COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
1re Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 30 JUIN 2011
MN
N° 2011/447
Rôle N° 10/01097
Association DROUOT COTATION DES ARTISTES MODERNES ET CONTEMPORAINS
[K] [E]
Sarl LES EDITIONS REMMAX
C/
[Z] [O]
[D] [I]
D'AIX EN PROVENCE LE PROCUREUR GENERAL PRES DE LA COUR D'APPEL
Grosse délivrée
le :
à :
la SCP MAYNARD - SIMONI
la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN
la SCP BOISSONNET-ROUSSEAU
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 07 Janvier 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 05/13550.
APPELANTS
Association DROUOT COTATION DES ARTISTES MODERNES ET CONTEMPORAINS,
[Adresse 3]
Monsieur [K] [E], fonctionnaire d'Etat et Expert et Assesseurs des Douanes, Directeur du 'Dictionnaire des Cotations des Artistes'
né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 9] (13),
demeurant [Adresse 3]
la SARL LES EDITIONS REMMAX, nom commercial DROUOT COTATION,
[Adresse 4]
représentée en la personne de son gérant
représentéS par la SCP MAYNARD SIMONI, avoués à la Cour,
Assistés de Me Raymond ALEXANDER, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur [Z] [O]
né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 8] (GENUSSON), demeurant [Adresse 6]
Représenté par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoué à la Cour
Assisté de Yann CHOUCQ , avocat au barreau de NANTES
Monsieur [D] [I]
demeurant [Adresse 7]
représenté par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avoués à la Cour,
Assisté de Me Bernard AUBRESPY, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur LE PROCUREUR GENERAL PRES DE LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
[Adresse 5]
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 06 Avril 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur François GROSJEAN, Président
Monsieur Michel NAGET, Conseiller
Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2011,
Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Madame Agnès BUCQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,
Suivant assignation en date du 14 décembre 2005, L'association Drouot Cotation des Artistes Modernes et Contemporains, ainsi que M.[K] [E] et la Sarl les Editions Remmax ont introduit, devant le tribunal de grande instance de Marseille une demande dirigée contre M.[I] et contre M.[Z] [O], pris en qualité de directeur de publication du site ARTactif.com, en vue d'obtenir la suppression d'un article prétendu diffamatoire, publié sur ce site, ainsi que la condamnation in solidum des défendeurs à leur payer à titre de dommages-intérêts :
-à l'association DROUOT COTATION, la somme de 300.000 euros,
-à M.[E], celle de 100.000 euros,
-à la société des éditions Remmax, celle de 150.000 euros,
outre celle de 5.000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de cette demande, ils expliquaient que l'association Drouot Cotation, sous la direction de M.[E], faisait publier chaque année un 'dictionnaire de cotation', éditée par la société Remmax, et vendu en librairie. Or, les 10, 11, 12 et 17 octobre 2005, ils ont fait constater par un huissier la publication, depuis le 25 septembre 2005, sur le site Internet www.artactif.com appartenant à la société ART ACTIF, d'une lettre dont l'auteur serait M.[R] [I], sous le titre 'ATTENTION AUX ARNAQUES', et dont le contenu serait ouvertement diffamatoire tant pour l'ouvrage en question que pour ses auteur et éditeur.
Toujours selon les demandeurs, l'article en question affirmait qu' 'un éditeur parisien' profiterait 'depuis plusieurs années de l'ego sur-dimensionné de certains artistes pour se faire du bon beurre sur leur dos'. Il y était encore affirmé que 'l'édition du dictionnaire, qui jouait la confusion avec la célèbre salle des ventes DROUOT' aurait ' permis d'attraper des centaines d'artistes qui payent cher, 100 euros, une inscription de quelques mots de textes et de 2 images guère plus grande qu'un timbre-poste, et que malgré les apparences, ce dictionnaire n'aurait ' aucun lien avec DROUOT SA où officient des commissaires-priseurs.'
L'éditeur se voyait encore accusé de publicité mensongère en affirmant que son dictionnaire était disponible dans toutes les librairies, alors qu'en fait cet ouvrage n'était distribué que dans 2.000 points de vente, alors qu'il en existe 26.000 en France. La valeur de la cotation, énoncée par les artistes eux-mêmes, était critiquée, et l'article se terminait par ces mots 'Elle n'est pas belle l'arnaque ''.
Les demandeurs expliquaient encore que l'origine de cet article était une société ARTACTIF, crée en 1998, et qui proposait aux artistes des services concurrents. Cette mauvaise publicité aurait causé à l'association Drouot Cotation un tort considérable, de nombreux artistes ayant refusé de renouveler leur adhésion pour l'année 2006, au point que la S.a.r.l. les Editions Remmax-Drouot Cotation aurait été dans l'obligation de cesser son activité depuis le 31 décembre 2006.
