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10/06/2011 | FRANCE | N°10/00631

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre a, 10 juin 2011, 10/00631


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 10 JUIN 2011



N° 2011/ 260













Rôle N° 10/00631







[Y] [W]





C/



[J] [C] épouse [V]



























Grosse délivrée

le :

à :



SCP MAGNAN

SCP BOTTAI






















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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 15 Mai 2009 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11/08/896.





APPELANT



Monsieur [Y] [W]

né le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 7], demeurant [Adresse 9]

représenté par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avoués à la Cour,

Assisté de Me Jean-jacques DELCLOS, a...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 10 JUIN 2011

N° 2011/ 260

Rôle N° 10/00631

[Y] [W]

C/

[J] [C] épouse [V]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP MAGNAN

SCP BOTTAI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 15 Mai 2009 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11/08/896.

APPELANT

Monsieur [Y] [W]

né le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 7], demeurant [Adresse 9]

représenté par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avoués à la Cour,

Assisté de Me Jean-jacques DELCLOS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [J] [C] épouse [V]

née le [Date naissance 4] 1938 à [Localité 8], demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP BOTTAI GEREUX BOULAN, avoués à la Cour,

Assistée de Me Joëlle ESTEVE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

11ème A - 2011/260

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Danielle VEYRE, Conseiller, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président

Madame Danielle VEYRE, Conseiller

Madame Cécile THIBAULT, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 mai 2011 mais le délibéré a été prorogé et la décision sera rendue le 10 juin 2011

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Juin 2011

Signé par Madame Cécile THIBAULT, Conseiller en remplacement du Président empêché et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

11ème A - 2011/260

Vu le jugement rendu le 15 mai 2009 par le tribunal d'instance d'Aix-en-Provence, qui a constaté que Monsieur [W] [Y] et Madame [C] [J] épouse [V] étaient liés par un bail d'habitation, a enjoint Monsieur [W] de laisser à la disposition de Madame [C] l'intégralité des locaux décrits dans le bail du 1er octobre 2003 (en fait 1er octobre 1993), a condamné Monsieur [W] à payer à Madame [C] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, a débouté Madame [C] de ses autres demandes.

Vu l'appel formé le 12 janvier 2010 par Monsieur [W] [Y] ;

Vu les conclusions déposées le 05 juillet 2011 par Monsieur [W] ;

Vu les conclusions déposées le 18 février 2011 par Madame [C].

MOTIFS et DECISION

Attendu qu'est versé aux débats un acte sous seing privé, en date du 1er octobre 1993 intitulé 'contrat de location de locaux vacants non meublés', conclu entre 'les soussignés' [W] [Y] et [C] [J]', qualifié de contrat de bail à usage d'habitation par Madame [C] et de prêt à usage par Monsieur [W] ;

Attendu qu'il est indiqué dans cet acte, que les locaux objet de la convention sont constitués par un appartement et un garage sis [Adresse 2] au 1er étage et au rez-de-chaussée à [Localité 6] la garage étant sis [Adresse 5] ;

Attendu que cet acte précise que la prise d'effet du 'bail' est le 1er octobre 1993 et que le dernier jour pour le résilier sera le décès de Madame [C] ; que dans la case 'paiement' il est écrit 'gratuit en échange de tous les services rendus et à rendre au cours des années à venir' ; qu'il est également écrit au paragraphe 'clause particulière' : 'd'un commun accord ce contrat de location ne peut être résilié que par le locataire et durera jusqu'à la mort de Madame [C]' ;

Attendu que cet acte est signé par 'le bailleur' et 'le locataire' ces signatures étant précédées de la mention 'lu et approuvé' ;

Attendu que Monsieur [W] soutient que le document dont se prévaut Madame [C] n'est qu'un imprimé de bail classique et que soit, il a été signé par Madame [C] elle-même qui a imité sa signature, soit Madame [C] lui a fait signer un exemplaire du bail en blanc 'en prévision d'un autre locataire' et qu'il n'a jamais accepté les conditions qui y sont mentionnées ;

Attendu que c'est à bon droit et par des motifs que la Cour fait siens, que le tribunal a dit que s'il n'est pas discuté que les mentions manuscrites n'ont pas été rédigées par Monsieur [Y] [W], la signature attribuée au 'bailleur' dans le contrat du 1er octobre 1993 est celle de Monsieur [Y] [W] ;

Attendu qu'un écrit, même s'il a comporté à l'origine un blanc-seing fait foi des conventions qu'il contient comme si elles y avaient été inscrites avant la signature sauf preuve contraire administrée par la partie qui allègue un blanc seing, et qu'en l'espèce, Monsieur [Y] [W] ne rapporte pas la preuve d'un abus de blanc seing de Madame [C] ;

Attendu que les mentions figurant dans l'acte du 1er octobre 1993 sont conséquences opposables à Monsieur [Y] [W] ;

11ème A - 2011/260

Attendu que l'article 1709 du Code civil dispose, que le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix, que celle-ci s'oblige de lui payer ;

Attendu que le prix constitue une obligation essentielle du bail, et qu'il doit être déterminable;

Attendu toutefois qu'il suffit pour qu'une convention soit qualifiée de bail, que le bailleur reçoive une contrepartie quelconque de la jouissance du bien qu'il accorde au locataire ;

Attendu en l'espèce que la mise à la disposition des locaux litigieux par Monsieur [W] à Madame [C], le 1er octobre 1993, est qualifiée de gratuite 'en échange de tous les services rendus et à rendre au cours des années à venir' ;

Attendu que cette contre-partie, telle qu'elle est énoncée est particulièrement imprécise, et ne permet pas de savoir, qu'elle est la nature des services passés rendus et futurs à rendre par Madame [C] ;

