COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 30 JUIN 2011
N° 2011/ 335
Rôle N° 10/02458
Syndicat des Copropriétaires IMMEUBLE SIS [Adresse 5]
C/
[S] [V]
[J] [P] épouse [V]
Grosse délivrée
le :
à :la SCP DE SAINT FERREOL - TOUBOUL
la SCP ERMENEUX CHAMPLY-LEVAIQUE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 01 Décembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° 06/05795.
APPELANT
Syndicat des Copropriétaires de l' IMMEUBLE sis [Adresse 5], demeurant [Localité 4]
représenté par son syndic en exercice la SARL PHILIPPE MATHIEU, dont le siège social est [Adresse 3], elle-même prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège,
représenté par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, Plaidant par la SCP CAMPOCASSO S. - LAMBREY E., avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [S] [V]
né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 7], demeurant [Adresse 5]
Madame [J] [P] épouse [V]
née le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 6] (ALGERIE) (99), demeurant [Adresse 5]
représentés par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avoués à la Cour, représenté par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, plaidant par Me Richard ALVAREZ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 09 Juin 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur André FORTIN, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président
Monsieur André FORTIN, Conseiller
Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie AUDOUBERT.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011.
ARRÊT
Contradictoire,
Magistrat Rédacteur: Monsieur André FORTIN, Conseiller
Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011,
Signé par Monsieur Jean-Paul ASTIER, Président et Madame Sylvie AUDOUBERT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
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Monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, sont propriétaires du lot N° 6 de l'immeuble en copropriété situé à [Adresse 5], pour l'avoir acquis le 18 janvier 2001 de mademoiselle [D] [K], laquelle le tenait des époux [G] selon acte de vente du 23 octobre 1992.
Ce lot est défini ainsi qu'il suit par le règlement de copropriété:
Tout le quatrième étage avec le droit de surélever la toiture de la hauteur nécessaire pour la réalisation d'une mezzanine dans le bâti existant, le droit de prolonger le palier de desserte pour donner accès aux locaux par une nouvelle ouverture, le droit d'édifier sur la toiture une terrasse et un éventuel complément à usage d'habitation et l'escalier du troisième au quatrième étage...
L'acte d'acquisition des époux [V] précise:
... les travaux ayant été réalisés en vertu de l'autorisation ci-après énoncée en seconde partie du présent acte.
Ce qui renvoie à la page 12 de l'acte où est énoncé:
Permis de construire - garantie décennale:
La construction de l'immeuble présentement vendu (...) a été achevée depuis plus de dix ans et a fait l'objet:
- D'un permis de construire délivré le 18 mai 1988
- D'une déclaration d'achèvement des travaux en date du 31 août 1988
- D'un certificat de conformité en date du 17 février 1992...
Les travaux en question ont en effet été réalisés par les époux [G].
En 2002, monsieur [B] [A], géomètre-expert, mandaté par le syndic pour réaliser une note de calcul sur le nombre de millièmes devant être attribués au lot N° 6, faisait la remarque suivante:
À notre avis, la comparaison du plan d'état des lieux, des plans de la copropriété communiqués et la description du lot N° 6 nous laissent à penser que l'aménagement des chambres 2 et 3 en parties privatives ne correspond pas à l'état descriptif de division initial.
Estimant que les travaux réalisés en leur temps par les époux [G] avaient outrepassé les facultés accordées par le règlement de copropriété au propriétaire du lot N° 6, par exploit délivré le 29 août 2006, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a fait assigner monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, à comparaître devant le Tribunal de grande instance d'Aix en Provence pour les voir condamner sous astreinte à supprimer le sens de l'ouverture de la porte installée en haut de la volée d'escalier de l'immeuble, à supprimer l'empiétement sur les parties communes côté cage d'escalier (alignement de la cloison installée par les requis), à faire réaliser par un homme de l'art et à leurs frais les travaux de reprise nécessaires, notamment sous l'escalier (replâtrage), arrêt de la rambarde d'escalier (sciée), travaux de peinture, à démolir les annexions des combles non autorisées et à faire procéder à une remise en état par un homme des l'art et à leurs frais des combles dénommés chambre 2 et 3 sur le plan de monsieur [A], le tout avec exécution provisoire.
Monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, ayant conclu au rejet de ces demandes, ayant demandé qu'il leur soit donné acte de leur accord pour réaliser à leurs frais les travaux de finition pour intégrer totalement les travaux réalisés par leurs soins au niveau du palier du 3ème étage à la jonction avec les parties communes et ayant formulé une demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, par jugement prononcé le 1er décembre 2009, le Tribunal de grande instance d'Aix en Provence:
- Condamnait in solidum monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, à faire supprimer la porte mise en place par eux sur le palier du 3ème étage et à remettre la cage d'escalier en l'état existant avant octobre 2004, ce, dans le délai d'un mois à compter de la signification de son jugement et sous astreinte de 50€ par jour de retard,
- Déboutait le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] du surplus de ses demandes,
- Déboutait monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, de leur demande de dommages et intérêts,
- Disait n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- Condamnait monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, in solidum, aux dépens de l'instance ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 1.200€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
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Par déclaration au greffe de la présente Cour le 8 février 2010, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a interjeté appel de ce jugement prononcé le 1er décembre 2009 par le Tribunal de grande instance d'Aix en Provence.
Il entend:
- Que monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, soient condamnés à faire procéder, dans le mois de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 200€ par jour de retard passé ce délai, à la démolition des chambres N° 2 et 3 sur le plan [A] du 15 mars 2004, avec reconstitution des murs maîtres et de la toiture dans l'état où ils se trouvaient le 2 octobre 1959, date du plan du 4ème étage dressé par 'L'atelier 226" à [Localité 8] et annexé au règlement de copropriété, travaux qui seront à exécuter sur la base d'un descriptif de travaux qui sera établi par l'architecte désigné par le conseil syndical et sous le contrôle d'un homme de l'art dont les honoraires d'intervention devront être supportés par les époux [V], propriétaires du lot N° 6,
- Que le jugement entrepris soit confirmé pour le surplus,
- Que les époux [V] soient condamnés à lui payer la somme de 4.000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.
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Monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, demandent à la Cour:
- De confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de sa demande de remise en son état antérieur du 4ème étage de l'immeuble,
- De l'infirmer en ce qu'il les a condamnés sous astreinte à faire supprimer la porte mise en place par eux sur le palier du 3ème étage et à remettre la cage d'escalier en l'état existant avant octobre 2004,
- De leur donner acte de ce qu'ils acceptent de procéder à l'inversion du sens d'ouverture de la porte mise en place en octobre 2004 et à procéder à la mise en place d'un vasistas,
- De condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à leur payer la somme de 4.000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- De le condamner encore aux dépens de première instance et d'appel.
