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23/06/2011 | FRANCE | N°10/10868

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 23 juin 2011, 10/10868


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 23 JUIN 2011



N°2011/478















Rôle N° 10/10868







[L] [B]





C/





SAS [S]







































Grosse délivrée le :

à :



Me Valérie VITU, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Michel DOSSETT

O, avocat au barreau de MARSEILLE



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Mai 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/3035.





APPELANTE



Madame [L] [B],

demeurant [Adresse 1]



comparant en personne,

assistée de Me Valérie VITU, avocat au barreau ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 23 JUIN 2011

N°2011/478

Rôle N° 10/10868

[L] [B]

C/

SAS [S]

Grosse délivrée le :

à :

Me Valérie VITU, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Michel DOSSETTO, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Mai 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 08/3035.

APPELANTE

Madame [L] [B],

demeurant [Adresse 1]

comparant en personne,

assistée de Me Valérie VITU, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS [S] prise en la personne de son représentant légal M [X] [S] domicilié en cette qualité au siège social sis, demeurant [Adresse 2]

comparant en personne,

assistée de Me Michel DOSSETTO, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laure ROCHE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Michel VANNIER, Président

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Madame Laure ROCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Fabienne MICHEL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2011

Signé par Monsieur Michel VANNIER, Président et Madame Fabienne MICHEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 8 juin 2010, Madame [L] [B] a régulièrement interjeté appel du jugement rendu le 21 mai 2010 par le Conseil des Prud'hommes de Marseille qui a condamné la société [S] à lui verser les sommes suivantes :

-indemnité compensatrice de préavis : 2500,16euros

-congés payés afférents : 250 euros

-dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : 5000euros

-rappel de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire:2500,16 euros

- heures supplémentaires : 2115,38 euros

-congés payés afférents : 211,54euros

-privation d'avantage en nature :200 euros

-article 700 du Code de Procédure Civile : 1000 euros

***

Madame [B] a été embauchée en qualité de contrôleur de gestion par la société [S] le 7 janvier 2008.

Elle a été licenciée pour faute grave par une lettre en date du 24 septembre 2008 ainsi motivée : « vous avez manifesté à plusieurs reprises votre refus de suivre les instructions données par votre hiérarchie ce qui caractérise une attitude d'insubordination constitutive d'une grave violation de vos obligations contractuelles »

Madame [B] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et réclame la condamnation de la société [S] à lui verser les sommes suivantes :

-indemnité compensatrice de préavis : 3050,85euros

-congés payés : 1167,66 euros

-dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : 36402,26euros

-rappel de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire:2819,17 euros

-préjudice moral : 10000 euros

Elle indique que l'employeur a omis de prendre en compte les périodes de mise à pied conservatoire et de préavis pour le calcul de la prime de 13° mois et doit lui payer à ce titre la somme de 728,94 euros.

Par ailleurs elle indique qu'elle bénéficiait d'un véhicule de fonction et demande à la cour de dire que ses bulletins de salaire doivent faire état de cet avantage en nature à hauteur de 342 euros par mois .Elle réclame paiement des congés payés et de la prime de 13° mois sur cet avantage en nature , soit 273,60 euros , ainsi que la condamnation de l'employeur à lui verser pour la suppression de cet avantage ,durant la mise à pied, 1500 euros , durant la période de ses congés ,du 11 au 17 aout 2008, 500 euros et durant le préavis, 500 euros.

D'autre part, elle conclut qu'elle a effectué de nombreuses heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées et elle réclame à ce titre 4371,51 euros outre , 24657 ,18 euros pour travail dissimulé et des dommages et intérêts de 1500 euros pour non respect de la durée maximale hebdomadaire et quotidienne du travail. Elle soutient que l'employeur doit être condamné à lui verser 1500 euros pour défaut d'information sur le repos compensateur et la somme de 4749,39 euros à titre d'indemnité pour repos compensateur.

Elle sollicite enfin la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile 

La société [S] réplique que le licenciement de Madame [B] est justifié, qu'elle n'a jamais demandé à cette dernière d'effectuer des heures supplémentaires et qu'elle ne peut être condamnée à payer des temps de trajet que la salariée pouvait éviter.

Elle conclut que Madame [B] doit donc être déboutée del'ensemble de ses demandes et condamnée à lui verser la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

.../...

MOTIFS

-Sur les heures supplémentaires

La preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Le contrat de travail de Madame [B] prévoit qu'elle exercera ses fonctions sur le site de [Localité 3] et qu'elle sera amenée à se rendre régulièrement dans les différentes agences du groupe. Celles ci ,au nombre d' une douzaine ,sont situées dans le sud de la France.

Madame [B] produit un tableau récapitulatif de ses heures de travail qu'elle a établi ainsi qu'un relevé de télépéage , en faisant valoir que pour se trouver dans les différentes agences de la société [S] dés 7 heures du matin elle devait quitter son domicile de très bonne heure et qu'elle rentrait le soir très tard ,bien après 17 ou 18 heures.

Elle produit l'attestation de Monsieur [R], ex directeur administratif et financier de la société [S] , indiquant que sa principale mission consistait à contrôler les agences et que dans ce but , elle effectuait des déplacements réguliers toutes les semaines qui l'obligeaient à partir tôt le matin et à rentrer tard le soir .

L'employeur réplique qu'il lui proposait de dormir à l'hôtel lorsqu'elle s'éloignait de [Localité 3] mais qu'elle n'a que très rarement accepté cette proposition .Il produit deux notes d'hôtel au soutien de cette affirmation ainsi que l'attestation de Monsieur [Z] directeur administratif et financier qui indique que compte tenu de l' éloignement des sites , le travail était organisé sur deux jours , et que Madame [B] refusait de passer la nuit sur place , préférant rentrer chez elle.

Elle justifie, pour certains jours, qu'elle s e trouvait au péage autoroutier à l'heure qu'elle indique sur son tableau récapitulatif ; pour les autres jours, qui représentent environ la moitié de la durée de la relation contractuelle, il faut déduire qu'elle n'a pas emprunté une autoroute et qu'elle se trouvait à [Localité 3].

Le temps passé par Madame [B] pour se rendre d'une agence à l'autre dans la journée est du temps de travail effectif ; il en est différemment du temps de trajet entre le lieu de travail et le domicile dés lors que ce temps n'est pas anormal .

Un temps de trajet entre lieu de travail et domicile d'une heure est normal à [Localité 3].

Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur un lieu d'exécution du contrat de travail distinct du lieu habituel n'est pas un temps de travail effectif si ce temps est d'une durée comparable à celle du temps normal de trajet entre domicile et lieu de travail.

Dés lors ,ce temps de déplacement n'entre pas dans le calcul des différentes durées légales et des majorations pour heures supplémentaires.

Lorsque le temps de déplacement professionnel dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous la forme de repos, soit sous une forme financière, qu'il appartient au juge de fixer , à défaut de décision prise par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou accord collectif.

Les horaires de travail de Madame [B],qui été embauchée pour travailler 39 heures par mois ,étaient :8à12 heures et 14 à 18 heures , ou 17 heures, le vendredi .Il est à noter qu'elle a bénéficié de 5 jours d'absence autorisée et rémunérée.

. Les relevés de péage autoroutiers ne peuvent justifier que Madame [B] comptabilise comme heures de travail effectif les plages horaires antérieures à 7 heures et postérieures à 19 heures ou le vendredi à 18 heures. Ces heures, qui correspondent à un temps de déplacement anormal, sont au nombre de 50 , d'après le tableau qu'elle produit.

Eu égard à l'ensemble des éléments exposés ci -dessus,l'employeur doit à Madame [B], à titre de contrepartie du temps de déplacement anormal ,la somme de 1000 euros.

Ce temps de déplacement anormal n'étant pas du travail effectif ne donne pas lieu à paiement d'heures supplémentaires, n'ouvre pas droit à repos compensateur, n'est pas en prendre en compte au regard de la durée légale du travail.