Par jugement en date du 7 janvier 2010, le tribunal de grande instance de Marseille a débouté les demandeurs de leurs prétentions, au motif essentiel que les faits incriminés ne pouvaient constituer la diffamation prévue par l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881.
[N] et [I] ont d'autre part été déboutés des demandes reconventionnelles de dommages-intérêts qu'ils avaient présentées. En revanche, M.[E], la société des éditions Remmax et l'association Drouot Cotation des Artistes Modernes et Contemporains ont été condamnés in solidum à verser à [N] et [I] la somme de 1.200 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'association Drouot Cotation des Artistes Modernes et Contemporains, M.[K] [E] et la S.a.r.l. les Editions Remmax ont relevé appel de cette décision, suivant déclaration reçue au greffe de la cour d'appel le 18 janvier 2000.
En l'état de leur dernière conclusions, ils en demandent la réformation, et reprennent leurs prétentions de première instance, dont ils ont augmenté le taux, la société Remmax sollicitant, à présent, la condamnation des intimés in solidum à lui payer la somme de 276.364 euros en réparation d'un préjudice financier, et celle de 150.000 euros au titre d'un préjudice commercial. Quant à l'association Drouot Cotation, elle leur réclame une somme de 300.000 euros au titre de son préjudice moral et de sa 'perte d'image' , tandis que M.[K] [E] conclut à la condamnation des intimés à lui payer la somme de 150.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral.
Ils demandent l'insertion du présent arrêt dans cinq journaux de leur choix, ainsi que la condamnation des intimés aux entiers dépens ainsi qu'au payement d'une somme de 15.000 euros réclamée en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 23 février 2011, M.[Z] [O] a soulevé la prescription prévue par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, et ce n'est qu'à titre subsidiaire qu'il conclut à la confirmation du jugement déféré. Il a également relevé appel incident pour faire juger abusive l'action engagée par M.[E] et la S.a.r.l. Remmax auxquels est réclamée une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts. En toutes hypothèse il conclut à la condamnation des appelants à lui payer la somme de 15.000 euros au titre des frais non récupérables.
M.[I] à lui aussi conclu à titre principal à la prescription de l'action de ses adversaires, et subsidiairement à la confirmation du jugement entrepris. Il sollicite également la condamnation des appelants à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Ministère public, auquel l'affaire a été communiquée, à fait connaître qu'il s'en rapportait à la décision de la cour d'appel.
M O T I F S :
Il s'avère qu'effectivement, les appelants ont laissé prescrire leur action, fondée sur les dispositions de la loi du 29 juillet 1881, et plus particulièrement sur la notion de diffamation.
L'appel a été interjeté le 18 janvier 2010. Puis, aucun acte de procédure, et en tous cas, aucun acte susceptible d'avoir interrompu la prescription de trois mois prévue par l'article 65 de la dite loi n'a été accompli, jusqu'au 31 mai 2010, date à laquelle les appelants ont assigné devant la cour d'appel les deux intimés, qui n'ont constitué avoué que le 14 juin 2010.
L'association Drouot Cotation, M.[E] et la société les Editons Remmax font état, vainement, de conclusions déposées le 2 avril 2010. En effet, ces conclusions ont été remises au greffe sans avoir été, au préalable, signifiées aux intimés, ce qui veut dire qu'elles ne sont pas conformes à l'article 909 du code de procédure civile. Ce texte prévoit que les conclusions doivent être déposées au greffe 'avec la justification de leur notification', ce qui n'a pas été le cas. De plus, une demande ne peut être présentée par voie de conclusions contre un défendeur ou un intimé défaillant, ainsi qu'il résulte du second alinéa de l'article 68 du même code.
En conséquence, ces conclusions en date du 2 avril 2010 n'ont pu lier le contentieux entre les parties, et elles ne peuvent davantage avoir interrompu la prescription.
Il convient donc de déclarer l'instance prescrite, de condamner les appelants aux dépens, et de débouter également les intimés de leur appel incident.
L'association Drouot Cotation des Artistes Modernes et Contemporains, M.[K] [E] et la S.a.r.l. les Editions Remmax seront condamnés aux dépens d'appel, sans qu'il apparaisse pour autant conforme à l'équité de les condamner également sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dans le contexte ci-avant rappelé.
Pour les mêmes motifs, aucune condamnation à des dommages-intérêts pour appel abusif ne sera prononcée, en l'absence de tout abus démontré des voies judiciaire.
PAR CES MOTIFS,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
Déclare l'association Drouot Cotation des Artistes Modernes et Contemporains, M.[K] [E] et la S.a.r.l. les Editions Remmax recevables en leur appel du jugement rendu le 7 janvier 2010, par le tribunal de grande instance de Marseille,
Déclare l'instance prescrite par application de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881,
Constate, en conséquence son extinction,
Déboute les intimés de leur appel incident, ainsi que de toutes leurs demandes de dommages-intérêts, ou tendant à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne les appelants aux dépens, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT