable.

Elle fait valoir qu'il appartenait aux médecins concernés de faire les dossiers complets pour la continuation de leur activité au [7] et que les médecins sont à l'origine de leur perte d'activité, et de la décision de la DDASS d'interdire toute activité de chirurgie esthétique à compter de janvier 2006.

Par leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 17 mai 2011, M.[E] [J], M.[S] [O], M.[R] [W] et M.[L] [M] demandent à la cour d'appel, sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la rupture des relations contractuelles est imputable à la Croix Rouge française, mais le réformer quant aux montants alloués au titre des préjudices subis,

- condamner la Croix Rouge française à leur payer, au titre du préjudice subi du fait de la rupture des relations contractuelles les sommes de :

-151.500 € au profit de M.[W],

- 90.000 € au profit de M.[J],

- 117.976 € au profit de M.[M],

- 139.400 € au profit de M.[O],

- condamner la Croix Rouge française au paiement d'une somme de 50.000 € à chacun en réparation de leur préjudice moral,

- condamner la Croix Rouge française au paiement d'une somme de 5.000 € à chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Croix Rouge française aux entiers dépens, dont ceux d'appel distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ, avoués.

Les quatre chirurgiens estiment que la Croix Rouge a mis fin brusquement et sans préavis aux contrats d'exercice libéral. Ils exposent qu'à la suite d'une mise en cause par l'agence régionale hospitalière, le directeur de l'hôpital avait déjà le 1er mars 2005 interrompu l'activité de chirurgie esthétique jusqu'au 25 mai 2005. Ils précisent que lorsqu'ont été publiés les décrets relatifs aux installations de chirurgie esthétique l'hôpital du [7] n'a déposé de dossier d'agrément et que suite à la décision de transfert vers l'hôpital [9], l'activité de chirurgie esthétique a pris fin le 12 janvier 2006. Ils ajoutent que l'hôpital [9] ne permettait cette activité ou dans des limites horaires réduites. Ils exposent avoir dû mettre fin à leur activité au [7] sans reprendre cette activité à [9]. Ils demandent une somme correspondant à un préavis de 18 mois pour M.[W], et de 12 mois pour M.M.[J], [O] et [M].

L'instruction de l'affaire a été déclarée close, d'accord des représentants des parties, le 1er juin 2011, avant les débats .

MOTIFS,

-Les contrats d'exercice libéral :

Les quatre chirurgiens exerçaient une activité de chirurgiens plasticiens, laquelle se subdivisait en deux spécialités, d'une part la chirurgie réparatrice, prise en charge par la sécurité sociale, qui ne faisait pas difficulté, d'autre part, la chirurgie esthétique proprement dite, non prise en charge par la sécurité sociale.

Sur le contenu des contrats d'exercice libéral qui les liait à l'hôpital du [7], les chirurgiens ne donnent pas d'éléments précis. Il s'agissait de contrats non écrits. Rien ne permet de dire que ces contrats tenaient plus à l'activité de chirurgie plastique réparatrice, qu'à celle de chirurgie plastique esthétique.

Les quatre chirurgiens présentent cependant ces deux activités comme un ensemble indifférencié.

Cependant les règles de contrôle des autorités sanitaires et sociales ne sont pas les mêmes et le payeur n'est pas le même.

D'après un courrier du directeur de l'hôpital du [7] du 25 mai 2005 aux quatre chirurgiens, plus un cinquième chirurgien concerné, l'activité de chirurgie esthétique avait représenté pour les cinq praticiens concernés en 2001, 2002, 2003 et 2004, environ 10% de l'activité générale de chirurgie plastique. A titre d'exemple en 2004, le nombre de patients pris en charge pour la chirurgie esthétique était de 70 alors que celui des patients pris en charge au titre de la chirurgie réparatrice s'élevait à 700.

S'agissant de contrats à durée indéterminée, et en l'absence de clause spécifique, il pouvait y être mis fin, en dehors d'un accord des parties, de manière unilatérale et à tout moment, sans motif particulier, sauf abus d'une partie dans l'usage de ce droit.

-La fin de l'activité de chirurgie à l'hôpital du [7] :

Le 10 mars 2005 le conseil de surveillance de l'hôpital a décidé d'un projet de fusion avec l'hôpital [9] et que les médecins exerçant au sein de l'hôpital du [7] ont été informés de cette décision lors de la commission médicale d'établissement 14 mars 2005 et qu'un comité de suivi de cette opération a été créé au sein de la commission médicale d'établissement de l'hôpital du [7].

Le 3 décembre 2005, par lettre circulaire aux médecins, l'association La Croix Rouge française a confirmé cette décision de transfert d'activité.

Le 6 janvier 2006, par lettre, l'association La Croix Rouge française a précisé que ce transfert entraînait la restructuration de l'hôpital du [7] et la cessation des contrats passés avec les médecins.

Le transfert a été effectif le 12 juin 2006.

-La fin de l'activité de chirurgie esthétique à l'hôpital du [7] :

Un incident est survenu en janvier 2005.

Le directeur de l'agence régionale hospitalière a écrit le 13 janvier 2005 au directeur de l'hôpital du [7] : 'suite à une plainte anonyme transmise à l'Urssaf, j'avais demandé en juin 2004 aux services de l'assurance maladie et de l'Etat, de diligenter une enquête conjointe sur la pratique de la chirurgie esthétique dans votre établissement. Les résultats montrent...que 36% des dossiers étudiés comportent des prestations mises indûment à la charge de l'assurance maladie...Les médecins conseils ont mis à jour des pratiques de chirurgie esthétique sous couvert d'autres actes accessoires (ne relevant que chirurgie ambulatoire ou de soins externes) pour 'justifier' la prise en charge de frais d'hospitalisation et autres prestations...En conséquence, je vous demande de mettre un terme dans les meilleurs délais aux pratiques sus-citées..Je souhaite également que vous m'apportiez toutes les précisions nécessaires sur les moyens que vous allez mettre en oeuvre pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté entre la chirurgie esthétique, risque non couvert par l'assurance maladie, et la chirurgie réparatrice'

Il en est résulté, qu'à la suite des abus ainsi dénoncés, l'activité de chirurgie esthétique a été suspendue à l'hôpital du [7].

Les chirurgiens concernés ayant insisté pour la reprise de cette activité, le directeur de l'hôpital du [7] leur écrivait le 4 avril 2005 : 'si le conseil de surveillance ne s'est pas opposé dans sa dernière séance à une reprise de l'activité de chirurgie esthétique, je vous rappelle que cette décision reste subordonnée à ...(suite liste d'exigences).

Je me dois de vous rappeler que, si le projet avec l'hôpital [9] devait se réaliser, cet établissement ne souhaite pas une activité de chirurgie esthétique. N'y serait transférée que la seule activité de chirurgie réparatrice. '.

Par cette lettre les quatre chirurgiens étaient avisés que l'activité de chirurgie esthétique ne serait pas reprise à l'hôpital [9], et qu'en conséquence, ils pourraient y continuer leur activité mais seulement au titre de la chirurgie réparatrice, l'exercice de l'activité de chirurgie esthétique restait provisoirement maintenue, tant que le transfert à [9] n'aurait pas lieu.

En réalité les nouvelles dispositions relatives aux installations de chirurgie esthétique allaient compliquer les choses.

Par lettre du 3 novembre 2005, le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales rappelait au directeur de l'hôpital du [7] : 'Par décret n°2005-776 du 11 juillet 2005, relatif aux conditions d'autorisation des installations de chirurgie esthétique, il est désormais fait obligation aux personnes physiques ou morale, y compris aux établissements de santé publics ou privés pratiquant cette activité de déposer un dossier complet...dans un délai de six mois à compter du 12 juillet 2005, date de publication du présent décret. A défaut d'une telle demande, je vous informe qu'à l'échéance du délai de six mois soit : le 12 janvier 2006, vous serez tenu de cesser sans délai toute activité de chirurgie esthétique'.

Il est clair que ce n'était pas aux chirurgiens eux-mêmes de procéder au dépôt d'un dossier mais à l'association Croix Rouge française, responsable de l'hôpital du [7].

C'est ce qu'avaient rappelé les quatre chirurgiens concernés par lettre au directeur de l'hôpital du [7] le 16 juin 2005 : 'malgré les projets d'avenir avec l'hôpital [9] (date de transfert incertaine') Il nous semble souhaitable que la direction dépose un dossier à la préfecture, en l'absence duquel toute activité de chirurgie esthétique cessera immédiatement après le 12/01/06'.

Alors que l'activité de chirurgie esthétique allait de toutes façons s'arrêter au moment du transfert, l'association Croix Rouge française n'a déposé aucun dossier en ce sens.

Il en est résulté que, sans attendre le transfert à l'hôpital [9], l'activité de chirurgie esthétique a du s'arrêter le 12 janvier 2006, cinq mois avant sa cessation inévitable.

-Les demandes des quatre chirurgiens :

Les quatre chirurgiens demandent des dommages et intérêts au titre de l'absence de préavis.

Il y a lieu de constater que seule leur activité de chirurgien esthétique à l'hôpital du [7] s'arrêtait le 12 janvier 2006. Il leur était toujours loisible d'exercer leur activité de chirurgie plastique réparatrice.

Ils ne peuvent en conséquence se plaindre d'y avoir cessé cette dernière activité à cette date.

Ils ont dû cesser leur activité de chirurgie réparatrice le 12 juin 2006.

En ce qui concerne la cessation de l'activité de chirurgie esthétique au [7] le 12 janvier 2006, ils en ont été avisés officiellement du jour au lendemain, même s'ils savaient que c'était inéluctable.

En ce qui concerne la cessation de l'activité de chirurgie réparatrice, ils ne précisent pas à quelle date, ils en ont été officiellement avisés, avant le 12 juin 2006.

En conséquence, seule la cessation de l'activité de chirurgie esthétique sans préavis sera indemnisée, étant observé qu'au vu des éléments rappelés ci-dessus, cette activité représentait environ 10% de leur activité chirurgicale.

Quant à la durée du préavis, aucun contrat type réglementaire ne s'imposait dans ce cadre d'exercice de la médecine libérale, en présence de patients libres de choisir leur médecin.

Aucune disposition n'avait été convenue entre les parties au sujet du préavis, aucun courrier n'est produit de nature à apporter une précision à ce sujet.

Le préavis doit être d'une durée raisonnable. Il est le même que ce soit l'hôpital ou le médecin qui prenne l'initiative de la rupture. Il doit être d'une durée suffisante pour permettre au médecin de réorganiser son activité si c'est l'hôpital qui met fin au contrat, et à l'hôpital de trouver un autre médecin disponible et compétent si c'est le médecin qui y met fin.

Le médecin exerce une profession libérale. Il n'est pas un salarié de l'hôpital. Mais selon l'importance de l'activité exercée au sein de cet hôpital qui lui fournit ses patients, il est plus ou moins dans une relation d'inter-dépendance avec cet hôpital. Il doit aussi conserver la liberté de rompre ce contrat sans rester dépendant de l'hôpital trop longtemps avant de le quitter.

A cet égard il est d'usage de tenir compte de l'ancienneté des relations, la prévisibilité d'une rupture devient en principe de plus en plus réduite quand la relation a durée longtemps et que des relations de confiance de longue durée se sont installées ; elle reste possible plus souvent quant la relation est encore récente.

En l'occurrence M.[W] exerçait au [7] depuis 12 ans, M.[M] depuis 9 ans, M.[O] depuis 5 ans et M.[J] depuis 4 ans.

Un préavis raisonnable d'usage est d'une année pour M.[W], qui exerçait cette activité au [7] depuis plus de dix ans, et de six mois pour les autres, qui l'exerçaient depuis moins de dix ans.

Les modalités de calcul de cette indemnité n'ayant fait l'objet d'aucune disposition contractuelle, il convient d'apprécier le préjudice subi par ces praticiens du fait de ce manquement.

Il s'agit d'un préjudice purement économique. Il n'est pas établi de préjudice moral.

M.[W] justifie de 101.000 € d'honoraires globaux en 2004. Il sera retenu10% de ceux-ci au titre de la chirurgie esthétique, soit 10.100 €.

La difficulté de retrouver rapidement un autre hôpital pour exercer cette activité lui a fait perdre cette somme pendant la durée du préavis, soit 10.100 €.

M.[O] justifie de 139.400 € d'honoraires globaux en 2004. Il sera retenu 10% au titre de la chirurgie esthétique, soit 13.940 €. Pour une durée de préavis de six mois, son préjudice résultant de la difficulté de trouver un autre hôpital est de 6.970 €.

M.[M] justifie de 117.976 € d'honoraires globaux en 2004. Il sera retenu 10% au titre de la chirurgie esthétique, soit 11.797 €. Pour une durée de préavis de six mois, son préjudice résultant de la difficulté de trouver un autre hôpital est de 5.898, 50 €, somme arrondie à 5.899 €.

M.[J] justifie de 90.000 € d'honoraires globaux en 2004. Il sera retenu 10% au titre de la chirurgie esthétique, soit 9.000 €. Pour une durée de préavis de six mois, son préjudice résultant de la difficulté de trouver un autre hôpital est de 4.500 € .

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu le 17 mai 2010 par le tribunal de grande instance de Marseille,

Statuant à nouveau,

Condamne l'association Croix Rouge française à verser à M.[R] [W], M.[S] [O], M.[L] [M] et M.[E] [J] une indemnité au titre de la rupture sans préavis le 12 janvier 2006 de leur activité de chirurgie esthétique au sein de l'établissement privé Hôpital du [7] à Marseille,

Fixe ces indemnités à :

-dix mille cent euros (10.100 €) pour M.[R] [W],

-six mille neuf cent soixante-dix euros (6.970 €) pour M.[S] [O],

-cinq mille huit cent quatre-vingt-dix-neuf euros (5.899 €) pour M.[L] [M],

- quatre mille cinq cents euros (4.500 €) pour M.[E] M.[J]

,

Condamne l'association Croix Rouge française à verser à M.[R] [W], M.[S] [O], M.[L] [M] et M.[E] [J] une somme de mille euros (1.000 €) à chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Dit que l'association Croix Rouge française supportera les dépens, de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 10/11639
Date de la décision : 30/06/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°10/11639 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-30;10.11639 ?
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