La demande relative au défaut d'information sur le repos compensateur est injustifiée et sera rejetée de même que de celle relative au travail dissimulé dont l'élément intentionnel n'est pas démontré.

- Sur le véhicule de fonction

Il est constant que Madame [B] bénéficiait d'un véhicule Peugeot ainsi que d'une carte de carburant mis à disposition par l'employeur.

Toutefois Madame [B] indique qu'elle a restitué ce véhicule durant ses congés du 11 au 17 aout et se plaint qu'un autre véhicule lui ait été confié à son retour par l'employeur.

Le véhicule n'était donc pas mis à sa disposition de façon permanente et de ce fait ne constitue pas un avantage en nature.

-Sur le licenciement

Une assistante administrative de l'employeur a adressé à cinq salariés de la société un courriel annonçant que Madame [B] ne faisait plus partie des effectifs, avant que

celle -ci soit licenciée.

Même en admettant , ainsi qu'elle en atteste , que cette assistante administrative a confondu mise à pied et licenciement, force est de constater que l'employeur n'a pas rectifié cette erreur.

En tout état de cause, ce dernier n'apporte aucunement la preuve, qui lui incombe, de la faute reprochée à Madame [B]. En effet, la seule attestation de Monsieur [Z] , évoquée ci 'dessus, qui indique que Madame [B] refusait de dormir à l'hôtel , ne peut prouver le refus réitéré de suivre les instructions de la hiérarchie reproché à la salariée .

Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse .

La société [S] devra en conséquence payer à Madame [B] les sommes suivantes :

- indemnité compensatrice de préavis : selon l'article 13 de la convention collective, pour un employé ayant une ancienneté inférieure à un an , un mois de salaire soit 2500,16 euros

-congés payés : Madame [B] indique sans être démentie qu'elle a pris cinq jours de congés payés, elle a acquis durant la relation contractuelle 21,5 jours ; il lui reste donc du 16,5 jours soit 1375,08 euros .L'employeur lui ayant versé 1106,79 euros , lui doit 268,29 euros

-dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : Madame [B] indique qu'elle n'a pas retrouvé d'emploi malgré ses recherches, dont elle justifie .

Elle a été indemnisée par Pole Emploi d'octobre 2008 à Décembre 2010. Elle a subi un préjudice moral résultant de la déstabilisation causée par sa mise à pied injustifiée et présentée à une partie du personnel comme un licenciement.

La somme de 5000 euros constitue une juste réparation de son préjudice, toutes causes confondues.

-rappel de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire (du 29 aout au24 septembre) :2250,14 euros

-Sur le rappel de prime de treizième mois

Le contrat de travail de Madame [B] prévoit qu'elle percevra une prime de treizième mois calculée au pro rata du temps de travail effectif. L'employeur lui était redevable de ce chef (y compris la période de mise à pied) de la somme de 1875,12 euros et lui a versé 1630, 23 euros : il reste du en conséquence à Madame [B] 244,89 euros.

L'équité en la cause commande la condamnation de la société [S] à verser la somme de 1800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

.../...

PAR CES MOTIFS

La cour , statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe

Vu l'article 696 du code de procédure civile

Réforme le jugement déféré

Condamne la société [S] à verser à Madame [B] les sommes suivantes :

-indemnité compensatrice de préavis : 2500,16euros

-congés payés : 268,29 euros

-dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : 5000euros

-rappel de salaire correspondant à la mise à pied conservatoire:2250,14 euros

- contrepartie de temps de déplacement anormal : 1000 euros

-rappel de prime de treizième mois : 244,89 euros

-article 700 du Code de Procédure Civile : 1800 euros

Rejette la demande formée au titre de cet article par la société [S]

Déboute Madame [B] de ses autres demandes

Dit que les dépens seront supportés par la société [S]

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/10868
Date de la décision : 23/06/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°10/10868 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-23;10.10868 ?
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