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MOTIFS DE LA DÉCISION
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Vu les moyens articulés par les parties au soutien de leurs prétentions,
1/ Attendu que c'est à bon droit que le premier juge, confronté à l'opposition de monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, les a condamnés sous astreinte à faire supprimer la porte mise en place par eux sur le palier du 3ème étage, dès lors que la mise en place de cette porte ne pouvait être réalisée qu'avec le consentement de l'assemblée générale des copropriétaires (article 14 du règlement de copropriété relatif aux portes d'entrée des lots) et dès lors que l'ouverture de la dite porte entravait celle de l'appartement du voisin de palier et, étant ouverte, empêchait même ce dernier de sortir de chez lui, comme cela est parfaitement démontré par le constat du 28 mai 2005 soumis aux débats;
Attendu cependant que si le règlement de copropriété impose, pour les modifications des portes d'entrée des lots et donc à plus forte raison pour leur pose, un consentement préalable de l'assemblée générale, dès lors que la partie d'escalier situé derrière la porte litigieuse est, en vertu de la définition de leur lot par le règlement de copropriété, une propriété privative des époux [V], l'assemblée générale ne pourrait, sans commettre un abus de majorité, refuser à ces derniers le droit de se clore, en sorte qu'à défaut de cette autorisation préalable qui doit être demandée par les époux [V] à la plus prochaine assemblée générale, mais en considération de ce qu'un refus de l'assemblée constituerait un abus de majorité, il sera fait droit à la demande de suppression de la porte sous astreinte mais en octroyant aux dits époux [V] un délai d'une année pour s'exécuter;
2/ Attendu, étant observé que les clauses de l'acte d'acquisition des époux [V] ne sont pas opposables au syndicat des copropriétaires mais ne leur réserve qu'un recours à l'égard de leur vendeur, que l'examen des plans et des titres soumis aux débats révèle, comme l'avait justement observé en 2002 monsieur [B] [A], géomètre-expert mandaté par le syndic pour réaliser une note de calcul sur le nombre de millièmes devant être attribués au lots N° 6, que l'aménagement des chambres 2 et 3 en parties privatives qui, en effet, comme l'observe l'expert, ne correspond pas à l'état descriptif de division initial, outrepasse manifestement le droit et donc la faculté accordée aux propriétaires du lot N° 6 par le règlement de copropriété dans le cadre de la définition et des limites de ce lot, en sorte que cet aménagement affecte et empiète en effet sur les parties communes, en l'espèce par la suppression d'une partie de la toiture commune (côté est de l'immeuble) et la surélévation des murs maîtres correspondants;
Attendu, ainsi, qu'il a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de condamner sous astreinte
monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, à procéder à une remise en l'état des lieux conformément à l'état descriptif initial;
Vu les articles 696, 699 et 700 du code de procédure civile,
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
STATUANT PUBLIQUEMENT, CONTRADICTOIREMENT, EN MATIÈRE CIVILE ET EN DERNIER RESSORT,
Reçoit l'appel,
Infirme le jugement prononcé le 1er décembre 2009 par le Tribunal de grande instance d'Aix en Provence,
Condamne monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, à faire supprimer la porte mise en place par eux sur le palier du 3ème étage et à remettre la cage d'escalier en l'état existant avant octobre 2004, ce, dans le délai d'une année à compter de la signification du présent arrêt, sauf à l'assemblée générale des copropriétaires à accorder entre-temps à monsieur [S] [V] et madame [J] [P], son épouse, l'autorisation d'établir une porte au même endroit, cette dernière devant s'ouvrir à l'intérieur de leur lot, ce, sous astreinte de 50€ par jour de retard à l'expiration de ce délai et pendant trois mois à l'issue desquels il pourra être à nouveau statué par le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance d'Aix en Provence,
Les condamne encore à faire procéder à la démolition des chambres N° 2 et 3 sur le plan [A] du 15 mars 2004, avec reconstitution des murs maîtres et de la toiture dans l'état où ils se trouvaient le 2 octobre 1959, date du plan du 4ème étage dressé par 'L'atelier 226" à [Localité 8] et annexé au règlement de copropriété, travaux qui seront à exécuter sur la base d'un descriptif de travaux qui sera établi par l'architecte désigné par le conseil syndical et sous le contrôle d'un homme de l'art dont les honoraires d'intervention devront être supportés par les époux [V], propriétaires du lot N° 6, ce, dans les six mois de la signification du présent arrêt et sous astreinte de 50€ par jour de retard pendant quatre mois à l'issue desquels il pourra être à nouveau statué par le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance d'Aix en Provence,
Les condamne encore à payer au le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 2.500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Les condamne enfin aux dépens de première instance et d'appel, ordonne distraction de ceux d'appel au profit de la SCP de SAINT FERREOL - TOUBOUL, avoués, sur leur affirmation d'en avoir fait l'avance.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S.AUDOUBERT J.P.ASTIER