Attendu que les prestations ne sont pas déterminables et ne peuvent être assimilées à un loyer ; qu'en outre le caractère de gratuité donné à cette occupation par la convention exclut celle-ci du régime du bail ;

Attendu aussi que la convention signée le 1er octobre1993 entre Monsieur [W] et Madame [C], même si les parties ont utilisé un imprimé de bail d'habitation classique, ne peut être qualifiée de contrat de bail soumis à la loi du 06 juillet 1989, en l'absence d'un prix, élément essentiel du contrat de louage, et doit être qualifiée de prêt à usage au regard du caractère gratuit de celle-ci, tel que défini par les articles 1875 et 1876 du Code civil ;

Attendu ensuite que Monsieur [Y] [W] n'est pas fondé à soutenir qu'il n'était pas propriétaire du bien immobilier lors de la signature de l'acte du 1er octobre 1993 dès lors qu'il l'est devenu aux termes d'un acte de partage du 23 décembre 1993, selon une attestation du 12 juin 2002 de Maître [T], notaire associé à Aix-en-Provence ;

*****

Attendu que Monsieur [W] par l'intermédiaire de son conseil a adressé le 14 mai 2007 à Madame [C] une lettre où il lui demandait de libérer l'appartement sis [Adresse 1], dans les meilleurs délais, désirant reprendre possession des lieux pour des raison familiales et faisant par ailleurs état de problèmes de voisinage ;

Attendu que l'article 1888 du Code civil dispose 'le prêteur ne peut retirer la chose prêtée qu'après le terme convenu ou à défaut de convention qu'après qu'elle a servi à l'usage pour lequel elle a été empruntée ;

Attendu que l'article 1889 du même code dispose : 'néanmoins si pendant ce délai, ou avant que le besoin de l'emprunteur ait cessé, il survient au prêteur un besoin pressant et imprévu de la chose, le juge peut, suivant les circonstances, obliger l'emprunteur à la lui rendre' ;

Attendu en l'espèce que le prêt par Monsieur [Y] [W] à Madame [C] du logement à usage d'habitation sis [Adresse 2] a été fait jusqu'au décès de cette dernière ;

Attendu que Monsieur [W] ne justifie ni d'une limitation de la durée du prêt à usage ni d'un besoin pressant et imprévu de reprendre le bien ;

11ème A - 2011/260

Attendu que le fait allégué par Monsieur [W] selon lequel Madame [C] depuis 2004 n'accomplit aucune diligence en contrepartie de son occupation, à le supposer établi, ne constitue pas une circonstance de nature à obliger l'emprunteur à restituer le bien, celle-ci n'étant pas imprévisible au moment du contrat ;

Attendu en conséquence, que Monsieur [W] sera débouté de ses demandes de restitution de l'appartement litigieux et d'expulsion de Madame [C] et de paiement par celle-ci d'une indemnité mensuelle d'occupation ;

Attendu aussi que Monsieur [Y] [W] devra laisser à la disposition de Madame [C] l'intégralité des locaux décrits dans l'acte du 1er octobre 1993 ;

****

Attendu que Madame [C] demande que Monsieur [W] soit condamné à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de ses meubles, la somme de 38.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice de jouissance, et celle de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral ;

Attendu que Madame [C] verse aux débats un constat d'huissier du 06 décembre 2007 duquel il ressort que des travaux avaient été entrepris, dans le logement litigieux, selon toute apparence à la demande de Monsieur [W] et que divers objets mobiliers étaient entreposées à l'extérieur ;

Attendu que de son côté Monsieur [W] produit un constat d'huissier du 07 août 2007 avec plusieurs photographies, selon lequel dans une pièce, sur le palier intermédiaire entre le premier étage et le rez-de-chaussée dont la porte était ouverte, étaient entreposés diverses 'affaires de cartons et de meubles' appartenant aux dires de Monsieur [W] à Madame [C] ; que dans le couloir de l'entrée de l'immeuble étaient déposés divers objets (tels une table, un miroir, une chaise, des plantes, un caddy) et qu'une autre pièce, sans porte, était elle aussi pleine d'objets appartenant à Madame [C] ;

Attendu que Madame [C], qui en août 2007 avait laissé dans l'immeuble à la vue de tous ou sans protection, des objets lui appartenant qui avaient pu être déplacés par diverses personnes, n'établit pas que certains d'entre eux dont elle ne donne ni le détail ni la justification de leur valeur, aient disparu du fait de Monsieur [W] ;

Attendu qu'il n'est pas discuté que dans le courant du deuxième semestre 2007, Madame [C] s'était absentée ;

Attendu que Monsieur [W] avait pu légitimement croire, que Madame [C] avait définitivement quitté les lieux comme il le lui avait d'ailleurs demandé par lettre du 14 mai 2007;

Attendu qu'aucune faute ne peut lui être reprochée et que les demandes de dommages et intérêts de Madame [C] seront rejetées ;

Attendu que Monsieur [W] qui succombe sur l'essentiel du litige supportera les dépens;

qu'aucune considération d'équité ou d'ordre économique ne commande qu'il soit fait application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de Madame [C] tant en première instance qu'en cause d'appel ;

11ème A - 2011/260

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement,

Réforme le jugement entrepris,

Dit que Monsieur [Y] [W] et Madame [J] [C] sont liés par un prêt à usage selon une convention en date du 1er octobre 1993,

Dit que Monsieur [Y] [W] devra laisser à la disposition de Madame [J] [C] l'intégralité des locaux décrits dans l'acte du 1er octobre 1993,

Déboute Madame [J] [C] de ses demandes de dommages et intérêts,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur [Y] [W] aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile .

La greffière P/ Le Président, empêché

Mme Cécile THIBAULT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/00631
Date de la décision : 10/06/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°10/00631 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-10;10.00631 ?
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